Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

Dossier : 2011-2508(EI)

 

ENTRE :

 

687352 BC LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

JASON ROBERT MARTIN,

intervenant.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 22 mars 2012, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge suppléant D. W. Rowe

 

Comparutions :

Représentant de l’appelante :

M. Peter Ronda

Avocate de l’intimé :

Me Dawn Francis

Pour l’intervenant :

L’intervenant lui-même

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel est rejeté et la décision du ministre du Revenu national est confirmée, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 18e jour d’avril 2012.

 

 

« D. W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de juin 2012.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

Dossier : 2011-2507(CPP)

ENTRE :

687352 BC LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

JASON ROBERT MARTIN,

intervenant.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 22 mars 2012, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge suppléant D. W. Rowe

 

Comparutions :

Représentant de l’appelante :

M. Peter Ronda

Avocate de l’intimé :

Me Dawn Francis

Pour l’intervenant :

L’intervenant lui-même

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel est rejeté et la décision du ministre du Revenu national est confirmée, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 18e jour d’avril 2012.

 

 

« D. W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de juin 2012.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 127

Date : 20120418

Dossiers : 2011-2508(EI)

2011-2507(CPP)

ENTRE :

687352 BC LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

JASON ROBERT MARTIN,

intervenant.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Rowe

 

[1]              L’appelante, 687352 BC Ltd. (« BCL »), a interjeté appel de deux décisions selon lesquelles, le 6 mai 2011, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a décidé, en vertu de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi ») et du Régime de pensions du Canada (le « Régime »), que Jason Robert Martin (« M. Martin » ou l’« intervenant ») avait occupé un emploi assurable et ouvrant droit à pension auprès de BCL pour la période allant du 17 août 2009 au 7 août 2010, compte tenu du fait qu’il était employé aux termes d’un contrat de louage de services.

 

[2]              Le représentant de l’appelante, l’intervenant et l’avocate de l’intimé ont consenti à ce que les deux appels soient entendus ensemble.

 

[3]              Dans son témoignage, Douglas Kurtz a mentionné qu’il demeurait à Chilliwack, en Colombie‑Britannique, et qu’il travaillait à son compte comme peintre en bâtiment. Au cours de la période visée, il a fourni ses services à BCL à titre de surveillant de chantier. Il a rencontré M. Martin dans un café parce qu’il avait cru comprendre que ce dernier voulait changer d’emploi. Par le passé, une entreprise exploitée par M. Martin et son associé, Trevor Henderson (« M. Henderson »), avait fourni des services à BCL. Au début d’août 2009, M. Henderson travaillait pour BCL comme poseur de parements; M. Martin, lui, faisait la pose de parements pour le compte d’un constructeur d’habitations. Selon Douglas Kurtz, lorsque M. Martin a accepté de faire le même travail pour BCL, il n’a nullement été question de la nature de la relation de travail; il a présumé que l’entente précédente s’appliquerait, c’est‑à‑dire que M. Martin présenterait une facture pour son travail, au taux horaire de 25 $, auquel serait ajoutée la taxe sur les produits et services (la « TPS »). Douglas Kurtz a déclaré que tous les travailleurs présents sur les chantiers de BCL – lui y compris – étaient considérés comme des sous-traitants. Il avait travaillé avec M. Martin plusieurs mois auparavant et savait que c’était un poseur compétent et expérimenté. Malgré l’absence d’horaire fixe, Douglas Kurtz était convaincu que M. Martin prendrait le temps qu’il faut pour terminer le travail à la satisfaction de l’entrepreneur général. M. Martin possédait des outils à main et il y avait sur le chantier une table de sciage fournie par BCL ou par Douglas Kurtz. Celui-ci a déclaré ne pas être actionnaire, administrateur ni dirigeant de BCL et ne pas l’avoir été au cours de la période visée, ajoutant qu’il ne travaillait plus pour cette entreprise. Douglas Kurtz savait que M. Martin avait présenté des factures mensuelles à BCL pour ses services jusqu’au 7 août 2010, date à laquelle il a déménagé à Kamloops.

 

[4]              Lors du contre-interrogatoire mené par l’avocate de l’intimé, Douglas Kurtz a déclaré que BCL lui versait un salaire mensuel pour son travail de surveillant de chantier. Les travailleurs arrivaient entre 7 h 30 et 8 h et prenaient une pause-repas vers midi. Habituellement, il y avait de quatre à sept travailleurs sur le chantier et on construisait des duplex et des maisons en rangée. Le constructeur / entrepreneur général apportait les matériaux sur le chantier. Douglas Kurtz a travaillé pour la première fois avec MM. Martin et Henderson à la construction d’un ensemble résidentiel, Retriever Ridge; la règle suivie était que les travailleurs devaient se présenter au travail avec les outils dont ils avaient besoin. MM. Martin et Henderson exploitaient leur propre entreprise, Aces High Exteriors (« Aces High »), et le constructeur les payait directement. Après avoir accepté, le 17 août 2009, de fournir ses services à BCL, M. Martin a travaillé à la construction d’un ensemble résidentiel à Boston Bar, en Colombie-Britannique, avec MM. Henderson et Douglas Kurtz ainsi que d’autres travailleurs payés par BCL. Douglas Kurtz a déclaré que les travailleurs étaient autorisés à travailler le samedi et qu’on leur remboursait les frais d’essence supportés pour le trajet d’une heure et demie (pour l’aller et pour le retour) qu’ils devaient effectuer depuis le Lower Mainland. Il a précisé qu’il était généralement présent sur le chantier, sauf pendant les deux heures de la pause-repas, et que, selon la politique, les travailleurs étaient tenus de l’informer s’ils devaient s’absenter. La semaine de travail normale allait du lundi au vendredi, à raison de huit heures par jour, mais certains poseurs commençaient et terminaient leur journée plus tôt. Même si la réalisation des travaux de construction était le résultat d’un travail d’équipe, certaines tâches pouvaient être accomplies par une seule personne en dehors des heures normales.

 

[5]              En contre‑interrogatoire, Douglas Kurtz a déclaré que les travaux sur le chantier de Boston Bar avaient été réalisés pendant l’hiver. Concernant le fait que M. Martin s’absentait du chantier pendant les heures de travail normales, il n’a pas été en mesure de dire si ce dernier avait demandé congé ou s’il s’était contenté de lui dire qu’il s’en allait. Le taux horaire de 25 $ était celui normalement offert, à l’époque, aux poseurs d’expérience.

 

[6]              Contre-interrogé par M. Martin en sa qualité d’intervenant, Douglas Kurtz a reconnu que les madriers requis pour l’échafaudage avaient été fournis par BCL ou par un autre travailleur du chantier. Douglas Kurtz s’est rappelé qu’à une occasion, il avait emprunté de l’argent pour payer les travailleurs parce que son frère, Wayne Kurtz (« M. Kurtz »), était en Californie. Il s’est rappelé une discussion avec M. Martin au sujet de son départ subit pour Kamloops : celui-ci avait expliqué son geste par le fait qu’il n’avait pas été payé en entier pour son travail. Douglas Kurtz recevait un montant mensuel fixe et ne tenait pas de fiche de temps. À une certaine époque, BCL avait pris du retard sur son échéancier, de sorte que, lorsque des travailleurs d’expérience se présentaient — un aspect que Douglas Kurtz pouvait facilement évaluer —, on leur offrait du travail. Douglas Kurtz a déclaré qu’il ne s’occupait pas de passer en revue les factures des travailleurs ni de leur émettre les chèques au nom de BCL en guise de paiement.

