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Référence : 2008CCI101

Date : 20080220

Dossiers : 2006-2259(IT)G

2006-2260(IT)G

ENTRE :

MARY LYNNE TESAINER

et SILVANO TESAINER,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

 

 

Avocat des appelants : Me Richard van Banning

Avocate de l’intimée : Me Margaret J. Nott

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

(Rendus oralement à l’audience

 le 18 janvier 2008 à Toronto (Canada).)

 

 

Le juge McArthur

 

[1]     Les présents appels son interjetés à l’égard de nouvelles cotisations établies par le ministre du Revenu national pour les années d’imposition 1992, 1993 et 1995 des appelants. Les appels on été entendus sur preuve commune. La preuve présentée est constituée d’un recueil conjoint de documents, d’un exposé conjoint des faits partiel et du témoignage de Silvano Tesainer. L’exposé conjoint des faits partiel est ainsi rédigé :

 

 

[TRADUCTION]

 

1.         Silvano Tesainer et Mary Lynne Tesainer (les « appelants ») sont des conjoints. Ce sont les années d’imposition 1992, 1993 et 1995 qui sont en cause dans les présents appels.

 

2.         Les questions en litige sont de savoir si :

 

            a)         pour les années d’imposition 1992 et 1993, les appelants ont le droit de déduire les sommes payées à titre de frais d’intérêts sur de l’argent qu’ils ont emprunté afin de l’investir dans une société de personnes en commandite;

 

            b)         pour l’année d’imposition 1995, le paiement reçu durant cette année par les appelants en vertu de la transaction ayant mis fin à la  poursuite qu’ils avaient, de concert avec d’autres personnes, intentée représente un remboursement de capital ayant entraîné une réduction du prix de base rajusté (le « PBR ») de leur participation dans la société de personnes en commandite – comme le prétend le ministre – ou s’il représente une indemnité, des dommages-intérêts ou un versement semblable qui n’a pas donné lieu à une réduction du PBR – comme le prétendent les appelants.

 

Le contexte factuel

 

3.         En décembre 1988, les appelants ont chacun acquis des parts d’une société de personnes en commandite, American Diversified Realty Fund, qui a par la suite adopté le nom de Fenix Development Partnership (« Fenix » ou la « société de personnes »).

 

4.         En 1988 ou en 1989, Fenix a acquis un intérêt dans un terrain situé à Mississauga (Ontario). Elle avait l’intention d’y construire un immeuble à usage commercial et industriel.

 

5.         En 1989, les fondateurs de Fenix ont eu un conflit avec la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario. Après 1991, Fenix ne détenait plus d’intérêt dans des biens immeubles et n’exerçait plus les activités auxquelles elle était vouée. 

 

Les frais d’intérêts

 

6.         En 1989, les appelants ont emprunté 100 000 $ à la Banque Toronto‑Dominion (la « banque »). Les appelants ont chacun utilisé leur part de 50 000 $ du prêt pour acquérir des parts de Fenix.

 

7.         Au cours de l’année d’imposition 1992, les appelants ont chacun payé 4 006 $ à la banque, à titre d’intérêt sur les prêts de 50 000 $ qu’elle leur avait consentis en 1989, et qu’ils avaient utilisés pour acquérir des parts de Fenix.

 

8.         Au cours de l’année d’imposition 1993, les appelants ont chacun payé 3 266 $ à la banque à titre d’intérêt sur les prêts qu’elle leur avait consentis.

 

Description du produit de la transaction

 

9.         En 1992, les appelants et d’autres commanditaires de Fenix ont intenté une poursuite à l’encontre du cabinet d’avocats qui s’occupait du placement privé des unités de Fenix (la « poursuite »).

 

10.       En 1994, des interrogatoires préalables ont été effectués, et les demandeurs ont présenté une requête en jugement sommaire (qui n’a pas été instruite, puisque le litige a fait l’objet d’une transaction).

