Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2001-3839(IT)G

ENTRE :

CHARLES B. LOEWEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête entendue sur preuve commune avec les requêtes d’Andrew Pringle, 2003-446(IT)G et de

Michael De Pencier, 2003‑1073(IT)G

le 24 octobre 2007, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge E.A. Bowie

 

Comparutions :

 

Avocate de l’appelant :

Me A. Christina Tari

Avocates de l’intimée :

Mes Annie Paré et Elizabeth Chasson

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          Une requête ayant été présentée par l’intimée en vue de l’obtention d’une ordonnance accordant l’autorisation de modifier la réponse à l’avis d’appel et, en particulier, d’inclure les paragraphes suivants :

 

          [traduction]

25.              Aucune demande n’a été faite conformément au paragraphe 237.1(2) de la Loi en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal relativement au logiciel et aucun numéro d’inscription n’a été attribué par le ministre en vertu du paragraphe 237.1(2) de la Loi.

 

26.       L’appelant n’a pas présenté le formulaire prescrit, notamment le numéro d’inscription d’abri fiscal, en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

27.       Avant l’acquisition du logiciel, des déclarations ou annonces avaient été faites aux acquéreurs éventuels du logiciel, ou avaient été envisagées par AIRS II Inc., ou pour le compte de celle‑ci.

 

28.       Selon les déclarations ou annonces, chaque acquéreur éventuel qui acquérait une part au montant de 500 000 $ en 1993 ferait un placement en argent comptant de 75 000 $ pour chacune des années d’imposition 1993 et 1994 et pourrait défalquer 250 000 $ en 1993 et 250 000 $ en 1994 de l’ensemble de son revenu.

 

29.       Le point litigieux est le suivant :

 

a)         Le logiciel constitue‑t‑il un abri fiscal au sens de l’article 237.1 de la Loi?

 

31.       Il prétend que le logiciel constituait un abri fiscal selon la définition figurant à l’article 237.1 de la Loi. Il prétend en outre qu’aucune demande en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été faite et que, par conséquent, aucun numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été attribué par le ministre. Par conséquent, aucun montant ne peut être déduit ou demandé par l’appelant à l’égard du logiciel en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

          Les documents qui ont été déposés ayant été lus, et les avocates des parties ayant été entendues;

 

          La Cour ordonne que la requête soit accueillie et l’intimée a l’autorisation de déposer et de signifier une réponse modifiée à l’avis d’appel, conformément au formulaire joint à l’avis de requête, dans les sept jours suivant la date de la présente ordonnance.

 

La Cour ordonne en outre que les parties supportent leurs propres frais et dépens dans la requête et que les coûts attribuables au retard qui a été accusé depuis la production de l’annexe I lorsqu’il s’est agi de déposer la présente requête soient adjugés à l’appelant, quelle que soit l’issue de la cause, en tant que dépens entre parties.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de novembre 2007.

 

« E.A. Bowie »

Juge Bowie

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de janvier 2008

 

Claude Leclerc, LL.B.

 


 

 

 

Dossier : 2003-446(IT)G

ENTRE :

ANDREW PRINGLE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête entendue sur preuve commune avec les requêtes de

Charles B. Loewen, 2001-3839(IT)G

et de Michael De Pencier, 2003-1073(IT)G

le 24 octobre 2007, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge E.A. Bowie

 

Comparutions :

 

Avocate de l’appelant :

Me A. Christina Tari

Avocates de l’intimée :

Mes Annie Paré et Elizabeth Chasson

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          Une requête ayant été présentée par l’intimée en vue de l’obtention d’une ordonnance accordant l’autorisation de modifier la réponse à l’avis d’appel et, en particulier, d’inclure les paragraphes suivants :

 

          [traduction]

21.       Aucune demande n’a été faite conformément au paragraphe 237.1(2) de la Loi en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal relativement au logiciel et aucun numéro d’inscription n’a été attribué par le ministre en vertu du paragraphe 237.1(2) de la Loi.

 

22.       L’appelant n’a pas présenté le formulaire prescrit, notamment le numéro d’inscription d’abri fiscal, en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

23.       Avant l’acquisition du logiciel, des déclarations ou annonces avaient été faites aux acquéreurs éventuels du logiciel, ou avaient été envisagées par AIRS II Inc., ou pour le compte de celle‑ci.

 

24.       Selon les déclarations ou annonces, chaque acquéreur éventuel qui acquérait une part au montant de 500 000 $ en 1993 ferait un placement en argent comptant de 75 000 $ pour chacune des années d’imposition 1993 et 1994 et pourrait défalquer 250 000 $ en 1993 et 250 000 $ en 1994 de l’ensemble de son revenu.

 

25.       Le point litigieux est le suivant :

 

a)         Le logiciel constitue‑t‑il un abri fiscal au sens de l’article 237.1 de la Loi?

 

27.       Il prétend que le logiciel constituait un abri fiscal selon la définition figurant à l’article 237.1 de la Loi. Il prétend en outre qu’aucune demande en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été faite et que, par conséquent, aucun numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été attribué par le ministre. Par conséquent, aucun montant ne peut être déduit ou demandé par l’appelant à l’égard du logiciel en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

          Les documents qui ont été déposés ayant été lus, et les avocates des parties ayant été entendues;

 

          La Cour ordonne que la requête soit accueillie, sans qu’aucuns dépens ne soient adjugés, et l’intimée a l’autorisation de déposer et de signifier une réponse modifiée à l’avis d’appel, conformément au formulaire joint à l’avis de requête, dans les sept jours suivant la date de la présente ordonnance.

 

La Cour ordonne en outre que les parties supportent leurs propres frais et dépens dans la requête et que les coûts attribuables au retard qui a été accusé depuis la production de l’annexe I lorsqu’il s’est agi de déposer la présente requête soient adjugés à l’appelant, quelle que soit l’issue de la cause, en tant que dépens entre parties.

 

 

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de novembre 2007.

 

« E.A. Bowie »

Juge Bowie

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de janvier 2008

 

Claude Leclerc, LL.B.

 


 

 

 

Dossier : 2003-1073(IT)G

ENTRE :

MICHAEL DE PENCIER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête entendue sur preuve commune avec les requêtes de

Charles B. Loewen, 2001-3839(IT)G et d’Andrew Pringle, 2003-446(IT)G le 24 octobre 2007, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge E.A. Bowie

 

Comparutions :

 

Avocate de l’appelant :

Me A. Christina Tari

Avocates de l’intimée :

Mes Annie Paré et Elizabeth Chasson

____________________________________________________________________

 

 

ORDONNANCE

 

          Une requête ayant été présentée par l’intimée en vue de l’obtention d’une ordonnance accordant l’autorisation de modifier la réponse à l’avis d’appel et, en particulier, d’inclure les paragraphes suivants :

 

          [traduction]

22.       Aucune demande n’a été faite conformément au paragraphe 237.1(2) de la Loi en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal relativement au logiciel et aucun numéro d’inscription n’a été attribué par le ministre en vertu du paragraphe 237.1(2) de la Loi.

 

23.       L’appelant n’a pas présenté le formulaire prescrit, notamment le numéro d’inscription d’abri fiscal, en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

24.       Avant l’acquisition du logiciel, des déclarations ou annonces avaient été faites aux acquéreurs éventuels du logiciel, ou avaient été envisagées par AIRS II Inc., ou pour le compte de celle‑ci.

 

25.       Selon les déclarations ou annonces, chaque acquéreur éventuel qui acquérait une part au montant de 500 000 $ en 1993 ferait un placement en argent comptant de 75 000 $ pour chacune des années d’imposition 1993 et 1994 et pourrait défalquer 250 000 $ en 1993 et 250 000 $ en 1994 de l’ensemble de son revenu.

 

26.       Le point litigieux est le suivant :

 

a)         Le logiciel constitue‑t‑il un abri fiscal au sens de l’article 237.1 de la Loi?

 

28.       Il prétend que le logiciel constituait un abri fiscal selon la définition figurant à l’article 237.1 de la Loi. Il prétend en outre qu’aucune demande en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été faite et que, par conséquent, aucun numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été attribué par le ministre. Par conséquent, aucun montant ne peut être déduit ou demandé par l’appelant à l’égard du logiciel en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

          Les documents qui ont été déposés ayant été lus, et les avocates des parties ayant été entendues;

 

          La Cour ordonne que la requête soit accueillie, sans qu’aucuns dépens soient adjugés, et l’intimée a l’autorisation de déposer et de signifier une réponse modifiée à l’avis d’appel, conformément au formulaire joint à l’avis de requête, dans les sept jours suivant la date de la présente ordonnance.

 

La Cour ordonne en outre que les parties supportent leurs propres frais et dépens dans la requête et que les coûts attribuables au retard qui a été accusé depuis la production de l’annexe I lorsqu’il s’est agi de déposer la présente requête soient adjugés à l’appelant, quelle que soit l’issue de la cause, en tant que dépens entre parties.

 

 

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de novembre 2007.

 

« E.A. Bowie »

Juge Bowie

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de janvier 2008

 

Claude Leclerc, LL.B.

 


 

 

 

Référence : 2007CCI703

Date : 20071120

Dossiers : 2001-3839(IT)G

2003-446(IT)G

2003-1073(IT)G

ENTRE :

CHARLES B. LOEWEN,

ANDREW PRINGLE et

MICHAEL DE PENCIER,

 

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

Le juge Bowie

 

Historique

 

[1]     Dans chacun des trois appels, j’ai été saisi des présentes requêtes par lesquelles l’intimée cherchent à obtenir l’autorisation de modifier les réponses aux avis d’appel. Les actes de procédure qui ont été déposés dans les trois appels sont identiques sur tous les points importants; il en va de même pour les modifications que l’intimée veut apporter aux réponses. Il en est ainsi parce que ces trois appels sont représentatifs d’un groupe d’appels en instance devant la Cour, interjetés pour le compte de 17 contribuables, chacun de ceux‑ci ayant acquis un droit indivis sur un logiciel qui a changé de mains aux termes d’une convention d’achat‑vente signée le 31 décembre 1993. Dans les motifs qu’il a prononcés à l’égard d’une requête antérieure, le juge en chef Bowman a fait un historique passablement détaillé de ces appels; je crois qu’il est utile de le reproduire ici :

 

3          L'appelant est un homme d'affaires diplômé en économie de l’Université de Colombie‑Britannique ainsi que de la Harvard Business School. Tout au long de sa carrière, il a évolué dans les échelons supérieurs du monde de la finance, des affaires des sociétés, de la gestion et de l’investissement. Les allégations pertinentes à la présente requête figurent dans l'affidavit déposé par l'appelant à l'appui de la requête ainsi que dans l'avis d'appel. Elles sont les suivantes :

 

-           En 1993, l'appelant a acquis une participation de 6,25 p. 100 dans un logiciel, connu sous le nom d'Arachnae Information Retrieval System Software II (AIRS II). Il était un des 17 copropriétaires. Dans son affidavit, il allègue qu'il a payé 500 000 $ pour sa participation.

