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Dossier : 2007-95(IT)G

 

ENTRE :

RICK ROBERTSON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

________________________________________________________________

 

Appel entendu le 6 octobre 2008, à Edmonton (Alberta).

 

Devant : L'honorable juge Valerie Miller

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelant :

Me Gordon D. Beck

Avocate de l'intimée :

Me Margaret M. McCabe

 

________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          Les appels interjetés à l'égard des nouvelles cotisations établies sous le régime de la Loi de l'impôt sur le revenu relativement aux années d'imposition 2000, 2001 et 2002 sont accueillis, avec dépens, et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'avril 2009.

 

 

« V. A. Miller »

Le juge V. A. Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de juin 2009.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 183

Date : 20090403

Dossier : 2007-95(IT)G

 

ENTRE :

RICK ROBERTSON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

 

 

Dossier : 2007-271(IT)G

 

ET ENTRE :

RICK ROBERTSON ENGINEERING LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge V. A. Miller

 

[1]              Les présents appels ont été entendus sur preuve commune. Ils concernent les années d'imposition 2000, 2001 et 2002 de Rick Robertson ainsi que les années d'imposition se terminant le 31 mars 2001 et le 31 mars 2002 de Rick Robertson Engineering Ltd. (« RREL »). Les questions en litige en l'espèce sont nombreuses. Les voici :

 

a)       RREL était‑elle une entreprise de prestation de services personnels?

 

b)      Les sommes suivantes ont‑elles été incluses à juste titre dans le revenu de Rick Robertson?

 

 

2000

2001

2002

Revenu non déclaré

963,00 $

$

$

Avantage au titre de l'intérêt sur un prêt à l'actionnaire

9 123,23

14 160,06

8 624,69

Avantage conféré à l'actionnaire — promotion

 

8 206,00

4 546,00

Avantage conféré à l'actionnaire — déplacement

 

26 068,00 P

32 232,00 P

Avantage conféré à l'actionnaire — adhésions personnelles

 

3 580,00 P

1 163,00 P

 

c)       Les éléments suivants figurant dans les nouvelles cotisations établies relativement à RREL sont‑ils exacts?

 

 

2001

2002

Frais promotionnels refusés

6 028,00 $

2 820,00 $

Frais de déplacement refusés

23 665,30 P

32 515,58 P

Droits d'adhésion et cotisations refusés

 

1 163,00 P

Revenu surévalué tiré de courses de chevaux

 

-759,00

Déduction aux petites entreprises refusée

6 396,00

6 814,00

 

d)      Les pénalités imposées en application du paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi ») relativement aux sommes marquées d'un P dans les tableaux ci‑dessus étaient‑elles justifiées?

 

[2]              Rick Robertson et Patricia McCulloch, agent des appels à l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC »), ont témoigné à l'audience.

 

[3]              Rick Robertson (« M. Robertson ») est titulaire d'un diplôme d'ingénieur électricien depuis 1984 et il a obtenu le permis d'exercice de sa profession en 1987. Il a travaillé pour la ville de Calgary, puis comme associé d'une société dénommée A & W Associates. Selon son témoignage, M. Robertson envisageait, en 1992, d'étendre les activités de son entreprise. Il a rencontré Gerry Stebnicki, également ingénieur électricien, et ils ont décidé, avec Ron Skene, de travailler ensemble par l'intermédiaire d'une société qui appartenait à M. Stebnicki et que ce dernier a renommée Stebnicki, Robertson & Assoc. Ltd. (« SRAL »). Son expert‑comptable lui ayant conseillé de constituer sa propre société, M. Robertson a fondé RREL en 1992.

 

[4]              Pendant toute l'audience, M. Robertson a qualifié SRAL de société de personnes et ses collaborateurs d'associés. Or, selon l'article 3 de la loi intitulée Partnership Act (Loi sur les sociétés de personnes) de l'Alberta, la relation existant entre les membres de SRAL ne constitue pas une société de personnes :

 

[TRADUCTION]

 

Exclusion
 

3          La relation entre les membres d'une société ou d'une association constituée en personne morale en application des dispositions de n'importe quelle loi en vigueur en Alberta ne constitue pas une société de personnes au sens de la présente loi[1].

 

[5]              Rick Robertson est l'unique actionnaire et administrateur de RREL. Pendant les années frappées d'appel, il était l'un des administrateurs de SRAL, et RREL détenait entre 25 pour 100 et 30 pour 100 des actions de SRAL. Chaque associé de SRAL détenait, par l'entremise de sa propre société, des actions de SRAL.