 

[7]              Dans son témoignage, M. Kurtz a dit qu’il est entrepreneur et qu’il est l’unique actionnaire et administrateur de BCL. La société faisait la pose de parements sur les résidences construites par des entrepreneurs généraux. Son rôle consistait à trouver du travail et à présenter des soumissions. S’il remportait un appel d’offres, des poseurs étaient engagés et Douglas Kurtz surveillait le travail. M. Kurtz a rencontré M. Martin dans un café; il avait déjà fait affaire avec MM. Martin et Henderson. Ces derniers avaient effectué des travaux pour lesquels ils avaient tous deux présenté une facture établie selon un taux horaire. M. Kurtz a déclaré que BCL n’avait jamais eu d’employés et que tous les travailleurs – Douglas Kurtz compris – étaient considérés comme des sous-traitants. Lorsque les travailleurs ont dû effectuer des déplacements jusqu’à Boston Bar, on a versé à chacun une somme calculée selon un taux horaire — pour un aller —, étant donné que c’était sur cette base que le promoteur et constructeur indemnisait BCL. Le taux horaire versé aux travailleurs pouvait varier dans une certaine mesure et, même si leurs heures supplémentaires n’étaient pas rémunérées à un taux majoré, ils pouvaient effectuer plus d’heures au taux normal. Avant la période en cause, MM. Martin et Henderson exploitaient Aces High et remettaient à BCL, pour la pose de parements, des factures établies selon un taux horaire auquel ils ajoutaient la TPS. Lorsque M. Martin a de nouveau travaillé avec M. Henderson à BCL après le 17 août 2010 et qu’il a continué de présenter des factures, M. Kurtz a présumé que le même numéro d’inscription à la TPS s’appliquait toujours et il a lui a remis, en guise de paiement, un chèque comprenant le montant attribuable à la TPS. M. Kurtz a aussi dit que, certaines semaines, il n’avait pas de travail à offrir.

 

[8]              Avec le consentement du représentant de l’appelante et de l’intervenant, l’avocate de l’intimé a déposé, sous la cote R-1, une reliure contenant un ensemble de documents figurant aux onglets 1 à 11 inclusivement. Dans les paragraphes qui suivent, les numéros d’onglet constituent des renvois aux documents de la pièce R‑1.

 

[9]              En contre-interrogatoire, M. Kurtz a déclaré que, pour un contrat, l’entrepreneur général verse à BCL une somme forfaitaire. BCL embauche des travailleurs pour la réalisation des travaux demandés. À l’onglet 1, on trouve une facture non datée se rapportant à des travaux exécutés pour un ensemble de condominiums à Retriever Ridge. Le montant de la facture est calculé en fonction de 73 heures de travail au taux de 25 $ l’heure, ce qui représente un total de 1 825 $. Un montant de 91,25 $, représentant la TPS de 5 %, a été inscrit par erreur dans l’espace réservé à la taxe de vente provinciale (la « TVP »). M. Kurtz a dit que, selon ce qu’il avait compris, MM. Martin et Henderson exploitaient une entreprise, Aces High, mais il a ajouté que M. Martin avait présenté certaines factures en son propre nom. L’un des éléments figurant dans une facture présentée en date du 1er mars 2010 pour des travaux exécutés par M. Martin à divers emplacements concerne les heures consacrées à la réparation d’une pompe à carburant pour laquelle M. Martin demandait une somme de 200 $. Dans une facture d’un montant de 1 600 $ portant la date du 1er juillet 2010, M. Martin a inscrit [TRADUCTION] « Prélèvement » et [TRADUCTION] « Travail à la pièce ». Aucune taxe n’a été ajoutée. Selon M. Kurtz, M. Martin l’aurait informé qu’il jugeait la méthode du travail à la pièce inacceptable et qu’à l’avenir son travail serait facturé au taux horaire de 25 $. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait dans les factures qu’il a établies par la suite. M. Kurtz a reconnu, à l’onglet 2,  deux photocopies de chèques remis à M. Martin au cours de la période visée. Tous les chèques étaient libellés au nom de Jason Martin. On a présenté à M. Kurtz un tableau préparé par l’agent des appels (onglet 8, p. 5) où on peut constater que des chèques étaient remis à M. Martin deux fois par mois, généralement au milieu et à la fin du mois, bien que certains chèques aient été émis pratiquement un à la suite de l’autre selon les circonstances. En juillet 2010, les travailleurs n’étaient pas payés régulièrement parce que la capacité de payer de BCL dépendait des fonds reçus de l’entrepreneur général, qui accusait parfois des retards dans ses paiements. M. Kurtz a déclaré qu’il avait informé les travailleurs qu’un tel problème pourrait survenir à l’occasion si l’entrepreneur tardait à verser les paiements au prorata des travaux. Toutefois, il n’a pas été question de ce qui arriverait si l’entrepreneur général refusait de payer ou n’était pas en mesure de le faire pour cause d’insolvabilité. M. Kurtz a déclaré qu’il ne savait pas et n’était pas en mesure de savoir si certaines des heures facturables étaient attribuables à la nécessité de remédier aux erreurs ou aux omissions des travailleurs. Tous les sous‑traitants du chantier présentaient leurs factures à BCL deux fois par mois. Il savait que M. Martin avait gagné un peu d’argent en faisant la teinte de vitres lorsqu’il ne travaillait pas pour BCL et que cela ne posait aucun problème si les travaux de pose étaient exécutés correctement. Aux dires de M. Kurtz, il y avait deux échelles à perches sur l’un des chantiers, ainsi que des madriers d’échafaudage que M. Henderson avait vendus à BCL lorsqu’il était parti travailler pour une autre entreprise.

 

[10]         Contre-interrogé par l’intervenant, M. Kurtz a déclaré que le madrier en aluminium de 24 pieds avait une valeur approximative de 500 $ et que les autres accessoires servant au travail de pose avaient une valeur maximale d’environ 2 000 $.