 

-           Le logiciel constitue un actif de la catégorie 12, et on peut déduire à 100 p. 100 une déduction pour amortissement (DPA) en vertu de l'annexe II du Règlement de l'impôt sur le revenu, sous réserve de la règle selon laquelle le contribuable ne peut déduire dans l'année d'acquisition que la moitié du montant de la DPA qui est autrement déductible.

 

-           Par conséquent, en 1994, l'appelant a déduit un montant de DPA de 250 000 $. En raison de cette déduction en 1994, l'appelant a subi une perte pour cette année et il a, par conséquent, reporté une perte de 32 822 $ en 1995.

 

4          Le ministre a établi de la manière suivante de nouvelles cotisations à l'égard de l'appelant pour chacune des trois années 1993, 1994 et 1995 :

 

a)     Il a refusé la déduction entière du montant de DPA pour 1993 au motif que le logiciel n'était pas prêt à être mis en service avant 1994.

 

b)     Pour 1994, il a établi la cotisation sur le fondement que la juste valeur marchande de 100 p. 100 du logiciel était de 1 600 000 $ et non pas de 8 000 000 $, montant sur lequel l'appelant s’est fondé lorsqu’il a produit sa déclaration. Par conséquent, le montant de DPA déduit par l’appelant quant au logiciel a été réduit à 50 000 $ de la manière suivante :

 

                    1 600 000 $ x 500 000 $ x 1/2 = 50 000 $ -----------

 8 000 000 $

 

c)   L'appelant n'a déduit aucun montant de DPA quant au logiciel pour l'année 1995, manifestement parce qu'il croyait avoir épuisé la DPA en 1993 et en 1994. Le ministre a refusé la perte autre que la perte en capital reportée en se fondant sur l'hypothèse que l'appelant n'en avait pas. En outre, le ministre -- par inadvertance, je présume -- a même refusé la DPA de 50 000 $ à laquelle, selon l’appelant, il aurait eu droit. Cela n'est cependant pas pertinent à la requête.

 

5          Les cotisations de 1993, de 1994 et de 1995 étaient toutes datées du 27 février 2001.

 

6          Le 4 avril 1997, l'appelant a signé une renonciation portant sur la « période normale de nouvelle cotisation » au sens de l'article 152 de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de l'année d'imposition 1993, et le 28 avril 1998, il en a signé une à l’égard de l'année d'imposition 1994.

 

7          Les renonciations pour les années d'imposition ont été révoquées par des avis de révocation d'une renonciation signés par l'appelant le 12 octobre 2000. La révocation des renonciations avait pour effet de mettre fin à la période normale de nouvelle cotisation, à l'égard des années 1993 et 1994, six mois après le dépôt de la révocation, c’est‑à‑dire le 21 avril 2001.

 

8          Aucune renonciation n'a été déposée quant à l'année 1995.

 

9          La première cotisation pour l'année 1995 a été établie le 9 mai 1996. Par conséquent, la période normale de nouvelle cotisation pour l'année 1995 a expiré le 10 mai 1999.

 

10        Le 2 mars 2000, Mme Jang, une vérificatrice de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, a écrit à l’appelant une lettre à propos de la copropriété de l'AIRS II dans laquelle elle propose des rajustements relativement à son investissement. Seulement deux questions ont été précisées, à savoir :

 

              a)         Évaluation.

 

                        Après avoir discuté longuement de l'évaluation du logiciel, Mme Jang a déclaré ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

 

Puisque qu’il est estimé que la première évaluation de 8 millions de dollars était déraisonnable, il a été déterminé que, à la date de l'évaluation, c’est‑à‑dire le 31 décembre 1993, la juste valeur marchande du logiciel acquis en copropriété, selon notre évaluation, était de 1,6 millions de dollars. Par conséquent, la perte en capital utilisée aux fins de la déduction pour amortissement (DPA) est limitée à 1,6 millions de dollars. Il est proposé de refuser l'excédent de 6,4 millions de dollars.

 

b)                 Prêt à être mis en service.

 

                        Mme Jang a déclaré que le logiciel n'était pas prêt à être mis en service avant 1994 et que, par conséquent, le montant de DPA ne devrait pas être déduit au titre de l’année 1993.

 

11        Les 20 et 30 mars 2000, l'appelant a écrit une lettre à Mme Jang dans laquelle il a fait part de ses observations en rapport avec la question de l'évaluation et a proposé que Mme Jang établisse une nouvelle cotisation fondée sur l'évaluation de 1,6 millions de dollars. Il semble avoir présumé que, dès qu'il avait reçu un avis de nouvelle cotisation, il pouvait interjeter appel devant la Cour. Il a également fait remarquer qu'elle aurait à établir une nouvelle cotisation à l'égard des 16 autres investisseurs.

 

12        Le 12 mai 2000, Me A. Christina Tari, l'avocate de l'appelant, a présenté de longues observations à Mme Jang en rapport avec la question de biens prêts à être mis en service.

 

13        Le 19 janvier 2001, Mme Jang a écrit une autre lettre à l'appelant à propos des années 1993, 1994 et 1995. Elle a répété sa position selon laquelle le montant de 1,6 millions de dollars évalué par Cole Valuation Partners était convenable ainsi que sa position quant à la question de biens prêts à être mis en service. Mme Jang a commenté en détail les observations de Me Tari. Elle a conclu avec l'observation suivante :

 

[TRADUCTION]

 

Nous croyons que nous avons recueilli assez d'éléments de preuve pour appuyer notre conclusion. Tel qu’il est mentionné dans notre lettre de proposition, nous avons accepté que le logiciel était prêt à être mis en service en 1994. Par conséquent, le montant de DPA ne devrait être déduit qu'au titre de l’année 1994 et des années suivantes. Veuillez trouver ci-joint une annexe modifiée d'amortissements fiscalement autorisés et une annexe modifiée de perte autre que perte en capital.

 

14        Les annexes ont réduit à zéro la déduction du montant de DPA pour l'année 1993 et à 50 000 $ ((500 000 $ X 1 600 000 $/8 000 000 $) X 50 %) pour l’année 1994 et à zéro le montant de la perte autre que perte en capital reportée en 1995.

 

15        Les nouvelles cotisations établies pour les années 1993, 1994 et 1995 ont suivi le 27 février 2001. La note suivante figurait sur les avis de nouvelle cotisation :

 

[TRADUCTION]

 

Nous avons effectué un rajustement conformément à notre lettre du 19 janvier 2001.

 

16        Le 30 avril 2001, Mme Jang a envoyé le rapport de vérification (T20-R1) à Me Tari. Le rapport décrit le logiciel et aborde en détail deux et uniquement deux questions : l'évaluation et biens prêts à être mis en service.

 

17        La réponse de l'ADRC aux observations figurant dans le document de 50 pages présenté par les copropriétaires en rapport avec le rapport de l'évaluation effectuée par Cole Valuation était une partie très importante du rapport.

 

18        Dans le rapport, la question de savoir si les copropriétaires ou l'appelant n'avaient aucun lien de dépendance avec le fournisseur du logiciel n’était pas abordée, bien que, à la page 8 du rapport, sous la rubrique [TRADUCTION] « Explication de toutes les modifications », figurent les remarques suivantes :

 

              [TRADUCTION]

1. DPA refusée *

 

Article 67, paragraphes 9(2), 13(26) et 13(27) et alinéas 69(1)a), 251(1)b) et 20(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

 

* Veuillez noter qu'en raison de la présente vérification, un solde de ???? au titre de la déduction pour amortissement est reporté à une année future. Le contribuable n'a pas demandé par écrit de déduire le solde restant.

 

Voir les explications aux pages suivantes.

 

19     L'alinéa 69(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu traite des conséquences fiscales des transferts effectués entre des personnes ayant un lien de dépendance. L'alinéa 251(1)b) stipule que la question de savoir si des personnes non liées entre elles n'ont aucun lien de dépendance est une question de fait, et les paragraphes 13(26) et 13(27) traitent de la restriction sur les déductions de montants de DPA au titre des biens prêts à être mis en service.

 

20     En plus du rapport de vérification, Mme Jang a envoyé à Me Tari, le 9 mai 2001, un document intitulé [TRADUCTION] « Exposé de position », daté du 21 novembre 2000. Ce rapport traitait d'un certain nombre de questions en plus des deux questions examinées dans le rapport de vérification. Mme Jang déclare ce qui suit dans ce rapport :

 

[TRADUCTION]

C. PROBLÈME OU QUESTION

 

Les questions en litige sont les suivantes :

 

1.         les copropriétaires ont-ils acquis le logiciel en vue d'exploiter une entreprise avec une attente raisonnable de profit ou les dépenses ont-elles été engagées en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien (alinéas 18(1)a) et 18(1)h)) et le logiciel a‑t‑il été acquis en vue de gagner ou de produire un revenu (alinéa 1102(1)c));

 

          2.         les montants censément payés ou payables au fournisseur du logiciel sont‑ils raisonnables dans les circonstances ou la valeur du logiciel était‑elle gonflée (article 67);

 

3.         le logiciel était‑il prêt à être mis en service le 31 décembre1993 (paragraphe 13(26));

 

4.         les billets sont-ils des obligations réelles ou éventuelles (alinéa 18(1)e));

 

5.         le logiciel acquis par la copropriété est-il un nouveau produit inventé par Arachnae?