 

[6]              En 2001 et en 2002, RREL a tiré son revenu de la prestation de services d'électrotechnique et de courses de chevaux. En 2001 et en 2002, la totalité du revenu tiré des services d'électrotechnique a été reçu de SRAL. Selon le témoignage de M. Robertson, au cours des années antérieures à celles frappées d'appel, RREL tirait ses revenus de petits projets auxquels SRAL ne participait pas (transcription, p. 95). Pendant ces années antérieures, RREL tirait en outre un revenu de ses placements dans une petite société d'imprimerie et dans l'immobilier. Postérieurement à 2002, RREL a acquis des actions dans RSR Engineering Services et a fourni des services à cette entreprise, qui offrait des services de mise en service (transcription, p. 94).

 

[7]              RREL avait deux employés : M. Robertson, qui rendait des services en sa qualité d'ingénieur, et son épouse, Brenda Robertson, qui rendait des services de secrétariat pour l'entreprise de génie et des services de gestion pour l'entreprise de courses de chevaux. Brenda recevait 30 000 $ par année pour les services qu'elle rendait, et le ministre du Revenu national (le « ministre ») a reconnu que cette somme était raisonnable compte tenu des circonstances (pièce AR‑1, onglet 22).

 

[8]              Monsieur Robertson a mentionné que chacun des actionnaires de SRAL devait obtenir ses propres contrats. Il a affirmé que, lorsqu'il a commencé à travailler chez SRAL, ses clients l'ont suivi et sont demeurés ses clients. Il a ajouté qu'il a, depuis, quitté SRAL et que ses principaux clients sont toujours les mêmes que ceux qu'il avait avant et pendant son travail chez SRAL.

 

[9]              L'un des clients de longue date de M. Robertson était le Calgary Exhibition and Stampede (l'« exposition »). Les autres genres de projets auxquels il a travaillé consistaient notamment en des améliorations locatives apportées à des immeubles à bureaux et à des écoles. Les autres ingénieurs chez SRAL avaient principalement obtenu des contrats visant de nouveaux projets immobiliers, comme des hôpitaux.

 

[10]         Monsieur Robertson a déclaré que le fait de travailler par l'entremise de SRAL lui offrait la possibilité d'entreprendre des projets plus importants. Même si ses clients devenaient de plus en plus importants, il pouvait néanmoins leur fournir des services. SRAL employait des secrétaires, des commis, des administrateurs de contrats, des techniciens agréés en génie et des concepteurs de dessins qui pouvaient l'aider lors de ses projets.

 

[11]         Lorsque l'un ou l'autre de ses clients mettait un projet sur pied, il lui demandait de présenter une offre de services (« OS »). À titre d'exemple, M. Robertson a mentionné que, lorsque les responsables de l'exposition ont décidé de faire construire le Calgary Stampede Roundup Center Expansion, ils ont communiqué avec lui. De son côté, il a communiqué avec divers architectes qui prévoyaient présenter une OS relativement au projet de façon à pouvoir aligner ses actions sur les leurs et faire partie de leur équipe. Il a ensuite établi son OS, qu'il a remise à l'architecte, et ce dernier l'a présentée comme faisant partie intégrante de la soumission. Son équipe a été choisie pour concevoir l'immeuble.

 

[12]         Monsieur Robertson a assisté à toutes les rencontres tenues pour la conception. C'est lui qui a décidé de l'aspect que présenterait l'immeuble sur le plan de l'électricité, c'est‑à‑dire qu'il a conçu le système électrique ainsi que les systèmes d'alarme et de sécurité. Parvenu à l'étape de la conception du système électrique, il a demandé l'aide des techniciens en génie électronique et des concepteurs de dessins assistés par ordinateur qui ont à proprement parler produit les dessins. Lorsque les travaux de construction ont débuté, M. Robertson a désigné un administrateur de contrats pour le projet. Celui‑ci s'est rendu à toutes les autres rencontres et a suivi l'évolution des travaux pour veiller à ce que le projet soit conforme à la conception et à la réglementation.

 

[13]         Monsieur Robertson a signalé que les clients pour lesquels il travaillait étaient les clients de RREL et non ceux de SRAL. Aucun des autres ingénieurs de SRAL ne travaillait en vertu de ses contrats, et il ne participait à aucun des leurs.

