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Dossier : 2009-411(IT)G

 

ENTRE :

ALGOMA CENTRAL CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

________________________________________________________________

 

Requête entendue le 13 mai 2009, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge Diane Campbell

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Me David Malach

 

 

Avocats de l'intimée :

Me Marie-Thérèse Boris

Me Thang Trieu

 

________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          Vu la requête de l'intimée en vue d'obtenir :

 

1.       une ordonnance radiant, en tout ou en partie, les paragraphes 7, 9, 10, 11, 12, 15, 16, 17, 22, 23 et 24 de l'avis d'appel;

 

2.       une ordonnance prorogeant le délai pour le dépôt de la réponse à l'avis d'appel;

 

3.       une ordonnance adjugeant les dépens de la requête, fixés et payables sur‑le‑champ;

 

4.       toute autre mesure de redressement demandée par les avocats et que la Cour jugera appropriée;

 

          La Cour ordonne :

 

          La requête est rejetée avec dépens, ceux‑ci étant payables sur‑le‑champ.

 

          L'intimée disposera d'un délai de 30 jours à compter de la date de la présente ordonnance pour déposer une réponse.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juin 2009.

 

 

« Diane Campbell »

Le juge Campbell

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'octobre 2009.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 314

Date : 20090610

Dossier : 2009-411(IT)G

 

ENTRE :

 

ALGOMA CENTRAL CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

Le juge Campbell

 

[1]              L'intimée a présenté la présente requête en vue d'obtenir :

 

1.       une ordonnance radiant, en tout ou en partie, les paragraphes 7, 9, 10, 11, 12, 15, 16, 17, 22, 23 et 24 de l'avis d'appel;

 

2.       une ordonnance prorogeant le délai pour le dépôt de la réponse à l'avis d'appel;

 

3.       une ordonnance adjugeant les dépens de la requête, fixés et payables sur‑le‑champ.

 

[2]              À titre de contexte, depuis le début des années 1990, l'appelante possédait des biens‑fonds d'une superficie de plus de 850 000 acres dans le Nord de l'Ontario. La plupart de ces biens‑fonds ont été vendus en 1997.

 

[3]              Selon le paragraphe 4 de l'avis d'appel, la superficie des biens‑fonds qui ont été vendus était de 849 679 acres, ceux‑ci étant composés :

 

[TRADUCTION]

 

a)         de biens‑fonds cantonaux, d'une superficie de 844 554 acres (les « biens‑fonds cantonaux »), dont 843 722 acres ont été vendus (les 843 722 acres qui ont été vendus sont ci‑après désignés comme étant les « terrains forestiers »);

 

b)         de parcelles additionnelles d'une superficie de 5 957 acres (les « autres biens‑fonds »).

 

[4]              L'appelante a établi à 33 825 331 $ la juste valeur marchande (la « JVM ») des terrains forestiers au 31 décembre 1971 (la « valeur au jour de l'évaluation »), selon une évaluation effectuée par Michael Cane, de Drivers Jonas. Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelante au motif que la JVM au jour de l'évaluation était de 11 295 802 $. Selon l'avis d'appel, le ministre a obtenu, au fil des ans, un certain nombre d'évaluations des terrains forestiers avant d'en fixer la valeur au jour de l'évaluation. La valeur des autres biens‑fonds, soit 1 042 787 $, n'est pas contestée.

 

[5]              La question qui est ici en litige se rapporte à la JVM, au 31 décembre 1971, des 843 722 acres dont sont composés les terrains forestiers.

 

[6]              Le 5 février 2009, l'appelante a déposé un avis d'appel à l'égard de son année d'imposition 1997. Il s'agit d'un appel direct de l'avis d'opposition qui a été signifié au ministre le 10 novembre 2003 et qui n'avait pas été annulé, ratifié ou modifié lors du dépôt de l'avis d'appel.

 

[7]              Le 7 avril 2009, l'intimée a déposé un avis de requête en vue d'obtenir une ordonnance radiant, en tout ou en partie, des paragraphes de l'avis d'appel. Les paragraphes ou passages de paragraphes que l'intimée cherche à faire radier se rapportent à plusieurs autres évaluations que le ministre a obtenues. Dans ces paragraphes, il est fait mention de certains renseignements, notamment :

 

a)       l'évaluation obtenue par l'appelante (paragraphe 7);

 

b)      la vérification effectuée par l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC ») en l'an 2000 (paragraphe 9);

 

c)       l'évaluation du 20 octobre 2000 de l'ARC, à Kitchener (paragraphes 9 et 10);

 

d)      l'évaluation du 20 juillet 2001 de l'ARC, à Vancouver (paragraphes 11, 12 et 23);

 

e)       l'évaluation du 28 mars 2008 de l'ARC, à Ottawa (paragraphes 15, 16, 17 et 24).