 

            [...]

 

F.         RECOMMANDATIONS ET CONCLUSION

 

                                    Notre position en l’espèce est principalement fondée sur le rapport d'évaluation rédigé par Cole and Partners. Il a été déterminé que la valeur du logiciel devrait se situer aux environs de 1,6 millions de dollars. Nous acceptons ce montant au titre de la juste valeur marchande du logiciel AIRS II. Nous souscrivons à la juste valeur marchande établie par Cole pour les motifs suivants :

 

1.         Le logiciel n'était pas prêt à la date de l'évaluation. Il existait un certain nombre d'incertitudes, notamment : Le logiciel fonctionnera‑t‑il de la façon décrite ou attendue? Quand sera-t-il prêt à être mis en service? Quelle est l'importance de la concurrences?

 

2.                 Bien que la somme de 5 102 315 $ ait été investie dans le AIRS originel et dans l'AIRS II et que les copropriétaires avaient prévu d'investir des fonds additionnels de 2,4 millions de dollars dans le logiciel AIRS II, cela ne signifie pas que le nouveau logiciel AIRS II a une valeur de 8 millions de dollars.

 

3.                 Tel qu’il a déjà été mentionné, le résultat des ventes quant à l’AIRS fut très décevant. Pour la période entière de dix ans, le logiciel AIRS n'a réussi à produire qu'un revenu brut de 1 249 377 $. Toutefois, les frais de lancement étaient de 2 284 315 $ et représentent presque le double du revenu brut. Il n'est pas certain que les projections de vente faites par Arachnae étaient réalisables.

 

4.                 Pendant toute la période en question, Arachnae n'a pas réussi à conclure un seul contrat.

 

5.                 Le fait qu’Excite Inc. ait obtenu du succès ne signifie pas qu'AIRS II aurait également obtenu du succès.

 

6.                 L'introduction du logiciel Excite peut ou non constituer la principale raison pour laquelle le logiciel n'a obtenu aucun succès.

 

            Veuillez noter que nous ne considérons pas qu'il n'y a « pas d'attente raisonnable de profit » de la part de l’entreprise. Pendant la réunion du 8 février 2000, nous avons réexaminé les propositions suivantes présentées par M. Phil McDonnell :

 

-                    A-t-elle été exploitée à titre d'entreprise?

 

-                    Avait-elle une gestion convenable?

 

-                    Existait-il une force de vente afin de commercialiser le produit?

 

-                    Le produit était-il sur le marché?

 

-                    Existait-il un obstacle?

 

La réponse à toutes les questions susmentionnées est « Oui ». De plus, toute la correspondance disponible indique que des mesures raisonnables ont été prises relativement à l'exploitation. On faisait tous ce qu'une véritable entreprise aurait fait. En ce qui concerne les profits, on ne peut pas rejeter une entreprise pour la simple raison qu’elle ne fait aucun profit.

 

CONCLUSION

 

Nous proposons que le montant total de la DPA soit limité à 1,6 millions de dollars pour tous les copropriétaires, tel qu’il est mentionné dans notre première position ci‑dessus. Tel qu’il est mentionné sous la rubrique « Prêt à être mis en service » ci-dessus, il a été déterminé que le 31 décembre 1993, le logiciel n'était pas prêt à être mis en service. Par conséquent, nous refusons toute DPA pour l'année 1993. Il semble que le logiciel ait été prêt à être mis en service en 1994. Ainsi, une DPA est proposée pour l'année d'imposition 1994 et les années d’imposition suivantes.

 

21     En ce qui concerne la question de savoir si les billets constituaient des obligations éventuelles, Mme Jang a mentionné ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

Détails portant sur les billets

 

Pour chaque coût unitaire de 500 000 $, le billet est de 350 000 $ plus les intérêts sur ce montant, à un taux égal à 5 p. 100 par année calculé selon le taux annuel sans avance.

 

Fabriquant -- les différents acheteurs, copropriétaires, investisseurs

 

Bénéficiaire -- AIRS II Inc.

 

Date de paiement -- le 31 décembre 2003 pour les billets établis en 1993 et le 31 décembre 2004 pour les billets établis en 1994.

 

Avant la date de paiement, les versements sur le capital et sur les intérêts du présent billet ne seront effectués qu’à même la part du fabricant quant aux revenus ajustés.

 

Si, à la date anniversaire, la part du fabricant quant aux revenus ajustés ne suffit pas pour payer l’intérêt dû, l’intérêt s’accumulera.

 

Le présent billet peut être remboursé en tout temps sans préavis ou prime.

 

Le fabricant aura le droit, sur avis du bénéficiaire, en tout temps avant la date de paiement, de prolonger le délai de paiement pour une période pouvant aller jusqu'à dix années supplémentaires.

 

Le présent billet sera sans garantie.

 

Le bénéficiaire accepte que le présent billet ne puisse être cédé ou endossé en faveur d'un tiers sans le consentement du fabriquant, lequel consentement peut être refusé sans raison valable.

 

Nous avons tenté de vérifier l'authenticité des billets. Jusqu'à présent, les billets n'ont pas été remboursés. Selon ce qu’a déclaré M. Frank Penny, le 10 juin 1999, les modalités des billets demeurent les mêmes. Quant à l'état actuel des billets d'acquisition, ils sont encore impayés et seront traités par AIRS II Inc. et les copropriétaires selon les modalités qu’ils fixeront. Les frais financiers relatifs aux billets d'acquisition s’accumulent dans les registres d'AIRS II Inc., et seront payés selon les modalités de l'emprunt.

 

La date d'échéance exceptionnellement longue liée à la vie économique du logiciel et le manque de cautionnement approprié ne semblent pas cadrer avec les pratiques commerciales courantes. Toutefois, il n'existe aucun élément de preuve qui appuie l'hypothèse selon laquelle on n'avait pas l'intention de rembourser la dette.

 

22        Il ressort clairement de l'exposé de position que Mme Jang a analysé la question portant sur l'éventualité et a décidé que les billets n'étaient pas des obligations éventuelles. Elle a examiné la question de savoir si le logiciel a été acquis en vue de gagner ou de produire un revenu d'une entreprise ou d'un bien et elle a décidé que c’était le cas.

 

23        Dans son affidavit, Mme Jang elle a mentionné ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

15.             Au moment de la vérification, je croyais que les faits que j'avais recueillis et dont j’ai tenu l’existence pour acquis soulevaient plusieurs questions juridiques qui sont décrites dans l'exposé de position. J'ai cependant choisi de procéder avec la nouvelle cotisation sur le fondement de deux conclusions de droit :

 

a)                 au 31 décembre 1993, la juste valeur marchande du logiciel n'était pas supérieure à 1,6 millions de dollars;

 

b)                 le logiciel n'était pas prêt à être mis en service pendant l'année d'imposition 1993 de l'appelant.

 

16.             Après avoir examiné la Réponse à l'avis d'appel, je peux affirmer que des conclusions de droit supplémentaires peuvent être tirées des faits que j'ai recueillis, et dont j’ai tenu l’existence pour acquis, au cours de ma vérification. Ces conclusions de droit sont les suivantes :

 

a)                 l'appelant n'a acquis aucun droit sur le logiciel en vue de gagner ou de produire un revenu;

 

b)                 l'appelant, les copropriétaires du logiciel, d'AIRS II Inc., et d'Arachnae avaient un lien de dépendance;

 

c)                 la DPA réclamée par l'appelant pour les années d'imposition 1993 et 1994 était déraisonnable;

 

d)                 le montant de 350 000 $ établi par les présumés billets fournis à AIRS II Inc. par l'appelant constituait une obligation éventuelle.

 

17.             On m'a informé que ces conclusions ont été tirées à partir des faits et des renseignements que j'ai recueillis, et dont j’ai tenu l’existence pour acquis, pendant la vérification. Je crois que cette information est vraie.

 

24     L'énoncé du paragraphe 15 selon lequel Mme Jang a décidé de procéder avec la nouvelle cotisation fondée sur deux conclusions de droit, à savoir la juste valeur marchande et le bien prêt à être mis en service, est exact.

 

[2]     L’avis d’appel de M. Loewen a été déposé au mois d’octobre 2001, et la réponse a été déposée au mois de janvier 2002. Dans les deux autres appels, les avis d’appel ont été déposés au début de l’année 2003 et les réponses ont été déposées au mois de mai 2004. L’intimée cherche maintenant à faire modifier la réponse dans chaque appel, en vue d’ajouter les cinq paragraphes et l’alinéa suivants, et en vue d’ajouter l’article 237.1 au paragraphe 26, dans lequel sont énoncées les dispositions législatives invoquées :

 

          [traduction]

25.       Aucune demande n’a été faite conformément au paragraphe 237.1(2) de la Loi en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal relativement au logiciel et aucun numéro d’inscription n’a été attribué par le ministre en vertu du paragraphe 237.1(2) de la Loi.

 

26.       L’appelant n’a pas présenté le formulaire prescrit, notamment le numéro d’inscription d’abri fiscal, en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

27.       Avant l’acquisition du logiciel, des déclarations ou annonces avaient été faites aux acquéreurs éventuels du logiciel, ou avaient été envisagées par AIRS II Inc., ou pour le compte de celle‑ci.

 

28.       Selon les déclarations ou annonces, chaque acquéreur éventuel qui acquérait une part au montant de 500 000 $ en 1993 ferait un placement en argent comptant de 75 000 $ pour chacune des années d’imposition 1993 et 1994 et pourrait défalquer 250 000 $ en 1993 et 250 000 $ en 1994 de l’ensemble de son revenu.

 

29.       Le point litigieux est le suivant :

 

a)         Le logiciel constitue‑t‑il un abri fiscal au sens de l’article 237.1 de la Loi?

 

31.       Il prétend que le logiciel constituait un abri fiscal selon la définition figurant à l’article 237.1 de la Loi. Il prétend en outre qu’aucune demande en vue de l’obtention d’un numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été faite et que, par conséquent, aucun numéro d’inscription d’abri fiscal n’a été attribué par le ministre. Par conséquent, aucun montant ne peut être déduit ou demandé par l’appelant à l’égard du logiciel en vertu du paragraphe 237.1(6) de la Loi.

