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Dossier : 2007-3661(IT)G

 

ENTRE :

 

WILFRED MacISAAC,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Tim Speakman, 2007-3663(IT)G

les 10 et 11 juin et le 8 décembre 2009 à Halifax (Nouvelle-Écosse),

 

Devant l’honorable juge T. E. Margeson

 

 Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Bruce S. Russell, c.r.

 

Avocats de l’intimée :

Me Darlene M. Lamey

Me Toks C. Omisade (10 et 11 juin 2009 seulement)

Me Jill Chisholm (8 décembre 2009 seulement)

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour l’année d’imposition 2005 de l’appelant est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation pour le motif que l’appelant remplit les conditions d’obtention du crédit d’impôt pour emploi à l’étranger (CIEE) conformément à l’article 122.3 de la Loi au titre du revenu gagné chez son employeur, Offshore Recruiting Services Inc., pendant l’année d’imposition 2005.

 

L’appelant a droit à ses dépens pour cette action, lesquels seront taxés sur la base d’un mémoire de frais pour les appelants, Wilfred MacIsaac et Tim Speakman.

 

         Signé à New Glasgow (Nouvelle-Écosse), le 19 août 2010.

 

 

 

« T. E. Margeson »

Le juge Margeson

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de janvier 2011.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 

 


 

 

Dossier : 2007-3663(IT)G

 

ENTRE :

 

TIM SPEAKMAN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Wilfred MacIsaac, 2007-3661(IT)G

les 10 et 11 juin et le 8 décembre 2009 à Halifax (Nouvelle-Écosse),

 

Devant l’honorable juge T. E. Margeson

 

 Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Bruce S. Russell, c.r.

 

Avocats de l’intimée :

Me Darlene M. Lamey

Me Toks C. Omisade (10 et 11 juin 2009 seulement)

Me Jill Chisholm (8 décembre 2009 seulement)

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour l’année d’imposition 2005 de l’appelant est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation pour le motif que l’appelant remplit les conditions d’obtention du crédit d’impôt pour emploi à l’étranger (CIEE) conformément à l’article 122.3 de la Loi au titre du revenu gagné chez son employeur, Offshore Recruiting Services Inc., pendant l’année d’imposition 2005.

 

L’appelant a droit à ses dépens pour cette action, lesquels seront taxés sur la base d’un mémoire de frais pour les appelants, Wilfred MacIsaac et Tim Speakman.

 

         Signé à New Glasgow (Nouvelle-Écosse), le 19 août 2010.

 

 

 

« T. E. Margeson »

Le juge Margeson

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de janvier 2011.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

Référence : 2010 CCI 436

Date : 20100819

Dossier : 2007-3661(IT)G

ENTRE :

WILFRED MacISAAC,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

 

Dossier : 2007-3663(IT)G

ET ENTRE :

 

TIM SPEAKMAN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Margeson

 

[1]              Les appelants interjettent appel de la décision du ministre du Revenu national (le « ministre ») de rejeter leurs demandes de crédit d’impôt pour emploi à l’étranger (« CIEE ») au titre du revenu gagné chez leur employeur, Offshore Recruiting Services Inc. (« ORSI »), pendant l’année d’imposition 2005.

 

Preuve

 

[2]              Adrian Coady était le président de la société ORSI. Il a fréquenté l’Université St. Francis Xavier et l’Université de Toronto. Depuis, il se consacre à l’industrie pétrolière et gazière, dans le cadre d’opérations terrestres et non terrestres. Il a été gestionnaire du personnel chez Harvey Offshore Services Inc. à St. John’s (Terre‑Neuve) jusqu’en 1997, année au cours de laquelle il a fondé la société ORSI. Harvey Offshore Services Inc. fournissait du personnel aux opérations de forage. L’essentiel du travail de M. Coady était de nature opérationnelle.

 

[3]              M. Coady est capable de « dénicher » des clients et de trouver du personnel compétent pour de nombreuses entreprises en exploitation au large des côtes. La société ORSI se trouve à St. John’s (Terre-Neuve) et compte six membres du personnel administratif (paie), deux employés chargés du recrutement à St. John’s et un employé à Halifax. En 2008, la société ORSI avait un budget de 19 000 000 $ en salaires et en autres frais. Elle comptait de nombreux employés dans le monde entier : 200 en 2009, 272 en 2008 et 200 en 2005.

 

[4]              M. Coady désirait poursuivre l’exploitation de l’entreprise principale relativement à laquelle il avait été employé par la société Harvey Offshore Services Inc. La société ORSI fournit du personnel opérationnel primaire à des installations de forage, à des navires et à des entreprises étrangères. Elle comptait vingt clients au Canada et à l’étranger. La plupart des clients ont un lien contractuel avec la société. La société ORSI établit des modalités de contrat et des échelles de rémunération pour divers niveaux de compétence. Elle tente de convaincre ses clients de faire appel à ses services. Il s’agit dans une large mesure d’un exercice de relations publiques.

 

[5]              Elle tente de décrocher un contrat avec les clients, puis trouve le personnel nécessaire aux fins du contrat.

 

[6]              La société ORSI établit le profil de l’employé pour le client, et, une fois l’employé accepté, elle traite son dossier pour l’emploi, notamment en effectuant l’examen médical et le dépistage de drogues, avant de le recruter et de procéder à son affectation. La société ORSI doit établir ses [traduction] « certificats de compétence ». Elle dispose d’une matrice de formation qui détermine où se situe l’employé éventuel par rapport aux besoins.

 

[7]              La société ORSI achète le billet d’avion de la personne pour que celle‑ci aille rencontrer un agent, réserve son hôtel et l’amène à l’hélicoptère afin qu’elle se rende au navire. Chaque personne doit apporter ses documents, y compris son passeport et ses certificats de compétence. L’employé obtient ensuite son affectation, est logé et est envoyé au travail, au Canada et à l’étranger.

 

[8]              En 2005, la société ORSI était très présente au Canada et ailleurs dans le monde, comme dans le golfe du Mexique, dans la mer du Nord, en Afrique occidentale, au Brésil et en Mauritanie. La société ORSI travaille essentiellement pour de gros clients qui comptent de 20 à 30 employés sur un même site. La société ORSI fournit parfois tout l’équipage d’un navire. À la suite d’une demande du client, la société ORSI évalue la configuration et les besoins du navire. Il s’agit d’un processus interactif.

 

[9]              La société ORSI a la responsabilité des employés tout au long du processus, mais elle ne dirige pas leur travail quotidien. Si l’employé ne fait pas l’affaire, il doit être remplacé.

 

[10]         Les feuilles de présence sont préparées par le personnel de la société ORSI qui tient des registres des heures de travail et elles sont approuvées par le capitaine ou par une autre personne ayant le pouvoir de les approuver. Les feuilles de présence sont envoyées aux spécialistes de la paie de la société ORSI. Celle-ci paie alors les employés.

 

[11]         Lorsqu’il y a des changements d’équipage, la société ORSI envoie des listes de débarquement et d’embarquement détaillées. Il lui incombe d’assurer le bien-être des employés. La société ORSI ou l’employé communique avec la famille des employés. La société ORSI se charge du retour des employés blessés ou tués. Outre les superviseurs qui travaillent sur le navire, la société ORSI est responsable des employés.

 

[12]         Pendant la durée du contrat, les employés de la société ORSI sur le site ou à St. John’s ou Halifax règlent les questions en litige en personne ou par téléphone.

 

[13]         La société ORSI offre un bon régime d’avantages sociaux à tous les employés dès l’embauche.

 

[14]         Une fois l’employé embauché, la société ORSI applique un processus standard d’évaluation individuelle. Il s’agit d’un processus interactif. Des employés de la société ORSI se rendent sur le navire ou sur la plateforme pour effectuer l’évaluation, sauf s’il s’y trouve un seul employé.

 

[15]         Ces évaluations peuvent être menées par la société ORSI ou par autrui. Il y a des rapports continus avec les employés sur les sites. La société ORSI assure le maintien des certificats d’agrément de sécurité pour ses employés.