 

[8]              Les moyens invoqués dans la requête sont les suivants :

 

[TRADUCTION]

 

1.         les paragraphes en question n'exposent pas des faits pertinents; ils énoncent plutôt des faits non pertinents et des éléments de preuve;

 

2.         les actes de procédure doivent énoncer des faits pertinents; ils ne doivent pas inclure des faits qui ne sont pas pertinents ni des éléments de preuve permettant d'établir ces faits;

 

3.         les paragraphes en question peuvent compromettre ou retarder l'instruction équitable de l'action et ils peuvent détourner l'attention de la véritable question en litige;

 

4.         les paragraphes en question ne révèlent aucun moyen raisonnable d'appel;

 

5.         les articles 48, 53 et 58 et la formule 21(1)a) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), DORS/90‑688;

 

6.         tout autre moyen invoqué par les avocats et que la Cour pourra autoriser.

 

[9]              Les paragraphes en question que l'intimée cherche à faire radier en tout ou en partie sont libellés comme suit :

 

[TRADUCTION]

 

7.         L'évaluation au jour de l'évaluation des biens‑fonds de l'appelante, selon une évaluation effectuée par Michael Cane, de Drivers Jonas, était la suivante :

 

a.         biens-fonds cantonaux – 34 529 529 $;

 

b.         terrains forestiers – 33 825 331 $;

 

c.         autres biens-fonds – 1 042 787 $.

 

9.         Une vérification de l'année d'imposition 1997 de l'appelante a débuté en l'an 2000. Le vérificateur de l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC ») a renvoyé l'évaluation indépendante préparée par l'évaluateur de l'appelante à l'unité d'évaluation des biens immobiliers du bureau de Kitchener de l'ARC. Le 20 octobre 2000, ce bureau a conclu ce qui suit :

 

[...] la valeur des biens‑fonds en question, au 31 décembre 1971, telle qu'elle est indiquée dans l'évaluation [de l'appelante], est considérée comme raisonnable.

 

10.       Malgré l'opinion exprimée par le bureau de Kitchener de l'ARC, le vérificateur de l'ARC a transmis l'évaluation à un évaluateur du bureau du district de Vancouver de l'ARC.

 

11.       Wilfred Cushnie, un fonctionnaire au bureau du district de Vancouver de l'ARC, a préparé une évaluation des terrains forestiers le 20 juillet 2001. En procédant à son évaluation, M. Cushnie a utilisé certaines ventes de biens‑fonds qui étaient selon lui comparables. Monsieur Cushnie a conclu que la valeur au jour de l'évaluation des biens‑fonds était la suivante :

 

a.         biens-fonds cantonaux – 12 000 000 $;

 

b.         terrains forestiers – 11 295 802 $;

 

c.         autres biens-fonds – 1 042 787 $.

 

12.       L'ARC a convenu que la valeur au jour de l'évaluation des autres biens‑fonds était de 1 042 787 $. Toutefois, elle a pris la position selon laquelle la valeur des terrains forestiers au jour de l'évaluation était de 11 295 802 $, d'où la détermination selon laquelle le gain en capital réalisé par l'appelante lors de la vente des biens‑fonds était de 49 412 327 $, de sorte qu'un gain en capital imposable de 37 059 245 $ a été inclus dans le revenu imposable de l'appelante.

 

15.       Des négociations ont eu lieu avec la Direction générale des appels de l'ARC. La principale question qui a été discutée était de savoir si les biens‑fonds comparables que M. Cushnie avait utilisés pour déterminer la valeur au jour de l'évaluation des terrains forestiers étaient appropriés. La Direction générale des appels craignait que les biens‑fonds comparables utilisés par M. Cushnie ne soient pas appropriés. La Direction générale des appels a décidé de transmettre l'affaire au bureau d'évaluation des biens immobiliers de l'ARC, à Ottawa.

 

16.       En 2005, l'ARC a retenu les services d'un évaluateur indépendant, Marco Fournier, des Consultants Forestiers M.S. inc., en vue d'évaluer les terrains forestiers. À ce moment‑là, l'agent des appels a informé l'avocat de l'appelante que l'évaluation serait achevée au plus tard au mois de novembre 2005. Malgré les nombreuses promesses et représentations qui ont été faites au fil des ans, l'évaluation n'a été achevée qu'au mois de mars 2008.

 

17.       Monsieur Fournier a conclu que les biens‑fonds comparables devaient être ceux dont la valeur était principalement attribuable à la valeur du bois. Dans son rapport du 28 mars 2008, M. Fournier a conclu que la valeur au jour de l'évaluation des terrains forestiers était de 5 000 000 $, soit une valeur bien inférieure à celle que l'ARC avait établie dans sa nouvelle cotisation.

 

22.       L'unité d'évaluation des biens immobiliers de l'ARC à Kitchener souscrivait à l'évaluation de l'appelante. L'unité d'évaluation des biens immobiliers de l'ARC à Kitchener avait raison.

 

23.       Dans l'évaluation que M. Cushnie, du bureau du district de Vancouver, a préparée pour le compte de l'ARC, il était conclu d'une façon erronée qu'en 1971, il y avait peu de bois commercialisable sur les terrains forestiers. Monsieur Cushnie n'a aucunement tenu compte de la valeur des droits miniers afférents aux terrains forestiers et les biens‑fonds comparables qu'il a utilisés étaient en général inappropriés. La méthode générale employée par M. Cushnie était erronée.

