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Dossier : 2006-929(IT)I

ENTRE :

TIMOTHY KIKOT,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus le 20 février 2007, à Vancouver (Colombie-Britannique).

Devant : L’honorable juge C.H. McArthur

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me John Gibb-Carsley

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

Les appels des nouvelles cotisations établies en application de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1993, 1994, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001 sont admis et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs de jugement ci‑joints.

 

L’appel concernant les pénalités pour production tardive qui ont été établies à l’égard de l’année d’imposition 1996 est rejeté.

 


L’appel concernant la pénalité imposée à l’égard de l’année 1999 pour récidive est également rejeté. Il est renoncé à toutes les autres pénalités qui ont été établies.

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour de janvier 2008.

 

 

« C.H. McArthur »

Juge McArthur

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mars 2008.

 

Christian Laroche

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI38

Date : 20080211

Dossier : 2006-929(IT)I

ENTRE :

TIMOTHY KIKOT,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT MODIFIÉS

 

Le juge McArthur

 

[1]     Il s’agit d’appels concernant certaines cotisations établies à l’égard des années d’imposition 1993 à 2001 de l’appelant, Timothy Kikot. L’appelant n’a pas produit de déclarations de revenus pour la période de neuf ans allant de 1993 à 2001, et ce, jusqu’en 2002.

 

[2]     Les années d’imposition 1993, 1994 et 1995 ont donné lieu à des cotisations selon les déclarations qui avaient été produites, sauf en ce qui concerne les pénalités pour production tardive. Dans l’ensemble, le présent appel se rapporte aux dépenses d’entreprise et aux dépenses d’emploi qui ont été rejetées pour les années 1996 à 2001.

[3]     L’appelant a été accusé, en vertu du paragraphe 238(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), d’avoir omis de se conformer aux exigences. Il a plaidé coupable sous trois chefs, pour les années d’imposition 1996, 1997 et 1998, et les accusations concernant les années 1993, 1994 et 1995 ont été suspendues.

[4]     Les points en litige sont notamment les suivants :

1.                 L’appelant a-t-il le droit de déduire des dépenses d’emploi supplémentaires pour les années d’imposition 1996, 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001?

2.                 L’appelant a-t-il le droit de déduire des dépenses d’entreprise supplémentaires pour les années 1996, 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001?

3.                 L’appelant s’est-il à juste titre vu imposer des pénalités pour récidive à l’égard des années d’imposition 1993, 1994, 1995, 1997, 1998 et 1999?

4.                 L’appelant s’est-il à juste titre vu imposer une pénalité pour production tardive pour l’année d’imposition 1996?

Résumé des faits

[5]     L’appelant a travaillé comme entrepreneur indépendant pour OPS Business Systems (« OPS ») de 1993 à 1996, ainsi qu’à titre d’employé, de 1996 à 1998, après qu’Ikon Office Solutions (« Ikon ») eut acheté OPS. Du 15 janvier au 14 avril 1998, l’appelant était travailleur autonome et il était rémunéré à la commission.

[6]     Au mois d’avril 1998, l’appelant s’est installé à Vancouver pour continuer à vendre du matériel de bureau Toshiba, mais pour une autre entreprise, Vancouver Office Products (par la suite appelée Conex Business Systems) jusqu’au mois de septembre 1999. Au mois de septembre 1999, l’appelant a quitté son emploi et il a entrepris d’exploiter l’entreprise de Global. La société Global Edge Technologies Inc. (« Global ») a été constituée en personne morale au mois de juin 1999, mais elle n’a jamais été utilisée en tant que personne morale. Quatre autres personnes participaient dans une certaine mesure aux activités de Global, mais l’appelant était le seul qui y travaillait à plein temps; pour les besoins du présent appel, les activités auxquelles l’appelant se livrait pour Global sont considérées comme étant celles d’une entreprise individuelle dont l’appelant ne tirait aucun revenu, tout en déduisant des dépenses.