 

[14]         La totalité des contrats, des factures, des lettres, etc., visant les clients de RREL étaient établis sur le papier à en‑tête de SRAL. Toutes les dépenses engagées par RREL au titre d'un projet étaient facturées aux clients par SRAL, qui ensuite remboursait RREL. L'assurance responsabilité de M. Robertson était établie au nom de SRAL et non de RREL. Il a affirmé que l'assurance responsabilité de tous les associés était établie au nom de SRAL puisqu'ils pouvaient ainsi obtenir un taux plus avantageux.

 

[15]         Aucune entente écrite n'a été conclue par SRAL et RREL. De même, aucune entente écrite n'a été conclue par M. Robertson et RREL.

 

[16]         Toutes les deux semaines, RREL envoyait à SRAL une facture de 3 750 $ pour les services rendus par M. Robertson. À la fin de l'exercice, les administrateurs de SRAL déclaraient des primes ou des dividendes en faveur des actionnaires de la société de sorte que son revenu soit ramené à zéro. La somme que chaque actionnaire recevait était calculée selon le pourcentage d'actions qu'il détenait et ce pourcentage changeait chaque année en fonction du revenu généré par l'actionnaire. Les primes payées à RREL s'élevaient respectivement à 175 000 $ et à 207 000 $ en 2001 et en 2002.

 

Entreprise de prestation de services personnels

 

[17]         Le terme « entreprise de prestation de services personnels » est défini au paragraphe 125(7) de la Loi :

 

« entreprise de prestation de services personnels » S'agissant d'une entreprise de prestation de services personnels exploitée par une société au cours d'une année d'imposition, entreprise de fourniture de services dans les cas où :

 

asoit un particulier qui fournit des services pour le compte de la société — appelé « employé constitué en société » à la présente définition et à l'alinéa 18(1)p);

 

b) soit une personne liée à l'employé constitué en société,

 

est un actionnaire déterminé de la société, et où il serait raisonnable de considérer l'employé constitué en société comme étant un cadre ou un employé de la personne ou de la société de personnes à laquelle les services sont fournis, si ce n'était de l'existence de la société, à moins :

 

c) soit que la société n'emploie dans l'entreprise tout au long de l'année plus de cinq employés à temps plein;

 

dsoit que le montant payé ou payable à la société au cours de l'année pour les services ne soit reçu ou à recevoir par celle‑ci d'une société à laquelle elle était associée au cours de l'année.

 

[18]         Dans les présents appels, Rick Robertson peut être considéré comme un employé constitué en société. L'avocat des appelants a soutenu que RREL n'est pas une entreprise de prestation de services personnels et que, si j'arrive à la conclusion contraire, l'alinéa d) de la définition serait alors applicable.

 

[19]         Pour décider si RREL exploitait une entreprise de prestation de services personnels, il faut répondre à la question suivante : M. Robertson pourrait‑il raisonnablement être considéré comme un cadre ou un employé de SRAL, si ce n'était de l'existence de RREL? Il convient donc d'examiner les facteurs pertinents pour décider si un travailleur est un employé ou un entrepreneur indépendant. La décision de principe en la matière est l'arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc.[2] de la Cour suprême du Canada. Dans cette affaire, le juge Major s'est penché sur le critère à quatre volets énoncé dans l'arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N.[3] et il a tenu les propos suivants aux paragraphes 47 et 48 :

 

47        Bien qu'aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l'employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s'il engage lui-même ses assistants, quelle est l'étendue de ses risques financiers, jusqu'à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu'à quel point il peut tirer profit de l'exécution de ses tâches. [Non souligné dans l'original.]

 

48        Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n'y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l'affaire.

 

[20]         À la lumière de tous les faits particuliers des présents appels, je suis d'avis que M. Robertson a rendu des services en sa qualité d'ingénieur à titre de personne travaillant à son compte. Il avait ses propres clients, il devait obtenir ses propres contrats et, en définitive, ses gains étaient tributaires de ses efforts. SRAL ne participait à une offre qu'après que M. Robertson eut obtenu le contrat. Monsieur Robertson travaillait uniquement en vertu des contrats qu'il obtenait lui‑même; il ne travaillait pas en vertu des contrats obtenus par les autres associés. SRAL effectuait les travaux d'écriture pour M. Robertson; son personnel travaillait pour les projets de ce dernier et, en fin de compte, il payait SRAL pour ces services.