 

24.       Dans l'évaluation qu'il a préparée pour le compte de l'ARC, M. Fournier a utilisé des biens‑fonds comparables dont la valeur était attribuable à la valeur du bois. Toutefois, M. Fournier n'a pas tenu compte des biens‑fonds comparables qui auraient justifié la valeur au jour de l'évaluation de l'appelante et il a rajusté les autres biens‑fonds comparables sans fournir de justification adéquate. Son évaluation était inexacte.

 

[10]         Le principal moyen invoqué par le ministre en vue de faire radier ces paragraphes, ou des passages de ces paragraphes, se rapporte à la pertinence des faits et des éléments de preuve énoncés dans les actes de procédure. Toutefois, le ministre invoque également l'article 53 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), et plus précisément l'alinéa 53a), en vue de soutenir que ces paragraphes peuvent compromettre ou retarder l'instruction équitable de l'appel, et enfin le ministre invoque l'article 58 des Règles en vue de soutenir que les paragraphes ne révèlent aucun moyen raisonnable d'appel. L'intimée a résumé ces trois moyens comme suit :

 

[TRADUCTION]

 

[...] premièrement, ils vont à l'encontre des règles applicables aux actes de procédure, puisqu'ils ne sont pas pertinents ou qu'il s'agit d'éléments de preuve; deuxièmement, ils peuvent compromettre ou retarder une instruction équitable, comme le prévoit l'alinéa 53a) des Règles; troisièmement, ils ne révèlent aucun moyen raisonnable d'appel, comme le prévoit l'alinéa 58(1)b).

 

(Transcription, page 2)

 

[11]         Je vais commencer par le troisième moyen, que l'intimée a selon moi plaidé d'une façon inappropriée, puisque le ministre cherche uniquement à faire radier certains passages de l'avis d'appel plutôt que « l'acte de procédure en entier ». L'article 58 des Règles autorise la Cour à radier un acte de procédure dans sa totalité au motif qu'il ne révèle aucune cause raisonnable d'action. Le passage pertinent de l'article 58 des Règles prévoit ce qui suit :

 

58.       (1) Une partie peut demander à la Cour,

 

[...]

 

b) soit de radier un acte de procédure au motif qu'il ne révèle aucun moyen raisonnable d'appel ou de contestation de l'appel,

 

et la Cour peut rendre jugement en conséquence.

 

Cette disposition ne peut pas être utilisée pour faire radier uniquement certaines parties d'un acte de procédure. Le libellé de la disposition est clair et ne peut être interprété que d'une seule façon. Il y est fait mention de l'acte de procédure en entier, ce qui, en l'espèce, serait interprété comme se rapportant à la radiation de l'avis d'appel en entier; or, ce n'est pas ce que l'intimée demande dans sa requête. Cette conclusion est étayée par la décision que le juge Bell a rendue dans l'affaire Enterac Property Corporation c. La Reine, no 94‑2141(IT)G, 19 avril 1995, 95 D.T.C. 391. Le juge Bell a affirmé :

 

[TRADUCTION]

 

[...] à mon avis, l'article 58 des Règles ne peut pas être interprété comme autorisant la présente cour à radier uniquement certaines parties d'un avis d'appel. [...]

 

[12]         Le 3 mars 1998, la Cour d'appel fédérale a confirmé les conclusions du juge Bell, à savoir que l'article 58 des Règles ne pouvait pas s'appliquer en vue de faire radier en partie un acte de procédure.

 

[13]         En soutenant que l'article 58 des Règles pouvait être utilisé pour faire radier certaines parties d'un acte de procédure, l'intimée a invoqué la décision Hawkes c. La Reine, no 94‑1933(IT)G, 24 novembre 1995, [1995] A.C.I. no 1507 (QL). Dans cette décision, le juge Margeson a accueilli la requête que la Couronne avait présentée en vue de faire radier trois paragraphes au motif qu'ils ne révélaient aucun moyen raisonnable d'appel en vertu de l'alinéa 58(1)b) des Règles. Dans cette affaire, il était allégué dans un paragraphe qu'un bureau de l'impôt différent avait établi une cotisation différente à l'égard de l'appelant; dans un deuxième paragraphe, il était allégué que le ministre avait affirmé que le contribuable ne ferait pas l'objet d'une nouvelle cotisation; dans un troisième paragraphe, la préclusion était invoquée. Toutefois, la décision Hawkes ne renferme pas une analyse détaillée au sujet de la radiation d'un acte de procédure en tout ou en partie, en vertu de l'alinéa 58(1)b) des Règles. La Cour d'appel fédérale a confirmé cette décision le 23 décembre 1996.