 

[11]         M. Martin a été appelé à témoigner par l’avocate de l’intimé. Il a dit vivre à Kamloops et travailler comme poseur de parements. Avant de fournir ses services à BCL, en août 2009, il avait travaillé pendant six mois, en tant qu’employé, comme transformateur et comme soudeur pour un fabricant de plastique. Auparavant, M. Henderson et lui dirigeaient Aces High en tant qu’associés et, en février 2008, ils s’étaient inscrits aux fins de la TPS et avaient reçu un numéro de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). M. Martin a reconnu un imprimé (onglet 3, p. 1 à 3 inclusivement) et a confirmé l’exactitude des revenus bruts qui y étaient inscrits (p. 3) pour la période allant du 28 janvier au 31 décembre 2008, soit 78 100 $, et celle allant du 1er janvier au 31 décembre 2009, soit 31 202 $. Il a affirmé avoir trouvé un emploi auprès de l’entreprise de fabrication de plastique et quitté l’entreprise, que M. Henderson a continué d’exploiter. Le 13 décembre 2005, M. Martin et un autre associé avaient enregistré une entreprise dans le but d’offrir des services de débosselage, mais ils n’ont pas donné suite au projet en raison de difficultés liées à l’obtention d’un local convenable. Dans les jours précédant le 1er août 2009, M. Martin dit avoir reçu un appel de Douglas Kurtz lui disant qu’il lui avait été recommandé par M. Henderson et que BCL avait du travail de pose de parements. M. Martin a accepté de fournir ses services et a donné un préavis de trois semaines à son employeur. M. Martin a déclaré que M. Kurtz lui avait fait [TRADUCTION] « la même proposition qu’à Trevor [Henderson] », ce qu’il a interprété comme une allusion au tarif horaire de 25 $. À l’époque, BCL faisait affaire sous un nom commercial, Can-Do Developments. M. Martin a déclaré que M. Henderson et lui travaillaient ensemble sur divers chantiers, mais que ce n’était plus en tant qu’associés exploitant une entreprise comme par le passé, à l’époque où Aces High était exploitée activement et qu’elle avait obtenu un contrat de sous-traitance auprès de BCL pour un contrat d’une semaine à un tarif fixe que M. Henderson et lui s’étaient divisés en parts égales. En tant qu’associés d’Aces High, ils avaient conclu un contrat pour l’exécution de travaux à Retriever Ridge au prix de 8 500 $ et ils avaient en fin de compte subi une perte. M. Martin a mentionné que M. Henderson et lui avaient acheté trois échelles, un madrier en aluminium de 24 pieds, une table de sciage et d’autres outils d’une valeur approximative de 6 000 $. Pendant le mois d’août 2009, M. Martin a travaillé à la construction d’un ensemble résidentiel à Boston Bar où il posait du revêtement extérieur et construisait des toits et des terrasses. Il possédait l’expérience nécessaire et n’avait pas besoin d’instructions; on lui confiait des tâches à son arrivée sur le chantier. Il avait en sa possession un porte-outils et des outils évalués à 280 $; lorsqu’il avait besoin d’un outil ou d’une pièce plus gros, il l’empruntait à un autre travailleur pendant un court moment. Chaque matin, il se rendait à la résidence de M. Kurtz pour charger les outils et les matériaux requis dans le camion de BCL; puis il conduisait le véhicule jusqu’au chantier de Boston Bar et recevait, pour cela, un paiement équivalent à 1,5 heure de travail au taux normal. Quelquefois, il y avait jusqu’à sept travailleurs sur le chantier, mais l’équipe principale en comptait quatre. Pendant la période visée, M. Martin a travaillé sur huit chantiers différents; si le chantier était situé dans les environs, il se rendait au travail avec son propre véhicule. Pendant toute cette période, la journée de travail normale commençait à 8 h et se terminait entre 15 h 30 et 16 h; il y avait une pause-repas d’une heure prise à un endroit choisi par le groupe, y compris Douglas Kurtz. M. Martin a dit qu’il était payé seulement pour les heures travaillées et qu’à une occasion, il avait avisé Douglas Kurtz qu’il devait partir plus tôt pour aller prendre sa fille. Pendant qu’il offrait ses services à BCL, il n’a embauché personne étant donné que ce [TRADUCTION] « n’était pas [son] entreprise ». M. Martin a déclaré qu’il ajoutait la TPS au montant de ses factures conformément aux instructions données par M. Kurtz. Il faisait le calcul de ses heures, qu’il multipliait par le taux de 25 $, et y ajoutait la TPS de 5 %, mais il en inscrivait le montant dans l’espace réservé à la TVP, sauf dans le cas d’une facture où il avait inscrit la TPS dans la colonne appropriée. M. Martin a dit ne pas avoir été inquiété par le fait que M. Kurtz lui avait demandé d’inclure la TPS parce que, faisant référence à M. Kurtz et à son frère, il était [TRADUCTION] « heureux de travailler avec des personnes qu’il appréciait ». Il a admis qu’il avait teint quelques vitres pour le compte d’un promoteur pour un tarif à la pièce et qu’il avait exécuté ce travail à un moment où il ne travaillait pas comme poseur pour les contrats de BCL. Il a déclaré qu’en juillet 2010, il avait accepté la proposition de M. Kurtz d’effectuer des travaux à la pièce et reçu une avance de 1600 $. Toutefois, il a rapidement compris qu’il ne voulait pas [TRADUCTION] « faire équipe » avec d’autres travailleurs et se partager les revenus en fonction du travail exécuté pour un volet quelconque du contrat. Il a fait savoir à M. Kurtz qu’il jugeait cette nouvelle méthode inacceptable et qu’il continuerait d’offrir ses services uniquement selon l’ancienne méthode consistant à présenter à BCL des factures établies selon un taux horaire. M. Martin a dit que, pendant qu’il travaillait à Boston Bar, il avait été [TRADUCTION] « détaché » pour travailler avec William Stoutjesdyk (« M. Stoutjesdyk »); il avait comptabilisé ses heures et établi la facture remise à BCL pour cette période de paie en se basant sur ces heures. M. Martin a mentionné ne pas avoir produit de déclarations de revenus depuis l’année d’imposition 2006. Il a admis que chaque chèque que lui avait remis BCL était libellé en son propre nom et portait la mention [TRADUCTION] « sous-trait. » dans l’espace réservé à la description, ce qui ne l’a pas inquiété puisqu’il était l’ami des frères Kurtz. Dans les derniers moments de la relation de travail, M. Martin s’est énervé parce qu’il n’avait pas reçu la totalité des paiements qui lui étaient dus et que, quelque temps auparavant, il avait reçu des paiements, sous forme de prélèvements ou d’avance, dont les montants étaient irréguliers. Il a quitté les lieux de travail le vendredi, après quoi il a téléphoné à M. Kurtz pour lui demander le reste de sa paie, qu’il a ensuite reçu.

 

[12]         Contre-interrogé par le représentant de l’appelante, M. Martin a déclaré que, lorsqu’il avait accepté de travailler pour BCL, il ne connaissait pas la nature de la situation professionnelle de M. Henderson; en revanche, il savait qu’il serait payé au même taux horaire de 25 $ et que les paiements seraient effectués autour du 15 et du 30 de chaque mois. M. Martin a reconnu que M. Henderson et lui avaient ajouté la TPS à leurs factures lorsqu’ils exploitaient Aces High, mais il a affirmé qu’il n’avait pas travaillé comme sous-traitant depuis et qu’il avait été l’employé d’une autre entreprise, en 2010, après avoir quitté BCL. Il a dit ne pas avoir produit de déclaration de TPS pour Aces High en mai 2010 et ne pas avoir été au courant de cette formalité jusqu’à ce que M. Henderson lui en glisse un mot. M. Martin a admis que M. Kurtz devait s’attendre à ce qu’il utilise le numéro de TPS qui leur avait été attribué à titre d’associés d’Aces High, numéro qui avait été inscrit sur les factures présentées à BCL pour le travail effectué avant la période visée. M. Martin a déclaré que, lorsqu’il avait accepté de travailler comme poseur sur les chantiers de BCL, le 17 août 2009, il n’exploitait plus d’entreprise, que ce soit sous forme de société de personnes ou à titre de propriétaire unique. Il a ajouté qu’il n’avait jamais été question, avec M. Kurtz, qu’il se fasse inscrire sur une liste de paie, mais il ne s’est pas inquiété de ce fait : il pensait qu’il aurait le statut d’employé, parce qu’il n’avait répondu à aucun appel d’offres concernant une tâche précise, qu’il offrait tous ses services selon les mêmes modalités, soit un taux horaire convenu de 25 $, et qu’il serait payé deux fois par mois pour ces services.

