Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Dossier : 2008-754(EI)

ENTRE :

MERCK FROSST CANADA LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

DALE CHOQUETTE,

intervenante.

____________________________________________________________________

Demande de correction des motifs du jugement

rendu le 24 septembre 2008

 

par : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

Comparutions :

 

Avocats de l'appelante :

Me Pierre Barsalou

Me Anna Szuminski

Avocat de l'intimé :

Me Simon-Nicolas Crépin

Pour l'intervenante:

L'intervenante elle-même

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

        Attendu que cette Cour a émis un jugement avec motifs de jugement en date du 24 septembre 2008;

 

        Attendu que l'avocat de l'appelante a avisé la Cour qu'une erreur s'était glissée dans la deuxième phrase du paragraphe 23 des motifs du jugement et que la référence à l’appelante aurait plutôt dû être une référence à l’intervenante;

 

        Attendu qu’il s’agit d’une erreur manifeste et qui ne porte pas sur la substance du jugement;

 

        Il est ordonné que le paragraphe 23 des motifs du jugement soit corrigé ex parte pour se lire :

 

[23]    Après avoir entendu les témoins et avoir pris connaissance des documents pertinents, je suis d’avis qu’il ne fait aucun doute que le montant de 71 713,43 $ n’a pas été reçu à titre de salaire mais à titre d’allocation de retraite. L’intervenante n’a pas fourni au cours de la période en litige une prestation de travail et elle n’a pas touché de salaire. En conclusion, le congé offert à l’intervenante pour la période de 4 mars 2006 au 31 mars 2007 était véritablement un congé sans solde et n’était pas un emploi assurable.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de novembre 2008.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI538

Date : 20081112

Dossier : 2008-754(EI)

ENTRE :

MERCK FROSST CANADA LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

DALE CHOQUETTE,

intervenante.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT CORRIGÉS

 

La juge Lamarre Proulx

 

[1]     Il s’agit d’un appel, d’une décision du ministre du Revenu national (« l’intimé »), en date du 10 décembre 2007, voulant que madame Dale Choquette, l’intervenante, ait exercé un emploi assurable du 25 mars 2006 au 3 mars 2007, (« période en litige »).

 

[2]     Quelques jours avant l’audience, l’avocat de l’intimé a informé la Cour, l’appelante et l’intervenante, que l’intimé adoptait maintenant la même position que celle de l’appelante soit que madame Dale Choquette n’était pas dans un emploi assurable durant la période en litige. À cet égard, l’avocat de l’intimé a fait à la Cour une demande de remise au cas où l’intervenante aurait souhaité quelque temps supplémentaire pour se préparer.

 

[3]     L’intervenante, a choisi de procéder à la date fixée pour l’audience.

 

[4]     L’appelante a déposé un cahier de documents contenant huit onglets comme pièce A-1.

 

[5]     L’intervenante a témoigné. Elle a relaté qu’elle avait commencé à travailler pour Merck Frosst Canada Ltd. (« Merck Frosst ») le 20 novembre 1989. En décembre 2005, elle a reçu avec d’autres collègues de travail un avis de licenciement collectif.

 

[6]     Le 28 novembre 2005, Merck Frosst avait annoncé la première phase de son programme de restructuration globale qui incluait une diminution de ses effectifs qui affecterait 235 employés à travers le Canada (onglet 1 de la pièce A-1).

 

[7]     Les documents de l’employeur informant l’intervenante de la fin de son emploi ainsi que des possibilités qui lui étaient offertes relativement à sa retraite et ses bénéfices de pension portent la date du 7 décembre 2005 (onglet 2 de la pièce A-1).

 

[8]     Le délai du préavis légal de la fin d’un emploi était du 10 décembre 2005 au 3 mars 2006. Durant cette période, l’intervenante a conservé tous les droits d’une employée bien qu’elle ait cessé de travailler depuis le 9 décembre 2005, date à laquelle elle a remis à son employeur tous les biens appartenant à l’entreprise selon la fiche produite à l’onglet 4 de la pièce A-1.

 

[9]     L’employeur a offert à l’intervenante, à l’encontre d’une quittance signée par cette dernière, un « Enhanced Termination Compensation Package » dont les termes sont décrits à l’article 9 de l’entente du 7 décembre 2005. La proposition offrait notamment d’ajouter une année aux années d’emploi dans le but d’améliorer l’accès aux bénéfices du régime de pension de l’employeur. Pour cela, l’employeur a accordé à l’intervenante, une année de congé sans solde du 4 mars 2006 au 31 mars 2007.  

 

[10]    De plus, un montant forfaitaire de 71 713,43 $ lui sera payé. Ce montant peut lui être payé de façon bi-hebdomadaire à partir du 4 mars 2006 ou en un seul montant le 31 mars 2007. Un mode de paiement un peu différent du premier mode proposé a été conclu entre l’employeur et l’employée mais ce mode de paiement comprenait tout de même des versements à toutes les deux semaines.

 

[11]    Le relevé d’emploi (onglet 6 de la pièce A-1) indique que la dernière période de paye commence le 4 mars 2006 et que la rémunération était versée à toutes les deux semaines. Le relevé indique également qu’un paiement d’un montant de fin d’emploi sera payé à toutes les deux semaines jusqu’à mars 2007.

 

[12]    Madame Choquette aurait fait une demande de prestations d’assurance-emploi en février 2007, un mois avant la fin du paiement final du montant forfaitaire de 71 713,43 $, un mois avant la fin du congé d’un an sans solde qui lui avait été offert pour lui permettre d’accroître ses droits à la pension de retraite.