[7]   D’une façon générale, l’appelant n’a pas soumis d’états des résultats des activités d’une entreprise, mais à l’instruction, il a produit un certain nombre de boîtes de reçus. En produisant ses déclarations, l’appelant a commencé par les années les plus récentes pour remonter aux années antérieures, ce qui a quelque peu contribué à la confusion qui régnait déjà au sujet des déclarations.

 

ANALYSE

 

Dépenses d’entreprise (exploitée indépendamment de l’emploi exercé à plein temps par l’appelant)

 

[8]     L’appelant assume la pleine responsabilité en ce qui concerne l’omission de produire ses déclarations de revenus au cours des années en question. L’appelant reconnaît également qu’en produisant finalement ses déclarations tardives, il a commencé par les années les plus récentes et que cela, en plus du temps qui s’était écoulé, a occasionné des problèmes lorsqu’il s’est agi pour l’appelant de se rappeler quelles étaient les dépenses d’entreprise et les dépenses d’emploi qui avaient été engagées, d’organiser ces dépenses et de les ranger dans une catégorie ou dans l’autre.

 

[9]     Dans ses observations écrites, l’intimée affirme que l’appelant [traduction] « a omis de corroborer sa demande d’une façon raisonnable », en ce qui concerne les dépenses d’entreprise, et qu’il [traduction] « n’a pas soumis à la Cour de motifs justifiant l’octroi d’un plus grand nombre de déductions que celles que le ministre avait initialement admises ». D’une façon générale, j’ai trouvé M. Kikot crédible. Tout au long de son témoignage, M. Kikot a étayé les reçus, les états correspondants des résultats des activités d’une entreprise et d’autres documents. Les motifs ci‑après énoncés sont fondés sur la preuve soumise par les deux parties.

1996

[10]    Après l’instruction, le ministre a admis un montant additionnel de 3 893 $, représentant 71 p. 100 des dépenses dont la déduction était demandée, ce qui est selon moi raisonnable, étant donné en particulier que les reçus et la preuve qui ont été présentés ne renfermaient pas de détails.

1997

[11]    Compte tenu des documents soumis par l’appelant à l’instruction, l’intimée a admis un montant supplémentaire de 3 569 $ au titre des frais afférents à un véhicule à moteur. Cela ramène à 80 p. 100 le pourcentage des dépenses admises en sus des dépenses déduites, conclusion que je trouve également raisonnable.

1998

 

[12]    L’appelant exploitait son entreprise, Mailbox Distributors, ce qui comportait la distribution de porte en porte de dépliants publicitaires, à laquelle il attribue un certain nombre de dépenses d’entreprise, indépendamment des dépenses d’emploi engagées au cours de la même période. L’entreprise a été exploitée de 1996 à 1998, mais non d’une façon exclusive. L’appelant a inclus une partie des frais de location de sa résidence à titre de dépenses d’entreprise. À l’instruction, l’appelant a déclaré qu’un montant de 7 088 $, représentant des dépenses d’entreprise, était attribuable à l’année 1998. Les dépenses d’entreprise admises par le ministre représentent 52 p. 100 de celles qui avaient été déduites. Étant donné que l’appelant était un entrepreneur autonome, du 15 janvier au 14 avril de cette année‑là, et qu’il exploitait Mailbox Distributors, je conclus qu’il s’agit d’une attribution inadéquate. Compte tenu de l’étendue des activités commerciales de M. Kikot au cours de l’année 1998, j’admets, dans une proportion de 75 p. 100, les dépenses dont la déduction était demandée. L’appelant a produit l’état pertinent des résultats des activités d’une entreprise et il a identifié les dépenses d’entreprise y afférentes au cours du contre‑interrogatoire. Le montant admis sera calculé comme suit : 75 % x 7 088 $ = 5 316 $.