 

[21]         Il avait la possibilité de réaliser des profits et il courait le risque de subir des pertes lorsqu'il fournissait des services en sa qualité d'ingénieur. Sa part des profits réalisés par SRAL était établie en fonction de la somme d'argent qu'il faisait gagner à cette dernière. Il ne recevait aucune rémunération pour le temps passé à travailler à une offre si celle‑ci ne donnait pas lieu à un contrat. SRAL lui remboursait uniquement les frais susceptibles d'être facturés à un client. Lorsqu'il engageait une dépense en vue d'obtenir un contrat et que son offre n'était pas retenue, c'est lui qui devait assumer cette dépense.

 

[22]         Le contrat intervenu entre RREL et SRAL n'exigeait pas que M. Robertson travaille pendant un nombre d'heures particulier. Selon son témoignage, ses heures de travail variaient suivant les exigences du projet et de son client. Il pouvait travailler 20 heures pendant certaines semaines et jusqu'à 70 heures par semaine à d'autres occasions. Il décidait du moment de ses vacances et de la durée de celles‑ci.

 

[23]         La preuve a révélé que M. Robertson était indépendant. Il prenait les décisions quant aux projets qu'il choisissait d'entreprendre et quant à la façon de fournir ses services d'ingénieur. Il choisissait les personnes qui feraient partie de l'équipe travaillant en vertu de ses contrats. SRAL n'exerçait pas de contrôle et n'avait pas le droit d'exercer un contrôle sur la façon dont M. Robertson fournissait ses services d'ingénieur.

 

[24]         Monsieur Robertson a reconnu qu'un grand nombre des outils qui lui permettaient de fournir ses services d'ingénieur appartenaient à SRAL. Ces outils étaient utilisés par les employés de SRAL. Monsieur Robertson a mentionné qu'il était propriétaire de l'ordinateur, des codes, des ouvrages théoriques, des ouvrages de conception d'éclairage, des calculatrices, des stylos et du papier qu'il utilisait. L'avocat des appelants a fait valoir que les outils les plus importants dont disposent les spécialistes sont leur formation, leur expérience et leurs connaissances, et que ces outils appartiennent sûrement à M. Robertson. J'en conviens.

 

[25]         Selon l'avocate de l'intimée, les éléments de preuve que j'ai énumérés plus haut au paragraphe 14 donnent à penser qu'il existait un contrat de travail entre M. Robertson et SRAL. Après avoir apprécié l'ensemble des facteurs applicables, j'estime qu'il serait injustifié de conclure que, si ce n'était de l'existence de RREL, M. Robertson serait considéré comme un employé ou un cadre de SRAL en 2000, en 2001 et en 2002.

 

[26]         Je conclus que RREL n'était pas une entreprise de prestation de services personnels.

 

RREL

 

Frais de déplacement

 

[27]         Les frais de déplacement refusés pour l'année d'imposition se terminant le 31 mars 2001 consistaient en les sommes suivantes :

 

Chèque no 457 à Travel Masters

2 500,00 $

Déplacement

12 103,80

Déplacement — É.-U.

4 689,79

Automobile

2 871,71

Dépenses en espèces à payer et réglées par l'actionnaire

1 500,00

Total

23 665,30 $

 

Les frais de déplacement refusés pour l'année d'imposition se terminant le 31 mars 2002 consistaient en les sommes suivantes :

 

Charges non remboursées par SRAL

1 354,11 $

Travel Masters

15 393,00

Déplacement — frais de carte de crédit

8 984,56

Automobile

6 313,51

Déplacement — É.‑U.

470,40

Total

32 515,58 $

 

[28]         Monsieur Robertson a fait état des dépenses engagées par RREL. J'ai conclu qu'il était un témoin crédible et j'accepte son témoignage sur ce point. À cet égard, je me suis appuyée sur l'arrêt Hickman Motors Limited c. Canada[4] de la Cour suprême du Canada, où le juge L'Heureux‑Dubé mentionne ce qui suit au paragraphe 87 :

 

[...] De plus, lorsque la LIR n'exige aucun document d'appui, le témoignage crédible d'un contribuable suffit, malgré l'absence de documents : Weinberger c. M.N.R., 64 D.T.C. 5060 (C. de l'É.); Naka c. La Reine, 95 D.T.C. 407 (C.C.I.); Page c. La Reine, 95 D.T.C. 373 (C.C.I.).