 

[14]         Deux ans plus tard, en 1998, la Cour d'appel fédérale, dans l'arrêt R. c. Enterac Property Corporation, no A‑256‑95, 3 mars 1998, 98 D.T.C. 6202, a confirmé la décision du juge Bell, à savoir que l'article 58 des Règles s'appliquait en vue de permettre la radiation d'un acte de procédure en entier, mais non certaines parties seulement de celui‑ci. Lorsque j'ai demandé à l'avocate de l'intimée comment elle arrivait à concilier la décision Hawkes et l'arrêt rendu par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Enterac, l'avocate a admis, dans les observations soumises en réponse, qu'il était impossible de concilier ces deux décisions, mais que l'arrêt Enterac avait probablement été rendu sans que l'avocat renvoie la Cour d'appel fédérale à la décision Hawkes. Toutefois, j'ai signalé à l'avocate que l'on pouvait tout aussi bien soutenir que, dans l'arrêt Enterac, la Cour d'appel fédérale avait simplement omis de tenir compte de la décision Hawkes, parce que cette décision était erronée. Dans ces deux décisions, une approche contradictoire est clairement adoptée à l'égard de l'article 58 des Règles et l'avocate a raison de dire qu'il n'y a aucune façon de les concilier. Toutefois, l'arrêt Enterac est la dernière décision rendue par la Cour d'appel fédérale, et je crois que, malgré la décision Hawkes, l'interprétation qu'il convient de donner à l'article 58 des Règles est celle qui figure dans l'arrêt Enterac.

 

[15]         Il y a eu d'autres décisions dans lesquelles la Cour s'est également fondée sur l'arrêt Enterac plutôt que sur la décision Hawkes. Dans l'affaire Gauthier c. La Reine, no 1999‑2648(IT)G, 10 mai 2006, 2006 D.T.C. 3050, la Couronne avait présenté des requêtes en vue de faire radier certaines parties des actes de procédure des appelants aux termes de l'article 53 ou de l'alinéa 58(1)b) des Règles. Au paragraphe [4], le juge C. Miller a dit ce qui suit :

 

En deuxième lieu, les appelants allèguent, en se fondant sur l'affaire R. c. Enterac Property Corp., que l'intimée n'est pas fondée à se baser sur l'alinéa 58(1)b) des Règles pour demander la radiation de certaines parties seulement des actes de procédure. Le juge Bell a établi une règle claire en la matière dans l'affaire Enterac. En appel de cette décision‑là, la Cour d'appel fédérale a déclaré :

 

[...] Nous sommes aussi d'avis que la règle 58 ne s'applique pas.

 

[16]         De plus, dans la décision Sentinel Hill Productions (1999) Corporation c. La Reine, 2007 CCI 742, 2008 D.T.C. 2544, au sous‑paragraphe [4]d), le juge en chef Bowman, en résumant les principes jurisprudentiels à appliquer à une requête en radiation, énonce comme suit le quatrième principe : « C'est l'article 53 des Règles et non l'article 58 qu'il faut appliquer dans le cadre d'une requête en radiation. »

 

[17]         À l'article 58 des Règles, il est fait mention de la radiation d'un acte de procédure, alors que l'article 53 dispose que la Cour peut radier « un acte de procédure ou un autre document [...] en tout ou en partie » pour trois motifs différents. De toute évidence, l'article 58 des Règles, tel qu'il s'appliquerait à la requête de l'intimée, viserait la radiation de l'acte de procédure ou de l'avis d'appel en entier. L'intimée cherche clairement à faire supprimer des paragraphes précis de l'avis d'appel, mais non à faire radier l'avis d'appel en entier. Par conséquent, l'intimée ne peut pas se fonder sur ce troisième moyen, l'article 58 des Règles, afin de faire radier ces paragraphes de l'avis d'appel au motif qu'ils ne révèlent aucun moyen raisonnable d'appel. J'espère que mes motifs mettront fin à tout doute que l'intimée pourrait encore éprouver à l'avenir lorsqu'il s'agira de présenter une telle requête en se fondant sur l'article 58 des Règles.

 

[18]         Le principal motif pour lequel l'intimée a présenté la requête ici en cause était que les paragraphes en question des actes de procédure étaient inappropriés, parce qu'ils vont à l'encontre de la règle applicable aux actes de procédure. Cette règle est énoncée par le juge Bowie dans la décision Zelinski c. La Reine, no 1999‑1746(IT)G, 20 novembre 2001, 2002 D.T.C. 1204, aux paragraphes 4 et 5 :

 

[4]        L'acte de procédure a pour but de définir les questions faisant l'objet du litige entre les parties aux fins de production et de communication préalable ainsi qu'en prévision du procès. Il incombe aux parties de présenter un exposé concis des faits pertinents sur lesquels elles se fondent. Les faits pertinents sont ceux qui, dans l'éventualité où ils sont établis au cours du procès, concourront à démontrer que la partie ayant déposé l'acte de procédure a droit au redressement demandé. De façon générale, il convient que la modification d'un acte de procédure soit autorisée, dans la mesure où cela n'est pas préjudiciable à l'autre partie — qui n'a pas droit à une contrepartie sous forme de dépens ou sous une autre forme —, les Règles visant à assurer, dans la mesure du possible, un procès équitable portant sur les vraies questions en litige entre les parties.