1999

[13]    Aucune dépense d’entreprise n’a été déduite et aucun revenu d’entreprise n’a été gagné.

2000

 

[14]    Une société (Global) avait été constituée en personne morale, mais rien ne montrait qu’elle était exploitée activement. L’appelant n’en a pas tenu compte et il a exploité l’entreprise pour son propre compte. Dans les présents motifs, il ne sera donc pas tenu compte de Global à titre de société. Je reconnais que Global exploitait activement une entreprise en l’an 2000.

[15]    L’ARC n’a admis aucune partie du montant de 6 168 $ qui avait été déduit au titre des dépenses d’entreprise, pour le motif que ces dépenses n’avaient pas été déduites dans une déclaration distincte de revenus de société comme elles devaient l’être, mais qu’elles avaient plutôt été déduites dans la déclaration de revenus personnelle de l’appelant. L’appelant affirme avoir engagé diverses dépenses lorsqu’il tentait de réunir des fonds pour l’entreprise, en faisant appel à sa famille et à des amis, entre les mois de janvier et d’août 2000. Global était composée de l’appelant et de cinq autres personnes. L’appelant a été le seul à renoncer à son emploi, au mois de septembre 1999, afin de poursuivre cette activité, à l’aide d’un plan d’entreprise selon lequel il devait commercialiser du nouveau matériel et de nouveaux logiciels pour la lecture informatique. L’appelant a déduit les dépenses d’entreprise dans sa déclaration de revenus personnelle.

 

[16]    L’alinéa 18(1)a) de la Loi prévoit qu’une dépense engagée ou effectuée par le contribuable en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien peut donner lieu à une déduction du revenu du contribuable. Les efforts que l’appelant a déployés pour lancer Global sur le marché et pour en tirer un revenu ont occasionné les dépenses d’entreprise suivantes :

 

a) Frais de repas et de représentation : déduction de 671 $ demandée

 

[17]    Cela représente un montant mensuel de 96 $, ce qui n’est certes pas un montant déraisonnable pour une personne qui tente d’attirer des investisseurs. Le paragraphe 67.1(1) permet la déduction de 50 p. 100 de ce montant. J’accorde dont une déduction de 335 $ pour les frais de repas et de représentation. L’alinéa 18(1)a) autorise cette déduction étant donné que la dépense a été engagée en vue de tirer un revenu d’une entreprise.

b) Frais de bureau : déduction de 341 $ demandée

[18]    Cette somme semble raisonnable pour une période de huit mois; elle est accordée.

c) Loyer : déduction de 1 440 $ demandée

[19]    Cette somme représentait les frais se rattachant à la partie de la résidence qui a servi de bureau pour Global au cours des huit mois susmentionnés. Un diagramme de la maison a été soumis à l’ARC. À supposer que le loyer mensuel soit de 1 500 $, ce chiffre représente 12 p. 100 seulement du loyer pour cette période. Le montant de 1 440 $ dont la déduction a été demandée est raisonnable; il est accordé.

d) Frais de déplacement : 2 245 $

 

[20]    De toute évidence, l’appelant a engagé ces frais de déplacement en cherchant à générer un revenu d’entreprise. Cette déduction de 2 245 $ se rattachant à l’entreprise est accordée.

 

                   e) Frais de téléphone : 220 $

 

[21]    Il s’agit de dépenses d’entreprise raisonnables, étant donné qu’elles s’échelonnent sur une période de huit mois.

 

                   f) Frais de bureau à domicile : 1 251 $ (chauffage, électricité, gaz, services publics)

[22]    Étant donné que la déduction relative au loyer a été accordée, cela semble faire double emploi, de sorte que les frais de bureau à domicile de 1 251 $ ne sont pas accordés.

          2001

[23]    Un montant de 6 193 $ en tout a été déduit au titre des dépenses d’entreprise en 2001. Toutefois, Global a fermé ses portes en l’an 2000 et l’appelant a admis qu’aucune activité commerciale n’avait été exercée cette année‑là. Étant donné qu’aucune entreprise commerciale n’a été exploitée, aucune des dépenses d’entreprise dont la déduction était demandée n’est accordée.