 

[29]         Monsieur Robertson a déclaré que la somme de 2 500 $ payée à Travel Masters et celle de 1 500 $ déduite à titre de dépenses en espèces à payer en 2001 constituaient des dépenses d'entreprise. Il n'était pas en mesure de fournir des explications ou des précisions concernant la somme de 2 500 $, et je suis d'avis qu'il ne s'agissait pas d'une dépense d'entreprise. Il a affirmé qu'il avait payé en espèces certaines des dépenses de RREL. Il n'a pas tenu de registre de ces dépenses, mais lui et son expert‑comptable ont estimé que ces paiements en espèces totalisaient 1 500 $. En l'absence de renseignements plus précis, je ne puis accepter que la somme de 1 500 $ constitue une dépense d'entreprise de RREL.

 

[30]         Selon le témoignage de M. Robertson, RREL n'avait pas d'automobile ni de carte de crédit. Il utilisait son propre camion et sa propre carte de crédit pour les activités commerciales de RREL. Chaque mois, il vérifiait ses relevés de carte de crédit et il marquait les dépenses engagées pour le compte de RREL. Il a ajouté qu'il avait examiné ces éléments avec son expert‑comptable et qu'il n'avait déduit que ceux avec lesquels ce dernier était d'accord.

 

[31]         En ce qui a trait à son camion, M. Robertson a allégué que les sommes de 2 871,71 $ et de 6 313,51 $ correspondaient aux dépenses totales qu'il avait engagées pour le camion au titre de l'essence, de l'assurance et des vidanges d'huile en 2001 et en 2002. Il a précisé qu'il avait déduit ces sommes parce qu'il pensait qu'elles étaient inférieures à une déduction de 0,35 $ le kilomètre. Dans les avis d'opposition, M. Robertson a déclaré qu'il devait fréquemment se rendre à Edmonton pour examiner des purs‑sangs lui appartenant ou susceptibles de l'intéresser, pour effectuer des opérations bancaires, pour acheter des fournitures ou pour assister à des réunions. Il a en outre affirmé qu'il ne tenait pas de registre, mais qu'il [TRADUCTION] « pouvait réexaminer ses documents et établir un registre approprié des déplacements précisant la distance parcourue ». Il n'a pas présenté de registre à l'audience. Il a plutôt estimé qu'il avait parcouru environ 50 000 kilomètres par année et qu'entre 60 pour 100 et 70 pour 100 de cette distance était imputable à l'entreprise.

 

[32]         Compte tenu du revenu que RREL a gagné tant à l'aide de son entreprise de génie que de son entreprise de courses de chevaux, il est évident que cette société a dû engager des dépenses. J'admets que M. Robertson a utilisé son camion aux fins des entreprises de RREL et que cette utilisation correspondait à 60 pour 100 de la distance parcourue. Plutôt que de recourir à une estimation des kilomètres parcourus chaque année, je crois préférable d'utiliser les dépenses présentées par M. Robertson. RREL peut déduire à titre de frais d'automobile les sommes de 1 723,03 $ et de 3 788,11 $ en 2001 et en 2002, respectivement.

 

[33]         Monsieur Robertson a fourni des renseignements sur la plupart des frais de déplacement qui ont été refusés. Il s'agissait notamment des précisions suivantes :

 

a)       La plus grande partie des frais de déplacement qui ont été refusés se rapportait à l'entreprise de courses de chevaux de RREL. Au cours de son année d'imposition 2002, RREL a tiré de ses activités liées aux courses de chevaux un revenu totalisant 35 841,49 $.

 

b)      Lorsque M. Robertson s'est rendu à Vancouver en 2000, en 2001 et en 2002, ses déplacements visaient toujours soit l'entreprise de courses de chevaux, soit les services de génie. Il s'est rendu à Vancouver pour rencontrer diverses personnes afin d'investir dans des chevaux, pour se familiariser avec Hastings Park ou pour obtenir des stalles pour ses chevaux. Selon son témoignage, on ne peut simplement se présenter à un hippodrome avec un cheval. Il faut d'abord rencontrer des gens qui vous aideront à trouver une stalle, un conducteur d'exercice et un jockey, à moins d'en avoir déjà un. Il est allé à Vancouver pour examiner les écuries, rencontrer les entraîneurs, vérifier la piste, rencontrer le secrétaire des courses et s'assurer qu'il faisait correctement tout ce qu'il devait faire avant le transport de ses chevaux. Il a précisé qu'il n'y a pas lieu de prendre un rendez‑vous lorsque l'on souhaite voir un hippodrome; il suffit de se rendre sur place puisque les personnes à rencontrer sont toujours là.