 

La numérotation figurant ci‑dessus se rapporte à l’appel Loewen. Les modifications que l’intimée se propose d’apporter aux deux autres réponses sont identiques, mais les numéros de paragraphe sont différents. L’avocate des appelants s’oppose aux requêtes en invoquant plusieurs motifs qu’elle a résumés sous les titres suivants dans un aperçu de son argumentation :

 

(i)                            Absence de droit prima facie de modifier les actes de procédure;

 

(ii)                          Absence de cause d’action valable;

 

(iii)                        Préjudice;

 

(iv)         Absence de « nouvel argument »;

 

(v)          Équité/sens commun/intérêt de la justice;

 

(vi)         Abus de procédure/Questions d’intérêt public

J’examinerai les motifs invoqués aux alinéas (i), (ii) et (iv), sous les titres susmentionnés, les motifs invoqués aux alinéas (iii) et (v), sous le titre commun « Considérations discrétionnaires », puis j’examinerai enfin le motif invoqué à l’alinéa (vi).

 

Absence de droit prima facie de modifier les actes de procédure

 

[3]     Me Tari compare l’article 54[1] des Règles, en vertu duquel les requêtes ici en cause sont présentées, avec l’article 26.01 des Règles de l’Ontario[2] :

 

54.       Une partie peut modifier son acte de procédure, en tout temps avant la clôture des actes de procédure, et subséquemment en déposant le consentement de toutes les autres parties, ou avec l’autorisation de la Cour, et la Cour en accordant l’autorisation peut imposer les conditions qui lui paraissent appropriées.

26.01   À moins qu’il n’en résulte un préjudice qui ne saurait être réparé par les dépens ou par un ajournement, le tribunal, sur motion présentée à toute étape d’une action, accorde l’autorisation de modifier un acte de procédure à des conditions justes.

 

Il faut appliquer l’article 54 en tenant compte de l’article 4 des Règles :

 

4(1)      Les présentes règles doivent recevoir une interprétation large afin d’assurer la résolution équitable sur le fond de chaque instance de la façon la plus expéditive et la moins onéreuse.

De nombreuses décisions ont été rendues au sujet de l’article 54 des Règles, mais l’énoncé de principe reconnu est celui que le juge en chef actuel de la Cour a prononcé dans la décision Continental Bank Leasing v. The Queen[3], page 302 :

 

Dans les affaires portées devant les tribunaux de l’Ontario et de la Colombie‑Britannique auxquelles on m’a renvoyé, un certain nombre de critères ont été élaborés – les faits ont‑ils été admis par inadvertance, la modification ou la rétractation d’un aveu soulève‑t‑elle une question pouvant être matière à procès et la partie adverse subirait‑elle un préjudice qui ne peut être compensé financièrement? À mon avis, ces critères ont été respectés. Mais je préfère tout de même examiner la question dans une perspective plus large : les intérêts de la justice seraient‑ils mieux servis si la demande de modification ou de rétractation était approuvée ou rejetée? Les critères mentionnés dans les affaires entendues par d’autres tribunaux sont évidemment utiles, mais il convient de mettre l’accent sur d’autres facteurs également, y compris le moment auquel est présentée la requête visant la modification ou la rétractation, la mesure dans laquelle les modifications proposées retarderaient l’instruction expéditive de l’affaire, la mesure dans laquelle la thèse adoptée à l’origine par une partie a amené une autre partie à suivre dans le litige une ligne de conduite qu’il serait difficile, voire impossible, de modifier, et la mesure dans laquelle les modifications demandées faciliteront l’examen par la Cour du véritable fond du différend. Il n’existe aucun facteur qui soit prédominant, ou dont la présence ou l’absence soit nécessairement déterminante. On doit accorder à chacun des facteurs le poids qui lui revient dans le contexte de l’espèce. Il s’agit, en fin de compte, de tenir compte de la simple équité, du sens commun et de l’intérêt qu’ont les tribunaux à ce que justice soit faite.

 

La Cour d’appel fédérale a cité ce passage en l’approuvant dans l’arrêt Canderel c. Canada[4], et plus récemment dans l’arrêt Merck & Co. c. Apotex Inc.[5] Il faut donc examiner les modifications proposées à la lumière des facteurs énumérés dans la décision Continental Bank Leasing et se demander également si ces modifications soulèvent une cause d’action valable, ou dans le contexte qui nous occupe, si elles soulèvent un moyen de défense valable à l’encontre des appels. Il serait insensé d’autoriser la modification d’un acte de procédure qui, si elle avait initialement été plaidée, aurait été susceptible d’être radiée pour le motif qu’elle n’est pas pertinente.

 

Absence de cause d’action valable

 

[4]     Le principe voulant que la modification d’un acte de procédure ne soit pas autorisée si elle ne soulève aucune cause d’action ou, dans le contexte d’une réponse à un avis d’appel devant la Cour, si elle ne fournit aucun moyen de défense à l’encontre de la cotisation portée an appel est un principe évident en soi. Comme il a déjà été mentionné, il serait insensé d’autoriser la modification d’un acte de procédure qui, si elle avait été initialement incluse, aurait été susceptible de radiation.

 

[5]     L’article 237.1 a été ajouté à la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi) en 1989. Il comprend la définition de l’expression « abri fiscal » et il exige que le promoteur d’un abri fiscal fasse inscrire cet abri auprès du ministre et obtienne ainsi un numéro d’inscription d’abri fiscal. Le paragraphe 237.1(6) prévoit ce qui suit :

 

237.1(6)           Un contribuable ne peut demander ou déduire de montant au titre d’une part dans un abri fiscal dans le calcul, en application de la présente loi, de son revenu, de son revenu imposable ou de son revenu imposable gagné au Canada ou de l’impôt ou d’un autre montant payable par celui‑ci ou d’un montant qui lui est remboursable, pour une année d’imposition, ou de tout montant à prendre en compte dans ce calcul, que s’il indique au ministre le numéro d’inscription attribué à l’abri fiscal.

 

L’intimée veut maintenant, au moyen des modifications, invoquer cette disposition à l’encontre des appelants. Pour qu’un tel argument soit retenu, il faut que la preuve établisse que le logiciel AIRS II était visé par la définition d’« abri fiscal », telle qu’elle existait au moment pertinent, soit en 1993 et en 1994. Comme le démontrent la décision rendue par la Cour dans l’affaire Baxter c. La Reine[6] et la décision par laquelle la Cour d’appel fédérale a annulé cette décision, il n’est pas facile d’appliquer cette définition. Le document qui a tout simplement été désigné, dans l’argumentation qui m’a été soumise, comme étant l’annexe I revêt une importance cruciale lorsqu’il s’agit de trancher la question; la définition d’« abri fiscal », telle qu’elle figurait dans la Loi en 1993 et en 1994, revêt également une importance cruciale. À ce moment‑là, cette définition était rédigée comme suit :

237.1(1)           Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

« abri fiscal » Bien pour lequel il est raisonnable de considérer, à la lumière de déclarations ou annonces faites ou envisagées en rapport avec ce bien, que, si une personne acquérait une part dans ce bien, le montant visé à l'alinéa a) excéderait le montant visé à l'alinéa b) à la fin d'une année d'imposition donnée se terminant dans les quatre ans après cette acquisition :

 

a) le total des montants dont chacun représenterait :

 

                  (i)         une perte qui est annoncée comme étant déductible dans le calcul du revenu, au titre de cette part, et qui pourrait être subie par la personne ou attribuée à celle-ci pour l'année donnée ou pour une année d'imposition antérieure,

 

                  (ii)        un montant qui est annoncé comme étant déductible dans le calcul du revenu ou du revenu imposable, au titre de cette part, et qui pourrait être engagé par la personne ou attribué à celle-ci pour l'année donnée ou pour une année d'imposition antérieure, à l'exclusion d'un montant inclus dans le calcul d'une perte visée au sous-alinéa (i);

 

b) l'excédent éventuel du coût de cette part pour la personne à la fin de l'année donnée sur la valeur totale des avantages visés par règlement que la personne ou toute personne avec laquelle elle a un lien de dépendance pourrait recevoir, directement ou indirectement, au titre de cette part. [7]

 

Me Tari prétend que, au vu de l’annexe I, le logiciel n’est pas visé par la définition telle qu’elle existait en 1993 et en 1994. L’exigence à laquelle il faut satisfaire selon la définition a été énoncée comme suit par le juge Rip dans la décision Maege c. La Reine[8] :

 

30        En ce qui concerne les aspects financiers d’un investissement et la question de savoir s’il s’agit d’un abri fiscal ou non, nous pouvons réduire les dispositions qui décrivent en quoi consiste un «abri fiscal » à une équation bien simple : un abri fiscal pourrait exister si A > (B - C), où A représente le total des montants déduits dans le calcul du revenu (y compris les pertes), B représente le montant de l’investissement ou le coût et C représente le montant des avantages visés par règlement reçus (dans ce cas‑ci, il s’agit de crédits d’impôt).

 

Selon l’annexe I, le coût d’une part dans le logiciel (B dans l’équation susmentionnée) est composé d’un versement de 75 000 $, de trois versements de 25 000 $ chacun, et d’un billet de 350 000 $, soit un montant de 500 000 $ en tout, et la DPA (A dans l’équation) pour chacune des années 1993 et 1994 s’élève à 250 000 $, soit à un montant de 500 000 $ en tout. Ce dernier montant est égal au premier montant, sans lui être supérieur, de sorte que le bien, prétend‑on, ne peut pas constituer un abri fiscal.

 

[6]     Selon la position prise par l’intimée, il faut déduire du facteur « coût » figurant dans l’équation (B) le montant de 350 000 $ mentionné dans le billet (C), parce qu’il s’agit d’un avantage à recevoir selon la description qui est donnée quant à cette expression au paragraphe 231(6) du Règlement de l’impôt sur le revenu. Les passages essentiels pertinents du Règlement, tel qu’il était libellé au moment pertinent, étaient les suivants :

 

231(6)  Pour l’application de l’alinéa b) de la définition d’«abri fiscal» au paragraphe 237.1(1) de la Loi, l’avantage à recevoir au titre d’une part dans un abri fiscal est un montant [...]. Sont notamment des avantages :

 

a)         le montant que l’acheteur [...] doit, immédiatement ou dans le futur, à une autre personne dans la mesure où, selon le cas:

 

                        (i)         l’obligation de rembourser ce montant est conditionnelle,

                        [...]