 

[13]         Dans son témoignage, M. Henderson a dit qu’il vivait à Chilliwack et travaillait comme poseur de parements. Il connaissait M. Martin depuis 20 ans et s’était associé avec lui pour exploiter une entreprise, Aces High, de 2007 jusqu’au milieu de 2009, moment où la récession avait frappé et où bon nombre de promoteurs avaient cessé la construction d’ensembles résidentiels. C’est à ce moment‑là que M. Martin avait quitté l’entreprise et trouvé un emploi, tandis que M. Henderson avait poursuivi ses activités sous le nom d’Aces High. L’entreprise avait été enregistrée comme société de personnes auprès de Service Canada aux fins de la TPS et de l’impôt sur le revenu. M. Henderson a déclaré qu’il avait reçu un appel téléphonique de M. Kurtz, lequel lui avait offert de travailler sur le chantier de Retriever Ridge, pour lequel M. Martin et lui, par l’intermédiaire d’Aces High, avaient déjà fourni des services, non pas à BCL, mais à un constructeur. Avec l’accord de M. Martin, M. Henderson a conservé les biens qui avaient été achetés pour Aces High, étant donné qu’il avait contracté un prêt pour leur acquisition. Lorsqu’il a recommencé à travailler sur divers contrats de BCL, M. Henderson recevait une paie établie au taux horaire de 25 $ et utilisait ses propres outils à main. M. Martin a reconnu une facture qu’il avait présentée à Cando (sic) Developments (pièce R‑2) en date du 30 octobre 2009, pour un montant de 1993,13 $, comprenant 64,5 heures de travail de pose de parements au taux de 25 $, plus trois mois de frais de location de matériel (échelles et échafaudage) pour un total de 100 $ par mois et, enfin, la TPS, soit 80,63 $. M. Henderson a déclaré que Douglas Kurtz était le contremaître des chantiers et qu’il décidait de l’heure de la pause‑repas et de celle du départ. Il a aussi usé de ses pouvoirs pour congédier un travailleur. Vers le milieu du mois de juin 2010, M. Kurtz a annoncé que BCL perdait de l’argent en payant les travailleurs selon un taux horaire et que l’entreprise avait décidé d’adopter une nouvelle formule de rémunération basée sur le travail à la pièce. M. Henderson a dit ne pas avoir consenti à ce changement : il a abandonné le chantier de BCL pour accepter un emploi auprès d’une autre entreprise de pose de parements.

 

[14]         Contre-interrogé par le représentant de l’appelante, M. Henderson a déclaré qu’au moment où il avait accepté de travailler au taux de 25 $ l’heure, il n’avait pas envisagé la possibilité de fournir ses services autrement qu’à titre d’employé, car à l’époque en question, il n’exploitait plus Aces High ni aucune autre entreprise. Il n’a pas produit de déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2009, mais songeait à déclarer que ses revenus provenaient d’un travail indépendant. Dans chaque facture présentée à BCL, indépendamment du nom commercial utilisé par cette dernière, il ajoutait la TPS. Aux dires de M. Henderson, même si les autres travailleurs et lui-même avaient de l’expérience, c’était Douglas Kurtz qui leur attribuait des volets de l’ouvrage et tous les travailleurs le suivaient lorsqu’il disait : [TRADUCTION] « Allons dîner! ». À son avis, les travailleurs considéraient Douglas Kurtz [TRADUCTION] « comme un patron ».

 

[15]         Contre-interrogé par M. Martin, M. Henderson a admis que, si une question se posait relativement au travail à effectuer sur le chantier, lui et les autres se tournaient vers Douglas Kurtz pour lui demander son avis et ses directives.

 

[16]         Lors de son témoignage, M. Stoutjesdyk a dit être un entrepreneur indépendant œuvrant, depuis 2005, dans le domaine du charpentage, de la rénovation et des ouvrages de béton, sous le nom de Brookbank Builders (« Brookbank »). Il a trois employés rémunérés selon un taux horaire et assujettis aux déductions à la source d’usage. Il a rencontré M. Kurtz en 2006, alors que Brookbank effectuait, pour un montant forfaitaire, des travaux obtenus à la suite d’une soumission. M. Stoutjesdyk connaissait M. Martin, avec qui il avait travaillé sur les chantiers de Retriever Ridge et de Boston Bar, et, même si ce dernier travaillait avec lui, il était payé par BCL. Relativement à un aspect de ce chantier de construction, Brookbank et BCL avaient toutes deux fourni des employés ou des travailleurs et s’étaient partagé les profits en parts égales. C’est BCL qui, au départ, avait obtenu le contrat en question.

 

[17]         Contre-interrogé par le représentant de BCL, M. Stoutjesdyk a convenu qu’il y a un surveillant de chantier pour la plupart des travaux.

 

[18]         Contre-interrogé par M. Martin en sa qualité d’intervenant, M. Stoutjesdyk s’est souvenu d’un cas où MM. Martin et Henderson l’avaient aidé à monter la charpente d’une habitation et avaient été payés pour leurs heures par BCL.

 

[19]         M. Martin, en sa qualité d’intervenant, n’a appelé aucun témoin.

 

[20]         De l’avis du représentant de l’appelante, la jurisprudence pertinente étaye l’hypothèse voulant que M. Martin ait fourni ses services en tant que personne travaillant à son propre compte et non à titre d’employé. Par le passé, M. Martin avait exploité une entreprise : Aces High. Il avait aussi tenté de démarrer une autre entreprise et avait tiré un revenu en teignant des vitres pour d’autres constructeurs. Se fondant sur la preuve, le représentant de l’appelante prétend que tous les actes accomplis par M. Martin ont été systématiquement conformes à ceux d’un entrepreneur indépendant et que l’ajout en règle de la TPS – quoique, la plupart du temps, dans l’espace réservé à la TVP – indiquait qu’il agissait conformément à sa qualité d’inscrit à la TPS, en utilisant le numéro qui leur avait été attribué, à M. Henderson et à lui, lorsqu’ils exploitaient Aces High. Il ne fait aucun doute que M. Martin n’avait pas besoin de supervision et qu’il avait la possibilité de travailler aux heures qui lui convenaient et de s’absenter du chantier au besoin pour des raisons personnelles.