 

[16]         Les pièces A-2 à A-5 ont été admises sur consentement. Elles comprenaient une politique sur les prestations de la compagnie d’assurance-vie Sun Life. Il y a également un régime d’assurance responsabilité des employés offert par Lombard Canada Limited qui protège les clients de la société ORSI contre les gestes posés par les employés de celle‑ci. La pièce A-3 était un contrat de client pour Wilfred MacIsaac et M-1 Drilling Services Inc. Ce contrat n’a peut-être jamais été signé.

 

[17]         Dans tous les contrats, les clients ont besoin d’une assurance responsabilité et d’une assurance pour les employés. La pièce A-2, onglet 1, était une autre convention non signée. La pièce A-2, onglet 5, était un contrat de membre de l’équipage conclu avec Tim Speakman. Il travaillait pour la société ORSI en Hollande et dans le golfe du Mexique. La pièce A-3, onglet 2, était un contrat de membre de l’équipage conclu avec Wilfred MacIsaac. Il s’est fait refuser la déduction par le ministre même s’il fournissait des services à l’étranger. Il était chargé de l’exploitation en Guinée équatoriale.

 

[18]         Le témoin a affirmé que la société ORSI n’était pas une simple agence de placement. Une agence de placement offrirait un [traduction] « service ponctuel seulement ». Ce type d’agence trouve une personne pour le client, fournit cette personne au client et c’est tout. La société ORSI fait beaucoup plus que cela. Elle trouve, interviewe et surveille l’employé, et traite son dossier. Elle s’occupe du dépistage des drogues, des contrats avec les membres de l’équipage, offre un régime d’avantages sociaux, fait de la logistique, gère la paie, établit les liens à bord du navire ou sur la plateforme et a l’entière responsabilité de l’employé 24 heures sur 24. Il lui incombe de veiller au bien‑être de l’employé.

 

[19]         Dans un cas, la société ORSI a agi comme une agence de placement et a reçu une commission d’intermédiaire. C’est tout ce qu’a fait la société ORSI. La personne n’était pas un employé de la société ORSI et n’a pas reçu de prestations ou d’avantages de la société ORSI. Les services d’agence de placement ne représentaient pas l’entreprise principale de la société ORSI.

 

[20]         La pièce A-6 a été admise sur consentement. Il s’agissait d’une entente visant à fournir du personnel qui est intervenue entre la société ORSI et Dutch Onshore Offshore Recruiting (« DOOR ») en date du 1er janvier 2003. La pièce A-4, onglet 4, était une facture pour Wilfred MacIsaac pour 2005. D’autres factures ont également été identifiées aux onglets 7 à 27 de la pièce A-4.

 

[21]         La société ORSI était tenue par contrat de payer les factures. Les modalités étaient identiques à celles qui se trouvaient dans l’entente non signée. En décembre 2005, M. MacIsaac a cessé d’être un employé de la société ORSI. Les contrats de membre d’équipage sont généralement signés au Canada, mais il arrive qu’exceptionnellement, ils soient signés à l’étranger.

 

[22]         En contre-interrogatoire, M. Coady a confirmé qu’il travaillait surtout au bureau de St. John’s, comme le font les deux spécialistes de la paie et les deux spécialistes des ressources humaines. Le seul autre bureau se trouve à Dartmouth (Nouvelle‑Écosse).

 

[23]         M. Coady est président de la société ORSI depuis sa création et gère et dirige l’entreprise. Il travaille surtout à Terre-Neuve, mais voyage également. La société ORSI compte 200 employés. Elle a des contrats avec des propriétaires de navire et leur fournit des employés opérationnels spécialisés pour leurs navires et leurs opérations. Ces employés contribuent à répondre aux besoins du client. M. Coady fait de la recherche sur l’identité des propriétaires de navire, sur les tâches qu’ils accomplissent et sur leurs besoins.

 

[24]         M. Coady signe les contrats avec les clients, quoique l’un de ses spécialistes puisse approuver les contrats de membres de l’équipage. Les employés prennent leur service sur le navire ou la structure. Il est rare que les employés ne soient pas Canadiens.

 

[25]         La pièce A-3, onglet 2, renfermait la convention conclue avec M-1 Drilling Fluids. Elle était en vigueur pour 2005, mais M. MacIsaac recevait 600 $ par jour et avait quatre jours de déplacement plutôt que trois. La pièce A-3, onglet 1, était une entente en vue de la fourniture de personnel. La société ORSI exerce la fonction et fournit le transport. La pièce A-6 était en vigueur pour l’année 2005 et visait M. Speakman, qui était hydrographe-arpenteur. Chaque employé avait un contrat de membre de l’équipage similaire à celui de la pièce A-3, onglet 2, conclu entre la société ORSI et Wilfred MacIsaac.

 

[26]         M. MacIsaac était un citoyen canadien qui résidait au Canada et dont le contrat avait été signé au Canada.

 

[27]         Le travailleur est assujetti à la hiérarchie en place sur la plateforme et aux termes de la clause 3.02 du contrat conclu avec la société M-1 Drilling Fluids, celle-ci pourrait mettre fin à son emploi.

 

[28]         M. MacIsaac approuvait ses propres feuilles de présence et envoyait l’information à la société ORSI, qui préparait sa paie en s’appuyant sur les feuilles de présence. La société M-1 Drilling Fluids acceptait lesdites feuilles de présence et acquittait la facture établie par la société ORSI. Il s’agissait d’un écart par rapport au contrat, mais il a refusé de reconnaître que la société ORSI renonçait au contrôle exercé sur le travailleur ou son travail.

 

[29]         La pièce A-1, onglet 5, avait trait à Tim Speakman. Elle était signée par lui et par la société ORSI. M. Speakman était un arpenteur du milieu marin. Cette catégorie professionnelle a été ajoutée après que le profil a été dressé.

 

[30]         M. Speakman avait beaucoup d’expérience et relevait probablement d’un gestionnaire tiers qui occupait un rôle important dans la hiérarchie. Il ne faisait pas rapport quotidiennement à la société ORSI et n’était pas supervisé directement par celle-ci. Il présentait des feuilles de présence qui étaient approuvées par le gestionnaire tiers. Dans les cas de M. Speakman et de M. MacIsaac, la société ORSI n’achetait pas leurs billets ni ne faisait leurs réservations. Dans tous les autres cas, la société ORSI achète les billets ou se les fait rembourser.

 

[31]         La société ORSI a un contrat de fourniture de personnel qui a évolué au fil du temps. Toutes les recrues ont des attestations de formation, de qualifications et de compétences différentes.

 

[32]         L’« ingénieur des boues » et l’« ingénieur des fluides » suivent une formation « à l’interne ». Ils doivent répondre aux besoins de la société cliente. Les employés des ressources humaines se familiarisent souvent avec les autres administrations. La société ORSI fait preuve de « diligence raisonnable » dans ses recherches visant à trouver du personnel. Quand la société ORSI donne de la formation à un employé, le coût de cette formation lui est parfois remboursé.

 

[33]         Quand un employé est affecté à un site, il se fait embaucher sur le navire conformément au rôle d’équipage. Il relève ensuite d’un service. La société ORSI peut contribuer à la relation entre le superviseur et le travailleur.

 

[34]         Le travail ne peut jamais être garanti. La société ORSI a une obligation de moyens et fait preuve de « diligence raisonnable ». Il n’existe pas de liste de seuils dans le contrat. Les dispositions du contrat sur le personnel renferment l’intégralité de l’entente.

 

[35]         En plus de fournir le personnel, la société ORSI s’occupe de la paie, des rapports sur le personnel, des régimes d’assurance et des régimes d’avantages sociaux.

 

[36]         La facture relative à la paie est créée à St. John’s et une copie papier est envoyée au client à Houston. Les fonds sont déposés directement dans le compte bancaire du fournisseur.