 

11.       En avril 1995, la poursuite a fait l’objet d’une transaction, et le procès‑verbal de cette transaction a été signé. D’après le procès‑verbal, les demandeurs qui ont intenté la poursuite (y compris les appelants) ont reçu 3 850 000 $. Après déduction des frais juridiques, il restait une somme nette d’environ 3 200 000 $ à partager entre les demandeurs.

 

12.       En juin 1995, les appelants ont reçu leur part du produit net de la transaction, soit un montant total de 98 278,75 $, la part de chaque appelant s’élevant à 49 139,38 $.

 

13.       En 1995, après la conclusion de la transaction ayant mis fin à la poursuite, Fenix a été dissoute.

 

Le prix de base rajusté de la participation dans la société de personnes

 

14.       Aux fins du présent litige, les parties ne contestent pas le fait que le prix de base rajusté de la participation de Silvio Tesainer dans Fenix, avant qu’il n’ait reçu le paiement en vertu de la transaction en juin 1995, était de (12 679 $), autrement dit une somme négative de - 12 679 $, comme l’illustre la lettre envoyée par Mme Santiago de l’ARC à l’appelant le 21 mai 1999; cette lettre fait partie de l’annexe B.

 

15.       Aux fins du présent litige, les parties ne contestent pas le fait que le prix de base rajusté de la participation de Mary Lynne Tesainer dans Fenix, avant qu’elle n’ait reçu le paiement en vertu de la transaction en juin 1995, était de 349 $, comme l’illustre la lettre envoyée par Mme Santiago de l’ARC à l’appelante le 25 juin 1999; cette lettre fait partie de l’annexe B.

 

[2]     Lors de son témoignage, M. Tesainer a parlé des faits énoncés dans l’exposé conjoint reproduit ci-avant, et il a ajouté que son épouse et lui avaient acquis leur participation dans la société de personnes pour réaliser une plus‑value en capital et pour en tirer des revenus à long terme. Le contrat de société de personnes en commandite vient corroborer cette affirmation, puisqu’il prévoit que seule une partie du capital investi dans la société de personnes peut en être retirée, et ce seulement après 15 ans. Quatre‑vingt‑treize associés ont investi dans le projet, et 74 d’entre eux, dont les appelants, ont participé à la poursuite intentée à l’encontre du cabinet d’avocats qui avait représenté Fenix auprès de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario. Les 19 autres associés n’y ont pas participé.

 

[3]     L’intimée a ainsi décrit les [TRADUCTION] « fondements des nouvelles cotisations », à l’étape de l’opposition :

 

[TRADUCTION]

 

Le gain en capital imposable faisant l’objet de la cotisation provient d’une transaction à l’égard d’une poursuite, relative à la société de personnes en commandite Fenix, intentée à l’encontre du cabinet d’avocats responsable du placement privé des parts de la société de personnes en commandite en raison des mauvais conseils qu’il avait fournis.

 

[…]

 

Seuls les contribuables qui ont reçu une part du produit de la transaction ont fait l’objet d’une nouvelle cotisation en raison des diverses incidences fiscales du partage des fonds et des différents avantages fiscaux dont chacun des associés pouvait se prévaloir. Le calcul du prix de base rajusté de la participation dans la société de personnes en commandite inclut toute perte subie par cette dernière, peu importe sa cause. À cet égard, la perte en capital subie par la société en 1991 lors de la disposition des biens à la suite de la saisie menée en application de l’article 79 a été incluse en vertu de l’alinéa 53(2)c) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Cette disposition a entraîné un prix de base rajusté ayant une valeur négative.

 

[4]     Les avocats des 74 associés ayant intenté la poursuite leur ont envoyé une lettre, datée du 11 janvier 1995, dans laquelle ils ont décrit la situation de la façon suivante :

 

[TRADUCTION]

 

            La présente lettre a pour but de vous informer de l’état de votre poursuite. L’audition, devant le juge Farley, de la requête en jugement sommaire aura lieu le 17 février 1995. En bref, la requête que nous avons introduite a pour but : a) de récupérer les 3 263 000 $ que les investisseurs de Fenix, dont vous faites partie, ont placés, et d’obtenir les intérêts, des dommages-intérêts punitifs, et d’autres directives de la Cour.