 

Il est allégué, à l’alinéa 22h) de la réponse dans l’appel Loewen (paragraphes 19 et 20 respectivement dans les appels Pringle et De Pencier) que l’obligation prévue dans le billet est une obligation éventuelle. La modification proposée serait donc susceptible de soulever un débat judiciaire.

 

 

 

Absence de « nouvel argument »

 

[7]     La période normale de nouvelle cotisation prescrite au paragraphe 152(4) de la Loi pour toutes les années visées par chacun des appels est depuis longtemps expirée. Les appelants prétendent donc qu’autoriser la modification proposée irait à l’encontre de la règle énoncée dans l’arrêt Continental Bank of Canada c. Canada[9]. L’intimée se fonde sur le paragraphe 152(9) qui est ainsi libellé :

 

152(9)  Le ministre peut avancer un nouvel argument à l’appui d’une cotisation après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation, sauf si, sur appel interjeté en vertu de la présente loi :

a)         d’une part, il existe des éléments de preuve que le contribuable n’est plus en mesure de produire sans l’autorisation du tribunal;

b)         d’autre part, il ne convient pas que le tribunal ordonne la production des éléments de preuve dans les circonstances.

 

L’objection invoquée par les appelants sous ce titre est que l’intimée ne se propose pas simplement de soulever un nouvel argument à l’appui des cotisations visées par les appels, mais qu’elle cherche plutôt à invoquer une cotisation différente fondée sur des opérations ou événements nouveaux et différents. L’avocate a invoqué la décision rendue par la Cour dans l’affaire Papiers Cascades Cabano Inc. c. La Reine[10] ainsi que la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Pedwell c. Canada[11]. À mon avis, la décision Papiers Cascades ne s’applique pas en l’espèce. Cette décision portait sur l’application du principe énoncé dans la décision New St. James[12] quant au report prospectif de crédits d’impôt à l’investissement inutilisés. Dans cette affaire, le ministre avait réduit, en établissant la cotisation pour l’année d’imposition 1966, le montant reporté prospectivement d’une année antérieure frappée de prescription par suite de la révision du montant du crédit auquel le contribuable avait droit pour cette année antérieure. Dans une remarque incidente, le juge de première instance avait retenu un nouvel argument avancé pour le compte de l’appelante, à savoir que permettre au ministre de calculer de nouveau le montant se rapportant à une année frappée de prescription revenait en fait à lui permettre d’interjeter appel de sa propre cotisation. La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel interjeté par le ministre et le principe énoncé dans la décision New St. James a été confirmé. La cour n’a pas jugé nécessaire d’examiner le paragraphe 152(9).

 

[8]     Dans l’affaire Pedwell, le ministre avait initialement établi la cotisation en vue d’imposer deux opérations, l’une concernant l’appropriation d’un bien‑fonds appartenant à une société, et l’autre concernant la vente du bien‑fonds. Une opposition ayant été déposée, le ministre avait établi une nouvelle cotisation en vue d’admettre l’opposition concernant l’opération de vente, et avait ratifié la cotisation relative à l’appropriation. Cette cotisation a été portée en appel et le juge de première instance, tout en accueillant l’appel à l’égard de l’appropriation du bien‑fonds, a renvoyé la cotisation au ministre en lui donnant comme directive d’établir une nouvelle cotisation au motif que le produit de la vente et celui d’une autre opération constituaient un revenu entre les mains de l’appelant. Cette décision a été annulée par la Cour d’appel qui a affirmé que la cotisation n’avait pas été établie sur cette base et que la Cour ne pouvait pas de son propre chef substituer une cotisation tout à fait différente à la cotisation portée en appel. La ratio decidendi figure dans le passage suivant des motifs du jugement de la Cour d’appel[13] :

21        Le ministre avance deux arguments. Le premier est que la question en litige dans un appel en matière d’impôt est de savoir si l’impôt est trop élevé. Cet argument sous‑entend que tout peut être débattu à la Cour de l’impôt et que le juge de la Cour de l’impôt n’est limité que par le montant de la cotisation. En d’autres mots, dans la mesure où le jugement n’excède pas le montant d’impôt cotisé par le ministre, le juge de la Cour de l’impôt peut conclure à l’assujettissement du contribuable pour tout motif, qu’il soit indiqué dans l’avis de nouvelle cotisation ou non, pourvu que le contribuable en soit informé et qu’il ait la possibilité d’y répondre.

22        J’estime que l’arrêt Banque Continentale règle cette question. La Couronne et, par conséquent, la Cour doivent s’en tenir à la cotisation faisant l’objet de l’appel, à moins qu’elle n’ait été modifiée ou qu’un avis adéquat de l’intention d’invoquer des motifs différents à l’appui de cette cotisation n’ait été donné avant l’expiration du délai prévu à cette fin et certainement avant que jugement soit rendu par la Cour de l’impôt. Cela n’a pas été le cas en l’espèce.

23        Le deuxième argument de la Couronne veut que les éléments qui ressortent font tous partie d’une seule transaction et que l’acquisition des 84 acres, la vente à Euler et le dépôt reçu de Landpark ne peuvent pas être séparés pour des fins fiscales. Ce sont toutefois trois opérations distinctes, auxquelles ont participé des parties différentes, qui ressortent:

1)         l’acquisition des 84 acres;

2)         la vente d’un lot aux Euler;

3)         le dépôt reçu de Landpark pour 16 lots.

Cela apparaît dans l’avis de nouvelle cotisation du ministre. Dans la nouvelle cotisation du 1er octobre 1994, l’appropriation des 84 acres est indiquée, suivie par le profit non déclaré qui aurait été réalisé sur la vente à Euler. Dans l’avis de nouvelle cotisation du 4 avril 1996, l’opération avec Euler est éliminée. Cela indique nécessairement que l’appelant n’a plus besoin de craindre que le produit de la vente à Euler soit interprété comme constituant une appropriation de sa part et qu’il peut se concentrer sur l’acquisition des 84 acres. Cela a été confirmé devant le juge de la Cour de l’impôt, comme il ressort de l’extrait de la transcription cité précédemment. Enfin, le dépôt de 22 500 $ versé par Landpark n’est mentionné nulle part dans les nouvelles cotisations.

24                Je ne dis pas que le ministre ne pourrait pas fonder une cotisation sur une transaction consistant en plus d’une opération. L’imposition est cependant liée à l’opération (ou est peut‑être réputée l’être), et si plus d’une opération doit former le fondement d’une cotisation, la cotisation doit refléter ce fait. Lorsque le fondement de la cotisation du ministre est une opération, la Cour ne peut pas après coup élargir la portée de la cotisation pour que celle‑ci vise également d’autres opérations.

Il est possible de faire une distinction entre l’affaire Pedwell et les affaires qui nous occupent, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, l’interdiction, dans l’arrêt Pedwell, vise les cas dans lesquels une opération tout à fait différente de celle qui est mentionnée dans la cotisation portée en appel est invoquée; deuxièmement, dans l’affaire Pedwell, le contribuable n’a jamais été avisé du fondement envisagé de la cotisation proposée par la Cour dans son jugement; troisièmement, le paragraphe 152(9) s’applique uniquement aux appels sur lesquels il a été statué après le 17 juin 1999; or, la décision de la Cour, dans l’affaire Pedwell, a été rendue le 29 octobre 1988, et comme le juge Rothstein l’a affirmé, ce paragraphe « [...] n’est pas pertinent en l’espèce de toute manière [...] ».

 

[9]     Aux fins de l’examen de l’application du paragraphe 152(9), les décisions qui sont pertinentes, et qui me lient, sont Canada c. Anchor Pointe Energy Ltd.[14], Canada c. Loewen[15] et Walsh c. Canada[16]. L’affaire Anchor Pointe est sur tous les points semblable à celles qui nous occupent. Dans cette affaire‑là, la nouvelle cotisation que le ministre avait établie à l’égard de la contribuable était fondée sur l’opinion selon laquelle certaines données sismiques, dont le coût avait été déduit au titre des frais d’exploration au Canada, avaient une juste valeur marchande inférieure au montant réclamé. La contribuable a fait opposition. Après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation, le ministre, en se fondant sur le jugement que la Cour d’appel fédérale venait de rendre dans l’affaire Global Communications Ltd. c. La Reine[17], a ratifié la nouvelle cotisation. Pour ce faire, le ministre s’était fondé sur la question de l’évaluation qui avait donné lieu à la nouvelle cotisation ainsi que sur un motif additionnel, à savoir que les données sismiques avaient été acquises en vue d’être revendues plutôt qu’en vue de servir à l’exploration comme l’exigeait la Loi. La question qui avait été soulevée dans une requête visant à contester la réponse à l’avis d’appel était de savoir si le paragraphe 152(9) permettait au ministre de faire valoir ce nouvel argument. En arrivant à sa conclusion, le juge Rothstein, au nom de la Cour, a affirmé ce qui suit aux paragraphes 37 à 41 :

37        Le paragraphe 152(9) autorise le ministre à faire valoir un nouvel argument à l’appui d’une cotisation après l’expiration de la période normale de la nouvelle cotisation. On ne laisse pas entendre en l’espèce qu’Anchor Pointe n’est plus en mesure de produire des éléments de preuve pertinents relativement au fondement ou à l’argument nouveau du ministre. Par conséquent, si la décision Global constitue un fondement ou un argument nouveau à l’appui de la nouvelle cotisation, le ministre peut la faire valoir même si cela n’a pas été fait avant l’expiration de la période normale de la nouvelle cotisation.

38        Anchor Pointe tente d’établir une distinction entre un nouveau fondement pour une cotisation et un nouvel argument à l’appui d’une cotisation. Je ne trouve pas utile cette argumentation sémantique. La question qui se pose est celle de savoir si le ministre vise, en s’appuyant sur la décision Global, à faire croître le montant du revenu d’Anchor Pointe qui n’était pas inclus dans une cotisation ou une nouvelle cotisation établie pendant la période normale de nouvelle cotisation.