 

[21]         L’avocate de l’intimé prétend qu’il n’y a pas eu accord de volontés lorsque MM. Martin et Douglas Kurtz, puis MM. Martin et Kurtz, ont discuté de prestation de services à BCL. La preuve révèle que M. Martin a été traité comme un employé devant exécuter le travail que lui confiait Douglas Kurtz, lequel exerçait les fonctions d’un surveillant de chantier. Selon l’avocate, BCL était d’accord pour que M. Martin travaille pour l’entreprise de M. Stoutjesdyk et l’avait rémunéré pour les heures qu’il avait effectuées. Malgré l’ajout de la TPS aux factures présentées par M. Martin pendant la période visée, il est évident qu’il était un travailleur rémunéré à l’heure sans possibilité de réaliser un profit ni exposition au risque de perte, puisqu’on le payait pour les heures qu’il comptabilisait même si on pouvait en imputer certaines à la nécessité de remédier à une erreur ou à un oubli. Selon l’avocate de l’intimée, la preuve ne permet pas de conclure que M. Martin exploitait une entreprise pour son propre compte et que les décisions du ministre devraient être confirmées.

 

[22]         Dans plusieurs affaires récentes, dont Wolf v. The Queen, 2002 DTC 6853, Le Royal Winnipeg Ballet c. M.R.N. (C.A.F.), 2006 CAF 87 (CanLII) (« Royal Winnipeg Ballet »), Vida Wellness Corp. (s/n Vida Wellness Spa) c. Canada (Ministre du Revenu national — M.R.N.), [2006] A.C.I. no 570, et City Water International Inc. c. Canada, 2006 CAF 350 (CanLII) (« City Water »), les parties avaient clairement exprimé leur intention mutuelle, à savoir que la personne fournissant les services le ferait à titre d’entrepreneur indépendant et non à titre d’employé. Ce n’est pas le cas dans les deux appels dont nous sommes saisis. Il n’y a pas d’accord écrit et les parties n’ont pas discuté de la question de la relation de travail, que ce soit au début de la période visée ou à quelque autre moment.

 

[23]         Dans l’arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983 – (« Sagaz »), la Cour suprême du Canada s’est penchée sur une affaire de responsabilité pour le fait d’autrui. En plus de procéder à l’examen des diverses questions en litige, la Cour suprême devait aussi déterminer ce qu’il faut entendre par entrepreneur indépendant. La décision de la Cour a été rendue par le juge Major, qui a étudié l’évolution de la jurisprudence sous l’angle de l’importance de la différence entre l’état d’employé et celui d’entrepreneur indépendant, compte tenu de son incidence sur la question de la responsabilité du fait d’autrui. Après s’être reporté aux motifs énoncés par le juge MacGuigan, de la Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national — M.R.N.), [1986] 3 C.F. 553, motifs qui renvoient eux-mêmes au critère d’organisation utilisé par lord Denning, ainsi qu’à la synthèse faite par le juge Cooke dans Market Investigations, Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732, le juge Major, aux paragraphes 47 et 48 de ses motifs, a déclaré ce qui suit :

 

47        Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui‑même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu’à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

 

48        Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire.

 

[24]         Je me propose maintenant d’examiner les faits propres aux présents appels en fonction des indices énoncés par le juge Major dans l’arrêt Sagaz.

 

Degré de contrôle

 

[25]         M. Martin, à l’instar de M. Henderson, était un poseur de parements d’expérience et n’avait pas besoin de supervision. Toutefois, à l’occasion, et selon les besoins, il recevait des directives de la part de Douglas Kurtz, qui jouait le rôle de contremaître et de surveillant de chantier auprès du groupe de travailleurs. Douglas Kurtz leur confiait des tâches et annonçait l’heure de la pause-repas. Les travailleurs lui emboîtaient le pas, mangeaient au même endroit que lui puis retournaient travailler même si lui, Douglas Kurtz, prenait une pause plus longue. Plus tard dans la journée, Douglas Kurtz leur annonçait que la journée de travail était terminée. Il arrivait qu’un travailleur ait la possibilité d’offrir des services pour son propre compte, mais cela se faisait rarement. Pour le chantier de Boston Bar, M. Martin était tenu de se présenter à la résidence de M. Kurtz, de charger les matériaux dans le camion appartenant à ce dernier ou à BCL et d’effectuer un trajet d’une heure et demie jusqu’au chantier. À Boston Bar, M. Martin a été [TRADUCTION] « prêté » à l’entreprise de M. Stoutjesdyk afin de travailler sur un aspect précis du chantier pour lequel Brookbank et BCL s’étaient associées. BCL payait M. Martin directement et il est évident que ce dernier n’était pas un sous-traitant de M. Stoutjesdyk.

 

Mise à disposition de matériel ou d’assistants

 

[26]         M. Martin apportait ses propres outils sur les chantiers, ce qui constitue la norme dans l’industrie de la construction. Les autres outils et le matériel appartenaient à M. Henderson, qui les avait conservés lorsque M. Martin avait quitté la société de personnes Aces High pour accepter un emploi auprès d’un fabricant de plastique. Ce n’est pas à M. Martin que BCL a payé les frais associés à la fourniture des échelles et du madrier d’échafaudage; ces frais ont été ajoutés à une facture présentée par M. Henderson, que BCL a acquittée par chèque. M. Martin n’a embauché aucun assistant, car tous les travailleurs étaient engagés et congédiés par M. Kurtz ou son frère, Douglas Kurtz.

 

Étendue des risques financiers et responsabilité pour les mises de fonds et la gestion

 

[27]         M. Martin n’a couru aucun risque financier durant la période visée. Il était payé pour son travail, y compris le trajet d’une heure et demie effectué jusqu’à Boston Bar, selon un taux horaire. Même s’il est arrivé qu’un promoteur mette du temps à payer BCL, M. Martin recevait ses paiements intégralement, notamment à une occasion où Douglas Kurtz a dû puiser dans ses propres avoirs pour payer les travailleurs parce que BCL ne disposait pas des liquidités nécessaires au moment en question. M. Martin n’était pas tenu de diriger qui que ce soit pour s’acquitter de ses propres tâches et son seul investissement, pendant la période visée, a été de fournir ses propres outils à main et son sac à outils.

 

Possibilité de tirer profit de l’exécution des tâches

 

[28]         M. Martin était payé au taux horaire de 25 $. Il n’était pas prévu qu’il puisse toucher une prime ou qu’il soit rétribué pour les heures supplémentaires. Il n’était visé par aucune convention de partage des profits. Après que M. Kurtz a modifié unilatéralement le mode de rémunération applicable, en juin 2010, en adoptant une formule de paiement basée sur le travail à la pièce selon le secteur du chantier de construction touché, M. Martin a présenté une facture de 1600 $, à titre de paiement anticipé. Toutefois, il a ensuite informé M. Kurtz qu’il ne se conformerait pas au nouveau régime et il a repris son ancienne méthode de facturation, basée sur un taux horaire de 25 $; BCL l’a payé en conséquence.