 

Plus tard, le 20 avril 1995, les avocats des associés leur ont appris que la poursuite avait fait l’objet d’une transaction dont le produit net était d’environ 3,2 millions de dollars, somme qui devait être partagée entre les 74 associés demandeurs. Comme je l’ai déjà mentionné, la société de personnes avait cessé ses activités en 1991, et elle a été dissoute en mai 1995.

 

[5]     Les parties s’entendent pour dire que le prix de base rajusté de leur participation dans la société de personnes en commandite, avant qu’ils aient reçu leur paiement en vertu de la transaction, avait une valeur négative de 12 679 $. Le recueil conjoint de documents comprend une circulaire d’offre et un contrat de société de personnes en commandite – deux documents très longs – et plusieurs documents connexes faisant partie d’une déclaration. La déclaration se rapporte à  une action introduite par Fenix et 74 de ses commanditaires, et elle contient la réclamation suivante à l’encontre du cabinet d’avocats :

 

[TRADUCTION]

 

Les demandeurs réclament :

 

1.         Chaque demandeur réclame la somme qu’il a investie. Comme le montre  l’annexe A de la déclaration, le montant total réclamé est de 3 261 000 $.

 

2.         Fenix, la demanderesse, réclame 3 261 000 $ et des dommages-intérêts de 3 500 000 $.

 

Les demandeurs ont déclaré avoir subi une perte de bénéfices globale de plus de 4 millions de dollars et ils ont réclamé des dommages-intérêts de 5 millions de dollars, de même que les intérêts. Le produit de la transaction s’élevait à 3 850 000 $. Après déduction des frais juridiques, environ 3 200 000 $ ont été partagés entre les 74 commanditaires ayant intenté la poursuite.

 

[6]     La principale position adoptée par les appelants est que le paiement de 98 280 $, qu’ils ont reçu en vertu de la transaction, ne constituait pas un remboursement du capital qu’ils avaient investi dans Fenix, et donc que l’alinéa 53(2)c) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») ne s’applique pas. Ils affirment aussi que pour qu’une somme reçue soit imposable, les circonstances qui entourent sa réception doivent correspondre à une disposition de la Loi – ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Ils soutiennent que le paiement constitue une indemnité, des dommages-intérêts ou un versement semblable, mais qu’il ne s’agit pas d’un remboursement de capital ayant entraîné une réduction du prix de base rajusté de leur participation. En outre, ils avancent que l’alinéa 53(2)c) de la Loi ne s’applique pas puisqu’il traite d’une attribution du capital, ou, du moins, implique celle‑ci. En l’espèce, il n’y a pas eu d’attribution de capital et il n’aurait pas pu en avoir, puisque le produit de la transaction était constitué d’un ensemble d’éléments. De plus, M. Tesainer a dit que la somme reçue en vertu de la transaction constituait un dédommagement pour une perte de bénéfices, et que le contrat de société de personnes en commandite ne prévoyait pas de remboursement de capital.

 

[7]     La position des appelants quant à la deuxième question en litige est qu’ils ont emprunté 100 000 $ à la Banque Toronto-Dominion afin de tirer un revenu de Fenix. Ils ont tous deux payé des intérêts sur l’argent emprunté, de 4 006 $ chacun en 1992 et de 3 266 $ chacun en 1993. Ils sont d’avis que ces paiements sont déductibles en vertu de l’alinéa 20(1)c) de la Loi.

 

[8]     L’intimée a insisté sur les conclusions formulées par la juge Charron de la Cour suprême du Canada dans Tsiaprailis c. La Reine[1], et plus particulièrement sur deux questions décisives : (i) que visait à remplacer le paiement?; (ii) l’élément remplacé aurait-il été imposable pour la personne qui en a bénéficié? En réponse à ces questions, l’avocate de l’intimée affirme que les paiements constituaient du capital, et que l’alinéa 53(2)c) s’applique en l’espèce.

