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Dossiers : 2008-2256(IT)I

2008-2260(IT)I

ENTRE :

AUDREY J. ARCHIBALD,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée;

 

ET ENTRE :

IAN G. ARCHIBALD,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE.

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appels entendus le 1er avril 2009, à Edmonton (Alberta).

 

          Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

 Pour les appelants :

M. Ian G. Archibald

 

 Avocate de l’intimée :

Me Holly A. Peterson

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

       

          Les appels interjetés à l’égard des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2004 sont accueillis, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations compte tenu du fait que les frais juridiques dont la déduction a été demandée peuvent être déduits dans le calcul des pertes d’une société de personnes.

 

          Les appelants ont droit à leurs dépens, le cas échéant.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 22e jour d’avril 2009.

 

 

 

« J. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de juin 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 215

Date : 20090422

Dossiers : 2008-2256(IT)I

2008-2260(IT)I

ENTRE :

AUDREY J. ARCHIBALD,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée;

ET ENTRE :

IAN G. ARCHIBALD,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE.

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Woods

 

[1]     Les présents appels ont été interjetés à l’égard de cotisations d’impôt sur le revenu établies à l’égard d’Ian et d’Audrey Archibald pour leur année d’imposition 2004. Le litige porte sur la déductibilité de frais juridiques engagés dans le cadre d’une nouvelle entreprise commerciale.

 

[2]     Depuis de nombreuses années, M. Archibald et son épouse exploitent une entreprise au moyen d’une société de personnes (la « société de personnes ») dont les bénéfices sont partagés à raison de 75 % pour M. Archibald et de 25 % pour Mme Archibald. Quoique la preuve au sujet des activités de la société de personnes n’était pas aussi claire que je l’aurais souhaité, il semble que les revenus de la société de personnes provenaient des services de conseil fournis par M. Archibald.

 

[3]     Selon les déclarations de revenus des appelants pour l’année d’imposition 2004, les pertes nettes totales de la société de personnes s’élevaient à 18 372,09 $. Les appelants ont inclus des frais juridiques de 14 216,21 $ dans le calcul de ces pertes.

 

[4]     Les appelants soutiennent que les frais juridiques en question peuvent être déduits à titre de dépense engagée par la société de personnes pour produire un revenu.

 

[5]     Les frais juridiques avaient été facturés par un cabinet d’avocats pour des conseils et la préparation de documents relatifs à l’émission de titres d’une nouvelle société (la « nouvelle société ») à des investisseurs. Selon ce que j’ai compris, cette nouvelle société devait se servir des fonds ainsi obtenus pour acheter des condominiums de plaisance et ensuite vendre des fractions d’intérêts dans ces propriétés. Une grande partie du travail juridique en question avait trait à la préparation d’une notice d’offre devant servir à la vente de titres de la nouvelle société.

 

[6]     M. Archibald a témoigné qu’il était prévu que la société de personnes obtienne des revenus de l’entreprise de deux façons : en tirant des commissions de la vente des titres et en étant rémunérée pour la gestion de la nouvelle société.

 

[7]     Dans les faits, les appelants n’ont pas réussi à trouver un nombre suffisant d’investisseurs pour rendre le projet viable, et ils l’ont donc abandonné.

 

[8]     L’intimée soutient que les frais juridiques en cause ne peuvent pas être déduits dans le calcul des revenus de la société de personnes parce que ces frais n’ont pas été engagés par celle‑ci, mais plutôt par la nouvelle société.

 

Analyse

 

[9]     Pour savoir si les frais juridiques en cause ont été engagés par la société de personnes ou par la nouvelle société, il faut déterminer la nature de l’accord intervenu entre les associés de la société de personnes et la nouvelle société. La nouvelle entreprise était de petite envergure, et l’accord n’a pas été consigné. Ainsi, la nature de l’accord ne peut être déterminée qu’en se fondant sur les circonstances de l’affaire.

 

[10]    À mon avis, les appelants ont établi selon la prépondérance des probabilités que les frais juridiques en cause ont été engagés par la société de personnes.

 

[11]    Il est clair que M. Archibald avait l’obligation légale de payer les frais juridiques. Le cabinet d’avocats lui avait envoyé des factures, et un jugement lui ordonnant de les acquitter avait même été rendu à son encontre. Le nom de la nouvelle société, qui venait d’être constituée par le cabinet d’avocats, figurait aussi sur les factures et sur le jugement, mais cela n’effaçait pas la responsabilité de M. Archibald. La preuve indique aussi que le cabinet d’avocats avait fait inscrire un privilège sur le titre de propriété de la résidence familiale des appelants pour garantir le recouvrement de sa créance.