 

[29]         Les faits en l’espèce sont semblables à ceux d’une autre affaire que j’ai instruite en 2009 : Stephen Twilley c. Le Ministre du Revenu national (« Twilley »), 2009 CCI 524. Cette affaire concernait un travailleur qui avait accepté de fournir ses services à un taux forfaitaire de 25 $ l’heure. Le payeur, M. Twilley, exigeait de ses clients un taux forfaitaire fixé en fonction de la superficie en pieds carrés.

 

[30]         Dans la décision Twilley, la représentante de l’appelant a invoqué la décision que j’ai rendue dans Beaver Home Improvements Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national ‑ M.R.N.), [2003] A.C.I. no 56 (« Beaver Home »). À cet égard, j’avais conclu que le travailleur était un entrepreneur indépendant lorsqu’il fournissait des services d’installation de couvertures pour lesquels Beaver Home le payait. Il existe toutefois des différences notables entre les faits de cette dernière affaire et ceux de l’espèce. Premièrement, le seul représentant de Beaver Home sur le chantier était un vendeur et estimateur dont le rôle était de s’assurer de la conformité du travail par rapport aux exigences du client. Deuxièmement, dans 90 p. 100 des cas, le travail à effectuer était simple et le travailleur pouvait s’en acquitter grâce aux outils à main et au matériel qui lui appartenaient. S’il avait besoin d’outils spécialisés, Beaver Home les lui fournissait. Le travailleur, un certain M. O’Flynn, se rendait au travail par ses propres moyens et, par souci de commodité, il prenait aussi ses collègues de travail à bord de son véhicule. Beaver Home fournissait aux assistants de M. O’Flynn des outils et du matériel.

 

[31]         Dans l’affaire Beaver Home, les risques financiers n’étaient pas élevés et M. O’Flynn était payé par Beaver Home indépendamment du fait que le propriétaire de la résidence acquittait ou non la facture. Les assistants étaient aussi payés directement par Beaver Home. En revanche, M. O’Flynn avait la possibilité de réaliser un profit en raison de l’existence d’une convention de partage des revenus l’autorisant à tirer un profit du travail des autres travailleurs. Il avait aussi le droit d’accepter ou de refuser une offre de travail et de négocier le versement d’un paiement supplémentaire si les travaux sur le chantier présentaient des difficultés imprévues. Dans la décision Beaver Home, j’ai conclu que M. O’Flynn avait la possibilité d’accroître ses revenus en étant lui-même efficace et en s’assurant de l’efficacité des autres travailleurs par une surveillance adéquate.

 

[32]         Les faits en l’espèce sont semblables à ceux de Copper Creek Homes Inc c. Le Ministre du Revenu national, 2011 CCI 570 – (« Copper Creek »). Dans cette affaire, le ministre avait inscrit un travailleur aux fins de la TPS et celui‑ci avait retenu les services d’un spécialiste en déclarations de revenus. Ce dernier avait établi dans la déclaration que les revenus du travailleur étaient tirés d’un travail indépendant. Au paragraphe 22 des motifs, j’ai écrit ce qui suit :

 

[22]      Quant à la supposée entente qui avait au départ été conclue, à savoir que M. Wiebe devait fournir ses services à Copper Creek à titre d’entrepreneur indépendant, bien qu’il n’y ait pas eu coercition, M. Falk a offert ce statut au taux horaire négocié, l’offre étant à prendre ou à laisser, et la relation de travail a débuté en 2008 sur cette base. À ce moment‑là, M. Wiebe fournissait ses services à d’autres, et notamment à Weststone, mais il ne s’était pas inscrit aux fins de la TPS et il n’estimait pas exploiter sa propre entreprise. Les déclarations de revenus de M. Wiebe relatives aux années 2008 et 2009 ont été produites comme elles l’ont été parce que Copper Creek n’avait pas délivré de feuillet T4 et, en 2010, la déclaration a été préparée, encore une fois, par le spécialiste en déclarations de M. Wiebe en supposant que l’argent gagné était un revenu d’entreprise. Or, la façon dont les déclarations ont été produites n’est pas déterminante, pas plus que l’attribution arbitraire d’un numéro de compte de TPS/TVH à M. Wiebe, laquelle était probablement due au fait que, dans ses déclarations de revenus, il avait indiqué un revenu d’entreprise et avait déduit certains montants appropriés.

 

[33]         Dans l’analyse m’ayant amené à conclure que le travailleur était un employé de Copper Creek, j’ai fait, au paragraphe 24, l’observation suivante :

 

[24]      La preuve qui a été présentée en l’espèce n’indique pas qu’au cours de la période pertinente, M. Wiebe exploitait une entreprise à son compte. L’inscription de l’entreprise a été imposée par le ministre et elle a été annulée. M. Wiebe ne travaillait pas pour d’autres personnes au cours de la période en question, il ne faisait pas de publicité pour ses services et il n’estimait pas avoir quelque autre statut que celui d’un employé qui aurait dû être inscrit dans la liste de paie de Copper Creek. La preuve dans son ensemble milite fortement en faveur de la conclusion selon laquelle M. Wiebe était engagé par Copper Creek aux termes d’un contrat de louage de services. La conduite des parties était compatible avec ce statut, et ce, même si la relation antérieure de travail de M. Wiebe avec Copper Creek, et avec la société à dénomination numérique, était peut‑être suffisamment différente pour justifier la décision du ministre d’attribuer un numéro d’entreprise à M. Wiebe. Toutefois, ces circonstances n’ont pas été portées à mon attention, sauf pour expliquer l’origine de la relation existant entre M. Wiebe et M. Falk, et entre M. Wiebe et Copper Creek. De toute façon, il est loin d’être certain que l’expression claire d’une intention commune aurait fait pencher la balance du côté de l’appelante; il ne s’agissait pas d’un facteur fiable dans les présents appels. Il n’y avait aucun accord réel des volontés sur ce point et au début de l’année 2010, M. Wiebe a demandé à ce que le statut d’employé lui soit accordé. De toute évidence, la déclaration de M. Falk, à savoir que le taux horaire accordé à M. Wiebe devrait être ramené de 25 $ à 17 $ ou 17,50 $ si celui‑ci était considéré comme un employé et s’il était assujetti à des retenues à la source, était un stratagème de négociation qui a mis fin aux demandes que faisait M. Wiebe à cet égard. La différence de 7 $ ou 7,50 $ l’heure représentait 30 p. 100 de la rémunération, ce qui était disproportionné par rapport au pourcentage des gains que l’employeur doit payer lorsqu’il effectue des versements en vertu de la Loi et du Régime, à savoir, jusqu’à concurrence d’un maximum qui n’est pas ici pertinent, 2,42 p. 100 et 4,95 p. 100 des gains respectivement. En sa qualité d’employeur, Copper Creek aurait été tenue de verser la cotisation à la CAT, de 4,4 p. 100, de sorte que le pourcentage global que Copper Creek aurait eu à payer était de 11,77 p. 100. Compte tenu du taux horaire de 25 $, la chose aurait eu pour effet de réduire la rémunération de M. Wiebe d’un montant de 2,94 $.

 

[34]         Dans l’arrêt Sagaz, précité, la question centrale consistait à se demander :

 

[…] si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte.