 

[5]        Le principe applicable est formulé ainsi par Holmsted et Watson :

 

[TRADUCTION]

 

Il s'agit de la grande règle en matière d'actes de procédure; toutes les autres règles sont essentiellement des règles accessoires ou des réserves à cette règle de base selon laquelle le plaideur doit exposer les faits pertinents sur lesquels il fonde sa demande ou sa défense. La règle comporte quatre composantes distinctes : (1) chaque acte de procédure doit exposer des faits et non pas simplement des conclusions de droit; (2) il doit exposer les faits pertinents et ne pas contenir de faits dénués de pertinence; (3) il doit exposer des faits, non les éléments de preuve qui serviront à étayer ces faits; (4) il doit exposer les faits avec concision.

 

M'inspirant de ces principes, j'aborde chaque requête en gardant à l'esprit le critère pertinent, à savoir si les paragraphes contestés et ceux que l'appelante veut ajouter sont conformes au principe selon lequel l'acte de procédure doit exposer les faits pertinents. La requête de l'appelante vise à ajouter deux questions à celles déjà incluses dans l'acte de procédure. Cette requête doit être accueillie, sauf s'il est évident que les questions ne sont pas fondées en droit et qu'on ne saurait faire droit à l'appel à leur égard, et ce, même si les faits sur lesquels elles sont fondées devaient être prouvés.

 

Cette décision a été confirmée par la Cour d'appel fédérale le 12 septembre 2002; elle a été suivie par notre cour dans un certain nombre de décisions subséquentes (Gee c. La Reine, 2003 CCI 533, 2003 D.T.C. 1020, Foss c. La Reine, 2007 CCI 201, 2007 D.T.C. 650, Stanfield c. La Reine, 2007 CCI 480, 2007 D.T.C. 1071). En résumé, cette règle prévoit que chaque acte de procédure doit renfermer un énoncé concis des faits pertinents sur lesquels une partie se fonde, et non des faits dénués de pertinence, et que, lorsque ces faits sont exposés, la preuve servant à les étayer ne doit pas être invoquée.

 

[19]         L'intimée a soutenu que la règle applicable aux actes de procédure est étayée par l'article 48 des Règles, qui prévoit que tout avis d'appel doit se conformer à la formule 21(1)a), selon laquelle l'appelant doit énumérer les faits pertinents. Comme le juge Bowie l'a dit dans la décision Zelinski, l'acte de procédure a pour but de définir les questions faisant l'objet du litige et d'énoncer les paramètres du processus judiciaire. Le juge Bowie a défini les faits pertinents comme étant ceux qui, dans l'éventualité où ils sont établis au cours du procès, concourront à démontrer que la partie qui les invoque a droit au redressement demandé.

 

[20]         L'intimée affirme que c'est l'évaluation effectuée par le ministre dont la Cour sera saisie, et plus précisément la valeur au jour de l'évaluation des terrains forestiers. Par conséquent, les paragraphes contestés ne sont pas pertinents pour ce qui est de cette détermination, parce qu'ils incluent des faits non pertinents qui se rapportent au processus d'établissement de la cotisation. L'intimée a également soutenu que les étapes menant à l'évaluation finale des biens‑fonds ne sont pas pertinentes, parce qu'elles se rapportent à un examen de la conduite du ministre et du processus mental qui ont abouti à la détermination. L'intimée a fait remarquer ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

 

Le ministre a tenu pour acquis que la valeur des terrains forestiers au jour de l'évaluation était d'au plus 11,3 millions de dollars. L'appelante tentera de démolir cette hypothèse au moyen d'une preuve d'opinion présentée par un expert. La valeur des terrains forestiers sera établie à l'instruction à l'aide d'opinions d'experts en matière d'évaluation de biens‑fonds.

 

En examinant les paragraphes en question, il est toujours important de se poser la question suivante : quel est le rapport entre ce fait et la valeur des terrains forestiers? [...]

 

(Transcription, page 6)

 

À l'audience, l'avocat de l'appelante a déclaré que, selon son interprétation des Règles de la Cour de l'impôt, il était tenu d'invoquer les diverses évaluations, puisqu'il prenait la position selon laquelle ces évaluations étaient pertinentes :

 

[TRADUCTION]

 

Ces quatre documents, l'opinion et les trois évaluations, sont tous des documents qui, selon les Règles, doivent être plaidés, s'ils sont pertinents, aussi brièvement que possible — c'est ce que l'appelante a tenté de faire, madame le juge; il s'agit de longs documents — et les libellés précis des documents n'ont à être plaidés que s'ils sont pertinents.

 

(Transcription, page 22)

 

[21]         La question de la validité de la cotisation sera établie à l'audience au moyen de la preuve d'opinion des experts et l'intimée soutient que les détails concernant les autres évaluations que le ministre a obtenues n'influent pas sur la JVM des terrains forestiers au jour de l'évaluation. L'intimée a également invoqué l'arrêt que la Cour d'appel fédérale avait rendu dans l'affaire Main Rehabilitation Co. Ltd. c. La Reine, 2004 CAF 403, 2004 D.T.C. 6762, qui établissait que les actions du ministre ne peuvent pas être prises en compte dans un appel à l'égard d'une cotisation. Par conséquent, la méthode que le ministre a employée pour établir la cotisation ou l'évaluation des biens‑fonds n'est pas susceptible de révision de la part de la Cour.

