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Dossier : 2007-3570(IT)I

ENTRE :

YOUNES AJAMI ARAB,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 5 mars 2008, à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Mounes Ayadi

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L'appel de la nouvelle détermination de la prestation fiscale canadienne pour enfants pour l’année de base 2005, de la nouvelle détermination de la prestation universelle pour la garde d’enfants pour l’année de base 2005 et de la nouvelle détermination du crédit pour la taxe sur les produits et services pour l’année d’imposition 2005, établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, est rejeté.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de mai 2008.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 


 

 

 

Référence : 2008CCI193

Date : 20080521

Dossier : 2007-3570(IT)I

ENTRE :

YOUNES AJAMI ARAB,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]              L’appelant interjette appel de la nouvelle détermination de la prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE) pour l’année de base 2005, de la nouvelle détermination de la prestation universelle de garde d’enfants (PUGE) pour l’année de base 2005 ainsi que de la nouvelle détermination du crédit pour la taxe sur les produits et services (CTPS) à l’égard de l’année d’imposition 2005.

 

[2]              Ces déterminations ont été établies après que le ministre du Revenu national (le ministre) eut déterminé que l’appelant n’était plus le particulier admissible à l’égard de ses trois enfants à partir du mois de septembre 2006. Il s’agit en fait de déterminer qui était le particulier admissible à partir de cette date.

 

[3]              En raison de ces nouvelles déterminations, le ministre a calculé la somme de 910 $ à titre de paiement en trop visant la PFCE à l’égard de l’année de base 2005, la somme de 119 $ à titre de paiement en trop pour le CTPS, toujours à l’égard de l’année 2005, et la somme de 600 $ à titre de paiement en trop pour la PUGE à l’égard de l’année 2005.

 

[4]              L’appelant et son épouse sont originaires de la Syrie et sont venus vivre au Canada en 2002. À l’époque, ils avaient un enfant. En 2003 et en février 2005, leurs deux autres enfants sont nés. Ils se sont cependant séparés peu de temps après la naissance de leur dernier enfant, soit en février 2005. L’épouse aurait alors quitté le foyer familial avec les enfants, mais l’appelant soutient que les enfants passaient plusieurs jours par semaine avec lui.

 

[5]              Au printemps de 2006, l’épouse de l’appelant a déposé une requête pour mesures provisoires et ordonnance de sauvegarde devant la Cour supérieure du Québec. Le 25 mai 2006, une ordonnance sur mesures provisoires fut émise par la Cour supérieure, à la suite du consentement des parties, portant que l’épouse de l’appelant aurait la garde des trois enfants et que l’appelant aurait des droits d’accès à l’amiable auprès des enfants à la suite d’un appel téléphonique préalable et pour un minimum de deux jours par semaine. Cette mesure provisoire a été convenue par l’appelant et son épouse dans l’attente d’une évaluation parentale ordonnée par la Cour le 11 mai 2006. Cette évaluation parentale mentionne cependant une ordonnance émise le 12 avril 2006.

 

[6]              Le 27 juillet 2006, l’appelant et son épouse ont convenu de modifier les mesures provisoires afin de permettre à l’épouse de voyager à l’étranger, c’est‑à‑dire de retourner en Syrie afin d’aller au chevet de sa mère qui à l’époque était très malade. La nouvelle ordonnance prévoit que l’appelant assumera la garde des trois enfants durant le séjour de l’épouse. Cette dernière s’est engagée aussi à revenir au Canada à temps pour la rentrée scolaire de l’aîné des enfants et pour reprendre la garde intérimaire des trois enfants. L’épouse s’est aussi engagée à fournir les attestations médicales relatives à l’état de santé de sa mère et l’ordonnance indique que l’appelant présentera une requête pour la garde de ses enfants le 25 septembre 2006.

 

[7]              L’appelant et son épouse ont consenti à une troisième entente devant la Cour supérieure du Québec le 25 octobre 2006. Le préambule de cette entente mentionne une expertise psychosociale qui est en cours et le fait qu’un signalement a été fait auprès de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ), sans toutefois que des mesures soient prises. Le travailleur social de la DPJ a toutefois recommandé qu’il y ait des modalités claires et précises quant aux droits d’accès du père et qu’elles soient respectées. L’ordonnance stipule donc que l’épouse a la garde des trois enfants et que l’appelant a accès aux enfants une fin de semaine sur deux, du samedi à 10 h au dimanche à 18 h, dès le 28 octobre 2006, et qu’il devra aviser 24 heures à l’avance s’il ne peut exercer son droit. L’ordonnance prévoit aussi que l’appelant et l’épouse ne doivent pas se contacter sauf en ce qui concerne l’accès aux enfants et en cas d’urgence.

