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Dossier : 2010-1612(IT)I

ENTRE :

DANIELLE PLAMONDON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu les 17 septembre et 10 décembre 2010,

à Québec (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Robert J. Hogan

 

Comparutions :

 

Pour l'appelante :

L'appelante elle-même

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Marie-France Dompierre

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 est accueilli, sans frais, et la nouvelle cotisation est annulée selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de janvier 2011.

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 


 

 

Référence : 2011 CCI 47

Date : 20110126

Dossier : 2010-1612(IT)I

ENTRE :

DANIELLE PLAMONDON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Hogan

 

[1]              Cet appel est relatif à une nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (« LIR ») pour l’année d’imposition 2005 de l’appelante.

 

[2]              L’appelante a amassé une collection d’insectes pendant plusieurs années. Au cours de l’année 2005, l’appelante a donné une partie de cette collection à la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval.

 

[3]              L’intimée ne nie pas que l’appelante ait fait un don de bienfaisance d’une valeur de 25 419,75 $. La position de l’intimée est que l’appelante a disposé d’un « bien à usage personnel » (« BUP ») tel qu’il est défini par la LIR et, par conséquent, que l’appelante a réalisé un gain en capital de 24 419 $. Le ministre du Revenu national (« ministre ») a calculé un montant de 1 000 $ au titre du prix de base rajusté des biens donnés aux fins du calcul de ce gain.

 

[4]              L’appelante a témoigné que son conjoint et elle sont des entomologistes amateurs. Ils ramassent des spécimens un peu partout dans le monde. Depuis quelques années, l’appelante donne régulièrement du matériel scientifique sous forme de collections d’insectes morts à différents organismes sans but lucratif tels que l’Insectarium de Montréal et la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval. Les insectes donnés sont destinés à la recherche ou au renouvellement des collections des universités ou des musées.

 

[5]              Dominic-Jean Gagnon, le vérificateur de l’Agence du revenu du Canada (« ARC ») qui a préparé        la cotisation, a témoigné qu’il a conclu que la collection d’insectes était un BUP puisque recueillir des insectes était un loisir donnant beaucoup de plaisir à l’appelante. Toutefois, en contre-interrogatoire, M. Gagnon a admis qu’il ignorait l’usage que l’appelante faisait de sa collection d’insectes. Pour sa part, l’appelante a témoigné qu’elle gardait les insectes dans des boîtes fermées dans un entrepôt appartenant à son conjoint jusqu’au moment où elle en faisait don à une œuvre de bienfaisance. Après une question de la Cour, l’appelante a décrit les insectes qu’elle a donnés comme suit :

 

Q.        Mais est-ce que ces insectes auraient pu être utilisés pour être exposés pour vous ou être exposés à des exhibitions ou des trucs de cette nature-là? Parce qu’un insecte c’est un bien fongible, j’imagine on ne sait pas... si on ne les identifie pas : ça c’est la mère, ça c’est le père et ça c’est le cousin, ça se ressemble tous un peu.

 

R.         Absolument. Bien, les insectes qu’on donne c’est pas de très beaux insectes, c’est pas des insectes qui sont utiles pour si, par exemple, on voulait les revendre ou en faire des encadrements esthétiques ou quoi que ce soit, ce sont... la tordeuse des bourgeons, c’est pas très esthétique. Et on a donné des tordeuses de bourgeons en grande quantité à l’Université Laval.

 

Donc, ce ne sont pas des insectes qui sont destinés à être admirés, si on veut. On peut en faire, peut-être, des collections justement qu’on va donner, je ne sais pas, moi, dans les écoles pour leur indiquer quelles sont les différentes variétés d’insectes mais ce ne sont pas de beaux insectes nécessairement. Ce sont des insectes exotiques, parfois, parce qu’ils peuvent venir de l’extérieur.

 

Par exemple, dans le cas de certains coléoptères nuisibles qui proviennent de l’Asie, je pense que l’Université Laval a fait des recherches à un moment donné puis soit moi ou mon conjoint, je ne me souviens pas, on avait donné de ces coléoptères-là. Mais ce sont des coléoptères qui [ne] sont pas nécessairement beaux à la vue. C’est beau pour un entomologiste qui se passionne pour ça mais même nous, je n’ai aucun insecte affiché dans ma maison. Parce qu’on est toujours là‑dedans, parce que j’ai pas besoin d’en voir sur mes murs, parce que...

 

La position des parties

 

[6]              La position de l’appelante est que les insectes ne sont pas des BUP et qu’elle n’a pas la jouissance de ceux-ci. Elle profite de l’activité de les recueillir et non de l’usage des insectes qu’elle garde dans des boîtes entreposées.