39        Le ministre ne le visait pas, à mon avis. La présente affaire diffère d’autres, comme Pedwell c. La Reine, 2000 D.T.C. 6050 (C.A.F.), où le ministre avait visé à prendre en compte des transactions différentes de celles ayant servi de fondement aux nouvelles cotisations établies pendant la période de la nouvelle cotisation. Je ne dis pas que la seule chose que le ministre ne peut faire après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation c’est prendre en compte d’autres transactions. Tout ce qui ferait augmenter l’impôt à payer par rapport à ce qui devrait l’être à la fin de la période de nouvelle cotisation serait répréhensible.

40        En l’espèce, le ministre ne cherche pas à s’appuyer sur Global pour faire croître les impôts à payer par Anchor Pointe au‑delà de ce qui était inclus dans la nouvelle cotisation du ministre avant l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation. La nouvelle cotisation faisait croître l’impôt payable en réduisant les déductions de FEC d’un montant correspondant à la différence entre le montant demandé et le montant établi en fonction de l’estimation par le ministre de la juste valeur marchande des données sismiques. En ratifiant la nouvelle cotisation, le ministre ne vise pas à augmenter l’impôt à payer. Il ne fait pas entrer en jeu une nouvelle transaction. Il ne fait qu’avancer un argument additionnel, soit que les données sismiques achetées pour fins de revente ou d’octroi de permis ne sont pas admissibles comme déductions au titre de FEC.

41        Dans ces circonstances, je suis d’accord avec la conclusion du juge Rip selon laquelle il n’y a rien de répréhensible à ce que la réponse de la Couronne renferme un argument additionnel fondé sur la décision Global.

 

[10]    Me Tari prétend que, en l’espèce, si l’on ajoutait des allégations selon lesquelles le logiciel AIRS II constituait un abri fiscal et que les appelants ne s’étaient pas conformés à l’exigence voulant qu’ils présentent le formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits exigés au paragraphe 237.1(6) de la Loi, cela reviendrait à ajouter de nouvelles opérations au fondement sous‑tendant les nouvelles cotisations. Je ne souscris pas à cette affirmation. Ces allégations sont tout à fait analogues à l’exigence ajoutée dans l’arrêt Anchor Pointe, à savoir que les données sismiques devaient être acquises à des fins d’exploration. Comme dans l’affaire Anchor Pointe, le ministre ne cherche pas à augmenter le montant de la cotisation, et ce, bien que le nouveau motif, s’il avait été soulevé à temps, eût entraîné une nouvelle cotisation d’impôt plus élevée. Comme l’a affirmé le juge Rothstein dans les trois dernières phrases du paragraphe 40 de ses motifs, l’intimée, en apportant cette modification à l’acte de procédure, ne cherche pas à augmenter le montant de l’impôt. Elle ne fait pas entrer en jeu une nouvelle opération. Elle ne fait qu’avancer un argument additionnel, à savoir que le bien ne peut pas donner lieu à une DPA dans le cas d’un abri fiscal non inscrit et que le contribuable n’a pas présenté le formulaire prescrit auprès du ministre.

 

[11]    La modification proposée est également analogue à l’ajout, dans les réponses qui ont été déposées il y a quelques années dans les présentes affaires, de l’argument invoqué à l’appui des nouvelles cotisations, à savoir que les appelants n’avaient pas acquis le logiciel en vue d’en tirer un revenu. En accueillant l’appel de l’ordonnance par laquelle la Cour avait radié cette allégation de la réponse, la juge Sharlow a affirmé ce qui suit au nom de la cour[18] :

 

46        Dans le cas de M. Loewen, Sa Majesté souhaite plaider que M. Loewen n’a pas acquis sa participation dans le logiciel en vue d’en tirer un revenu. Si cet argument est bien fondé, M. Loewen n’aurait pas dû être autorisé à se prévaloir de quelque déduction pour amortissement que ce soit. Comme le délai prévu par la loi est expiré, le ministre ne peut plus établir de nouvelle cotisation pour augmenter la dette fiscale de M. Loewen en diminuant sa déduction pour amortissement. Sa Majesté ne cherche cependant pas à ramener à zéro la déduction pour amortissement; elle veut seulement défendre la nouvelle cotisation par laquelle le ministre a diminué la déduction pour tenir compte de ce qu’il estimait être la juste valeur marchande de la participation de M. Loewen dans le logiciel. C’est essentiellement ce que Sa Majesté a été autorisée à faire dans l’affaire Anchor Pointe.

47        L’avocat de M. Loewen affirme que l’arrêt Anchor Pointe n’est pas utile pour résoudre les questions en litige dans le cas qui nous occupe parce que, dans l’affaire Anchor Pointe, Sa Majesté avait plaidé un nouveau moyen au terme de l’étape de l’opposition, alors qu’en l’espèce, Sa Majesté a présenté son nouvel argument pour la première fois à l’étape de la procédure écrite. Il n’y a pas lieu selon moi de faire une telle distinction. Dans les deux affaires, il s’agissait de savoir si Sa Majesté était autorisée à défendre une cotisation sur le fondement d’un argument qu’elle présentait pour la première fois après l’expiration du délai prévu pour l’établissement d’une nouvelle cotisation.

48        À mon avis, les questions que Sa Majesté soulève dans cette partie de son appel ont déjà été tranchées dans l’arrêt Anchor Pointe. Il n’est donc pas nécessaire que j’examine les autres arguments qui ont été soulevés pour le compte de M. Loewen sur ce point. Je conclus que le juge a commis une erreur en radiant ces extraits de la réponse et que l’appel de Sa Majesté devrait être accueilli sur ce point.

 

[12]    Dans l’arrêt Walsh c. Canada[19], après avoir mentionné l’arrêt Anchor Pointe, le juge en chef Richard a résumé l’affaire de façon succincte au paragraphe 18 des motifs qu’il a prononcés au nom de la cour :

 

18        Les conditions suivantes sont applicables lorsque le ministre veut invoquer le paragraphe 152(9) de la Loi :

 

1)      Le ministre ne peut pas inclure de transactions non comptées dans la nouvelle cotisation du contribuable.

 

2)      Le droit du ministre de proposer un autre argument à l’appui d’une cotisation est assujetti aux alinéas 152(9)a) et b), qui ont trait au préjudice causé au contribuable.

 

3)      Le ministre ne peut pas invoquer le paragraphe 152(9) pour établir une nouvelle cotisation au‑delà du délai prévu au paragraphe 152(4) de la Loi ou pour percevoir un impôt dépassant le montant de la cotisation contestée. 

 

En l’espèce, l’intimée ne cherche pas à établir de nouvelles cotisations, elle ne cherche pas à percevoir plus d’impôt que le montant qui a été établi dans la période normale de nouvelle cotisation, et elle ne cherche pas à se fonder sur des opérations autres que celles dont il était question dans les nouvelles cotisations initialement établies. Elle cherche à invoquer un argument additionnel, à savoir que le paragraphe 237.1(6) empêche les déductions qui ont été refusées dans les nouvelles cotisations visées par les appels; cet argument additionnel exige qu’un fait additionnel soit allégué – à savoir que le formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits n’a pas été présenté par les appelants. Le paragraphe 152(9) autorise la chose. La disposition restrictive figurant aux alinéas a) et b) ne s’applique pas en l’espèce; l’autorisation de présenter une preuve ne doit être demandée que devant une cour d’appel. La question de savoir si l’ajout de ce nouveau point factuel à ce stade est inéquitable pour les appelants est une question différente, sur laquelle je vais maintenant me pencher.

 

Considérations discrétionnaires

 

[13]    Me Tari avance un certain nombre de motifs discrétionnaires en s’opposant à l’autorisation de modifier l’acte de procédure. Elle affirme que 14 années se sont écoulées depuis la conclusion des opérations qui ont donné lieu aux cotisations. Arachnae Management Limited, qui a vendu le logiciel AIRS II, a cessé d’exercer ses activités et son directeur s’est installé aux États‑Unis. Il n’existe plus de source où chercher des documents additionnels d’Arachnae. Il serait maintenant difficile ou impossible d’établir si Arachnae a fait des annonces, ou si elle a fait inscrire le logiciel en vertu de l’article 237.1 de la Loi. La recherche initiale de documents, selon l’avocate, était axée sur des documents traitant des questions de valeur et de disponibilité aux fins de la mise en service sur lesquels la répartitrice s’était initialement fondée. Depuis lors, d’autres questions ont été ajoutées; or, si une autre question était ajoutée à ce stade, cela causerait un préjudice aux appelants en ce sens qu’ils ne disposent d’aucun moyen leur permettant de réfuter l’allégation selon laquelle le logiciel constituait un abri fiscal non inscrit. Les appelants affirment également que, si une modification additionnelle était maintenant autorisée, l’instruction serait inévitablement retardée de façon indue, au détriment non seulement des trois appelants en cause en l’espèce mais également au détriment de 14 autres appelants dont les appels attendent l’issue des présents appels. L’appel Loewen a été interjeté il y a environ six ans, et les autres il y a près de cinq ans. Les appelants ont terminé l’interrogatoire préalable de l’intimée au mois de mai 2005. Ils veulent faire entendre l’affaire dans les plus brefs délais, et ils affirment être prêts à la faire entendre. Un bon nombre d’appelants sont âgés; on m’a informé que deux appelants sont décédés depuis le début des procédures.

 

[14]    Dans son opposition aux modifications, l’avocate se fonde également sur l’article 4 des Règles :

 

4(1)      Les présentes règles doivent recevoir une interprétation large afin d’assurer la résolution équitable sur le fond de chaque instance de la façon la plus expéditive et la moins onéreuse.

 

Les modifications proposées, selon elle, occasionneraient des frais et des retards additionnels et susciteraient de nouvelles questions qui n’ont pas déjà été abordées lors de la préparation de l’instruction, de sorte que cela empêcherait les appelants d’obtenir la résolution équitable de leurs appels auquel ils ont droit, de la façon la  plus expéditive possible.