 

[8]              Un jugement de divorce a été prononcé en mai 2007, mais les mesures de sauvegarde n’ont pas été finalisées à ce moment. L’appelant et son épouse ont alors convenu d’attendre un complément d’expertise psychosociale et ont convenu que l’épouse conserve la garde des trois enfants avec droit d’accès à l’appelant chaque fin de semaine en alternant les enfants. L’épouse est responsable des rendez-vous et du suivi des enfants auprès des différents intervenants et l’appelant a droit aux dossiers scolaires et médicaux des enfants. L’appelant et l’épouse ne doivent pas discuter de leur cas devant les enfants et ne doivent pas communiquer entre eux.

 

[9]              Après leur séparation, l’épouse était la prestataire des PFCE. À la suite de son départ en Syrie, l’appelant a fait une demande de PFCE le 30 juillet 2006, auprès de l’Agence des douanes et du revenu du Canada à l’époque. Ne pouvant obtenir la signature de son épouse, il a invoqué comme motif que cette dernière était partie en dehors du Canada, soit en Syrie, depuis le 3 août 2006. Chose étrange, la demande a cependant été signée le 30 juillet 2006. L’appelant est donc devenu prestataire des PFCE. Au retour de son voyage et lorsque l’épouse s’est rendu compte de ce fait, elle a à son tour fait demande pour les prestations le 13 octobre 2006. La vérification a indiqué que l’appelant était le particulier admissible pour le mois d’août 2006 et que par la suite l’épouse était le particulier admissible, il y a donc eu des avis de détermination établissant des paiements en trop versés à l’appelant à partir du mois de septembre 2006 à l’égard de l’année de base 2005 relativement aux prestations et crédits décrits ci-dessus.

 

[10]         Malgré le fait que, selon les ordonnances de la Cour supérieure, l’épouse ait la garde des trois enfants et l’appelant n’ait que des droits d’accès, l’appelant maintient que ses enfants étaient avec lui cinq ou six jours par semaine et que l’épouse ne les avait que deux ou trois jours par semaine. Il témoigne que cette façon de faire existait avant le mois d’août 2006 et que cela a même continué après que son épouse eut repris les enfants au début de septembre 2006. À l’appui de ses prétentions, il a déposé en preuve une série de documents, y compris les rapports d’expertise des différents intervenants, son implication vis‑à‑vis des soins prodigués par les différents intervenants auprès de ses enfants, de la correspondance variée et des extraits de calendrier pour novembre et décembre 2006, de même que pour les trois premiers mois de 2007, à titre d’exemples de la fréquence de la présence de ses enfants chez lui. Il soutient que son épouse n’a jamais respecté les ordonnances et que tout est beau, mais sur papier seulement.

 

[11]         Il y a cependant certains indices que l’on retrouve parmi cette documentation qui laissent croire que les enfants résidaient avec leur mère et que la fréquence des visites avec le père était peut‑être moindre que le prétend ce dernier. Dans son rapport du 2 mars 2007, le Dr Alain Lebel, à la suite d’une rencontre avec l’appelant, écrit que ce dernier déplore le fait de ne pas avoir plus souvent ses enfants, puisque depuis le mois de novembre 2006, il ne les voit qu’une fin de semaine sur deux. Dans un autre rapport provenant de la clinique de développement du Centre hospitalier universitaire de Sainte‑Justine au sujet d’un des enfants, on peut y lire que cet enfant vit avec sa mère et voit son père une fin de semaine sur deux et ce, depuis le mois de février 2005.

 

[12]         Le rapport fait suite à une évaluation faite le 1er et le 7 mars 2007. Dans un autre rapport en date du 4 juin 2007 d’une orthophoniste qui a vu un des enfants, on peut lire que les enfants habitent actuellement avec l’épouse et que l’appelant les voit régulièrement. Plus loin on lit qu’il faut tenir compte de la situation du bilinguisme et du fait que l’enfant passe plus de temps avec sa mère qui ne lui parle qu’en arabe.