 

[7]              La position de l’ARC est que les insectes sont des BUP et que le don de ceux-ci crée un gain en capital en application du paragraphe 46(1) et de l’article 54 de la LIR.

 

Analyse

 

[8]              Les articles pertinents de la LIR se lisent comme suit :

 

46(1) Lorsqu’un contribuable a disposé d’un bien à usage personnel lui appartenant (à l’exception d’un bien exclu dont il est disposé dans les circonstances visées au paragraphe 110.1(1) ou aux définitions de « total des dons de bienfaisance », « total des dons de biens culturels » ou « total des dons de biens écosensibles » au paragraphe 118.1(1)), les présomptions suivantes s’appliquent dans le cadre de la présente sous-section :

 

a) le prix de base rajusté du bien, pour le contribuable, immédiatement avant la disposition, est réputé être le plus élevé des montants suivants : 1 000 $ et le montant calculé par ailleurs comme prix de base rajusté du bien, pour le contribuable, à ce moment;

 

b) le produit de disposition du bien est réputé être le plus élevé des montants suivants : 1 000 $ et le produit de disposition du bien, calculé par ailleurs.

 

[…]

 

54  Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente sous-section.

 

[…]

 

« biens à usage personnel » Sont compris parmi les biens à usage personnel :

 

a) les biens qui appartiennent au contribuable et qui sont affectés principalement à l’usage ou à l’agrément personnels du contribuable ou à l’usage ou à l’agrément personnels d’une ou plusieurs personnes qui sont :

 

(i) le contribuable,

 

(ii) une personne liée au contribuable,

 

(iii) lorsque le contribuable est une fiducie, un bénéficiaire de cette fiducie ou toute personne liée au bénéficiaire;

 

b) toute créance du contribuable relative à la disposition de biens qui étaient réservés à son usage personnel;

 

c) tout bien du contribuable qui consiste en une option relative à l’acquisition de biens qui seraient, si le contribuable les acquérait, des biens réservés à son usage personnel.

 

Dans le cas d’une société de personnes, le terme vise également les biens de la société de personnes qui sont affectés principalement à l’usage ou à l’agrément personnels d’un ou plusieurs associés de la société de personnes ou d’une personne liée à cet associé.

 

[…]

 

248(1)  Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

[…]

 

« biens » Biens de toute nature, meubles ou immeubles, corporels ou incorporels, y compris, sans préjudice de la portée générale de ce qui précède :

 

a) les droits de quelque nature qu’ils soient, les actions ou parts;

 

b) à moins d’une intention contraire évidente, l’argent;

 

c) les avoirs forestiers;

 

d) les travaux en cours d’une entreprise qui est une profession libérale.

 

« biens à usage personnel » S’entend au sens de l’article 54.

 

[9]              L’intimée affirme que la Cour doit suivre la décision du juge en chef adjoint Bowman, tel était alors son titre, dans l’affaire Klotz c. La Reine[1]. Cette cause traite de l’appel d’un contribuable qui avait acheté des tableaux pour les donner à différentes universités. L’appelant témoignait que les tableaux étaient des BUP dans le but avoué de tirer avantage de l’alinéa 46(1)a) de la LIR. Cette disposition prévoit que le prix de base rajusté d’un BUP est égal à 1 000 $ ou au coût réel du bien, selon le montant le plus élevé. L’appelant avait payé moins de 1 000 $ pour chaque tableau, d’où l’intérêt pour lui de profiter du prix de base rajusté réputé de 1 000 $ prévu à l’alinéa 46(1)a) de la LIR.

 

[10]         Selon l’appelant dans l’affaire Klotz, la définition d’un BUP englobe tous les biens, sauf ceux qui servent à tirer un revenu d’un bien, d’une entreprise ou d’un emploi (ci‑après les « biens à revenu »). En l’absence de preuve que les tableaux aient été détenus par l’appelant afin de tirer un revenu, l’appelant a invité la Cour à conclure que les tableaux étaient des BUP.

 

[11]         L’intimée a prétendu qu’il existait trois catégories de biens, soit les biens utilisés ou affectés principalement à l’usage ou à l’agrément des contribuables, les biens à revenu et tous les autres biens. Selon l’intimée dans l’affaire Klotz, seulement les biens de la première catégorie sont des BUP. Dans ladite affaire, le juge en chef adjoint Bowman a affirmé que l’expression BUP n’est pas définie dans la LIR d’une façon exhaustive. Selon lui, la définition de BUP suggère un sens élargi en raison de l’emploi du terme « sont compris ». Selon lui également, le régime des BUP est fondé entièrement sur ce qui est personnel et ce qui est lié à une entreprise ou à une activité commerciale. Par conséquent, tout bien devrait être un BUP à moins que la preuve ne démontre que le bien est un bien à revenu.