 

[35]         En l’espèce, les parties se connaissaient déjà avant la période en cause et elles avaient travaillé sur les mêmes chantiers. M. Kurtz et son frère, Douglas Kurtz, savaient que MM. Martin et Henderson avaient exploité une entreprise, Aces High, et que M. Martin était employé par une entreprise lorsqu’ils ont communiqué avec lui pour l’inviter à fournir ses services à BCL, en août 2009. Dans son témoignage, M. Kurtz a dit avoir présumé que M. Martin ajouterait la TPS à ses factures établies selon le taux horaire convenu et qu’il utiliserait le numéro attribué à la société Aces High, dont il était propriétaire avec M. Henderson, et qui avait déjà présenté des factures à BCL pour des travaux effectués avant la période visée. M. Martin a déclaré qu’il n’avait pas eu l’intention de fournir ses services à BCL autrement qu’à titre d’employé rémunéré à l’heure, deux fois par mois, et qu’il avait ajouté les 5 % de taxe pour accéder à la demande de M. Kurtz, qu’il considérait, au même titre que Douglas Kurtz, comme un ami. M. Martin désirait travailler, mais pas à des conditions susceptibles de lui occasionner des pertes, une situation dont il avait déjà fait l’expérience à titre d’associé d’Aces High et qu’il ne voulait pas revivre. Il a communiqué cette intention en rejetant tout de suite le nouveau régime de paiement à la pièce que M. Kurtz avait tenté d’imposer. Il s’y est opposé et a refusé de continuer à travailler autrement que sur la base du taux horaire convenu.

 

[36]         Dans son témoignage, M. Kurtz a déclaré que BCL n’avait jamais eu d’employés. Son frère, Douglas Kurtz, travaillait comme surveillant de chantier et recevait un salaire mensuel, mais il était traité comme un entrepreneur indépendant. Il n’a pas été question de la situation de travail de Douglas Kurtz devant moi, mais la preuve n’indique pas que Douglas Kurtz exploitait sa propre entreprise et les modalités selon lesquelles il offre ses services semblent correspondre à celles d’un employé. L’entente avec Douglas Kurtz est révélatrice de l’attitude de M. Kurtz, qui attribuait à quiconque effectue du travail sur un chantier de BCL le statut de sous‑traitant, peut-être parce que BCL n’était ni un constructeur, ni un promoteur, et qu’elle remportait des appels d’offres à titre de sous-traitante chargée de réaliser certains travaux sur divers chantiers de construction résidentielle. Ce statut de sous‑traitant ne correspond pas aux faits révélés par la relation de travail établie entre M. Martin et BCL pendant la période visée, et ce, indépendamment de ce qui avait eu cours auparavant. Contrairement à la situation décrite dans l’arrêt Precision Gutters Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.), 2002 CAF 207, la preuve ne permet pas de conclure à l’existence de deux entreprises, l’une exploitée par M. Martin et l’autre par BCL, pour ce qui est des travaux effectués sur les chantiers visés par la période en cause.

 

[37]         Les hypothèses ne peuvent être considérées comme des ententes et les déclarations unilatérales de statut ne lient pas les parties à l’instance. À défaut d’autres éléments de preuve, même l’intention mutuelle de définir une relation de travail d’une certaine façon ne suffit pas.

 

[38]          Dans la décision Standing c. Canada (Ministre du Revenu national ‑ M.R.N.)(C.A.F.), [1992] A.C.F. no 890, le juge Stone tient les propos suivants :

 

[...] Rien dans la jurisprudence ne permet d’avancer l’existence d’une telle relation du simple fait que les parties ont choisi de la définir ainsi sans égards aux circonstances entourantes appréciées en fonction du critère de l’arrêt Wiebe Door. [...]

 

[39]         Les parties n’avaient pas d’intention commune selon laquelle M. Martin fournirait ses services en tant qu’entrepreneur indépendant. L’ajout de la TPS aux factures de M. Martin n’est pas déterminant quant à la question de savoir à quel titre il a fourni des services à BCL après le 17 août 2009. Il n’était pas raisonnable que M. Kurtz, seule âme dirigeante de BCL, prenne des décisions en présumant que M. Martin travaillait toujours, en quelque sorte, pour son propre compte étant donné qu’il lui avait offert du travail alors qu’il était employé par une autre entreprise et qu’il avait, en toute bonne foi, prévenu son employeur, trois semaines à l’avance, de son intention de démissionner.

 

[40]         Dans la décision Domart Energy Services Ltd. c. Le Ministre du Revenu national, 2007 CCI 585 (« Domart »), le juge Boyle s’est penché sur une affaire dont les faits sont fort différents de ceux dont il est question en l’espèce. Aux paragraphes 6 à 13, inclusivement, il expose ces faits de la façon suivante :

 

4          Dans le cadre des services de location qu’elle offre à ses clients du domaine pétrolier, Domart utilise deux camions‑grues. Les camions‑grues sont de gros camions qui coûtent cher; grâce à leur grue à flèche intégrée, ils peuvent servir à livrer et à reprendre de la machinerie et de l’équipement du type et de la taille de ceux que Domart loue. Domart possède un des deux camions‑grues, et l’autre appartient à un tiers avec lequel Domart n’a pas de lien de dépendance, McCallum Trucking Ltd., qui fournit également à Domart le conducteur du camion‑grue. Les camions‑grues sont des pièces d’équipement dont le prix élevé est de l’ordre des 400 000 $.

 

5          Avant la période en cause, Domart employait un conducteur privé pour son propre camion‑grue. Toutefois, quand ce conducteur est parti, Domart a eu de la difficulté à trouver un nouvel employé, malgré la publicité faite et les efforts de recrutement déployés.

 

6          M. Wilfrid Flanagan a abordé M. Pavlis et a offert à ce dernier les services de conducteur de camion‑grue de son entreprise, Grubbs, pour le camion‑grue de Domart. M. Pavlis connaissait bien Grubbs et l’entreprise précédente de M. Flanagan, Skookum Inc., nom sous lequel M. Flanagan avait auparavant exercé ses activités. Domart avait été client de Skookum et de Grubbs.

 

7          Grubbs offrait certains services de transport aux entreprises œuvrant dans le secteur de l’exploration et du développement pétroliers. Outre les services de conducteur de camion‑grue, Grubbs fournissait des services de véhicule d’escorte et des services de livraison express. Les services de véhicule d’escorte consistent à fournir le petit camion qui précède ou qui suit les véhicules gros, lents ou dangereux, ainsi que le conducteur. Grubbs fournissait régulièrement des services de véhicule d’escorte à Domart, environ deux fois par mois, pendant la période pertinente; elle fournissait à la fois le véhicule d’escorte et le conducteur. Les services de livraison express consistent à rendre disponibles de petits camions pour livrer immédiatement dans les champs pétrolifères les pièces de remplacement et les accessoires qui sont nécessaires à l’équipement loué. Domart n’utilisait pas les services de livraison express de Grubbs parce qu’elle avait pris d’autres arrangements. Grubbs avait un barème tarifaire qui indiquait les taux et les modalités de ses services de véhicule d’escorte, de livraison express et de conducteur de camion‑grue. M. Flanagan en avait donné une copie à M. Pavlis à des fins de discussion. M. Flanagan insistait sur le fait qu’il ne souhait pas être un employé de Domart, mais que Grubbs était disposée à fournir des services à titre d’entrepreneur. Grubbs avait un numéro de TPS, une lettre d’attestation aux fins de l’indemnisation des accidents du travail et sa propre assurance responsabilité, et elle avait fourni ces documents à Domart.