 

[22]         Dans la décision Sentinel Hill Productions, au paragraphe 4, le juge en chef Bowman a énoncé comme suit les principes à appliquer lors d'une requête en radiation présentée en vertu de l'article 53 des Règles, principes qui sont bien établis :

 

[...] La question a été examinée dans de nombreuses décisions de la Cour et de la Cour d'appel fédérale. Il n'est pas nécessaire de les citer toutes étant donné que les principes sont bien établis.

 

a)         Les faits allégués dans l'acte de procédure contesté doivent être considérés comme exacts sous réserve des limites énoncées dans l'arrêt Operation Dismantle Inc. c. Canada, [1985] 1 R.C.S. 441, à la page 455. Il n'est pas loisible à la partie qui attaque un acte de procédure en vertu de l'article 53 des Règles de contester des assertions de fait.

 

b)         Pour qu'un acte de procédure soit radié, en tout ou en partie, en vertu de l'article 53 des Règles, il doit être évident et manifeste que la position qui est prise n'a aucune chance de succès. Il s'agit d'un critère rigoureux et il faut faire preuve d'énormément de prudence en exerçant le pouvoir conféré en matière de radiation d'un acte de procédure.

 

c)         Le juge des requêtes doit éviter d'usurper les fonctions du juge du procès en tirant des conclusions de fait ou en se prononçant sur la pertinence. Il faut laisser de telles questions à l'appréciation du juge qui entend la preuve.

 

d)         C'est l'article 53 des Règles et non l'article 58 qu'il faut appliquer dans le cadre d'une requête en radiation.

 

[23]         La jurisprudence que l'intimée a citée à l'appui de son argument milite en faveur d'une interprétation fort restrictive de ce qui peut être inclus dans un acte de procédure. Dans bien des cas, la ligne de démarcation entre les faits et la preuve peut être très floue. Selon moi, l'approche la plus raisonnable est celle que le juge en chef Bowman a prise dans la décision Niagara Helicopters Limited c. La Reine, 2003 CCI 4, 2003 D.T.C. 513, aux paragraphes 6, 7 et 8 :

 

[6]        À mon avis, il est prématuré à ce stade du procès de déterminer que les faits que l'avocat de l'appelante considère comme pertinents et partie intégrante de la cause de l'appelante sont dénués de pertinence. Selon la jurisprudence et la doctrine, il est incontestable que seul peut être radié un acte de procédure clairement et manifestement scandaleux, frivole ou vexatoire ou constituant un recours abusif au tribunal (Hunt c. Carey Canada Inc., [1990] 2 R.C.S. 959, à la page 980; Erasmus c. Sa Majesté la Reine, C.A.F., no T‑148‑91, le 7 juin 1991 (91 DTC 5415, à la page 5416)).

 

[7]        Il n'est certainement pas manifeste et évident que les paragraphes mis en cause soient scandaleux, vexatoires ou frivoles ou qu'ils constituent un recours abusif au tribunal. Le recours consistant à radier certains passages de l'acte de procédure pour ces motifs est réservé aux cas les plus manifestes, tels que Davitt c. Canada, [2001] A.C.I. no 360 (2001 DTC 702) à titre d'exemple.

 

[8]        Il appartient au juge d'instance de trancher la question de savoir si une allégation est dénuée de pertinence, compte tenu de l'ensemble de la preuve présentée au procès. Lors d'une requête préliminaire, il ne serait pas approprié qu'un juge saisi de la requête, qui n'a pas entendu la preuve, décide qu'une allégation est dénuée de pertinence, privant une partie de la chance de présenter la question devant le juge qui présidera au procès afin de le laisser y accorder le poids qu'il jugera bon.

 

J'appellerai cette approche celle du critère « manifeste et évident » lors de la radiation de certaines parties d'un acte de procédure. Même si le juge en chef faisait expressément mention de l'article 53 des Règles, je crois néanmoins qu'il convient également d'appliquer cette approche pour décider si ces paragraphes énoncent des faits ou des éléments de preuve.

 

