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Dossier : 2012-663(IT)I

ENTRE :

DALI BENTOLILA,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels

de Telepath Corporation (2012-666(IT)I et 2012-672(GST)I)

le 24 septembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Robert J. Hogan

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocat de l’intimée :

Me Darren Prevost

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’égard des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour les années d’imposition 2001 et 2002 est accueilli, sans dépens, et les nouvelles cotisations sont annulées conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          L’appel interjeté à l’égard des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi pour l’année d’imposition 2003 est rejeté, sans dépens, pour les raisons énoncées à l’audience.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de décembre 2012.

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de janvier 2013.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice

 


 

 

Dossiers : 2012-666(IT)I

2012-672(GST)I

ENTRE :

TELEPATH CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus sur preuve commune avec les appels

de Dali Bentolila (2012-663(IT)I)

le 24 septembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Robert J. Hogan

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

M. Dali Bentolila

Avocat de l’intimée :

Me Darren Prevost

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels interjetés à l’égard des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 et en vertu de la Loi sur la taxe d’accise pour les périodes qui ont pris fin les 31 décembre 2001, 2002 et 2003 sont accueillis, sans dépens, et les nouvelles cotisations sont annulées conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

           

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de décembre 2012.

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de janvier 2013.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

 

Référence : 2012CCI423

Date : 20121204

Dossiers : 2012-666(IT)I, 2012-672(GST)I

2012-663(IT)I

ENTRE :

TELEPATH CORPORATION,

DALI BENTOLILA,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Hogan

 

[1]             Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi de nouvelles cotisations à l’égard de Dali Bentolila (l’« appelant ») pour les années d’imposition 2001 et 2002 pour inclure dans le calcul du revenu de ce dernier des revenus non déclarés de 38 579,64 $ et de 28 202,16 $, revenus de Telepath Corporation (« Telepath ») qu’il se serait appropriés. Le ministre a établi de nouvelles cotisations à l’égard de Telepath pour les années d’imposition 2001 et 2002 pour inclure dans le calcul du revenu de cette dernière des revenus d’entreprise non déclarés de 27 084 $ et de 51 467 $ pour ces années. Le ministre a également établi de nouvelles cotisations à l’égard de Telepath, qui avait manqué à son obligation de percevoir la taxe sur les produits et services (la « TPS ») sur ses présumés revenus d’entreprise non déclarés pour les périodes de déclaration qui ont commencé le 1er janvier 2001 et pris fin le 31 décembre 2003.

 

[2]             Le calcul des revenus non déclarés de l’appelant et de Telepath pour les années en cause est fondé sur l’analyse des dépôts effectués sur les comptes en banque de Telepath et de l’appelant.

 

[3]             Les appels ont été entendus sur preuve commune sous le régime de la procédure informelle.

 

[4]             En l’espèce, la Cour doit trancher les questions suivantes :

 

a)       si l’appelant et Telepath ont fait une présentation erronée de leur revenu, par négligence, inattention ou omission volontaire pour les années d’imposition 2001 et 2002, ce qui permettrait ainsi au ministre d’établir une cotisation à leur égard après la période normale de nouvelle cotisation;

 

b)      si l’appelant et Telepath ont omis d’inclure les montants qualifiés de montants non déclarés dans le calcul de leur revenu pour les années d’imposition 2001 et 2002;

 

c)       si le ministre a à juste titre calculé des pénalités à l’endroit de Telepath et de l’appelant pour défaut de production de leurs déclarations de revenus dans les délais prévus par la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »);

 

d)      si Telepath a omis de percevoir la TPS sur les montants que le ministre a qualifiés de revenus non déclarés.

 

[5]             Quand il a établi les nouvelles cotisations en cause à l’égard de l’appelant, le ministre s’est fondé sur les hypothèses de fait suivantes, énoncées dans la réponse à l’avis d’appel :

 

[traduction]

 

7.   Pour calculer l’impôt que l’appelant devait payer, le ministre s’est fondé sur les hypothèses suivantes :

 

a)   pendant toute la période en cause, l’appelant résidait au Canada;

 

b)      pendant toute la période en cause, Telepath était une société résidente du Canada;

 

c)      l’exercice de Telepath prend fin le 30 novembre;

 

d)     pendant toute la période en cause, l’appelant était président et seul actionnaire de Telepath;

 

e)      pendant toute la période en cause, l’appelant participait à la gestion quotidienne des affaires de Telepath;

 

f)       dans ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelant a déclaré des revenus totaux de 3 511 $, de 3 511 $ et de 7 968 $ respectivement;

 

g)      l’appelant n’a pas produit de déclarations de revenus pour les années 2001, 2002 et 2003 dans les délais impartis;

 

h)      Telepath a touché des revenus non déclarés de 27 084 $ et de 51 467 $ pour les années d’imposition 2001 et 2002 respectivement;

 

i)        des dépôts de 38 579,64 $ et de 28 202,16 $ pour les années d’imposition 2001 et 2002, respectivement (les « dépôts »), présentés en détail à l’annexe A ci‑jointe, correspondaient à des revenus de Telepath déposés dans un compte en banque détenu conjointement par l’appelant et d’autres membres de sa famille;

 

j)        il s’agissait de dépôts de commerçant effectués depuis un terminal point de vente Moneris et ces dépôts provenaient du compte de commerçant de Telepath;

 

k)      ni Telepath ni l’appelant n’ont déclaré ces dépôts en tant que revenus dans leurs déclarations de revenus;

 

l)        l’appelant a reçu ces dépôts en sa qualité d’actionnaire de Telepath.