 

[13]         Dans une fiche d’urgence en date du 30 août 2006 et signée par l’appelant, on peut lire que l’adresse de l’enfant est celle de la mère. Cette date correspond au retour de l’épouse de Syrie et l’adresse est celle indiquée sur son bail. On peut également constater que l’appelant, dans un questionnaire de développement pour chacun des enfants en date du 9 et du 12 août 2007, indique que les enfants vivent avec leur mère. Il ne fait cependant aucun doute que la présence de l’appelant est évidente et qu’on peut constater que ce dernier a eu des contacts réguliers avec ses enfants, qu’il est intervenu auprès des différents professionnels dans la préparation des différentes évaluations requises et qu’il a joué son rôle de père.

 

[14]         L’épouse nous présente une autre version des circonstances entourant sa vie de couple et la garde des enfants. Ils se sont séparés en février 2005 à la suite à d’actes de violence et l’appelant a fait l’objet d’ordonnances lui interdisant de communiquer avec son épouse. Les enfants sont demeurés avec elle depuis cette date et l’appelant venait chercher les enfants le samedi pour les retourner le dimanche. Elle a obtenu des ordonnances de garde provisoire dans l’attente de l’évaluation et il en fut ainsi jusqu’à son absence en août 2006 pour aller au chevet de sa mère. C’est elle-même, à la suggestion de son avocat, qui a suggéré une modification à l’ordonnance de garde jusqu’à son retour. Elle est revenue le 29 août 2006 et a repris la garde de ses enfants, sous réserve des droits de visite du père qui s’effectueraient une fin de semaine sur deux, sans pour autant lui refuser le droit de les voir à sa demande. Un incident avec la DPJ n’a pas eu de conséquences en ce qui concerne les ordonnances de garde et les enfants ont continué à demeurer avec elle à son appartement jusqu’en août 2007; elle a lors consenti à accorder la garde des enfants à l’appelant malgré le fait que les rapports des intervenants recommandaient que la garde des enfants soit confiée à l’épouse.

 

[15]         Il ne fait aucun doute également que dans le cas de l’épouse, la preuve avancée démontre clairement qu’elle s’est aussi très bien occupée de ses enfants et que malgré sa difficulté à communiquer en français, elle parvenait à se faire comprendre avec l’aide d’interprètes. Elle a accompagné ses enfants chez les intervenants et s’est occupée d’eux pour les nécessités de la vie. Son témoignage a d’ailleurs été appuyé par la travailleuse sociale affectée à son cas. Il est aussi évident que les enfants se trouvaient à différents moments aux domiciles des deux parents, car chacun d’eux a déposé des lettres de voisins ou de propriétaire attestant que les enfants causaient du bruit. Cela ne démontre cependant pas combien de temps les enfants passaient chez chacun des parents.

 

[16]         Pour être admissible au crédit pour la taxe de vente, il faut répondre aux conditions que j’ai trouvées dans les définitions de « particulier admissible » et « personne à charge admissible » figurant à l’article 122.5 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi) que je reproduis ci‑après.

 

Article 122.5 : Définitions.

 

(1)   Les définitions qui suivent s’appliquent au présent  article.

 

« particulier admissible » Par rapport à un mois déterminé d'une année d'imposition, particulier, à l'exception d'une fiducie, qui, avant ce mois, selon le cas :

 

a)      a atteint l'âge de 19 ans;

b)      a résidé avec un enfant dont il était le père ou la mère;

c)      était marié ou vivait en union de fait.

 

« personne à charge admissible » Est une personne à charge admissible d'un particulier par rapport à un mois déterminé d'une année d'imposition la personne qui, au début de ce mois, répond aux conditions suivantes :

 

a)            elle est l'enfant du particulier ou est à sa charge ou à la charge de l'époux ou du conjoint de fait visé du particulier;

b)            elle vit avec le particulier;

c)            elle est âgée de moins de 19 ans;

d)            elle n'est pas un particulier admissible par rapport au mois déterminé;

e)            elle n'est pas le proche admissible d'un particulier par rapport au mois déterminé.

 

Je reproduis ci‑après la définition de « particulier admissible » figurant à l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi).