 

[12]         Lors du congrès de 2005 de l’Association de planification fiscale et financière, on a demandé à l’ARC si celle-ci avait révisé sa position sur le sens à donner à un BUP en raison de la décision Klotz[2]. L’ARC était toujours d’avis qu’il fallait regarder l’utilisation des biens avant de faire la détermination. Le document indique que la position de l’ARC demeurait inchangée, mais qu’elle attendait la décision de la Cour d’appel fédérale dans Canada c. Nash[3]. Comme la Cour d’appel fédérale n’a pas discuté de la définition d’un BUP, on peut supposer que sa position n’a pas changé.

 

[13]         J’estime qu’il y a plusieurs termes qui sont importants pour déceler la portée de la définition d’un BUP. Le premier terme qui suscite un intérêt est « sont compris ». Comme le juge en chef adjoint Bowman l’a dit dans Klotz, ce terme n’est pas de nature exhaustive. Il est vrai que dans certains cas il permet d’élargir la définition. Toutefois, comme l’affirme la juge Lamarre dans Fortino c. Canada[4], qu’une disposition législative reçoive une interprétation stricte ou libérale sera déterminé par le but qui la sous‑tend, qu’on aura identifié à la lumière du contexte et de l’objet de la loi et de l’intention du législateur. Selon les principes dégagés par la Cour suprême du Canada dans Québec (Communauté urbaine) c. Corp. Notre‑Dame de Bon‑Secours[5], l’interprétation du terme « sont compris » doit se faire à la lumière du contexte. Malgré mes égards envers la position contraire, je ne crois pas que l’on puisse faire abstraction de tous les autres termes de la définition lors de l’analyse du terme « sont compris ».

 

[14]         En poursuivant l’analyse de la définition de BUP, les termes que l’on doit disséquer sont « principalement », « à usage » et « agrément ». Ces termes se trouvent à l’alinéa a) de la définition de BUP à l’article 54. Cette règle fut introduite pour permettre la classification des biens qui font l’objet d’un double emploi.

 

[15]         Débutons par le mot « principalement » qui est au centre de la règle classifiant les biens soumis à un double emploi. Dans Le Nouveau Petit Robert, 2008, « principalement » est défini comme « avant les autres choses, par-dessus tout ». La définition de « principal » est similaire : « qui est le plus important, le premier parmi plusieurs »  (je souligne). En langue anglaise, la LIR utilise le mot « primarily ». Le Oxford English Dictionary, troisième édition, définit ce terme par « to a great or the greatest degree; for the most part, mainly ».  Il faut donc que le bien soit affecté à l’usage ou à l’agrément du contribuable d’une manière non équivoque. Dans sa définition d’un BUP, si le législateur avait voulu qu’il n’y ait que deux types différents de biens, il aurait pu définir un BUP comme tout bien sauf les biens à revenu, comme l’affirme le juge en chef adjoint Bowman dans l’affaire Klotz. Cependant, ce n’est pas ce que le législateur a fait. Il a choisi d’utiliser l’adverbe « principalement » (« primarily » en anglais). Le législateur a donc choisi de permettre d’examiner l’utilisation du bien avant de déterminer si un bien est un BUP.

 

[16]         Dans un deuxième temps, la présence du terme « à usage », qui se trouve au début de la définition ainsi qu’à l’alinéa a), nous aide à délimiter la catégorie de biens visée par la définition, qui se lit ainsi : « […] affectés principalement à l’usage ou à l’agrément personnels du […] ». Le Nouveau Petit Robert, 2008, définit ce terme par : « destiné à être utilisé (de telle ou telle façon) ». On peut en déduire que ce terme est similaire à « utiliser ». Dans la version anglaise, le législateur a utilisé « use ». La décision Glaxo Wellcome Inc. c. Canada[6] du juge Bowman, tel était alors son titre, a porté sur la détermination du mot « use » dans la définition d’« ancien bien d’entreprise ». Cette décision fait un certain survol de la manière d’interpréter les dispositions législatives fiscales. Voici ce qu’il dit de l’utilisation du mot « use » :

 

14        Le droit au report prévu que possède l’appelante en vertu de l'article 44 dépend de l’interprétation à donner à un mot - utilisé - (used).