 

[15]    L’explication que l’intimée a donnée quant à la présentation tardive de la demande visant les modifications proposées figure dans l’affidavit de Laura Alescio, qui a été déposé à l’appui des requêtes. Un document crucial, concernant le placement AIRS II, est intitulé : [traduction] « Occasion de participer à l’âge de l’information au moyen d’un placement dans un engin de recherche documentaire dans le cadre d’une coentreprise » (l’Occasion d’affaires). Ce document est daté du 9 décembre 1993; il est composé d’une page couverture, suivie de pages numérotées 2 à 6, suivies des annexes I à VI. Les annexes comprennent 17 pages en tout. Selon l’avocate de l’intimée, l’annexe I indique que le logiciel est visé par la définition d’« abri fiscal »qui figure à l’article 237.1. L’affidavit établit que la répartitrice n’a jamais vu l’annexe I et qu’elle n’a pas envisagé la possibilité que le placement constituait un abri fiscal. Les appelants n’ont pas réfuté cette preuve; je conclus que la répartitrice du ministre n’a pas pu tenir compte de la question même que l’intimée cherche maintenant à soulever puisqu’on ne lui a remis que 7 des 17 pages comprises dans un document. L’une des pages manquantes – l’annexe I – est la page cruciale mentionnant le coût d’achat d’une part et la DPA prévue pour la période de deux ans suivant l’acquisition.

 

[16]    L’affidavit de Mme Alescio établit également que ce n’est qu’au mois de février 2005 que l’avocate des appelants a initialement fourni une copie du document renfermant l’annexe I (mais pas les autres annexes) à l’avocate de l’intimée. Il semble que le document complet n’a été produit qu’au mois d’avril 2006 en réponse à un engagement que M. Pringle avait pris lorsqu’il avait été interrogé au préalable. Les actes de procédure, dans ces appels, ont été clos au milieu d’avril 2004, à la suite de la décision par laquelle la Cour d’appel fédérale avait rejeté la contestation par l’appelant de la réponse initiale dans l’appel Loewen.

 

[17]    L’intimée a justifié le dépôt tardif de la présente requête en affirmant que [traduction] « [...] le procureur général ne s’[est] pas arrêté à la question de savoir si le placement dans AIRS II constituait un abri fiscal [...] » [20] avant que la Cour d’appel fédérale ne rende sa décision dans l’affaire Baxter[21], le 30 avril 2007. Le 9 mai 2007, l’avocate de l’intimée a informé l’avocate de l’appelant de son intention de présenter la requête. Le retard, entre le 9 mai et le 24 octobre, est attribuable au fait que l’avocate des appelants n’était pas disponible.

 

[18]    Je ne veux pas que l’on considère que j’excuse le délai de deux ans qui s’est écoulé avant que le procureur général se rende compte de l’importance de l’annexe I, et qu’il réagisse alors. Somme toute, c’était le même procureur général qui avait plaidé l’affaire Baxter devant la Cour et devant la Cour d’appel fédérale depuis 2002. La présente requête aurait dû être déposée beaucoup plus tôt à la suite de la production de l’annexe I. Ceci dit, il est évident que si l’on n’avait pas remis une copie incomplète de l’« Occasion d’affaires » à la répartitrice, celle‑ci aurait été en mesure d’examiner la question de l’abri fiscal avant l’établissement des nouvelles cotisations. La preuve dont je dispose ne démontre pas d’une façon claire si ce sont les appelants qui sont fautifs ou si c’est Arachnae qui l’est, mais le retard imputable à l’intimée a commencé au plus tôt au mois de février 2005 et il a pris fin au mois de mai 2007.

 

Preuve documentaire

 

[19]    L’affidavit qui a été déposé pour le compte des appelants en opposition à la requête porte dans une large mesure sur le fait qu’Arachnae a mis fin à ses activités et que son directeur, M. McCutcheon, s’est installé aux États‑Unis. Tout cela s’est produit vers l’an 2000. Il semble que l’avocate des appelants ait à sa disposition les documents d’Arachnae qui ont été trouvés après ces événements. Je ne dispose certes d’aucun élément de preuve donnant à entendre que des documents se rapportant à la question de l’abri fiscal ont disparu ou ont été détruits depuis le mois de février 2005. Il importe également de souligner que l’intimée aura la charge de prouver les faits pertinents qu’elle veut maintenant alléguer pour la première fois. Il n’y a donc pas lieu de conclure que le retard, entre le mois de février 2005 et le mois de mai 2007, a causé préjudice aux appelants en ce qui concerne la possibilité d’obtenir les documents. Les appelants n’ont pas non plus adopté, dans leurs appels, une ligne de conduite qu’ils seraient obligés de modifier si les modifications étaient autorisées.

 

Instruction tardive

 

[20]    Les appelants affirment qu’ils veulent faire instruire l’affaire le plus tôt possible et qu’il serait inéquitable d’autoriser la modification puisque cela occasionnerait un retard additionnel. Je ne veux pas imputer l’énorme retard qui a été accusé jusqu’à maintenant à une partie plutôt qu’à l’autre. En fait, ces appels ne sont pas prêts pour l’instruction en ce moment. Les interrogatoires préalables des appelants ne sont pas terminés. Aussi récemment que le 15 octobre 2007, l’avocate des appelants a reconnu le droit de l’intimée d’interroger encore une fois au préalable les appelants Pringle et De Pencier, et elle a proposé que les interrogatoires aient lieu au mois de janvier ou de février 2008.

 

[21]    Le juge en chef a ordonné aux appelants, il y a un an, de produire le code source du logiciel AIRS II. Les appelants ne sont pas encore conformés à cette ordonnance. Ils affirment que les bandes qu’ils ont en leur possession sont altérées. À l’audience, on m’a dit que, lorsqu’une conférence préparatoire qui a eu lieu au mois de juin, l’ordonnance prévoyant la production de ces bandes avait été modifiée par le juge qui présidait la conférence, mais, en fait, le dossier du greffe révèle qu’aucune ordonnance de ce genre n’a été rendue. On a apparemment proposé que les experts des parties se réunissent afin d’examiner la question de savoir s’il était possible d’extraire l’information des bandes, mais aucune mesure en ce sens n’a encore été prise.

 

[22]    Lors de l’audition des requêtes, l’avocate des appelants m’a informé qu’une autre copie du code source est conservée par un cabinet comptable national aux termes d’un contrat de mise en main tierce depuis la date de conclusion, au mois de décembre 1993. Il semble que cette firme n’ait pas été en mesure de produire la copie en réponse à la demande de l’avocate. À ce jour, on n’a présenté à la Cour aucune demande en vue de faire modifier l’ordonnance rendue par le juge en chef ou en vue d’obtenir des directives, de façon à régler la question. Les présents appels ne peuvent pas être instruits tant que la question de la production du code source ne sera pas réglée d’une façon ou d’une autre.

 

[23]    Lors de l’audition des requêtes, j’ai demandé à l’avocate combien de temps il lui faudrait pour interroger le représentant de l’intimée sur la nouvelle question si j’autorisais la modification. L’avocate n’a pas voulu se risquer à estimer le temps nécessaire. Étant donné que la question de savoir si les billets comportent des obligations éventuelles est déjà soulevée dans les réponses qui ont été déposées, les nouvelles questions de fait que les modifications soulèveraient sont de savoir si des annonces ont été faites, si le promoteur a fait inscrire AIRS II à titre d’abri fiscal et si les appelants ont présenté le formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits. Je ne vois pas pourquoi l’interrogatoire préalable relatif à ces questions ne pourrait pas être effectué en un jour ou deux.

 

[24]    Me Tari prétend que l’ajout de la question de l’abri fiscal nécessiterait le report de l’instruction tant que la Cour suprême n’aura pas statué sur une demande d’autorisation de pourvoi présentée dans l’affaire Baxter, laquelle a été déposée au mois de juin 2007, et si l’autorisation est accordée, tant que cet appel n’aura pas été entendu et réglé. Or, la jurisprudence est en évolution constante; les tribunaux de première instance ne sont pas obligés de s’abstenir d’entendre une affaire parce qu’elle comporte une question de droit sur laquelle l’issue d’un appel qui est en cours ailleurs peut avoir une incidence.

 

Intérêt de la justice

 

[25]    La question que l’intimée cherche maintenant à soulever est importante. Le point qui est en litige en l’espèce se rapporte au droit des appelants de se prévaloir de la DPA. L’intimée veut alléguer qu’un élément pertinent, en vertu de la Loi telle qu’elle s’appliquait au moment pertinent, est l’exigence voulant que l’on se conforme au paragraphe 237.1(6). Si les modifications étaient autorisées, cela permettrait à la Cour d’examiner le véritable fond des demandes que les appelants font à l’égard de la DPA, compte tenu de toutes les dispositions pertinentes de la Loi. Dans des circonstances à peu près identiques, le juge en chef adjoint Bowman (tel était alors son titre), après avoir mentionné la décision qu’il avait rendue dans l’affaire Continental Bank Leasing, a autorisé la modification des avis d’appel après le début de l’instruction dans l’affaire Scavuzzo et Scavuzzo c. La Reine[22]. L’instruction a été ajournée afin de permettre aux deux parties de déposer de nouveaux actes de procédure et d’autoriser une production et une communication additionnelles, de façon que tous les motifs d’appel possibles puissent être pleinement examinés à l’instruction. Voici ce que le juge a affirmé à la page 170 :

 

[...], la Couronne ne subit en l’espèce aucun préjudice qui ne puisse pas être compensé par des dépens. La possibilité que les appelants obtiennent gain de cause relativement au nouveau point n’est pas le genre de préjudice envisagé par la jurisprudence dans ce genre de cas.