Dépenses d’emploi

[24]    J’examinerai maintenant la demande de déduction des dépenses d’emploi de l’appelant. En plus des efforts indépendants d’entrepreneur qu’il déployait lui‑même, l’appelant occupait un emploi, et ce, pendant toutes les années ici en cause. Pour les années 1996 et 1997, aucun formulaire T2200 n’a été soumis, de sorte qu’aucune dépense d’emploi n’a été admise. La présentation d’un formulaire T2200 signé par l’employeur est clairement une exigence du paragraphe 8(10) de la Loi. En 2002, l’appelant a fait des efforts raisonnables en vue d’obtenir des formulaires T2200 de son employeur pour ses années d’imposition 1996 et 1997, mais il n’a pas réussi à les obtenir. L’appelant avait de toute évidence effectué des dépenses déductibles ces années‑là, mais je ne possède aucun pouvoir discrétionnaire me permettant d’interpréter autrement le libellé clair de la Loi puisque ce libellé n’est pas ambigu. Les dépenses dont la déduction a été demandée pour les années 1996 et 1997 ne sont pas accordées.

 

J’examinerai les autres années d’une façon individuelle.

 

[25]    En ce qui concerne l’année 1998, l’appelant a demandé la déduction d’un montant de 33 203 $ au titre des dépenses d’emploi.

 

[26]    À la suite de la présentation d’un formulaire T2200 valide à l’instruction, l’intimée a admis un montant de 17 215,26 $ sur le montant de 33 203 $ dont la déduction était demandée au titre des dépenses. Cela représente 52 p. 100, ce qui est selon moi tout à fait raisonnable, étant donné qu’aucune ventilation des dépenses n’a été fournie en vue d’aider à déterminer les montants qui ont été déduits et les catégories de dépenses y afférentes et en vue d’établir un lien avec ce qui est autorisé à l’article 8 de la Loi. Aucune déduction supplémentaire n’est accordée pour l’année 1998.

 

[27]    En 1999, l’appelant a demandé la déduction d’un montant de 12 059 $ au titre des dépenses d’emploi. Jusqu’au mois de septembre 1999, soit la période pendant laquelle il a engagé des dépenses d’emploi, l’appelant vendait du matériel de bureau Toshiba pour une société appelée Vancouver Office Products/Conex Business Systems. L’appelant a soumis à l’appui un formulaire T2200 valide avec sa déclaration. Au mois de septembre 1999, l’appelant a quitté son emploi afin d’exploiter l’entreprise de Global. Sur les 12 059 $ qui ont été déduits, un montant de 9 720 $ se rapporte aux frais afférents à un véhicule à moteur.

 

[28]    L’alinéa 8(1)h.1) autorise la déduction des frais afférents à un véhicule à moteur dans les cas suivants :

 

dans le cas où le contribuable, au cours de l’année, a été habituellement tenu d’accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur ou à différents endroits et a été tenu, aux termes de son contrat d’emploi, d’acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur qu’il a engagés dans l’accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, les sommes qu’il a dépensées au cours de l’année au titre des frais afférents à un véhicule à moteur pour se déplacer dans l’exercice des fonctions de son emploi, sauf s’il a, selon le cas:

 

(i)                  reçu une allocation pour frais afférents à un véhicule à moteur qui, par l’effet de l’alinéa 6(1)b), n’est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l’année.

 

(ii)                demandé une déduction pour l’année en application de l’alinéa f);

 

 

La preuve soumise par l’appelant n’établissait pas que celui‑ci avait le droit de déduire des dépenses en sus de celles que le ministre a admises. L’appelant a exercé un emploi pendant huit mois seulement en 1999; de plus, il semble avoir combiné les dépenses d’entreprise et les dépenses d’emploi pour cette année‑là; en effet, aucune dépense d’entreprise n’a été déduite séparément. Il n’y avait aucune façon de répartir les montants en cause. Le montant de 9 720 $ que le ministre a admis est raisonnable. Aucune déduction supplémentaire n’est accordée.