 

c)       Monsieur Robertson a expliqué qu'en 2000, il travaillait à un projet appelé Arctic Shores pour le compte du jardin zoologique de Calgary. Lui et son équipe s'étaient déjà rendus à Chicago et à Omaha pour y visiter leur jardin zoologique, et ils avaient projeté d'aller à Orlando pour voir la réserve Discovery. Au lieu de se rendre à Orlando avec son équipe, il y est allé avec sa famille puisqu'il avait déjà prévu passer des vacances familiales en Floride. Les seuls frais qu'il a déduits comme dépenses d'entreprise sont ceux qu'il a engagés pour sa propre visite de la réserve Discovery.

 

d)      Monsieur Robertson a eu vent d'une proposition touchant la construction d'une piste de courses, d'une tribune, d'un hôtel et d'un casino dans la région de Calgary. On estimait que les coûts de construction s'élèveraient à 200 millions de dollars. En mars 2002, il a réuni une équipe pour se rendre à Dallas, puis en Alabama, pour visiter différentes pistes de courses ainsi que différents casinos et hôtels. Son équipe se composait d'un architecte, d'un décorateur d'intérieur, d'un entrepreneur en électricité, d'un représentant en fabrication de systèmes d'alimentation sans coupure et d'un représentant en fabrication de systèmes de distribution. La piste de courses située à Dallas était la seule à avoir été construite en Amérique du Nord au cours de la dernière décennie. Lui et son équipe ont pu [TRADUCTION] « examiner l'infrastructure, la façon dont les choses avaient été construites et conçues et voir comment tout cela fonctionnait ». Monsieur Robertson a payé pour le voyage, lequel a coûté 15 393 $. Son équipe a réussi à obtenir le contrat, et le projet en était à l'étape de l'élaboration lorsque les investisseurs y ont mis fin. RREL n'a pu récupérer les dépenses qu'elle avait engagées.

 

e)       Dans son témoignage, M. Robertson a mentionné qu'il s'était rendu à Phoenix en février 2002 pour l'entreprise de courses de chevaux. Il a affirmé qu'il ne s'agissait pas de vacances familiales, contrairement à ce qu'a supposé le vérificateur de l'ARC. Il s'est vu dans l'obligation d'amener ses enfants avec lui parce qu'ils étaient très jeunes à ce moment‑là et que ni lui ni son épouse n'avait, à Calgary, de proches parents susceptibles de prendre soin des enfants. Il a par inadvertance déduit le coût des billets d'avion et de la chambre des enfants. Il a déclaré que les sommes de 1 403,20 $ et de 235,20 $ n'auraient pas dû être déduites comme dépenses d'entreprise.

 

f)       En avril 2001, RREL a présenté à SRAL une facture relative aux frais de déplacement de 3 020,46 $ qu'elle avait engagés. SRAL n'a remboursé que 1 666,35 $ puisqu'il s'agissait de la seule somme susceptible d'être imputée à un projet. RREL a dû assumer le solde, soit 1 354,11 $.

 

g)       En mai 2001, il s'est rendu à Birmingham pour l'entreprise de courses de chevaux et il a engagé des frais de 365,88 $ pour louer une voiture.

 

h)       En juillet 2001, il s'est rendu à Penticton. Deux raisons étaient à l'origine de ce déplacement : il voulait étudier la possibilité d'aménager un hôtel, d'une part, et donner l'occasion à son fils de suivre des cours dans une école de hockey, d'autre part. Il a déclaré qu'il avait passé la semaine entière avec des courtiers en immeubles ou à la chambre de commerce pour obtenir des renseignements généraux sur des terrains qui étaient à vendre. Il a déduit à titre de dépense d'entreprise les frais d'hôtel liés à ce déplacement, mais non les frais de repas et de déplacement.

 

[34]         Comme je l'ai déjà mentionné, j'estime que M. Robertson est un témoin crédible. Lorsqu'il a commis des erreurs dans la déduction de dépenses, il a volontiers admis s'être trompé. Il se souvenait de détails précis concernant la plupart de ses déplacements. J'arrive à la conclusion que RREL a engagé les frais de déplacement suivants :

 

31 mars 2001

 

31 mars 2002

 

Déplacement

12 103,80 $

Frais non remboursés

1 354,11 $

Déplacement — É.-U.

4 689,79

Travel Masters

15 393,00

Automobile

1 723,03

Déplacement — carte de crédit

7 346,16

Total

18 516,62 $

Automobile

3 788,11

 

 

Déplacement — É.-U.