 

8          Domart savait que Grubbs avait d’autres clients et que Grubbs ne serait pas en mesure de répondre chaque fois qu’elle avait besoin d’un conducteur de camion‑grue. Grubbs pouvait refuser le travail qu’on lui offrait, ce qu’il lui est d’ailleurs arrivé de faire.

 

9          Depuis la période en cause, Domart a pu remplacer Grubbs et M. Flanagan en embauchant un conducteur de camion‑grue à titre d’employé.

 

10        M. Flanagan avait obtenu et conservé son propre permis de conduire de classe 1, dont il avait besoin pour conduire un camion‑grue. M. Flanagan avait un certificat de compagnon grutier-opérateur d’appareil de levage, ce qui signifie qu’il avait le permis provincial nécessaire pour pouvoir conduire le camion‑grue. M. Flanagan payait de sa poche et consacrait de son temps personnel pour conserver ce titre de compétences. En outre, il tenait le carnet de route réglementaire du camion et de la grue.

 

11        Grubbs ou M. Flanagan était aussi responsable des infractions aux règlements de la circulation. Ce n’était pas une pratique courante, dans l’industrie, qu’un conducteur soit responsable des contraventions et des amendes de la manière dont Grubbs avait accepté de l’être.

 

12        Domart avait accepté de verser 45 $ l’heure à Grubbs pour les services de conducteur de camion‑grue de M. Flanagan. Ce taux horaire était considérablement plus élevé que celui de 35 $ l’heure que Domart avait auparavant versé à ses employés conducteurs de camion‑grue et qu’elle offrait aux employés éventuels. Il n’y avait pas de contrat écrit. M. Pavlis avait clairement établi, dans ses discussions avec M. Flanagan, que le taux horaire accru était versé parce qu’il s’agissait d’un taux contractuel, et qu’il n’y aurait pas d’heures supplémentaires payées, ni rien de plus. Bien que Domart aurait fortement préféré embaucher un employé pour conduire le camion‑grue, M. Pavlis, au nom de Domart, avait expressément convenu avec M. Flanagan que les services de conducteur de camion‑grue seraient rendus dans le cadre des activités de Grubbs.

 

13        Domart ne versait rien de plus à Grubbs pour les repas et les chambres d’hôtel; Grubbs n’avait ni vacances ni congés de maladie payés, et pas d’avantages sociaux. Les employés de Domart, y compris les conducteurs de camion‑grue, bénéficiaient d’une gamme d’avantages sociaux. Domart payait la factuelle mensuelle qu’elle recevait de Grubbs au taux convenu, TPS en sus.

 

[41]         Le juge Boyle a conclu que le travailleur n’était pas tenu de se présenter au travail, que son horaire de travail était établi par les clients et qu’il avait le loisir de choisir l’itinéraire et de prendre des pauses quand bon lui semblait. Aux paragraphes 21 et 22, le juge Boyle ajoute :

 

21.       Avant de me pencher sur ces critères et de les examiner dans le contexte des faits de l’espèce, je ferai remarquer qu’il est à la fois très clair et reconnu par la Couronne que M. Flanagan exploitait effectivement une entreprise sous le nom de Grubbs Oilfield Services. Selon la Couronne, le travail de conducteur de camion‑grue que M. Flanagan exécutait pour Domart s’inscrivait dans une relation d’emploi distincte. Il n’est pas contesté que M. Flanagan rendait à Domart des services de véhicule d’escorte dans le cadre des activités de Grubbs, l’entreprise que M. Flanagan exploitait. La Couronne ne conteste pas non plus que Grubbs, l’entreprise de M. Flanagan, fournissait des services de véhicule d’escorte et de livraison express, et peut‑être même des services de conducteur de camion‑grue, à d’autres clients que Domart. Cet aspect rend l’affaire passablement différente des nombreux jugements publiés en la matière et de la plus grande partie de la jurisprudence sur laquelle se fonde la Couronne. Essentiellement, la Couronne soutient que le travail de conducteur de camion‑grue constituait un travail distinct des services de véhicule d’escorte que M. Flanagan fournissait à Domart pendant la même période, et distinct des services qu’il fournissait à d’autres clients pendant cette période. La position opposée à celle de la Couronne serait que Domart était simplement l’un des meilleurs et des plus importants clients de Grubbs pendant la période en cause.

 

Intention des parties

 

22.       En l’espèce, les deux parties avaient clairement l’intention d’établir une relation d’entrepreneur indépendant. M. Flanagan faisait affaire sous le nom de Grubbs Oilfield Services et, avant de travailler comme conducteur de camion‑grue pour Domart, il avait fait d’autres types de travaux pour celle‑ci et avait aussi travaillé pour d’autres clients. M. Pavlis, au nom de Domart, a témoigné que même s’il aurait préféré embaucher M. Flanagan au poste de conducteur de camion‑grue, devant l’insistance de M. Flanagan, Domart avait sciemment et intentionnellement accepté d’établir plutôt une relation d’entrepreneur indépendant avec Grubbs, l’entreprise de M. Flanagan.

 

[42]         Au paragraphe 29, le juge Boyle conclut :

 

29.      En me fondant sur la preuve présentée, je suis convaincu que la prestation des services de conducteur de camion‑grue faisait partie intégrante des activités de l’entreprise Grubbs, exploitée par M. Flanagan. Rien dans les faits ou dans la loi ne permet de séparer ces services utilisés par Domart des autres activités générales de Grubbs et de les qualifier de services s’apparentant à un emploi qu’aurait exercé M. Flanagan pour Domart. Dans l’affaire qui nous occupe, M. Flanagan fournissait les services à Domart dans le cadre de sa propre entreprise déjà établie. Comme il a été exposé dans Market Investigations, il est ainsi plus facile en l’espèce d’appliquer les critères pertinents.

 

[43]         Après avoir analysé l’ensemble de la preuve et examiné la jurisprudence applicable, je conclus que les décisions rendues par le ministre en vertu de la Loi et du Régime sont correctes et elles sont confirmées.

 

[44]         Les deux appels sont rejetés.

 

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 18e jour d’avril 2012.

 

 

« D. W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de juin 2012.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                  2012 CCI 127

 

 

No DES DOSSIERS DE LA COUR :  2011-2508(EI) et 2011-2507(CPP)

 

 

INTITULÉ :                                       687352 BC LTD. c. LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL ET JASON ROBERT MARTIN

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 22 mars 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge suppléant D. W. Rowe

 

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 18 avril 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

M. Peter Ronda

Avocate de l’intimé :

Me Dawn Francis

Pour l’intervenant :

L’intervenant lui-même

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                      s.o.

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.