 

[13]    Au départ, le ministère des Ressources humaines et développement des compétences Canada aurait refusé la demande de prestations d’assurance-emploi au motif que la travailleuse n’avait pas suffisamment accumulé d’heures de travail entre le 29 janvier 2006 et le 27 janvier 2007. Elle avait accumulé 184 heures alors que pour se qualifier, elle avait besoin de 630 heures. Madame Choquette en a appelé le 6 mars 2007. Cet appel n’a pas été produit. Le 25 avril 2007, elle a reçu une lettre du même ministère, l’informant que la Commission avait changé sa décision et accordait en totalité le droit aux prestations d’assurance-emploi qui commenceront à être payées deux semaines après le 5 mars 2007, date où elle aurait cessé d’occuper un emploi assurable auprès de son employeur.

 

[14]    L’avocat de l’appelante ne conteste pas que durant la période en litige l’intervenante était dans une situation d’emploi mais, fait-il valoir, il s’agit d’un emploi non assurable car sans solde. La rémunération pour services rendus est un élément essentiel d’un emploi assurable au sens de la Loi de l’assurance-emploi (la « Loi »). Il se réfère à cet égard à l’alinéa 5(1)a) de la Loi :

 

5(1) Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

 

a)      l’emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d’un contrat de louage de services ou d’apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l’employé reçoive sa rémunération de l’employeur ou d’une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

 

[15]    L’avocat fait valoir que le paiement reçu est bien de la nature d’une allocation de retraite. Selon l’entente entre les parties produite à l’onglet 2 de la pièce A-1, le montant de 71 713,43 $ a été payé en compensation pour la perte d’un long emploi. Il s’agissait d’un montant unique qui a été payé aux deux semaines pour l’avantage et à la demande de l’employée.

 

[16]    L’avocat se réfère à cet égard à la définition d’« allocation de retraite » qui se trouve au paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu :

 

248(1) Définitions -- Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

 

 

« allocation de retraite » Somme, sauf une prestation de retraite ou de pension, une somme reçue en raison du décès d'un employé ou un avantage visé au sous-alinéa 6(1)a)(iv), reçue par un contribuable ou, après son décès, par une personne qui était à sa charge ou qui lui était apparentée, ou par un représentant légal du contribuable :

a) soit en reconnaissance de longs états de service du contribuable au moment où il prend sa retraite d'une charge ou d'un emploi ou par la suite;

b) soit à l'égard de la perte par le contribuable d'une charge ou d'un emploi, qu'elle ait été reçue ou non à titre de dommages ou conformément à une ordonnance ou sur jugement d'un tribunal compétent.

 

[17]    Il se réfère également à l’alinéa 2(3)b) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations :

 

2(3) Pour l’application des paragraphes (1) et (2), sont exclus de la rémunération :

b)      les allocations de retraite;

 

[18]    L’avocat s’est référé notamment aux décisions suivantes de la Cour d’appel fédérale et de la Cour canadienne de l’impôt :

 

Élément c. Canada, [1996] F.J.C. No. 718,

Forrestall c. Canada, [1996] F.C.J. No. 1638 et

Overin c. Sa Majesté la Reine, [1997] T.C.J. No. 1264.

 

[19]    De la décision Élément, l’avocat cite le paragraphe 2 :

 

2     Nous sommes tous d'avis que le Ministre et le juge de la Cour canadienne de l'impôt sont venus à la bonne conclusion en décidant que le requérant n'exerçait pas un emploi assurable durant cette période. Malgré le plaidoyer très habile de Me Lepage à l'effet que le contrat de travail du requérant subsistait parce que celui-ci bénéficiait d'un droit de rappel, il n'en demeure pas moins qu'une personne qui ne fournit pas une prestation de travail et ne touche aucun salaire n'exerce pas un emploi assurable au sens de l'alinéa 3(1)a) de la Loi.

 

[20]    L’intervenante s’est appuyée sur la position initiale de l’intimé.

 

Analyse et conclusion

 

[21]    La confusion dans la position de l’intimé paraît provenir du genre de congé offert à l’employée. On lit dans la Réponse à l’avis d’appel, au paragraphe g), que l’employeur a offert à la travailleuse le bénéfice d’un congé sans solde pour la période du 4 mars 2006 au 31 mars 2007. Par ailleurs, au paragraphe k), on mentionne que durant cette période la travailleuse a continué à recevoir une rémunération de l’employeur aux deux semaines. Au paragraphe p) de la Réponse, l’intimé affirme que durant la période en litige, la travailleuse était en congé rémunéré.

 

[22]    La nature du paiement de 71 713,43 $ est l’élément déterminant de cette affaire.

 

[23]    Après avoir entendu les témoins et avoir pris connaissance des documents pertinents, je suis d’avis qu’il ne fait aucun doute que le montant de 71 713,43 $ n’a pas été reçu à titre de salaire mais à titre d’allocation de retraite. L’intervenante n’a pas fourni au cours de la période en litige une prestation de travail et elle n’a pas touché de salaire. En conclusion, le congé offert à l’intervenante pour la période de 4 mars 2006 au 31 mars 2007 était véritablement un congé sans solde et n’était pas un emploi assurable.

 

[24]    L’appel est accordé et l’intervention rejetée.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de novembre 2008.

 

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI538

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2008-754(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              MERCK FROSST CANADA LTD. C. M.R.N. ET DALE CHOQUETTE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 16 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 24 septembre 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l'appelante :

Me Pierre Barsalou

Me Anna Szuminski

Avocat de l'intimé :

Me Simon-Nicolas Crépin

Pour l'intervenante:

L'intervenante elle-même

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelante:

 

                     Nom :                            Me Pierre Barsalou

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.