 

[29]    En ce qui concerne l’année 2000, le ministre a admis, dans une proportion de 96 p. 100, les dépenses d’emploi qui avaient été déduites, ce qui est raisonnable.

 

[30]    En 2001, l’appelant a déduit un montant de 13 380 $ au titre des dépenses d’emploi. Cette année‑là, l’appelant vendait des produits Canon. Le ministre a admis 59 p. 100 des dépenses d’emploi engagées cette année‑là. L’appelant soutient que les frais de stationnement pour lesquels aucun reçu n’était disponible représentent 41 p. 100 du montant dont la déduction a été refusée. Étant donné l’absence de reçus, il m’est impossible de ne pas souscrire au calcul effectué par le ministre. Aucune dépense ne pourra être déduite, en sus de celles que le ministre a admises.

 

 

Production tardive

 

[31]    L’appelant n’avait pas produit de déclarations de revenus comme le ministre l’avait mis en demeure de le faire en vertu du paragraphe 150(2) de la Loi. Il a finalement produit les déclarations et le ministre les a toutes reçues au mois de juillet 2002. L’appelant s’est vu imposer des pénalités pour production tardive et pour récidive à l’égard des années d’imposition 1996, 1997, 1998 et 1999. Les dispositions suivantes de la Loi sont pertinentes, en ce qui concerne les pénalités qui ont subséquemment été établies :

 

Article 162

 

(1)        Défaut de déclaration de revenu – Toute personne qui ne produit pas de déclaration de revenu pour une année d’imposition selon les modalités et dans le délai prévus au paragraphe 150(1) est passible d’une pénalité égale au total des montants suivants:

a)         5 % de l’impôt payable pour l’année en vertu de la présente partie qui était impayé à la date où, au plus tard, la déclaration devait être produite;

b)         le produit de 1 % de cet impôt impayé par le nombre de mois entiers, jusqu’à concurrence de 12, compris dans la période commençant à la date où, au plus tard la déclaration devait être produite et se terminant le jour où la déclaration est effectivement produite.

(2)        Récidive – La personne qui ne produit pas de déclaration de revenu pour une année d’imposition selon les modalités et dans le délai prévus au paragraphe 150(1) après avoir été mise en demeure de le faire conformément au paragraphe 150(2) et qui, avant le moment du défaut, devait payer une pénalité en application du présent paragraphe ou du paragraphe (1) pour défaut de production d’une déclaration de revenu pour une des trois années d’imposition précédentes est passible d’une pénalité égale au total des montants suivants:

[...]

 

Paragraphe 150(2)

Mise en demeure de produire une déclaration

(2)        Toute personne, qu’elle soit ou non assujettie à l’impôt visé par la présente partie pour une année d’imposition et qu’une déclaration ait été produite ou non en vertu du paragraphe (1) ou (3), doit, sur mise en demeure du ministre, signifiée à personne ou envoyée sous pli recommandé, produire auprès du ministre, dans le délai raisonnable fixé par la mise en demeure, une déclaration de revenu pour l’année d’imposition y mentionnée, selon le formulaire prescrit et renfermant les renseignements prescrits.