 

[12]    Je me pencherai d’abord sur la question de savoir qui, de M. Archibald ou de la société de personnes, a engagé les frais juridiques en cause. L’avocate de l’intimée a affirmé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuve pour lier la société de personnes à ces frais.

 

[13]    À première vue, cet argument semble convaincant, car la documentation ne comporte ni le nom des associés (les appelants) ni le nom de la société de personnes. De plus, M. Archibald a témoigné qu’il aurait probablement reçu un salaire de la nouvelle société. D’un point de vue juridique, la notion de « salaire » est incompatible avec les revenus d’entreprise obtenus par une société de personnes.

 

[14]    Malgré ces difficultés, j’ai conclu, compte tenu de l’ensemble de la preuve, que M. Archibald avait bel et bien engagé les frais juridiques en cause au nom de la société de personnes.

 

[15]    Selon le témoignage de M. Archibald, lequel n’a pas été contesté, les diverses activités commerciales qu’il menait étaient entreprises au nom de la société de personnes. Il n’y a aucune raison de croire que les revenus produits par le travail de M. Archibald dans le cadre de l’entreprise commerciale en cause auraient été traités différemment.

 

[16]    Dans son témoignage, M. Archibald a mentionné qu’il aurait peut‑être reçu un salaire de la nouvelle société. Cela est incompatible avec la position voulant que c’était la société de personnes qui aurait obtenu les revenus, car un salaire peut seulement être versé à un particulier en sa qualité d’employé.

 

[17]    À mon avis, dans son témoignage, M. Archibald voulait dire que la société de personnes aurait touché des revenus grâce aux services qu’il aurait fournis. Je ne crois pas qu’il employait le terme « salaire » dans son sens juridique.

 

[18]    Je conclus donc que les frais juridiques en cause n’ont pas été engagés par M. Archibald à titre personnel, mais plutôt au nom de la société de personnes.

 

[19]    Il reste à savoir si la société de personnes a engagé les frais en son nom propre ou si elle l’a fait pour le compte de la nouvelle société.

 

[20]    En appliquant à l’accord conclu entre la société de personnes et la nouvelle société une interprétation fondée sur le bon sens, j’ai conclu que la société de personnes avait engagé les frais juridiques en son propre nom, tout en conservant le droit d’être éventuellement remboursée si l’entreprise allait de l’avant.

 

[21]    La nouvelle entreprise représentait probablement un projet très risqué pour la société de personnes. Il semble qu’il s’agissait là d’une entreprise de nouveau genre pour M. Archibald, et celui‑ci avait engagé les frais juridiques avant même de savoir si un nombre suffisant d’investisseurs allaient manifester leur intérêt.

 

[22]    L’ébauche de la notice d’offre traite du paiement de frais juridiques. Il est probable que la nouvelle société aurait remboursé ces frais à la société de personnes si le projet était allé de l’avant. Cependant, la société de personnes ne s’attendait pas à être remboursée si l’émission de titres n’avait pas lieu.

 

[23]    Ainsi, j’ai conclu que la société de personnes a engagé les frais juridiques pour son propre compte.

 

[24]    Ces conclusions suffisent à disposer des présents appels. Je tiens à souligner que d’autres arguments avaient été soulevés dans la réponse à l’avis d’appel, mais ils n’ont pas été invoqués à l’audience. Ces arguments portaient que les frais juridiques n’avaient pas été engagés pour obtenir des revenus et qu’ils avaient été payés à titre de capital. Comme ces arguments n’ont pas été invoqués à l’audience, il n’est pas nécessaire de les considérer.

 

[25]    Par conséquent, les appels sont accueillis, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il établisse des nouvelles cotisations compte tenu du fait que les frais juridiques en cause peuvent être déduits dans le calcul des pertes de la société de personnes.

 

[26]    Les appelants ont droit à leurs dépens, le cas échéant.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 22e jour d’avril 2009.

 

 

 

« J. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de juin 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2009 CCI 215

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2008-2256(IT)I

2008-2260(IT)I

 

INTITULÉS :

Audrey J. Archibald et Sa Majesté la Reine

et Ian G. Archibald et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 1er avril 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge J. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 22 avril 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Pour les appelants :

M. Ian G. Archibald

 

Avocate de l’intimée :

Me Holly A. Peterson

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

Pour les appelants :

 

Nom :

s.o.

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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