 

[26]    En résumé, le fait que l’on a attendu environ deux ans après la production de l’annexe I accompagnant le document de proposition pour présenter les requêtes en cause en l’espèce milite certes à l’encontre des modifications, mais cela en soi ne porte pas un coup fatal aux requêtes : voir Bradley Holdings Ltd. c. La Reine[23]. Les appelants ne subiront aucun préjudice par suite de ce retard de deux ans, si la nouvelle question est examinée. À coup sûr, il a fallu beaucoup trop de temps pour faire avancer les appels au stade où ils sont rendus, mais apparemment l’intimée n’est pas plus à blâmer que les appelants pour ce retard. L’intimée a apparemment fait l’objet d’interrogatoires préalables complets, mais les interrogatoires de deux appelants ne sont pas terminés et il reste encore des questions à trancher au sujet de la production du code source. Si les modifications étaient autorisées, cela permettrait d’examiner, à l’instruction, toutes les dispositions pertinentes portant sur le droit des appelants aux déductions demandées. À mon avis, si les modifications étaient autorisées, cela ne causerait aux appelants aucun préjudice qui ne puisse pas être compensé par des dépens.

 

Abus de procédure

 

[27]    Me Tari a avancé l’argument selon lequel les présentes requêtes constituent un abus de procédure et qu’elles devraient être rejetées pour ce seul motif. L’avocate a affirmé que les requêtes avaient été présentées dans le cadre d’une stratégie délibérée adoptée par l’avocate de l’intimée, qui voulait retarder l’affaire dans le but de rendre le présent litige tellement coûteux pour les appelants qu’ils se verront obligés d’accepter un compromis. J’ai minutieusement examiné les documents mis à ma disposition pour tâcher d’y trouver des éléments de preuve à l’appui de cet argument, mais je n’en ai trouvé aucun. Ce genre d’accusation, sans aucun fondement, est inexcusable. Depuis quelques années, on a assisté à un manque de courtoisie de plus en plus grand dans les litiges, ce qui n’a pas échappé a l’attention de l’Advocates’ Society, de l’Association du Barreau canadien et d’autres organismes. L’Advocates’ Society en a parlé dans ses Principles of Civility, publiés sur son site Web[24]. Cette société condamne les allégations dénuées de fondement de ce genre qui sont faites contre un avocat de la partie adverse. Dans l’ensemble, la conduite de l’avocate qui a comparu devant la Cour a toujours été conforme aux traditions du barreau. J’espère que cela continuera, et que ce qui s’est produit en l’espèce est un incident isolé qui ne se répétera pas.

 

Conclusion

 

[28]    Pour les motifs susmentionnés, les requêtes sont accueillies. L’intimée aura l’autorisation de déposer une réponse modifiée dans chacun des présents appels dans le formulaire qui est joint aux avis de requête. Les réponses modifiées seront signifiées et déposées dans les sept jours suivant la date de l’ordonnance. Une conférence sur la gestion de l’instance sera organisée afin d’assurer, dans les plus brefs délais, toute production et communication additionnelles nécessaires.

 

Dépens

 

[29]    Selon Me Tari, les requêtes devraient être rejetées et les appelants devraient avoir droit à leurs frais et dépens à l’égard des requêtes sur la base avocat‑client; dans le cas où les requêtes seraient accueillies, les appelants devraient alors avoir droit aux frais et dépens relatifs aux requêtes ainsi qu’aux frais occasionnés par les modifications, sur la base avocat‑client. L’avocate invoque la décision Bradley Holdings Ltd.[25], dans laquelle le juge Bonner a affirmé ce qui suit, aux paragraphes 19 et 20 :

19        M. Silver signale que la présente poursuite a été engagée il y a plus de trois ans. Le litige porte sur la modification d’une réponse qui a déjà été modifiée. La forme de la réponse modifiée à deux reprises qui est jointe à l’avis de requête n’est pas la même que celle de la réponse modifiée à deux reprises que l’intimée a cherché à déposer il y a quelques semaines seulement. Au cours de l’audition de la présente requête, l’intimée a jugé nécessaire de chercher à apporter des modifications additionnelles au paragraphe 7 de la réponse modifiée à deux reprises, de façon que celui‑ci soit compréhensible. À la suite de l’audition de la requête visant la modification, vendredi dernier. M. Silver a cherché à éclaircir le libellé sous la forme d’un paragraphe 27 corrigé. Tout cela est arrivé à la suite des interrogatoires préalables et à un moment où l’affaire était apparemment sur le point d’être entendue et où la date d’audience avait été fixée.

20        Selon le principe sous-tendant l’adjudication des frais et dépens entre parties, les frais et dépens ne devraient sans doute pas constituer un fardeau trop lourd pour la partie perdante. Je reconnais également qu’une partie qui agit d’une façon raisonnable peut être obligée de modifier ses actes de procédure si l’enquête effectuée au cours de la phase de préparation de l’affaire ou si les réponses données lors des interrogatoires préalables font voir l’affaire sous un nouveau jour. De telles modifications sont selon moi normales et habituelles. Toutefois, dans ce cas‑ci, rien de la sorte n’est invoqué dans l’affidavit qui a été déposé à l’appui de la requête. Quant à moi, il semble que la modification soit nécessaire simplement parce que l’intimée a omis d’analyser sa preuve d’une façon appropriée en temps opportun. Tout cela aurait dû être fait bien avant le dépôt de la présente demande de modification. À mon avis, les circonstances de l’espèce satisfont au critère préliminaire de la conduite scandaleuse et outrageante qui s’applique à l’adjudication des frais et dépens sur la base avocat‑client. Les frais de la présente requête et les frais inutilement engagés seront adjugés sur cette base.

 

Si ce n’était des observations dont j’ai fait mention ci‑dessus au paragraphe 27, je serais porté à adjuger aux appelants les frais et dépens relatifs aux requêtes ainsi que les frais de toute production et communication additionnelles nécessaires par suite des modifications, mais en tant que frais et dépens entre parties. Contrairement à ce qui s’est produit dans l’affaire Bradley Holdings, il ne s’agit pas en l’espèce d’un cas dans lequel l’intimée a omis d’analyser l’affaire d’une façon appropriée en temps opportun. La possibilité d’analyser l’affaire d’une façon appropriée ne s’est présentée qu’au moment de la production de l’annexe I, en 2005. La répartitrice n’a pas eu une telle possibilité, et bien que je n’excuse pas le retard qui a été accusé entre 2005 et 2007 lorsqu’il s’est agi de présenter les requêtes, il reste que, dans une large mesure, le coût additionnel du litige pour toutes les parties, par suite des modifications, résulte de l’omission de produire l’annexe I avec le reste du document. Dans ces conditions, j’estime que les parties doivent supporter leurs propres frais en ce qui concerne les requêtes. Les frais attribuables au retard qui a été accusé depuis la production de l’annexe I, lorsqu’il s’est agi de présenter les requêtes, sont adjugés aux appelants, quelle que soit l’issue de la cause, en tant que frais et dépens entre parties.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de novembre 2007.

 

« E.A. Bowie »

Juge Bowie

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de janvier 2008

 

Claude Leclerc, LL.B.

 

 


 

ADDENDA

 

 

Après que les présents motifs eurent été rédigés, mais avant leur signature, les avocates des deux parties ont communiqué par lettre avec le greffe. En résumé, l’avocate des appelants a affirmé qu’elle avait en sa possession certains éléments de preuve qu’elle venait d’obtenir et que ceux‑ci se rapportaient aux questions examinées aux paragraphes 15 à 18 des présents motifs. L’avocate a remis une copie à l’avocate de l’intimée, qui estimait que ces éléments n’avaient rien à voir avec les questions dont j’étais saisi. Lorsque j’ai appris l’existence de cette lettre, j’ai demandé au greffe de faire savoir aux deux avocates que je reporterais la délivrance des ordonnances pour une durée de dix jours en vue de donner aux parties qui désiraient le faire la possibilité de me soumettre une requête visant à faire rouvrir les présentes requêtes afin d’autoriser la présentation d’éléments de preuve et d’arguments additionnels. Le délai de dix jours est maintenant expiré, et aucune partie n’a présenté de requête. Je rends donc aujourd’hui les ordonnances, et les motifs y afférents.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de novembre 2007.

 

 

« E.A. Bowie »

Juge Bowie

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de janvier 2008

 

Claude Leclerc, LL.B.

 


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI703

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR : 2001‑3839(IT)G, 2003‑446(IT)G

                                                          et 2003-1073(IT)G

 

INTITULÉS :                                     CHARLES B. LOEWEN, ANDREW PRINGLE et MICHAEL DE PENCIER

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 24 octobre 2007

 

MOTIFS DES ORDONNANCES :     L’honorable juge E.A. Bowie

 

DATE DES ORDONNANCES :         Le 20 novembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Avocate des appelants :

Me A. Christina Tari

Avocates de l’intimée :

Mes Annie Paré et Elizabeth Chasson

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                   Nom :                             A. Christina Tari

 

                   Cabinet :                         Richler et Tari

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 



[1]           Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90‑688a.

 

[2]           Règles de procédure civile, R.R.O. 1990, Règl. 194.

 

[3]           93 DTC 298, page 302.

 

[4]           [1993] 2 C.T.C. 213, page 219.

 

[5]           [2004] 2 C.F. 459; 2003 CAF 488.

 

[6]           Baxter c. La Reine, [2006] 3 C.T.C. 2427; 2006 CCI 230; infirmée par 2007 CAF 172.

 

[7]           Il s’agit du libellé applicable à l’année 1994, lequel ne comporte aucune différence importante par rapport au libellé applicable à l’année 1993 aux fins qui nous occupent.

 

[8]           2006 CCI 117.

 

[9]           [1998] 2 R.C.S. 358.

 

[10]          2006 DTC 2305; infirmée par 2007 DTC 5129.

 

[11]          [2000] 4 C.F. 616. 

 

[12]          New St. James Ltd. c. M.R.N., [1966] Ex.C.R. 977.

 

[13]          Précité, note 11, paragraphes 21 à 24.

 

[14]          [2004] 5 C.T.C. 98.

 

[15]          [2004] 4 C.F. 3.

 

[16]          2007 CAF 222.

 

[17]          [1999] 3 C.T.C. 537.

 

[18]          Loewen, précitée, note 15, paragraphes 46 à 48.

 

[19]          Précité, note 16.

 

[20]          Affidavit de Laura Alescio, paragraphe 4.

 

[21]          Précité, note 6.

 

[22]          2005 DTC 169.

 

[23]          [2004] 3 C.T.C. 2432.

 

[25]          Précité, note 23.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.