 

[32]    L’appelant était dépassé par la situation, étant donné les questions fiscales complexes auxquelles il faisait face au fil des ans, et il n’a pas pu satisfaire aux exigences imposées par la Loi. Il a tenté de lancer un certain nombre d’entreprises commerciales et d’exercer des emplois, souvent en même temps, en vue d’essayer de gagner sa vie. La jurisprudence établit clairement que le caractère complexe de la situation fiscale d’une personne ne constitue pas un motif suffisant de ne pas se conformer aux exigences de la Loi, mais dans ce cas‑ci, le sens commun et l’équité doivent entrer en ligne de compte. Chaque cas doit finalement être tranché selon la situation du contribuable en cause. J’ai conclu que l’appelant s’était montré remarquablement franc et sincère, même s’il ne savait pas trop à quelles dates les dépenses avaient été engagées et quelles catégories de dépenses étaient en cause. En tentant d’accorder une réparation quelconque, l’appelant en méritant bien une, il convient d’examiner les mises en demeure que le ministre a envoyées.

 

[33]    Des mises en demeure pour chacune des années 1993 à 1998 ont été envoyées à l’appelant au mois de septembre 1998; elles ont été retournées à l’ARC sans être réclamées, au mois de novembre 1998. Étant donné que l’appelant est crédible et puisque rien ne permet à la Cour de supposer que l’appelant était au courant de ces mises en demeure, je ne puis, selon la prépondérance des probabilités, conclure qu’il a été satisfait à l’exigence énoncée au paragraphe 162(2). Le fait que les mises en demeure ont été retournées à l’ARC sans être réclamées milite en faveur de l’appelant.

 

[34]    Dans ses observations écrites, l’intimée déclare que la mise en demeure concernant l’année 1998 a été envoyée au mois de septembre 1998, ce qui semble peu probable. L’intimée déclare ensuite avoir envoyé, au mois de septembre 1999, une mise en demeure se rapportant à l’année 1998. Étant donné la confusion qui règne à ce sujet, les pénalités relatives à l’année 1998 ne peuvent pas être imposées, étant donné que le ministre n’est pas en mesure de déterminer avec exactitude à quel moment ou de quelle façon la mise en demeure concernant l’année 1998 a été envoyée. La preuve permet uniquement de conclure que cette mise en demeure a été envoyée à un moment donné et qu’elle a par la suite été retournée sans être réclamée.

 

[35]    Le témoignage présenté au nom du ministre, confirmant que des TX14D (des mises en demeure) distinctes ont été [traduction] « envoyées » à la nouvelle adresse de l’appelant, à certaines dates, ne permet pas de conclure que ces mises en demeure ont été envoyées sous pli recommandé. L’intimée n’a pas réussi à établir que les mises en demeure avaient été envoyées sous pli recommandé. Je ne suis pas prêt à conclure que les mises en demeure ont été envoyées conformément aux exigences du paragraphe 150(2), c’est‑à‑dire qu’elles ont été signifiées à personne ou qu’elles ont été envoyées sous pli recommandé.

 

[36]    L’intimée déclare que les mises en demeure ont été envoyées le 22 septembre, au 2895, 21e avenue Ouest, adresse où, selon le témoignage de l’appelant, celui‑ci habitait entre le 2 septembre 1998 et le mois de février 2001. Toutefois, le changement d’adresse n’a été enregistré auprès de l’ARC que le 18 septembre; quatre jours seulement s’étaient écoulés avant que l’ARC envoie les mises en demeure susmentionnées.

 

[37]    Le fait que les mises en demeure ont été retournées sans être réclamées et que les mises en demeure concernant les années 1993 à 1997 ont été envoyées à l’appelant 20 jours seulement après que sa famille se fut installée à cette nouvelle adresse m’empêche également de conclure que l’appelant était de quelque façon au courant de ces mises en demeure. Le fait que les mises en demeure ont été retournées à l’ARC sans être réclamées ne permet pas à la Cour de conclure qu’elles ont été signifiées à l’appelant. Le ministre a mentionné la décision Bowen[1], qui traitait de l’envoi par la poste d’un avis de ratification de cotisation et non de mises en demeure entraînant, en l’absence de réponse, l’imposition de pénalités.