 

[37]         La société ORSI est un entrepreneur en main-d’œuvre canadien et fournit du personnel à l’industrie pétrolière et gazière par l’intermédiaire de sa section des ressources humaines. La concurrence et la demande dans le domaine des travailleurs qualifiés sont considérables. La société ORSI consacre beaucoup d’efforts et d’expérience à la formation du personnel. Elle commercialise son entreprise sur un vaste secteur et consacre beaucoup d’efforts à conserver ses clients. Elle fait concorder les talents disponibles avec les besoins des clients.

 

[38]         La société ORSI soutient les employés à l’extérieur du Canada en offrant des prestations d’assurance si le travailleur est blessé et du soutien en cas de deuil. Elle fait de la promotion pour constituer une base de clients au moyen de blogues, de contacts personnels, d’activités commerciales continues, de visites à des clients éventuels, d’auto-promotion au moyen d’un profil actualisé, du bouche-à-oreille et du savoir corporatif. Ses clients se trouvent au Canada et à l’étranger et sont habituellement dans des lieux éloignés. Elle a une base de données séparée en catégories professionnelles et se sert des services du courrier électronique, du téléphone et de la télécopie.

 

[39]         Les employés des ressources humaines de la société ORSI sont des spécialistes d’après leur titre. Il s’agit d’un titre professionnel. Ils possèdent des années d’expérience dans ce genre de travail et en logistique.

 

[40]         La société ORSI a pu se décrire comme fournisseur de services auparavant, mail il s’agit d’une question de sémantique et M. Coady est maintenant plus prudent.

 

[41]         M. Coady n’a jamais utilisé ou autorisé l’expression « services de placement » en faisant référence au travail de la société ORSI.

 

[42]         M. Coady a confirmé que le cabinet d’avocats Felesky Flynn était autorisé à agir pour la société ORSI dans un appel en matière de TPS dans le cadre duquel elle était décrite comme fournisseur de services de personnel et de ressources humaines connexes et comme « services de placement », mais il a affirmé que ce n’était que des chinoiseries.

 

[43]         La société ORSI prépare les documents pour le crédit d’impôt pour emploi à l’étranger et une lettre type à l’intention de l’ARC au sujet des employés qui demandent le crédit, mais elle ne se sert jamais du crédit pour attirer des employés.

 

[44]         Elle dresse le profil d’un employé pour un client. Elle donne les antécédents professionnels et la formation des gens dans le cadre du processus d’acceptation entre la société ORSI et le client. Quand le client accepte le travailleur, le dossier de l’employé est traité jusqu’à la mobilisation. Une fois les vérifications préalables effectuées, la société ORSI lui fait signer un contrat. Généralement, elle aide le travailleur à se rendre au lieu de travail. Le client autorise la première mobilisation et acquitte les frais. En 2005, onze réclamations ont été rejetées.

 

[45]         Lors de son réinterrogatoire, M. Coady a affirmé qu’en 2005, M. Speakman était un employé de la société ORSI et non un employé de la DOOR. Il n’y avait pas de différence au niveau de la portée entre « fournir les services » et fournir du « personnel qualifié et compétent ».

 

[46]         M. Coady a pris part à la rédaction de la pièce A-3 et a affirmé qu’il n’y a pas eu de différend avec les clients au sujet de ce qui était fourni.

 

[47]         Timothy Edward Speakman travaille chez la société ORSI depuis 2005. Il a fait ses études à Ryerson et y a obtenu un baccalauréat en technologie. Il a également obtenu une maîtrise en génie de l’Université de Calgary. Il a reçu le crédit d’impôt en question de 1991 à 2004 et ce crédit lui a été refusé en 2005.

 

[48]         Il a signé la pièce A-1, onglet 5, qui était un contrat conclu avec la société ORSI. Ce contrat prévoyait qu’il ferait un travail sur une base de consentement mutuel. Il décrivait les avantages dont il bénéficierait. Il travaillerait avec la DOOR et en de nombreux endroits différents. Il n’a jamais vu la pièce A-6 avant les interrogatoires préalables dans son dossier. Il s’agissait du contrat de la société ORSI prévoyant la fourniture de personnel à la DOOR. Il était un employé de la société ORSI et non de la DOOR et avait conclu un contrat avec la société ORSI. Il facturait la société ORSI à chaque période de paie et celle‑ci le payait.

 

[49]         Il a identifié la feuille de présence de la société ORSI comme pièce A-1, onglet 2 et a dit qu’il l’avait signée. La feuille de présence avait été préparée à l’extérieur du Canada. Il envoyait également ses notes de frais à la société ORSI tous les mois. Il était en contact avec la société ORSI pendant qu’il était en mer. La société ORSI lui fournissait une assurance-maladie collective et des services de paie. Il travaillait sur un navire et la société ORSI s’est efforcée, comme tout autre employeur l’aurait fait, de soutenir ses employés en mer.

 

[50]         En contre-interrogatoire, il a reconnu qu’il n’avait jamais reçu de crédit d’impôt pour emploi à l’étranger pendant qu’il était au service de la société ORSI. Il a qualifié la DOOR d’agence de personnel. La société ORSI l’a dirigé vers la société DOOR, qui l’a dirigé vers son travail chez GeoLab. Les services qu’il a fournis à la société DOOR étaient les mêmes que ceux que DOOR offrait à GeoLab.

 

[51]         Il a établi que le contrat de membre d’équipage était la pièce A-2, onglet 5. Une fois le contrat signé, il a été mobilisé.

 

[52]         Il ignorait s’il avait examiné l’avis d’opposition avant le dépôt de celui-ci. Il ne l’a pas signé.

 

[53]         Il devait inspecter un oléoduc pour DOOR et neuf personnes faisaient partie de l’équipe, mais une seule personne était un employé de GeoLab. Toutes les autres provenaient d’agences. Il ignorait tout des relations d’affaires entre DOOR et GeoLab.

 

[54]         Son taux de rémunération provenait de la société ORSI. Il soumettait des fiches de paye une fois par mois, sauf en une occasion, alors qu’il travaillait à deux projets.

 

[55]         Il envoyait une feuille de présence pour la société ORSI et une feuille de présence pour DOOR.

 

[56]         Il communiquait avec la société ORSI par courrier électronique. Il ne recevait pas de visites de la société ORSI sur le lieu de travail. Sa paie était déposée automatiquement dans son compte bancaire à Vancouver.

 

[57]         GeoLab affrétait le navire et fournissait la nourriture et l’hébergement. Il transportait son propre matériel de sécurité, mais GeoLab l’aurait fourni s’il en avait eu besoin.

 

[58]         Il a accepté que son dossier soit porté en appel par la société ORSI.

 

[59]         Lors de son réinterrogatoire, il a dit que la société ORSI était davantage qu’une agence de recrutement de personnel. Cette société lui offrait des services de paie et assumait la responsabilité de sa paie.

 

[60]         Wilfred Charles MacIsaac était un ingénieur des fluides de forage employé par la société ORSI. Il devait maintenir les fluides à un niveau précis dans la lubrification des installations de forage en mer. Il avait suivi des cours élaborés par l’industrie pétrolière en prévention des éruptions, ainsi que des cours de survie et de premiers soins.

 

[61]         En 1978, il a suivi des cours de sciences politiques à l’Université St. Francis Xavier. La même année, il a commencé à travailler dans le secteur pétrolier en Alberta et a été formé par son employeur. Il est retourné en Nouvelle-Écosse en 1980 pour travailler dans le secteur pétrolier à l’extérieur des côtes. Il a travaillé dans différentes parties du monde.

 

[62]         En 2005, il travaillait pour la société ORSI à titre d’ingénieur des fluides de forage en Afrique et en Guinée équatoriale. Le travail était fait pour Exxon Mobil chaque jour. Il travaillait 28 jours, douze heures par jour, puis avait 28 jours de congé. Il retournait à Antigonish, en Nouvelle-Écosse.