[24]         L'intimée a soutenu que l'avis d'appel expose des faits se rapportant au processus mental et à la conduite du ministre, mais je ne crois pas que ces paragraphes visent le processus mental ou la conduite du ministre ou qu'ils renferment des commentaires à ce sujet. Ces paragraphes se rapportent aux divers documents qui, si j'ai bien compris l'appelante, sont déjà en la possession du ministre. Les paragraphes identifient simplement les documents. Il n'y est aucunement allégué qu'il y a eu conduite inappropriée ou irrégulière et aucun reproche n'est fait au sujet du processus mental qui peut avoir été suivi. Ces paragraphes indiquent simplement ce qui s'est passé sur une longue période. Je crois que l'appelante doit être autorisée à conserver ces paragraphes dans son avis d'appel, parce qu'ils peuvent être pertinents quant à la JVM des biens‑fonds lorsqu'il s'agira d'établir pourquoi un si grand nombre d'évaluations avaient été obtenues avant que l'intimée en choisisse une. Cela est peut‑être pertinent ou ne l'est peut‑être pas pour ce qui est de l'issue du litige, mais à ce stade de l'instance, il n'est pas manifeste ni évident selon moi que ces paragraphes contiennent des éléments de preuve ou des faits non pertinents à un point tel que je devrais les radier de l'avis d'appel. À ce stade de l'instance, puisque je n'ai entendu aucune preuve, je ne suis pas convaincue que ces paragraphes sont inappropriés ou non pertinents à un point tel qu'ils devraient être radiés. Le juge qui entendra finalement le présent appel sera mieux placé, à la lumière de la preuve, pour décider du poids et de la pertinence à accorder, le cas échéant, aux autres évaluations. La question de savoir si ces paragraphes tendent à prouver que la position prise par l'appelante au sujet de l'évaluation est la bonne est une question qu'il convient de laisser à l'appréciation du juge du procès, une fois qu'il aura entendu les parties. Étant donné que la plupart des documents mentionnés, sinon tous, sont entre les mains de l'appelante, et puisque je crois qu'ils peuvent certes faire l'objet d'une communication préalable, je ne vois pas en quoi une requête à ce stade de l'instance est la procédure qui convient pour déterminer le poids et la pertinence de ces paragraphes.

 

[25]         En répondant à la question posée par l'intimée (« Quel est le rapport entre ce fait et la valeur des terrains forestiers? »), il semble raisonnable pour l'appelante de soulever la question de l'existence des évaluations pertinentes que le ministre a obtenues en déterminant la valeur des terrains forestiers. À mon avis, puisque la preuve n'a pas encore été entendue, il est prématuré de se prononcer sur l'exactitude et sur la pertinence des allégations dont la radiation est demandée.

 

[26]         Le dernier moyen que l'intimée a invoqué à l'appui de la présente requête était que les paragraphes en question pouvaient compromettre ou retarder l'instruction équitable de l'appel. L'article 53 des Règles prévoit ce qui suit :

 

53. La Cour peut radier un acte de procédure ou un autre document ou en supprimer des passages, en tout ou en partie, avec ou sans autorisation de le modifier parce que l'acte ou le document :

 

a) peut compromettre ou retarder l'instruction équitable de l'appel;

 

b) est scandaleux, frivole ou vexatoire;

 

c) constitue un recours abusif à la Cour.

 

L'intimée a limité cet argument à l'alinéa 53a) des Règles. Il ressort clairement de la jurisprudence que la Cour estime qu'il faut faire preuve d'une grande retenue en appliquant cette disposition aux actes de procédure. Dans la décision 935475 Ontario Limited c. La Reine, 2009 CCI 196, 2009 D.T.C. 1130, au paragraphe 34, le juge Jorré a dit ce qui suit :

 

Il est clair, à première vue, que l'article 53 ne concerne pas la radiation d'actes de procédure déficients, mais plutôt la radiation d'actes de procédure susceptibles de préjudicier sensiblement au déroulement du procès. [...]

 

Le juge des requêtes doit être vigilant lorsqu'il s'agit de radier certains passages d'un acte de procédure qu'une partie veut soumettre au juge qui entendra l'appel. Une requête est une mesure préliminaire pendant laquelle aucun élément de preuve n'est présenté au sujet du poids et de la pertinence. Lorsqu'une requête en radiation est présentée, la Cour doit veiller à ce que les allégations qu'une partie veut soumettre au juge qui présidera le procès ne soient pas supprimées d'une façon inappropriée, ce qui aurait pour effet de priver cette partie du droit de plaider que l'allégation est pertinente à la lumière de l'ensemble de la preuve présentée au cours de l'audience.

 

[27]         Dans la décision Main Rehabilitation Co. Ltd. c. La Reine, 2003 CCI 454, 2004 D.T.C. 2099, au paragraphe 2, le juge Woods a dit ce qui suit au sujet de l'article 53 des Règles :

 

Le seuil d'application de l'article 53 est élevé. Cet article ne peut s'appliquer à moins que la question soulevée dans l'avis d'appel n'ait clairement aucun bien‑fondé. L'issue doit être « évidente et manifeste » et le résultat « au‑delà de tout doute raisonnable » [...]

 

[28]         L'intimée a invoqué les arguments suivants :

 

[TRADUCTION]

 

Le maintien des paragraphes en question risquerait de compromettre ou de retarder une instruction équitable. Ce motif de radiation est prévu à l'alinéa 53a) des Règles.

 

Les allégations concernant le processus d'établissement des cotisations peuvent uniquement servir à causer préjudice au ministre. Cela peut nuire à la cause du ministre. Cela peut créer chez le juge des faits un préjudice favorable à la cause de l'appelante et peut détourner son attention de la véritable question en litige. Les allégations portant sur le processus d'établissement des cotisations peuvent servir à retarder l'instruction. Elles élargiront la portée des questions en litige. Elles prolongeront le processus de production et de communication préalable ainsi que le procès; de plus, ces allégations exposent le ministre à une recherche faite à l'aveuglette.