 

15        Pourquoi s’agit-il d’une question si difficile? Le mot « utilisé » est l’un des mots les plus communs et les plus fréquemment employés en français, comme le mot « use » en anglais. De fait, la définition du verbe « use » (utiliser) qui est donnée dans le New Shorter Oxford Dictionary of the English Language est : [TRADUCTION] « se servir d’(une chose), spécialement pour une fin particulière ou dans un but particulier; employer, en tirer parti [...]; exploiter, cultiver, occuper (un bien-fonds, une terre, etc.). » Le nom « use » (utilisation) est défini comme suit : [TRADUCTION] « acte d’utiliser, fait d’être utilisé. » Compte tenu de ce cercle vicieux, nous n’en savons pas plus qu’auparavant. De même, le mot « utiliser » (use) est défini comme suit dans le Petit Robert 1 dictionnaire de la langue française : « rendre utile, faire servir à une fin précise [...] employer. » Je n’aurais jamais cru que le règlement de cette question apparemment simple (mais prêtant à confusion) me forcerait à porter mon attention sur la vaste gamme de principes d’interprétation de la loi qui sont régulièrement énoncés par les tribunaux.

 

[17]         Après avoir fait une analyse des principes d’interprétation, il ajoute ces commentaires au sujet du mot « use » (utilisé) :

 

20        […] À moins qu’un principe d’interprétation ne m’oblige à attribuer un sens plus large au mot « utilisé », ce mot laisse entendre l’utilisation réelle à une certaine fin, et non sa possession en vue d’une utilisation future. Par « utilisé principalement en vue de tirer un revenu d’une entreprise », on laisse à première vue entendre que le terrain doit servir à une fin productive dans le cadre de l’exploitation de l’entreprise[7].

[Je souligne.]

 

[18]         Le dernier terme qui doit être examiné est « agrément », qui se trouve à l’alinéa a) de la définition. Dans la version anglaise, le législateur a utilisé l’expression « enjoyment ». Dans Le Nouveau Petit Robert, 2008, ce terme est défini comme « qualité d’une chose, d’un être, qui les rend agréables »  alors que dans le Oxford English Dictionary, deuxième édition, le terme « enjoyment » est défini comme « the action or state of deriving gratification from an object. Also, in weaker sense, the possession and use of something which affords pleasure or advantage ». À mon avis, la jonction des termes « principalement » et « à l’usage »  devrait nous faire comprendre qu’il faut interpréter l’expression comme signifiant une utilisation principale pour une fin précise. Il faut que celle-ci soit réelle et dominante.

 

[19]         En l’espèce, l’appelante a déclaré qu’elle mettait les insectes en vrac dans des boîtes d’entreposage. Elle ne les préparait que pour la donation. Il n’y avait pas d’usage réel. L’intimée n’a pas contredit cette preuve. M. Gagnon a admis qu’il ignorait l’utilisation que l’appelante faisait des insectes. Il semble avoir confondu les activités de l’appelante avec l’usage qu’elle aurait pu faire des insectes. Peut-on dire, après les témoignages de l’appelante et de M. Gagnon, que l’appelante a eu l’agrément des insectes? Selon la version anglaise, il faut la possession et l’utilisation de quelque chose.

 

[20]         De toute manière, je ne dois pas trancher cette question pour décider du sort de l’appel. Si j’accepte que les insectes soient des BUP comme l’allègue l’intimée, je dois néanmoins accueillir l’appel de l’appelante. En vertu de l’alinéa 46(1)a) de la LIR, si le prix de base rajusté d’un BUP est de moins de 1 000 $, le prix de base rajusté est réputé être de 1 000 $. Si le produit de disposition du BUP est inférieur à 1 000 $, il est réputé être de 1 000 $. En vertu de ces deux règles, il peut y avoir un gain en capital seulement si le produit de disposition est supérieur à 1 000 $ et le prix de base rajusté du bien est limité à 1 000 $. Comment ces dispositions doivent‑elles s’appliquer aux spécimens d’insectes donnés par l’appelante à l’Université Laval? La réponse se trouve au paragraphe 46(3). Cette disposition est applicable dans le cas où un certain nombre de BUP qui feraient normalement l’objet d’une seule disposition font l’objet de plus d’une disposition à la même personne, et où ces biens ont ensemble une juste valeur marchande supérieure à 1 000 $. Dans ce cas, les biens sont considérés comme un seul BUP et le coût réputé de 1 000 $ est applicable à l’ensemble des biens et non pas à chacun des biens constituant le tout. La LIR dit « biens qui feraient normalement l’objet d’une seule disposition ».  La version anglaise de la disposition utilise le mot « set » au lieu de l’expression « biens qui feraient normalement l’objet d’une seule disposition ». Dans le Dictionary of Canadian Law, le mot « set » est défini comme suit : « A number of articles of the same general character ordinarily on sale together or intended to be used together . . . ».  Selon cette définition, une paire de boucles d’oreille ou une paire de souliers serait un seul bien. Un ensemble de vaisselle serait traité comme un seul BUP.