 

[63]         En 2005, il a rempli sa déclaration de revenus et a demandé le crédit d’impôt qui est en litige en l’espèce. Il avait obtenu le crédit depuis 2001. Cette année-là, il a établi une relation de travail avec la société ORSI à titre d’employé. Il a signé le nouveau contrat de membre d’équipage avec la société ORSI (onglet 2 de la pièce A‑3). C’était un contrat entre lui et la société ORSI, aux termes duquel l’employeur, la société ORSI, l’employait à titre d’employé. La société ORSI lui versait son salaire.

 

[64]         Après ses 28 jours de travail sur le navire, il envoyait ses heures par courrier électronique à la société ORSI et l’informait de ses jours de déplacement. Il n’avait à obtenir l’approbation de personne d’autre que la société ORSI. Il était payé tous les quatorze jours par dépôt direct dans son compte.

 

[65]         Il a désigné le guide de la société ORSI à l’onglet 1 de la pièce A-4. Il l’avait reçu de la société ORSI. Il a reçu de la société ORSI les prestations qui sont énoncées à l’onglet 2, clause 2.01, de la pièce A-3.

 

[66]         Il a communiqué avec la société ORSI à de nombreuses reprises. Elle lui a envoyé de la paperasse et il l’a renvoyée après l’avoir remplie. S’il devait y avoir des problèmes, il s’attendait à ce que la société ORSI s’adresse aux exploitants de plateforme et règle les problèmes.

 

[67]         En contre-interrogatoire, il a affirmé qu’il avait travaillé pour des sociétés autres que la société ORSI. Il aimait les indemnités en cas de maladie et l’assurance responsabilité que lui procurait la société ORSI.

 

[68]         La société ORSI n’a pas eu de problèmes à régler concernant Mobile J et lui en 2005. Il s’est servi de M-1 Drilling Fluids pour remplir ses rapports chaque jour. Il était en contact quotidiennement avec Mobile J, l’exploitant du navire, au sujet des fluides. Il n’avait pas à faire rapport de ces questions à la société ORSI.

 

[69]         M-1 Drilling Fluids devait approuver les feuilles de présence.

 

[70]         On lui a dit qu’en 2005, la société ORSI s’est opposée à une cotisation de TPS et que, dans les documents d’appel, il était mentionné que la société ORSI était une agence de placement. Il ignorait l’opposition et cet énoncé. L’appel initial en l’espèce était signé par un employé de la société ORSI. Il a convenu que l’appel en l’espèce avait été lancé par la société ORSI et il a autorisé un certain M. Dawe à former l’appel en son nom. Il travaillait avec M-1 Drilling Fluids, qui fournissait des fonds pour Exxon Mobil.

 

[71]         En 2005, la société ORSI lui a fourni un emploi sur une autre plateforme. Le forage était effectué par Pride.

 

[72]         Ses contacts avec la société ORSI étaient faits par courrier électronique à St. John’s. Il a signé son contrat à la maison.

 

[73]         Il avait vu la convention prévoyant la fourniture de personnel, à la pièce R-1, onglet 1, entre la société ORSI et M-1 Drilling Fluids. Il envoyait ses feuilles de présence à la société ORSI et l’argent était versé dans son compte à Antigonish. Il recevait des talons de chèque de paye comme ceux qui se trouvent à la pièce A-4, onglet 5. On lui a montré les factures de la société ORSI à M-1 Drilling Fluids, mais il ne les avait jamais vues. Le dépôt direct dans son compte bancaire à Antigonish, en Nouvelle-Écosse, était fait à partir de la société ORSI à St. John’s (Terre‑Neuve), pour toute l’année 2005.

 

[74]         Il a été renvoyé à l’interrogatoire préalable au cours duquel il avait affirmé que la société ORSI assurait la logistique et fournissait de la main-d’œuvre à ses clients. Il a convenu qu’il avait fait cette déclaration. Il a également convenu avoir dit que la société ORSI traitait avec des sociétés et des entrepreneurs pétroliers étrangers en son nom et lui offrait des soins de santé alors qu’il n’avait pas un tel avantage auparavant. La société ORSI offrait également une structure et l’« aidait à joindre les deux bouts ».

 

[75]         Il ne participait pas aux contrats conclus entre la société ORSI et les sociétés pétrolières et de forage. Il ne partageait pas les bénéfices avec la société ORSI. Il assistait à des réunions avec la société ORSI concernant les opérations ou les plateformes liées à son travail. Il devait se conformer aux règles de la plateforme comme tous les autres travailleurs. Il n’a pas pris part au contrat entre la société ORSI et Pride. Il a exercé des fonctions similaires sur des plateformes en Angola, mais n’a pas participé aux négociations concernant le projet.

 

[76]         Il relevait d’un représentant de la société Exxon Mobil sur la plateforme. Il recevait son salaire et se faisait rembourser ses frais et présumait que cet argent provenait de Haliburton.

 

[77]         Il a examiné les documents du ministre et connaissait la position de la société ORSI et celle du ministre.

 

[78]         Il a recruté la société ORSI et celle-ci lui a trouvé un emploi dans le secteur pétrolier. La société ORSI s’est chargée de la logistique. La société M-1 Drilling Fluids a acquitté la majeure partie du tarif aérien.

 

[79]         En 2005, toutes ses transactions avec la société ORSI étaient faites par voie électronique et personne ne lui rendait visite. Ses tâches quotidiennes étaient déterminées en collaboration avec M‑1 Drilling Fluids. S’il éprouvait des difficultés avec son travail sur la plateforme, l’exploitant de la plateforme s’en chargeait. L’exploitant pouvait lui demander de travailler davantage d’heures. Exxon Mobil avait le contrôle de la plateforme et M-1 Drilling Fluids exerçait le contrôle des fluides.

 

[80]         Il n’était pas au courant d’impôts qui étaient versés en son nom à des gouvernements étrangers.

 

[81]         Lors de son réinterrogatoire, il a affirmé que M-1 Drilling Fluids pouvait également le congédier. La société ORSI aurait aussi pu le licencier en tout temps. Toutes les réunions auxquelles il a pris part avec la société ORSI avaient trait au travail.

 

Arguments pour le compte des appelants

 

[82]         Dans une argumentation écrite exhaustive et détaillée, l’avocat des appelants s’est dit d’avis que la société ORSI avait la responsabilité de ses employés tout au long du processus de travail, même si elle ne dirigeait pas habituellement leur travail au quotidien. Elle était chargée de diriger le service de la paie pour ces employés et s’occupait de la logistique pour les amener au travail et les ramener à la maison.

 

[83]         La société ORSI s’occupe de ses employés lorsque surviennent des accidents ou des incidents. Elle participe à l’évaluation des travailleurs et à la mise à jour de leurs certificats et de leurs accréditations.

 

[84]         La société ORSI offre une assurance responsabilité des employés qui peut atteindre 8 000 000 $ et qui couvre certains événements, afin de se protéger à titre d’employeur, et il en est question dans le contrat de M-1 Drilling Fluids concernant Wilfred MacIsaac.

 

[85]         La société ORSI exerce ses affaires à l’échelle internationale par l’intermédiaire d’employés comme Wilfred MacIsaac et Tim Speakman, qui offrent leurs services spécialisés dans diverses parties du monde.

 

[86]         La société ORSI a agi une seule fois comme agence de placement. La personne concernée n’avait pas signé de contrat à titre d’employé.

 

[87]         La société ORSI fournit des « services de ressources humaines » en affectant les bonnes personnes aux bons endroits. Ces employés se présentent dans le cadre de la structure existante sur la plateforme ou sur le navire. Une fois sur place, ils sont supervisés par le personnel de la plateforme ou du navire et la société ORSI n’exerce aucune supervision directe des travaux sur le navire ou la plateforme. Pour la société ORSI, la norme consiste à acheter des billets pour ses employés. Le fait qu’elle n’ait pas acheté de billets pour M. MacIsaac et M. Speakman constituait un écart par rapport à la norme.