 

8.   Quand il a établi de nouvelles cotisations pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 après la période normale de nouvelle cotisation, le ministre s’est fondé sur les faits suivants :

 

a)      les faits qui font l’objet des hypothèses énoncées ci‑dessus;

 

b)      l’appelant a fait une présentation erronée de ses revenus quand il a déclaré qu’ils s’élevaient seulement à 38 579,64 $ et à 28 202,16 $ pour les années d’imposition 2001 et 2002, respectivement;

 

c)      en déclarant des revenus en moins, l’appelant a fait une présentation erronée de son revenu par négligence, inattention ou omission volontaire pour les années en cause.

 

[6]             Le ministre s’est fondé sur des hypothèses de fait similaires pour Telepath.

 

[7]             Pour des raisons qui n’ont pas été divulguées à l’audience, c’est la division des mesures spéciales d’exécution de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») qui a entrepris les vérifications fiscales à l’égard de l’appelant et de Telepath. Le vérificateur de l’ARC qui a mené la première vérification à l’égard des contribuables a conclu que l’appelant avait omis de déclarer des revenus de Telepath qu’il s’était appropriés, soit des montants de 197 733 $, de 207 215 $ et de 58 465 $ pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 respectivement. Les nouvelles cotisations initiales étaient fondées sur l’hypothèse selon laquelle toutes les sommes déposées sur un compte de la Banque de Montréal (« BMO ») enregistré aux noms de l’appelant, de sa mère, de deux des frères de l’appelant et d’un ami étaient des revenus non déclarés de l’appelant et de Telepath.

 

[8]             Au stade de l’opposition, l’appelant a réussi à convaincre le vérificateur de l’ARC que le compte de la BMO leur appartenait à lui, à sa mère, à deux de ses frères et à un ami. La preuve a montré que c’est la mère de l’appelant qui a ouvert ce compte à l’origine; celle‑ci a déclaré à l’audience qu’elle avait ajouté le nom de deux de ses fils et d’un ami de la famille sur le compte afin de faciliter les transferts électroniques de fonds entre les signataires du compte.

 

[9]             L’agente des appels qui a été chargée d’examiner le travail du vérificateur de l’ARC a été convaincue par la plupart des explications de l’appelant et a réduit le montant des revenus non déclarés aux montants précisés ci‑dessus.

 

[10]        L’agente des appels a déclaré avoir traité les dépôts effectués à partir d’un terminal point de vente Moneris (le « compte de commerçant ») comme des revenus non déclarés de l’appelant et de Telepath. Elle a agi ainsi parce que ce compte de commerçant avait été ouvert au nom de Telepath et qu’elle n’acceptait pas les explications de l’appelant selon lesquelles le revenu était celui d’une entreprise exploitée par un ami, et plus tard, par son frère, dans les circonstances décrites ci‑dessous.

 

[11]        L’appelant a déclaré que le compte de commerçant avait été ouvert au nom de Telepath à la demande de Michael Schweitzer, résident des États‑Unis. M. Schweitzer se rendait fréquemment à Cuba, et c’est là qu’il a rencontré sa future femme, Aimelin Schweitzer. Le couple a ouvert un commerce appelé Cubamall.com (« Cubamall »). Il s’agissait d’un commerce de vente de cigares et d’alcool cubains par Internet. Les États‑Unis ont décrété l’embargo sur Cuba, ce qui empêchait M. Schweitzer de faire affaire avec Cuba depuis les États‑Unis. Il a donc demandé à l’appelant d’ouvrir le compte de commerçant pour recevoir les paiements effectués par les clients de Cubamall par carte de crédit Visa, MasterCard et American Express.

 

[12]        L’appelant a produit deux tableaux Excel[1]. Un de ces tableaux, qui couvrait la période allant du 5 octobre 2001 au 5 juin 2002, a été préparé afin d’effectuer le suivi des fonds reçus par Telepath et l’appelant pour le compte de Cubamall. L’autre tableau, qui couvrait la période allant du 19 octobre 2001 au 22 juillet 2002, avait également pour but d’assurer le suivi des fonds dépensés par l’appelant et Telepath pour le compte de Cubamall. Pour finir, l’appelant a produit un courriel de M. Schweitzer daté du 23 décembre 2001, dans lequel M. Schweitzer demandait à l’appelant d’envoyer des fonds par voie électronique à un proche de sa future femme à Cuba. Mme Schweitzer a quitté Cuba pour rejoindre son futur mari aux États‑Unis. Les Schweitzer ont mis fin aux activités de Cubamall à cette époque et le compte de commerçant n’a plus servi à recevoir des fonds pour le compte de M. Schweitzer.