470,40

 

 

Total

28 351,78 $

 

Frais promotionnels

 

[35]         Les frais promotionnels refusés en 2001 et en 2002 s'élevaient respectivement à 6 028 $ et à 2 820 $. Monsieur Robertson a témoigné au sujet de l'une des dépenses refusées. Il a mentionné qu'en 2002, des frais de 1 025 $ ont erronément été inscrits sous la rubrique « réunion de famille ». Or, il s'agissait plutôt d'un événement promotionnel tenu au ranch de ses parents, à Medicine Hat. Cette dépense a été faite en vue d'intéresser des investisseurs à l'entreprise de courses de chevaux de RREL et de trouver des investisseurs pour commencer à acquérir des biens immobiliers dans le secteur commercial. Le [TRADUCTION] « coût engagé au titre de cet événement en valait la peine » puisque RREL compte maintenant treize investisseurs dans divers purs‑sangs. RREL a en outre acheté des biens immobiliers commerciaux avec huit investisseurs.

 

[36]         Les frais promotionnels englobaient les frais de repas que M. Robertson a payés au cours de ses déplacements. Comme j'accepte que les frais de déplacement constituent une dépense d'entreprise, le coût des repas supporté à cette occasion est également accepté.

 

[37]         Je conclus que RREL a engagé des frais promotionnels de 4 608,92 $ et de 2 820 $ en 2001 et en 2002, respectivement.

 

Adhésions

 

[38]         Selon le témoignage de M. Robertson, RREL achetait chaque année des balles, des chemises et des gants de golf qu'elle offrait à ses clients pour leurs tournois de golf. En 2002, ces objets ont coûté 1 115 $ à RREL, et ces frais sont acceptés comme dépense d'entreprise.

 

Rick Robertson

 

[39]         L'avocat des appelants a reconnu que M. Robertson avait omis d'inclure la somme de 963 $ dans le calcul de son revenu en 2000.

 

Avantage au titre de l'intérêt

 

[40]         Un avantage au titre de l'intérêt a été inclus dans le revenu de M. Robertson en application du paragraphe 80.4(2) de la Loi aux fins de l'établissement de sa cotisation. Selon cette disposition, le contribuable qui a contracté une dette en faveur d'une société dont il est actionnaire est réputé avoir reçu un avantage. Cette disposition est ainsi rédigée :

 

(2) Idem — Lorsqu'une personne (autre qu'une société résidant au Canada) ou une société de personnes (autre qu'une société de personnes dont chacun des associés est une société résidant au Canada) était :

 

a) soit un actionnaire d'une société;

 

b) soit rattachée à un actionnaire d'une société;

 

c) soit un associé d'une société de personnes, ou un bénéficiaire d'une fiducie, qui était actionnaire d'une société,

 

et que, à ce titre, la personne ou la société de personnes a reçu un prêt de la société, de toute autre société qui lui est liée ou d'une société de personnes dont la société ou toute autre société qui lui est liée est un associé, ou a par ailleurs contracté une dette en faveur de l'une d'elles, la personne ou la société de personnes est réputée avoir reçu, au cours d'une année d'imposition, un avantage égal à l'excédent éventuel du total visé à l'alinéa d) sur le montant visé à l'alinéa e) :

 

dle total des intérêts sur tous ces prêts et sur toutes ces dettes, calculés au taux prescrit sur chacun de ces prêts et chacune de ces dettes pour la période de l'année où le prêt ou la dette était impayé;

 

ele montant des intérêts pour l'année versés sur tous ces prêts ou toutes ces dettes au plus tard 30 jours après le dernier en date de la fin de l'année et du 31 décembre 1982.

 

(3) Non-application des par. (1) et (2) — Les paragraphes (1) et (2) ne s'appliquent pas à un prêt ou à une dette ou à une partie quelconque d'un prêt ou d'une dette qui :

 

[...]

 

b) soit a été inclus dans le calcul du revenu d'une personne ou d'une société de personnes en vertu de la présente partie.

 

[41]         Il ressort de la preuve que RREL ne versait pas un salaire fixe à M. Robertson; ce dernier effectuait plutôt des prélèvements tout au long de l'année. Les soldes débiteurs de clôture au 31 décembre du compte de prêt à l'actionnaire de M. Robertson se chiffraient respectivement à 169 238,56 $, à 449 138,30 $ et à 255 831,66 $ en 2000, en 2001 et en 2002. Aucun intérêt n'a été payé sur ces sommes. Les soldes étaient réduits à zéro au 31 mars de l'année suivante, lorsque M. Robertson recevait sa prime ou ses dividendes.