 

[88]         La société ORSI couvre parfois la formation des employés et il arrive que la société cliente en acquitte le coût.

 

[89]         L’avocat des appelants a reconnu que la société ORSI ne dirige pas les activités quotidiennes de ses employés à bord, mais cette situation ne va pas à l’encontre de sa position selon laquelle elle apporte une contribution, notamment au moyen de discussions avec les employés et les superviseurs au sujet de ses employés et de leur travail. En outre, elle ne reconnaît pas, comme le témoin l’a mentionné, que la société ORSI a renoncé à tout contrôle sur lui et sur son travail.

 

[90]         La société ORSI s’engage à s’efforcer de fournir du personnel compétent qui déploiera ses meilleurs efforts et fera preuve de diligence raisonnable dans l’exécution de son travail.

 

[91]         La société ORSI gère le système de paie; le pouvoir d’émettre les chèques de paie provient de l’installation qui produit les documents nécessaires à la paie et, sauf dans le cas de Wilfred MacIsaac, ceux-ci devaient être approuvés par une personne autorisée sur le navire ou la plateforme. Il s’agit d’un volet crucial de l’entreprise de la société ORSI.

 

[92]         La société ORSI s’occupe du paiement des factures de services médicaux fournis aux termes de la politique de la Sun Life, puis présente les factures à la Sun Life. La sécurité de l’employé quant à cette protection est un élément très important du travail de la société ORSI.

 

[93]         Tim Speakman estimait que la société ORSI était pour lui davantage qu’une agence de recrutement de personnel. Elle offrait des services de paie, une assurance-maladie collective, une assurance responsabilité, et lui fournissait sa paie régulière. Il communiquait régulièrement avec la société ORSI au sujet de ses avantages et, bien qu’il tentait de régler ses problèmes à bord, il appelait la société ORSI s’il avait besoin d’aide.

 

[94]         Les indemnités de maladie fournies par la société ORSI étaient une raison pour laquelle il a choisi de travailler pour cette société. Il a dit que la société ORSI était son employeur et qu’elle aurait pu le congédier en tout temps.

 

[95]         L’avocat a affirmé que la seule question juridique qui a été soulevée dans les actes de procédure était que les employés n’étaient pas considérés comme exploitant une entreprise à l’étranger comme l’exige le paragraphe 122.3(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

[96]         L’avocat a fait valoir que, conformément à l’alinéa 122.3(1)b) de la Loi, à tous les moments pertinents, les deux appelants ont exercé la totalité, ou presque, de leurs fonctions à l’étranger, dans le cadre d’un contrat en vertu duquel l’employeur déterminé (la société ORSI) exploitait une entreprise à l’étranger se rapportant à l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel, de minéraux ou d’autres ressources semblables. De plus, la société ORSI n’était pas une agence de placement et était un entrepreneur ou un sous-traitant et exploitait effectivement une entreprise à l’étranger conformément à l’alinéa 122.3(1)b) de la Loi.

 

[97]         En général, la Loi a pour objet d’aider les sociétés canadiennes, et plus précisément les employeurs déterminés, à exploiter une entreprise à l’étranger se rapportant à des activités admissibles comme le génie. Pour l’essentiel, cette disposition leur permet de soumissionner de manière concurrentielle contre des sociétés étrangères relativement à des travaux à l’étranger.

 

[98]         La question soulevée par le sous-alinéa 122.3(1)b)(i) a été réglée dans Betteridge c. Canada, [1998] A.C.I. no 1078, [1999] 1 C.T.C. 2569. Dans cette affaire, le CIEE a été refusé parce que la Cour a conclu que la recherche effectuée à l’étranger se rapportant à un contrat qu’avait passé l’université pour des travaux réalisés au Canada.

 

[99]         Cette affaire peut être distinguée des affaires en l’espèce, parce que les deux employés concernés dans la présente affaire devaient effectuer leur travail à l’étranger pour le compte de la société ORSI.

 

[100]     Les présentes affaires peuvent être distinguées de la situation de fait dans Fonta c. La Reine, [2002] 3 C.T.C. 2177, parce que la société ORSI ne fournissait pas ses services en faisant office d’« agence de recrutement de personnel spécialisé » pour un seul client. Elle offrait ses services à de nombreux clients.

 

[101]     Dans Dunbar c. La Reine, 2005 CCI 769, [2006] 1 C.T.C. 2423, la Cour a conclu qu’un employeur qui fournissait du personnel exploitait une entreprise à l’étranger. Les circonstances dans cette affaire étaient similaires à celles des présentes affaires. Dans Dunbar, la Cour a jugé important que l’employeur ait été désigné comme assuré conjoint avec Norbulk (l’entrepreneur en personnel à l’étranger), situation qui aurait pu ne pas être nécessaire si l’entreprise canadienne avait simplement été une agence de recrutement de personnel.

 

[102]     Dans les présentes affaires, les deux employés étaient des professionnels très qualifiés et internationalement respectés qui travaillaient dans l’industrie pétrolière et gazière mondiale. Dans Dunbar, la Cour a conclu que ce n’était pas une simple agence de placement.

 

[103]     Dans les présentes affaires, DOOR était une société de placement de personnel par opposition à un utilisateur final, comme dans Dunbar.

 

[104]     L’avocat a également invoqué la décision rendue dans Purves c. La Reine, 2005 CCI 290, [2005] 3 C.T.C. 2041, dans laquelle la Cour a conclu que l’employeur canadien, qui était une agence de recrutement de personnel, exploitait une entreprise à l’étranger.

 

[105]     L’avocat a invoqué la décision rendue dans Mys c. La Reine, 2007 CCI 736, [2008] 4 C.T.C. 2191, dans laquelle la Cour a établi une distinction d’avec l’affaire Fonta et a conclu que l’employeur n’était pas une agence de recrutement de personnel spécialisé parce qu’elle avait aussi d’autres clients.

 

[106]     De plus, l’avocat a invoqué la décision rendue dans Surprenant c. La Reine, 2005 CCI 192, 2005 DTC 586, et a fait valoir que le libellé du contrat intervenu entre la société canadienne et la société française correspondait, pour l’essentiel, au libellé des conventions entre DOOR ou M-1 Drilling, d’une part, et la société ORSI, d’autre part.

 

[107]     Dans Adams c. La Reine, 2005 CCI 237, 2005 DTC 636, la Cour a rejeté l’argument de l’intimé selon lequel l’employeur canadien était seulement une « agence de recrutement de personnel spécialisé » aux fins de la société étrangère, et a conclu qu’il s’agissait d’un véritable sous-traitant et qu’une partie du contrat principal était attribuée au sous-traitant en vue de l’exécution partielle du contrat principal. Il s’agit de la même situation que dans les présentes affaires.

 

[108]     En outre, la société ORSI a exploité une entreprise à l’étranger pour obtenir les contrats de DOOR et de M-1 Drilling Fluids au moyen de voyages précédents en Hollande. De plus, M. Coady et d’autres membres du personnel administratif continuaient à voyager à l’étranger pour la société ORSI avant et après 2005. Affirmer qu’il y a une différence entre fournir les services de personnel compétent et fournir du personnel compétent n’est qu’une question de sémantique.

 

[109]     Le recrutement de services ne constitue pas la seule activité de la société ORSI. Celle-ci soutient et représente ses employés, fournit des services de paie, et prend part à des activités internationales dans le cadre de ses contrats avec DOOR et M-1 Drilling Fluids, contrats qui exigeaient une assurance responsabilité de l’employeur.

 

[110]     Toutes ces fonctions cadrent dans le libellé de la division 122.3(1)b)(i)(A) de la Loi. L’expression « se rapportant à » [en anglais : with respect to] doit faire l’objet d’une interprétation large et extensive, tel qu’il est énoncé dans la décision Purves rendue par le juge Bowie. Chacun des services fournis par la société ORSI, dont le recrutement, constitue du soutien raisonnable, voire nécessaire, à l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel, de minéraux ou d’autres ressources semblables aux termes de la division 122.3(1)b)(i)(A).