 

[13]        L’appelant a également déclaré que son frère, Will Bentolila, avait ouvert une imprimerie dans la région d’Ottawa. L’appelant et son frère, qui vit maintenant en Russie, ne se parlent plus.

 

[14]        D’après l’appelant, son frère avait de mauvais antécédents en matière de crédit et un dossier criminel, ce qui l’empêchait d’emprunter de l’argent et d’ouvrir un compte de commerçant pour recevoir des paiements par carte de crédit. Pour aider son frère, l’appelant lui a donné accès au compte commercial établi à son nom et à celui de Telepath. Les paiements reçus par Visa et MasterCard étaient crédités sur le compte conjoint à la BMO et les paiements reçus par American Express étaient déposés sur le compte en banque de Telepath. L’appelant tenait des tableaux Excel détaillés faisant état des revenus encaissés pour le compte de l’entreprise de son frère, des dépenses faites pour l’entreprise et des dépenses personnelles de son frère et de la conjointe de fait de celui‑ci.

 

[15]        Ces tableaux ont été présentés à l’agente des appels de l’ARC, qui a refusé de les accepter en l’absence de documents additionnels.

 

[16]        Le témoignage de l’appelant est corroboré par le témoignage de Kavita Persaud, ancienne conjointe de fait du frère de l’appelant. Mme Persaud a expliqué que Will Bentolila avait de mauvais antécédents en matière de crédit, ce qui faisait en sorte qu’il lui était difficile d’emprunter de l’argent ou d’ouvrir un compte de commerçant. Elle a déclaré avoir été au courant du fait que l’appelant avait autorisé son frère à utiliser ses comptes en banque, à lui et à Telepath. Elle le savait parce que l’appelant réglait la plupart de leurs dépenses personnelles et que Will Bentolila lui avait expliqué pourquoi il en était ainsi. Je prends note du fait que l’agente des appels de l’ARC a bien accepté qu’un des dépôts effectués sur le compte en banque à la BMO n’appartenait pas à l’appelant parce que ce dernier a été en mesure de montrer que ces fonds avaient été transférés électroniquement sur le compte en banque de Mme Persaud.

 

[17]        Le sous‑alinéa 152(4)a)(i) de la Loi permet au ministre d’établir une cotisation à l’égard d’un contribuable après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation dans les circonstances suivantes :

 

(i) [lorsqu’un contribuable] a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi […]

 

[18]        Il revient à l’intimée de prouver l’existence de telles circonstances relativement à l’appelant et à Telepath.

 

[19]        J’ai conclu que l’appelant, Lise Bentolila et Mme Persaud étaient des témoins crédibles. Leurs témoignages ont confirmé la position de l’appelant, selon laquelle celui‑ci avait adopté des méthodes bancaires peu orthodoxes pour exploiter Telepath et pour faciliter ses transactions bancaires avec des amis et des membres de sa famille. Je m’appuie aussi sur le fait que l’agente des appels de l’ARC a été capable d’établir que la plupart des fonds déposés sur le compte de la BMO appartenaient à d’autres membres de la famille.

 

[20]        Pour finir, je prends note du fait que l’appelant a pleinement coopéré avec l’ARC au cours de la vérification dont il a fait l’objet et qu’il a présenté à l’ARC des documents comptables dans lesquels les dépôts effectués sur le compte de commerçant avaient été surlignés.

 

[21]        Au vu de l’ensemble de la preuve, je suis convaincu que l’appelant et Telepath n’ont pas manqué à leur obligation de déclarer la totalité de leurs revenus.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de décembre 2012.

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de janvier 2013.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


RÉFÉRENCE :                                        2012 CCI 423

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :     2012-666(IT)I, 2012-672(GST)I

                                                                 2012-663(IT)I

 

INTITULÉ :                                             Telepath Corporation, Dali Bentolila c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                      Le 24 septembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                    L’honorable juge Robert J. Hogan

 

DATE DU JUGEMENT :                        Le 4 décembre 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Pour Dali Bentolila, appelant :

L’appelant lui‑même

 

Représentant de Telepath Corporation, appelante :

 

 

M. Dali Bentolila

 

Avocat de l’intimée :

 

MDarren Prevost

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

            Pour les appelants :

 

                      Nom :                         

 

                      Cabinet :

 

             Pour l’intimée :                           William F. Pentney

                                                                 Sous‑procureur général du Canada

                                                                 Ottawa, Canada



[1] Pièce A-1.

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