 

« particulier admissible » S'agissant, à un moment donné, du particulier admissible à l'égard d'une personne à charge admissible, personne qui répond aux conditions suivantes à ce moment :

 

a)   elle réside avec la personne à charge;

b)   elle est la personne — père ou mère de la personne à charge — qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de cette dernière;

c)   elle réside au Canada ou, si elle est l'époux ou le conjoint de fait visé d'une personne qui est réputée, par le paragraphe 250(1), résider au Canada tout au long de l'année d'imposition qui comprend ce moment, y a résidé au cours d'une année d'imposition antérieure;

d)   elle n'est pas visée aux alinéas 149(1)a) ou b);

e)   elle est, ou son époux ou conjoint de fait visé est, soit citoyen canadien, soit :

      (i)      résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés,

      (ii)     résident temporaire ou titulaire d'un permis de séjour temporaire visés par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés ayant résidé au Canada durant la période de 18 mois précédant ce moment,

      (iii)    personne protégée au titre de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés,

      (iv)    quelqu’un qui fait partie d'une catégorie précisée dans le Règlement sur les catégories d'immigrants précisées pour des motifs d'ordre humanitaire pris en application de la Loi sur l'immigration.

Pour l'application de la présente définition :

f)    si la personne à charge réside avec sa mère, la personne qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de la personne à charge est présumée être la mère;

g)   la présomption visée à l'alinéa f) ne s'applique pas dans les circonstances prévues par règlement;

h)   les critères prévus par règlement serviront à déterminer en quoi consistent le soin et l'éducation d'une personne.

 

[17]         Pour ce qui est des prestations fiscales pour enfants, les définitions qui suivent s’appliquent :

 

« année de base » S’entend, par rapport à un mois, de l’année d’imposition suivante :

 

a)      si le mois compte parmi les six premiers mois d’une année civile, celle qui a pris fin le 31 décembre de la deuxième année civile précédente;

b)      si le mois compte parmi les six derniers mois d’une année civile, celle qui a pris fin le 31 décembre de l’année civile précédente.

 

« déclaration de revenu » Le document suivant produit par un particulier pour une année d’imposition :

 

a) si le particulier a résidé au Canada tout au long de l’année, sa déclaration de revenu (sauf celle produite en vertu des paragraphes 70(2) ou 104(23), de l’alinéa 128(2)e) ou du paragraphe 150(4)) produite ou à produire pour l’année en vertu de la présente partie;

 

b) dans les autres cas, un formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits, présenté au ministre.

 

« conjoint visé » Personne qui, à un moment donné, est l’époux ou le conjoint de fait d’un particulier dont il ne vit pas séparé à ce moment. Pour l’application de la présente définition, une personne n’est considérée comme vivant séparée d’un particulier à un moment donné que si elle vit séparée du particulier à ce moment, pour cause d’échec de leur mariage ou union de fait, pendant une période d’au moins 90 jours qui comprend ce moment.

 

[18]         Je reproduis ci‑après la définition de « particulier admissible » figurant à l’article 2 de la Loi sur la prestation universelle pour la garde d’enfants :

 

« particulier admissible » Particulier admissible pour l’application de la sous-section a.1 de la section E de la partie I de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[19]         Le juge Dussault dans l’affaire Lapierre c. Canada, 2005 CCI 720, [2005] A.C.I. no 538 (QL), a très bien résumé les conditions énoncées dans la définition de « particulier admissible » et le concept de résidence qu’on y énonce. Je reproduis les paragraphes 12 et 13 de cette décision :

 

12     Aux fins de la prestation fiscale canadienne pour enfants la définition de « particulier admissible » que l'on retrouve à l'article 122.6 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi ») énonce un certain nombre de conditions auxquelles doit répondre un particulier à « un moment donné ». Aux fins du calcul de la prestation selon le paragraphe 122.61(1), on tient compte des personnes à charge admissibles à l'égard desquelles une personne est le particulier admissible au début de chaque mois. Il s'agit du « moment donné » auquel il est fait référence dans la définition de « particulier admissible » à l'article 122.6 de la Loi. C'est donc en fonction de la situation qui prévaut au début de chaque mois qu'il faut déterminer si un particulier répond aux conditions énoncées à la définition. La première condition pour qu'un particulier puisse être considéré un « particulier admissible » est énoncée à l'alinéa a) de la définition de cette expression par lequel on exige que ce particulier « réside avec la personne à charge ». C'est à l'égard de cette seule condition que le ministre a établi les déterminations en litige.