 

[111]     Les appels devraient être accueillis avec dépens.

 

Arguments pour le compte de l’intimée

 

[112]     L’avocate a soutenu que l’une des questions à trancher dans ces appels consiste à établir si la société ORSI est un employeur déterminé qui exploite une entreprise dans le cadre d’un contrat se rapportant à une activité admissible en vertu du paragraphe 122.3(1) de la Loi.

 

[113]     Elle a fait mention de la lettre de Felesky Flynn, le cabinet d’avocats fiscalistes qui représente la société ORSI, dans un autre litige dans lequel la question portait sur des fournitures détaxées et sur la TVH applicable à ces fournitures. Elle a souligné que, dans cette lettre, l’avocat mentionnait que les fournitures étaient détaxées parce qu’elles étaient [traduction] « le mieux décrites comme des fournitures de personnel et des services de ressources humaines connexes (services de placement) et non comme des fournisseurs de divers “services” que le personnel recevait instruction d’exécuter pendant qu’il était à bord des navires ».

 

[114]     La société ORSI a de plus fait valoir qu’il lui incombait notamment de trouver et de placer du personnel compétent au service de clients non résidents pour combler leurs besoins en membres d’équipage chargés de travailler sur des navires à l’étranger qui seraient exploités par ces clients ou au profit de ceux-ci au large de l’est du Canada. De plus, les fournitures ont été établies conformément à une « entente de fourniture de personnel » et cette entente détermine le type de personne qu’exigeait le client non résident. Elle ne précise pas les fonctions de ce personnel.

 

[115]     La société ORSI a soutenu que l’entreprise qu’elle exploitait consistait à fournir du personnel et non à fournir l’activité du personnel.

 

[116]     Dans son profil d’entreprise, la société ORSI se décrit comme une « agence de placement ». Sa démarche en vue de faire établir une nouvelle cotisation au titre de la TPS a été couronnée de succès sur cette base.

 

[117]     Les appelants ont signé une renonciation pour permettre à un représentant de la société ORSI de former les présents appels.

 

[118]     La deuxième question consiste à déterminer si les appelants ont droit au crédit d’impôt pour emploi à l’étranger pour leur emploi chez la société ORSI pendant l’année d’imposition 2005 conformément à l’article 122.3 de la Loi.

 

[119]     L’avocate est d’avis qu’ils n’y ont pas droit parce que leur employeur, la société ORSI, n’exploitait pas une entreprise à l’étranger dans le cadre d’un contrat se rapportant à une activité admissible. La société ORSI plaçait du personnel. Elle s’employait surtout à recruter du personnel compétent. Elle exerce ses activités à partir de ses bureaux de St. John’s (Terre-Neuve) et n’exploite pas une entreprise à l’étranger.

 

[120]     La disposition pertinente porte sur l’activité admissible de l’employeur déterminé et non sur l’employé. L’exécution par les appelants de leurs fonctions liées aux clients de la société ORSI n’a pas lieu à l’étranger et ne se rapporte pas à une activité admissible.

 

[121]     Il n’y a pas de « critère relatif à l’emplacement » au paragraphe 122.3(1), ce qui fait que l’analyse de la question de savoir si le travail a été effectué ou si l’entreprise a été « exploitée » à l’étranger dépend d’une analyse des faits. Voir Rooke c. La Reine, 2002 CAF 393, 2002 DTC 7442 (C.A.F.), et Seto c. La Reine, 2007 CCI 489, 2007 DTC 1647.

 

[122]     La décision R. c. Gordon, [1961] R.C.S. 592, énonce les éléments requis pour « exploiter une entreprise » : (i) apport sous forme de temps, d’attention et de travail; (ii) le fait de contracter des obligations envers d’autres personnes; (iii) l’objectif de gagner sa vie ou de réaliser un bénéfice.

 

[123]     La société ORSI exerçait la totalité de ses activités commerciales et contractuelles à partir du Canada. Toute activité qui, au dire de la société ORSI, serait survenue à l’étranger constitue simplement une activité de soutien à une activité de base de ses contrats canadiens. Le contrat de membre d’équipage signé par les appelants et la société ORSI fait en sorte que le salaire est payé et non que les feuilles de présence sont remplies. Les feuilles de présence sont tout simplement nécessaires pour permettre à la société ORSI de gérer la paie, de facturer les clients et de payer le personnel.

 

[124]     Le soutien administratif, la paie, le soutien aux employés et l’assurance offerts par la société ORSI étaient fournis conformément à des contrats signés, rédigés et administrés au Canada. L’entreprise principale de la société ORSI est exploitée à partir de son siège social à St. John’s (Terre-Neuve).

 

[125]     Toutes les activités commerciales de la société ORSI sont exercées au Canada, proviennent du Canada ou sont déclenchées par des obligations contractuelles découlant de contrats canadiens. Les courriels, lettres, feuilles de présence ou appels téléphoniques ne sont qu’accessoires à l’exécution de ces contrats. Le fait d’exploiter une entreprise conformément aux contrats n’est pas lié à une activité admissible.

 

[126]     Les faits des présentes affaires ne sont pas les mêmes que ceux dont il était question dans la décision Dunbar. Dans les présentes affaires, la société ORSI n’était pas partie aux opérations pétrolières et gazières. L’entrepreneur dans ces appels contrôlait et gérait son projet et dirigeait les activités des appelants une fois qu’ils étaient placés. Dans Dunbar, le rendement de l’appelant comme capitaine du navire, qui était aussi le navigateur du navire, était lié au paiement effectif du contrat d’exploration.

 

[127]     La société ORSI est un entrepreneur indépendant et ni la société ORSI ni ses sociétés affiliées ne sont des mandataires du client ou le client du client.

 

[128]     La société ORSI ne passe pas de contrat sur les activités admissibles ou concernant celles-ci. La société ORSI conclut des contrats de fourniture du personnel.

 

[129]     Les contrats de client portent sur la « fourniture de personnel ». Il n’y a pas de mentions ou d’articles relatifs à une activité admissible. Les contrats parlent d’eux-mêmes. De plus, la société ORSI n’est pas partie aux contrats entre le sous-traitant et la société pétrolière et gazière. La société ORSI fournit du personnel. De son propre aveu, elle ne participe pas à l’exploration de pétrole et de gaz.

 

[130]     La société ORSI cherche maintenant à rejeter ses déclarations antérieures selon lesquelles elle était une « agence de placement » et prétend maintenant qu’elle fournit du personnel spécialisé et qu’elle est davantage qu’une agence de placement, et ce, même si les circonstances n’ont pas changé.

 

[131]     En ce qui concerne la question de la crédibilité, l’avocate affirme que M. Coady a fait un certain nombre de déclarations antérieures incohérentes et s’est montré trop général au sujet des activités et des déplacements de la société ORSI à l’étranger. Son témoignage n’était pas cohérent avec le profil documenté de la société ORSI et avec les déclarations faites précédemment sous la direction de M. Coady à l’intimée et au grand public, notamment dans ses publicités. De nombreuses parties de son témoignage étaient intrinsèquement non fiables.

 

[132]     Il n’a pas donné de réponses directes à des questions directes. Ses explications étaient trop générales et parfois trompeuses. Les appelants eux-mêmes ont une position évidemment partiale à l’égard du résultat, mais ont par ailleurs parlé des circonstances dont ils avaient personnellement connaissance.

 

[133]     La preuve documentée appuie la position du ministre.

 

[134]     Les appels devraient être rejetés avec dépens.