 

[21]         L’intimée prétend que l’objet des dons doit être considéré comme un seul BUP, puisque l’appelante et l’Université Laval ont choisi de définir lesdits dons comme une « collection d’insectes » au reçu pour don de bienfaisance émis à l’appelante. On ne doit pas confondre la signification du terme « collection » avec celle de l’expression « biens qui feraient normalement l’objet d’une seule disposition ». Le rédacteur du Canada Tax Service[8] fait la mise en garde suivante à ce sujet :

 

Properties Comprising a Set

 

. . .

 

Whether a number of personal-use properties would have ordinarily been disposed of in one disposition as a set is a question of fact. A set is generally composed of two or more articles having something in common and having a value as a set which is greater than the sum total of the values of the individual pieces making up the set. In some cases, the pieces making up a set match or are identical, eg a set of vases or of dining-room chairs. In other cases, the pieces making up a set are not identical, but are complementary, eg a rare chess set. The words “set” and “collection” are clearly not synonymous: accordingly, a collection of paintings or of stamps would not normally constitute a set of paintings or of stamps.

 

. . .

 

[TRADUCTION]

 

Biens constituant un tout

 

[…]

 

La question de savoir si un certain nombre de biens à usage personnel feraient normalement l’objet d’une seule disposition est une question de fait. Deux objets ou plus qui sont normalement vendus comme un tout ont habituellement une caractéristique commune et, ensemble, ont habituellement une valeur supérieure à la somme de leur valeur individuelle. Parfois, les objets qui seraient normalement vendus comme un tout sont complémentaires ou identiques, par exemple un ensemble de vases ou un ensemble de chaises de salle à manger. Dans d’autres cas, les objets ne sont pas identiques, mais se complètent, par exemple les pièces d’un jeu d’échecs rare. Un « tout » n’est manifestement pas la même chose qu'une « collection »; ainsi, une collection de tableaux ou de timbres-poste ne constitue habituellement pas des biens qui seraient normalement vendus comme un tout.

 

[…]

[Je souligne.]

 

[22]         Dans la présente cause, la preuve démontre que les 2 158 insectes donnés à la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval ont été évalués de façon individuelle. La grille d’évaluation utilisée par l’évaluateur tient compte de la préparation, de l’humidification, de l’étalage, de l’épinglage et de l’identification pour attribuer une valeur à chaque spécimen. La preuve a également démontré que les 2 158 insectes donnés proviennent d’au moins 46 pays différents, représentant au total au moins 268 espèces diverses. D’après le témoignage de l’appelante, les insectes ont au moins six ou sept utilités différentes. Les insectes donnés sont donc considérés comme des biens distincts les uns des autres et sont traités comme tels. Ils ne sont pas rattachés les uns aux autres. Ils ne forment pas un tout ou un ensemble indissociable. La grille d’évaluation démontre qu’aucun des insectes n’avait une valeur supérieure à 1 000 $. Par conséquent, l’appelante ne réaliserait pas un gain en capital résultant de la disposition d’un BUP si j’acceptais l’interprétation défendue par l’intimée dans cette cause.

 

[23]         Pour tous ces motifs, l’appel est accueilli et la nouvelle cotisation est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de janvier 2011.

 

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 47

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2010-1612(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              DANIELLE PLAMONDON c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Les 17 septembre et 10 décembre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Robert J. Hogan

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 26 janvier 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelante :

L'appelante elle-même

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Marie-France Dompierre

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelante :

 

                     Nom :                           

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1] 2004 CCI 147, conf. par 2005 CAF 158.

[2] Voir le congrès de 2005 de l’APFF, conférence 2005-0141261C6, sens de l’expression « bien à usage personnel » et impact de la décision Klotz.

[3] 2005 CAF 386.

[4] [1996] A.C.I. no 1457 (QL), conf. par [1999] A.C.F. no 1964 (QL).

[5] [1994] 3 R.C.S. 3.

[6] [1996] A.C.I. no 6 (QL).

[7] Ibid.

[8] Canada Tax Service – McCarthy Tétrault Analysis, 46 – Personal-Use Property (TaxnetPRO).

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