 

Si les paragraphes en question ne sont pas radiés, les parties se lanceront ou risquent de se lancer dans des querelles procédurales avant que l'appel puisse être entendu. Les ressources des parties et les ressources judiciaires seront inutilement utilisées pour démêler des questions de pertinence, et l'appel sera finalement plus compliqué et plus long que nécessaire. Les ressources judiciaires seront inutilement utilisées pour tenter de démêler des allégations portant sur des opinions provisoires et sur le processus décisionnel interne du ministre.

 

(Transcription, pages 10 et 11)

 

[29]         À vrai dire, je ne vois pas comment ces paragraphes peuvent compromettre ou retarder l'instruction. Somme toute, c'est la JVM des biens‑fonds qui est en litige. Je ne vois pas comment, comme l'intimée le soutient, ces paragraphes élargiront la portée de la question en litige ou détourneront l'attention de la question en litige. À première vue, ces évaluations antérieures semblent aider à préciser la question en litige en ce qui concerne l'exactitude de l'évaluation sur laquelle le ministre se fonde. Je ne souscris pas à la prétention de l'intimée lorsqu'elle affirme que le maintien de ces paragraphes dans l'avis d'appel aura pour effet de retarder les mesures qui aboutiront à l'instruction. J'ai déjà dit que, selon moi, l'appelante aura droit à la communication préalable de la plupart de ces documents, parce qu'ils portent tous clairement sur l'évaluation des biens‑fonds, soit la seule question en litige dans le présent appel. La pertinence se voit attribuer, lors de la communication préalable, une portée beaucoup plus large que lors d'une audience. L'appelante a fait savoir qu'elle avait déjà à sa disposition la plupart des renseignements par suite d'une demande d'accès à l'information. Je ne crois pas non plus que le maintien de ces paragraphes dans l'avis d'appel donnera lieu à des recherches à l'aveuglette. Ces paragraphes contiennent des renseignements se rapportant à la question en litige, des renseignements qui peuvent être pertinents pour ce qui est du résultat. Il n'y a tout simplement aucune indication que l'appelante cherche à faire annuler la cotisation au motif que le ministre a exercé son pouvoir d'une façon irrégulière. Au contraire, l'avocat de l'appelante a affirmé : [TRADUCTION] « En rédigeant l'avis d'appel, j'ai essayé de ne pas faire mention de la conduite. » (Transcription, page 27.) Il a également dit : [TRADUCTION] « Nous ne nous plaignons pas. Nous ne faisons que relater ce qui s'est passé sur une longue période. » (Transcription, page 32.) Il me semble que l'intimée ne se sent tout simplement pas à l'aise lorsqu'elle se voit obligée de prendre position au sujet de l'existence de ces diverses évaluations.

 

[30]         Je tiens à rappeler aux avocats de l'intimée les remarques que le juge en chef Bowman a faites au paragraphe 11 de la décision Sentinel Hill :

 

[...] Lorsque la Couronne, dès qu'elle voit un argument juridique qu'elle n'aime pas, cherche à le faire radier, la tactique qu'elle emploie est déplorable. Comme je l'ai dit dans la décision Sackman c. The Queen, 2007 CCI 455, c'est ce genre de querelle qui met les litiges fiscaux hors de la portée des personnes ordinaires. Je ne veux pas voir la Cour devenir l'enceinte où l'on se livre à des manœuvres procédurales. [...]

 

L'intimée a menacé de soumettre de nouveau l'affaire à la Cour au cours des interrogatoires préalables si je laissais ces paragraphes dans l'avis d'appel, mais je tiens à avertir les deux parties qu'elles devraient se montrer prudentes sur ce point, parce qu'en l'absence d'une raison suffisante pour présenter une autre requête avant l'audition de l'affaire, la partie fautive pourrait devenir la cible d'une flèche portant la mention « dépens » se dirigeant droit vers elle.

 

[31]         La requête est rejetée avec dépens, ceux‑ci étant payables sur‑le‑champ.

 

[32]         L'intimée disposera d'un délai de 30 jours à compter de la date de la présente ordonnance pour déposer une réponse.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juin 2009.

 

 

« Diane Campbell »

Le juge Campbell

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'octobre 2009.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2009CCI314

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2009-411(IT)G

 

INTITULÉ :                                       Algoma Central Corporation c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 13 mai 2009

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :      L'honorable juge Diane Campbell

 

DATE DE L'ORDONNANCE :          Le 10 juin 2009

 

COMPARUTIONS :      

 

Avocat de l'appelante :

Me David Malach

 

Avocats de l'intimée :

Me Marie-Thérèse Boris

Me Thang Trieu

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

          Pour l'appelante :

 

                   Nom :           David Malach

 

                   Cabinet :      Aird & Berlis

                                       Toronto (Ontario)

 

          Pour l'intimée :       John H. Sims, c.r.

                                       Sous-procureur général du Canada

                                       Ottawa, Canada

 

 

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