 

Observations en réplique des appelants

 

[135]     En réplique, l’avocat des appelants a affirmé que l’intimée a omis de distinguer les présentes affaires de Dunbar. La société ORSI n’a pas à agir comme mandataire de ses clients pour exploiter avec compétence une entreprise à l’étranger relativement à un contrat avec ces clients. La société ORSI a la compétence pour ce faire et une relation de mandataire n’est pas une condition préalable pour établir qu’une entité exploite une entreprise à l’étranger. Dunbar ne mettait pas en scène une relation entre un entrepreneur et un sous-traitant, mais plutôt une situation entre deux sous‑traitants comme dans la situation de fait de M. Speakman. Cette situation n’a pas eu d’incidence négative sur la décision favorable au travailleur dans Dunbar. Aucun quota de rendement spécifique de quelque nature que ce soit n’a découlé des « stipulations clés » mentionnées par la Cour dans Dunbar ni dans son analyse. Cette affaire, comme les présentes affaires, n’exigeait rien de plus de ses employés que l’exécution régulière de leur travail chaque jour jusqu’à la fin du cycle de travail. C’est ce qui était exigé de M. Speakman et de M. MacIsaac.

 

[136]     L’obligation de la société ORSI d’offrir une assurance responsabilité constituait un facteur crucial dans l’affaire Dunbar et la société ORSI avait la même obligation dans les présentes affaires. Ce n’était pas fait à titre gratuit par la société ORSI; celle‑ci était tenue de se soumettre à cette obligation. Ainsi, la société ORSI assumait une partie du risque associé à l’exploitation d’une entreprise à l’étranger et exploitait une entreprise à l’étranger.

 

[137]     Les appelants dans les présentes affaires n’étaient pas supervisés dans le cadre de l’exécution de leurs travaux spécialisés, et toute prétendue supervision ne s’appliquait pas à leurs travaux, mais plutôt à la coordination de tous les travaux effectués sur le site.

 

[138]     Ce n’était pas un facteur dans la décision rendue dans Dunbar et, quoi qu’il en soit, ce facteur ne s’applique à aucune des questions en litige dans les présentes affaires. La décision Purves indique clairement que le juge de première instance ne se préoccupait aucunement du fait que la supervision quotidienne des travailleurs par le personnel de GMC ait quelque effet que ce soit sur le droit du travailleur au CIEE. De même, la Cour a écarté la position selon laquelle Comtech n’était qu’un fournisseur de personnel et n’exploitait donc pas une entreprise à l’étranger.

 

[139]     La supervision pouvait s’appliquer de façon pertinente à la question de savoir si le travailleur était un employé ou de qui il était un employé. Il ne s’agissait pas d’une question en litige dans les présentes affaires.

 

[140]     La société ORSI était, par ses contrats avec des clients, autant sinon plus engagée dans l’exploration et (ou) l’exploitation de pétrole ou de gaz naturel que l’était Comtech avec GMC dans Purves ou que l’était OSC avec l’exploitation du pétrole ou du gaz naturel dans Dunbar.

 

[141]     La société ORSI exploitait effectivement une entreprise au Canada, mais elle exploitait également une entreprise à l’étranger. Il importe peu qu’au cours des années en question, il ait pu y avoir un ralentissement dans le nombre de déplacements à l’étranger par opposition aux autres années, ce qui a eu pour effet de permettre à la société ORSI de récolter les fruits de ses travaux précédents. Au cours des années en litige, elle a pu s’en remettre davantage aux communications par téléphone et par courrier électronique, mais il ne s’agit pas d’un fait décisif dans les présentes questions en litige.

 

[142]     Certaines déclarations faites par l’ancien avocat externe de la société ORSI portaient sur un contexte différent d’un litige en matière de TVH qui est survenu en 2002 et qui a été réglé en 2005. Il avait trait à un régime fiscal différent.

 

[143]     Il n’y a pas de différence entre la fourniture de services de personnel et la fourniture de personnel. Dans Dunbar, le contrat mentionnait la fourniture de personnel et non la fourniture de services, ce qui n’a pas empêché la Cour de conclure que la société OSC a effectivement exploité une entreprise à l’étranger et n’était pas simplement une agence de placement.

 

[144]     Enfin, la thèse de l’intimée selon laquelle les contrats conclus entre les sociétés ORSI et DOOR et entre les sociétés ORSI et M-1 Drilling Fluids ne se rapportaient pas à « l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel […] » au sens de la division 122.3(1)b)(i)(A) de la Loi n’est pas fondée. Il était clair que les travaux spécialisés exécutés par les deux travailleurs dans les présentes affaires se rapportaient à l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel et autres.

 


Analyse et décision

 

[145]     En termes simples, la principale question en litige dans ces appels consiste à déterminer si la société ORSI (le prétendu employeur) a, dans le cadre du contrat, exploité à l’étranger au cours des années en question une entreprise se rapportant à une activité admissible, ce qui permettrait aux appelants de recevoir le CIEE pour l’année d’imposition 2005 conformément au paragraphe 122.3(1) de la Loi.

 

[146]     Avant d’aborder cette question, la Cour traitera d’abord d’un certain nombre de questions secondaires qui se sont manifestées à l’instruction et dans les arguments écrits subséquents.

 

[147]     L’intimée a soulevé une question très importante relativement à la crédibilité d’Adrian Coady. L’avocat a fait valoir que M. Coady [traduction] « avait fait un certain nombre de déclarations incohérentes et s’était montré trop général en faisant des affirmations un peu exagérées quant aux activités et aux déplacements à l’étranger de la société ORSI », et que ses déclarations étaient [traduction] « incompatibles avec le profil documenté de la société ORSI et d’autres preuves documentées sur la société ORSI ». Il va sans dire qu’il a nié que la société ORSI était une agence de placement, ce qui allait à l’encontre des observations précédentes qu’il avait faites au nom de la société ORSI.

 

[148]     La Cour n’accepte pas cette représentation de M. Coady ou de son témoignage. Il était manifestement une personne qui connaissait très bien l’entreprise et les employés de la société ORSI. Il n’était pas d’avis que la société ORSI cédait quelque contrôle que ce soit à l’égard du travailleur quand celui‑ci était sur le lieu de travail, sauf en ce qui concerne la supervision quotidienne de la plateforme ou du navire, et il a affirmé, pour l’essentiel, que la société ORSI veille à ce qu’il soit fait preuve de diligence raisonnable et à ce que le travail soit fait conformément à son obligation de moyens. En outre, la Cour conclut de ce qu’il a déclaré que la société ORSI apporte généralement sa contribution, dans le cadre de discussions, aux employés et aux superviseurs.

 

[149]     La Cour a conclu de son témoignage que la société ORSI fournissait des employés bien qualifiés et compétents, comme M. MacIsaac et M. Speakman, qui devaient s’acquitter de leurs fonctions de manière satisfaisante.

 

[150]     En ce qui concerne le témoignage des deux appelants, la Cour ne peut conclure à l’existence de défaillances dans la façon dont ils ont témoigné ni dans les faits qu’ils ont éclairci. Ils étaient manifestement partiaux quant à l’issue des appels, mais la Cour n’a pu percevoir que cette partialité a affecté la qualité de leur témoignage.

 

[151]     La deuxième question secondaire a trait à la position de l’intimée selon laquelle un avocat externe, dans une autre affaire, avait fait valoir que les fournitures de la société ORSI étaient détaxées parce qu’elles étaient [traduction] « le mieux décrites comme des fournitures de personnel et des services de ressources humaines connexes […] (services de placement) et non comme des fournitures de divers « services » que le personnel recevait instruction d’exécuter pendant qu’il était à bord des navires ».

 

[152]     Aucun des témoins n’avait quoi que ce soit à faire avec cette déclaration et ils ont tous convenu qu’elle n’était pas exacte.

 

[153]     Il importe peu qu’en conséquence de cette thèse, l’avocat externe soit parvenu à convaincre l’ARC que les fournitures étaient détaxées. La Cour doit tenir compte de la preuve qui lui est soumise, et non de ce que quelqu’un aurait pu faire valoir dans une autre affaire pour quelque motif que ce soit.

 

[154]     La troisième question secondaire qui a été soulevée consiste à déterminer si les appelants étaient ou non des employés de la société ORSI. Cette question a été soulevée par l’avocat des appelants dans sa réplique en raison des mentions, par l’intimée, de la question de la supervision des travailleurs au lieu de travail.