 

[38]    L’expression « après avoir été mise en demeure », partie intégrante du paragraphe 162(2), étant donné les conséquences pécuniaires qui en découlent, oblige indubitablement le ministre à s’assurer que le contribuable a été mis au courant de la mise en demeure. Le paragraphe 162(2) prévoit qu’une mise en demeure doit être signifiée et prévoit en outre que la mise en demeure doit être reçue  par le contribuable.

 

[39]   L’appel concernant les pénalités pour production tardive qui ont été établies à l’égard de l’année 1996 est rejeté, l’appelant n’ayant pas démontré l’existence de circonstances atténuantes telles que celles qui sont reconnues par les tribunaux, lesquelles pourraient raisonnablement l’exonérer de toute responsabilité de produire ses déclarations à temps. Les appels concernant les pénalités imposées pour récidive à l’égard des années 1993, 1994, 1995, 1997 et 1998 sont admis pour les motifs énoncés ci‑dessus, puisqu’il n’a pas été établi que les mises en demeure avaient été signifiées à l’appelant, conformément au paragraphe 150(2). La mise en demeure se rapportant à l’année 1999 a été envoyée au mois d’août 2000 et elle n’a pas été retournée, de sorte que la pénalité imposée pour récidive à l’égard de l’année 1999 est maintenue.

 

Conclusion

 

[40]   La preuve que M. Kikot a soumise n’était pas suffisamment détaillée. M. Kikot ne savait pas trop quelles dépenses se rapportaient à l’entreprise et quelles dépenses étaient associées à un emploi; de plus, il a parfois combiné les dépenses d’entreprise et les dépenses personnelles. M. Kikot aurait mieux fait d’embaucher un teneur de livres ou un comptable, même s’il n’avait peut‑être pas les moyens de le faire.

 

[41]   Malheureusement, la Loi prévoit fort peu de réparations dans le cas de l’appelant. En effet, les contribuables sont obligés de produire des déclarations annuelles conformément à la Loi. L’appelant s’est mis dans une situation fort difficile. Il n’a pas pu organiser ses documents d’une façon raisonnable en vue de me permettre ou de permettre au ministre d’accorder dans sa pleine mesure la réparation demandée.

[42]   Les dépenses supplémentaires suivantes sont accordées :

          Dépenses d’entreprise                        Dépenses d’emploi

                     accordées                                         accordées

 

1996

8 745 $

Néant

 

1997

6 079 $

Néant

 

1998

5 316 $

17 215 $

 

1999

Néant

  4 210 $

 

2000

Repas 335,40 $

  4 908 $

 

 

Frais de bureau 341 $

 

 

 

Loyer 1 440 $

 

 

 

Déplacements 2 245 $

 

 

 

Téléphone 220 $

 

 

 

Bureau à domicile

 

Néant

2001

Néant

  7 927 $

 

Pénalités

 

[43]   L’appel concernant les pénalités pour production tardive qui ont été établies à l’égard de l’année 1996 est rejeté.

 

[44]   L’appel concernant la pénalité imposée à l’égard de l’année 1999 pour récidive est également rejeté. Il est renoncé à toutes les autres pénalités qui ont été établies.

 

[45]   L’appel est admis et les cotisations sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux présents motifs de jugement.

 

Les présents motifs du jugement modifiés remplacent les motifs du jugement rendus le 23 janvier 2008.

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de février 2008.

 

 

« C.H. McArthur »

Juge McArthur

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mars 2008.

 

Christian Laroche

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI38

 

DOSSIER DE LA COUR :                 2006-929(IT)I

 

INTITULÉ :                                       TIMOTHY KIKOT

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 20 février 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge C.H. McArthur

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 23 janvier 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me John Gibb-Carsley

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 



[1] Bowen v. Minister of National Revenue, 1991 CarswellNat 520, [1991] 2 C.T.C. 266, [1992] 1 C.F. 311, 139 N.R. 167, 91 D.T.C. 5594 (C.A.F.), au paragraphe 7.

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