 

[42]         Dans son témoignage, M. Robertson a déclaré qu'il ne pensait pas avoir jamais dû de l'argent à RREL. Il croyait plutôt que c'était RREL qui lui devait de l'argent. Les prélèvements qu'il recevait de RREL étaient consignés par ses experts‑comptables à la fin de l'exercice. Il a mentionné qu'il ne possédait pas des connaissances comptables suffisantes pour bien comprendre les éléments figurant dans le compte de l'actionnaire.

 

[43]         L'avocat des appelants a fait valoir que M. Robertson n'avait pas l'intention d'être un débiteur de RREL. C'est possible, mais il reste que l'intention n'est pas un facteur visé au paragraphe 80.4(2) de la Loi. La preuve ne permet nullement de penser que les soldes inscrits dans ce compte étaient inexacts ni qu'une erreur de report a été commise.

 

[44]         L'avocat des appelants a également soutenu que le paragraphe 80.4(3) de la Loi s'appliquait aux faits en l'espèce puisque M. Robertson avait inclus [TRADUCTION] « une somme équivalente au montant du prêt » dans le calcul du revenu. Je suppose que l'avocat renvoie à la prime ou aux dividendes qui ont été déclarés et crédités au compte de l'actionnaire de M. Robertson le 31 mars 2001 et le 31 mars 2002.

 

[45]         Cet argument ne peut être retenu. Le paragraphe 80.4(2) de la Loi fait état de la période de l'année où le prêt ou la dette était impayé. Les propos tenus par le juge Bonner dans la décision Wood c. M.R.N.[5] s'appliquent aux faits dont je suis saisie :

 

[...] La formulation de la loi est tout à fait claire. À la fin de chacune des journées de l'année, il est possible d'appliquer ce critère et de déterminer l'importance du bénéfice reçu au moment considéré sous réserve uniquement de la déduction des intérêts réellement versés par le débiteur conformément à ce qu'exige l'alinéa 80.4(1)c). La durée de la période pendant laquelle un prêt est en souffrance n'est modifiée ni par l'intention de faire en sorte qu'un montant suffisant de dividendes soit déclaré pour effectuer une compensation ni par ce qui aurait pu être fait en l'espèce. [...]

 

[46]         Par conséquent, compte tenu des circonstances de la présente affaire, je pense qu'on a inclus à juste titre un avantage au titre de l'intérêt dans la cotisation établie à l'égard de M. Robertson.

 

Avantages conférés à un actionnaire

 

[47]         Comme je conclus que de nombreuses sommes incluses dans le calcul du revenu de M. Robertson constituaient à juste titre des dépenses d'entreprise de RREL, ces mêmes sommes doivent être déduites des avantages qui ont été inclus dans le calcul du revenu de M. Robertson en application du paragraphe 15(1) de la Loi.

 

Pénalités pour faute lourde

 

[48]         Les pénalités se fondent sur l'hypothèse selon laquelle M. Robertson, en sa qualité d'unique actionnaire de RREL, donnait instruction à la société de faire de nombreux paiements qui n'étaient pas faits en vue de gagner un revenu. Les appelants ont en grande partie obtenu gain de cause dans les présents appels. J'arrive à la conclusion que la plupart des paiements constituaient en réalité des dépenses d'entreprise. Les pénalités imposées à RREL et à M. Robertson seront donc annulées.

 

[49]         Les appels sont accueillis avec dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'avril 2009.

 

 

« V. A. Miller »

Le juge V. A. Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de juin 2009.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2009CCI183

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2007-95(IT)G

 

INTITULÉ :                                       Rick Robertson et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 6 octobre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L'honorable juge Valerie Miller

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 3 avril 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Gordon D. Beck

Avocate de l'intimée :

Me Margaret M. McCabe

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour les appelants :

 

          Nom :           Me Gordon D. Beck

          Cabinet :      MacPherson, Leslie & Tyerman LLP

 

Pour l'intimée :       John H. Sims, c.r.

                             Sous-procureur général du Canada

                             Ottawa, Canada



[1] RSA 2000, ch. P-3, art. 3.

 

[2] [2001] 2 R.C.S. 983.

 

[3] [1986] 3 C.F. 553.

 

[4] [1997] 2 R.C.S. 336, 97 D.T.C. 5363 (CSC).

 

[5] no 86‑840(IT), 18 février 1988, 88 D.T.C. 1180 (CCI).

 

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