 

[155]     Toutefois, la Cour est convaincue que cet élément n’a pas été mis en cause par l’intimée pendant l’instruction, et, comme l’avocat des appelants l’a indiqué, l’intimée n’a produit aucune preuve à cet égard pendant l’instruction.

 

[156]     La seule preuve soumise était celle que les appelants et M. Coady ont fait valoir pendant toute l’instance, c’est-à-dire que les travailleurs étaient des employés de la société ORSI. En outre, en exposant les questions dans les sections D.1 et 20.2, l’avocate de l’intimée n’a pas fait mention de cette question secondaire.

 

[157]     La Cour est convaincue, d’après l’ensemble des éléments de preuve présentés, que les appelants étaient des employés de la société ORSI à tous les moments pertinents.

 

[158]     Il reste à la Cour à déterminer si la société ORSI exploitait une entreprise à l’étranger en 2005, aux termes d’un contrat régissant une activité admissible. À cet égard, la décision Dunbar est pertinente. Dans cette affaire, le juge C. Miller a conclu qu’un employeur qui fournissait du personnel exploitait effectivement une entreprise à l’étranger. Après avoir examiné un certain nombre d’affaires connexes, il a affirmé ce qui suit :

 

22        Ce qui se dégage à mon avis de ces décisions et du Bulletin d’interprétation, c’est que, lorsque l’entreprise exploitée par une société canadienne se limite à celle d’une agence de placement, elle n’est pas exploitée à l’étranger du simple fait que le personnel recruté exerce ses activités à l’extérieur du Canada. Cependant, lorsque l’entreprise consiste à fournir des services au moyen de la sous-traitance, lesquels services doivent nécessairement être fournis à l’étranger, il est permis de dire que l’entreprise est exploitée à l’étranger. C’est une distinction subtile, particulièrement en l’espèce. Pourtant, cette différence permet de comprendre pourquoi la société de consultation en informatique qui affecte un spécialiste en informatique à un projet mené en France peut être admissible à titre de société exploitant une entreprise à l’étranger (Surprenant), tout comme l’ingénieur qui travaille pour une société de génie canadienne et qui est affecté à un projet mené à l’extérieur du pays (Purves et Gonsalves c. La Reine, [2000 D.T.C. 1491 (C.A.F.)].

 

[159]     Au paragraphe 78 de l’argumentation de l’intimée, l’avocate a cherché à distinguer les faits dans Dunbar de ceux des présentes affaires. Elle a notamment affirmé que le travail de la société ORSI est le placement de personnel de certaines catégories de travail et qu’il s’agit de son travail de base. Toutefois, cela ne fait pas en sorte que les faits dans l’affaire de la société ORSI diffèrent de ceux de la décision Dunbar.

 

[160]     Si la société ORSI ne faisait rien de plus que de recruter simplement les travailleurs et les affecter à un sous-traitant, sans apporter d’autres contributions à la vie du travailleur, comme cela se produirait dans les cas des « chasseurs de têtes », l’expression « agence de placement seulement » aurait davantage de signification qu’elle en a en réalité dans les faits de ces affaires et, manifestement, qu’elle en a eue dans Dunbar.

 

[161]     Dans les présentes affaires, la relation entre le travailleur et la société ORSI n’a pas pris fin quand le travailleur a été affecté à un sous-traitant. La société ORSI a continué de prendre part à la logistique touchant les travailleurs. Dans certains cas, elle organisait l’achat de billets pour eux. Dans d’autres, elle ne le faisait pas.

 

[162]     Elle offrait des assurances de frais médicaux pour eux ainsi que des indemnités en cas de maladie, de même qu’une assurance pour eux en cas de blessure ou de décès.

 

[163]     Elle offrait des services de paie et organisait des services de soutien en cas de deuil pour eux, et demeurait en contact avec leurs familles. Elle avait des communications et des contacts suivis avec les travailleurs et elle était responsable des employés pendant le processus de travail, même si elle ne les dirigeait ni ne les supervisait sur le lieu de travail. Ce n’était pas nécessaire et il aurait été irréaliste pour elle de le faire.

 

[164]     M. Coady, ainsi que les deux appelants, estimaient que la société ORSI était responsable d’eux pendant qu’ils étaient employés par la société ORSI. Ce qui importait particulièrement dans ces affaires et dans Dunbar était que les contrats de la société ORSI avec DOOR et M-1 Drilling Fluids exigeaient tous deux que la société ORSI ait une assurance responsabilité considérable pour ses employés qui travaillent à l’étranger. En conséquence, pour l’essentiel, les contrats de la société ORSI exigeaient qu’elle assume une partie du risque associé à l’exploitation d’une entreprise à l’étranger, à l’endroit où les appelants travaillaient.

 

[165]     La Cour n’accepte pas les arguments de l’intimée selon lesquels les faits dans Dunbar pouvaient être distingués des faits des présentes affaires.

 

[166]     La Cour conclut qu’il n’y a rien de magique à faire valoir dans une affaire que la société fournit du personnel (un ingénieur) et dans une autre qu’elle fournit des services (des services d’ingénierie). Comme l’a soutenu l’appelant dans Purves, un ingénieur fournit nécessairement des services d’ingénierie, ce qui fait que, si vous fournissez un ingénieur, vous fournissez des services d’ingénierie.

 

[167]     L’avocate de l’intimée fait valoir que les appelants doivent échouer en l’espèce parce que la société ORSI n’exploitait pas, dans le cadre d’un contrat, une entreprise à l’étranger se rapportant à [ with respect to ] une activité admissible.

 

[168]     Dans la décision Purves, lorsque le juge Bowie a commenté l’expression  « in respect of » [ quant à ], il a fait référence à l’arrêt Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, dans lequel le juge Dickson (tel était alors son titre), a dit :

 


11        […] À mon avis, les mots [«in respect of»] ont la portée la plus large possible. Ils signifient, entre autres, «concernant», «relativement à» ou «par rapport à». Parmi toutes les expressions qui servent à exprimer un lien quelconque entre deux sujets connexes, c’est probablement l’expression [«in respect of»]  qui est la plus large.

 

[169]     Dans les présentes affaires, le travail de la société ORSI aux termes des contrats conclus avec ses clients consistait à fournir des employés très compétents, soit M. Speakman et M. MacIsaac, aux lieux de travail à l’étranger où leurs clients, DOOR et M-1 Drilling Fluids, prenaient manifestement part à une activité admissible. Les contrats exigeaient qu’elle le fasse.

 

[170]     Il ne fait aucun doute que le travail très spécialisé des appelants se rapportait à [«was with respect to»] « l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel, […] » au sens de la division 122.3(1)b)(i)(A) de la Loi.

 

[171]     Les appels sont accueillis et les questions sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation pour le motif que les appelants remplissent les conditions d’obtention du crédit d’impôt pour emploi à l’étranger (CIEE) conformément à l’article 122.3 de la Loi.

 

[172]     Les dépens sont adjugés aux appelants. Il y aura un seul mémoire de frais pour les deux appelants.

 

          Signé à New Glasgow (Nouvelle-Écosse), le 19 août 2010.

 

 

 

« T. E. Margeson »

Le juge Margeson

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de janvier 2011.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


RÉFÉRENCE :                                  2010 CCI 436

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :          2007-3661(IT)G et 2007-3663(IT)G

 

INTITULÉS :                                     WILFRED MacISAAC et

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

                                                          TIM SPEAKMAN et

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

DATES DE L’AUDIENCE :               Les 10 et 11 juin et le 8 décembre 2009

 

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :       L’honorable juge T. E. Margeson

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 19 août 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

MBruce S. Russell, c.r.

Avocats de l’intimée :

MDarlene M. Lamey, MToks C. Omisade et MJill Chisholm

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                      Bruce S. Russell, c.r.

 

                        Cabinet :                    McInnes Cooper

                                                          Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Canada)

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