 

13     Si la résidence est le concept fondamental utilisé aux fins de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu en vertu de la Loi, il n'y est cependant pas défini et ce sont les tribunaux qui ont tenté d'en circonscrire les limites. Essentiellement une question de fait, la résidence d'une personne à un endroit donné s'établit par un certain nombre de critères de temps, d'objet, d'intention et de continuité qui n'ont pas nécessairement toujours la même importance et qui peuvent varier selon les circonstances de chaque cas (voir Thomson v. Minister of National Revenue, [1946] R.S.C. 209). Toutefois, la résidence implique une certaine constance, une certaine régularité ou encore une certaine permanence selon le mode de vie habituel d'une personne en relation avec un lieu donné et se distingue de ce qu'on peut qualifier de visites ou de séjours à des fins particulières ou de façon sporadiques. Lorsque la Loi pose comme condition de résider avec une autre personne, je ne crois pas qu'il convient d'accorder au verbe résider un sens qui s'écarte du concept de résidence tel qu'il a été élaboré par les tribunaux. Résider avec quelqu'un c'est vivre ou demeurer avec quelqu'un dans un endroit donné avec une certaine constance, une certaine régularité ou encore d'une manière habituelle.

 

[20]         Il incombe à l’appelant d’établir selon la prépondérance des probabilités qu’il est le particulier admissible aux PFCE, au CTPS et à la PUGE et qu’il remplit les conditions prévues dans les définitions. En l’espèce, la preuve est abondante qu’il s’agit de parents qui se sont occupés de leurs enfants et ont assumé de façon correcte la responsabilité pour leurs soins et leur éducation, malgré le fait que leur propre relation ait pu faire l’objet de nombreuses difficultés. Pour qu’un particulier soit un particulier admissible, la première condition exige que cette personne réside avec la ou les personnes à charge, soit en l’espèce les trois enfants. Sur cette question la preuve avancée par les parents est contradictoire, en ce que l’appelant soutient que les enfants sont avec lui cinq ou six jours par semaine et avec l’épouse deux ou trois jours, alors que l’épouse soutient exactement le contraire, et ce, pour les périodes pertinentes, à l’exception du mois d’août 2006 où l’épouse reconnaît que, pour ce mois, l’appelant résidait avec ses enfants.

 

[21]         Ce qui rend le fardeau de la preuve de l’appelant difficile à surmonter est le fait que ce qu’il avance est contraire aux faits dans toutes les ordonnances de la Cour supérieure du Québec visant les mesures accessoires, la garde et les droits d’accès, lesquelles d’ailleurs ont toutes été signées avec le consentement de l’appelant. Il reconnaît que la garde des enfants est à l’épouse et qu’il n’a que des droits d’accès aux enfants pendant les fins de semaine. Il a consenti à cet état de choses en trois occasions, un geste qui, à mon avis, est très incompatible avec ce qu’il avance. Le contenu de certains rapports d’expertise fait également référence au fait que le père n’a que des droits d’accès auprès de ses enfants. Je ne peux également faire abstraction du questionnaire de développement (pièce I-5), qu’il a lui‑même signé en août 2006, où il répond que les enfants vivent avec leur mère. Il n’y a rien de concret dans la preuve qui puisse me permettre de conclure que cette situation ait pu changer, du moins jusqu’en août 2007. Sur cette question, je m’en remets aux remarques du pédopsychiatre (pièce A‑3) en février 2007 où, après avoir eu une rencontre avec l’appelant, il écrit que ce dernier déplore le fait de ne pas avoir plus souvent ses enfants puisque, depuis le mois de novembre 2006, il ne les voit qu’une fin de semaine sur deux.

 

[22]         L’ensemble de la preuve me permet de conclure que l’épouse est celle qui réside avec ses trois enfants, c’est‑à‑dire qu’ils vivent ensemble dans le logement de l’épouse de façon constante, régulière ou habituelle, et ce, au début de chaque mois de la période visée dans l’avis de détermination, et ce, à partir et incluant la période de septembre 2006 à août 2007.

 

 

[23]         Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de mai 2008.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI193

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-3570(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Younes Ajami Arab et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 5 mars 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 21 mai 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Mounes Ayadi

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

                     Nom :                           

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

           

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