 

[9]     À l’égard des frais d’intérêts, l’intimé a conclu qu’il était impossible pour la société de personnes de reprendre ses activités après 1991. En fait, le terrain sur lequel le projet devait être construit avait été vendu par le créancier hypothécaire grâce à son pouvoir de vente. La source de revenus ayant disparu, les intérêts payés n’étaient donc pas déductibles.

 

[10]    Je réglerai d’abord la question principale, et la plus difficile à trancher, soit celle de savoir si les paiements ont été versés à titre de capital, à titre de dommages‑intérêts ou à un autre titre. Visaient-ils à remplacer le capital investi dans la société de personnes par les appelants, ou plutôt à les indemniser de la perte d’un placement ou d’une autre perte qu’ils ont subie? Le montant forfaitaire a été versé après que la poursuite a été introduite, la veille de l’audition de la requête en jugement sommaire présentée au nom des appelants. Il s’agissait probablement d’un compromis.

 

[11]    L’intimée s’appuie principalement sur la déclaration présentée par les demandeurs. Cette déclaration a pour objet principal – il s’agit du moins de la première question qui y est abordée – le remboursemenr des sommes qu’ils avaient investies – ce qui constituerait, selon l’intimée, une immobilisation. L’avocate de l’intimée renvoie aussi à la lettre datée du 11 janvier 1995, où le cabinet d’avocats représentant les 74 commanditaires ayant intenté la poursuite a écrit : [TRADUCTION] « [nous avons] pour but […] de récupérer les 3 263 000 $ que [vous avez] placés » et d’obtenir l’intérêt avant jugement et des dommages‑intérêts punitifs.

 

[12]    Dans une lettre envoyée aux appelants le 20 avril 1995, leur cabinet d’avocats les informe que la poursuite a fait l’objet d’une transaction, et que le produit de celle‑ci, après déduction des frais, est de 3,2 millions de dollars. L’avant-dernier paragraphe de la lettre est ainsi rédigé :

 

[TRADUCTION]

 

            Certains d’entre vous avez reçu des lettres de Revenu Canada, où ce dernier indiquait qu’il allait considérer que les produits de la transaction réduisent le prix de base rajusté de votre participation dans la société de personnes en commandite, ce qui entraînerait probablement un gain en capital. De façon générale, cela veux dire que la somme que vous recevrez en vertu de la transaction pourrait être réduite d’au plus 30 %, après la déduction pour gain en capital. Comme nous l’avons mentionné au comité de direction, il existe une position juridique raisonnable selon laquelle ces sommes ne sont pas imposables à titre de gain en capital ou à un autre titre, parce qu’elles constituent des dommages-intérêts généraux pour les pertes de placement que vous avez subies.

 

Plus loin, les auteurs de la lettre encouragent les appelants à consulter leurs propres conseillers en fiscalité. Il est évident que la poursuite visait non seulement les sommes placées, mais aussi les intérêts, des dommages-intérêts punitifs et des frais.

 

[13]    Il est clair que la réclamation principale des appelants visait le capital qu’ils avaient investi dans le projet immobilier. Le recueil de documents contient une déclaration, provenant sans doute des avocats qui représentaient les appelants, où il est question du remboursement d’une partie de leur placement initial. Il semble s’agir du relevé d’un compte en fidéicommis :

 

 

 

[TRADUCTION]

 

Fonds à distribuer :                                                       3 206 000 $

Somme investie par Silvano et Mary Tesainer :      100 000 $

Total des investissements :                                              3 263 000 $

Part des Tesainer :                                                                  3,06 %

Part proportionnelle du produit de la transaction :                98 278 $

 

[14]    Dans Bourgault Industries Ltd. c. La Reine[2], la juge Woods a donné préséance à la preuve documentaire plutôt qu’aux témoignages de vive voix lorsqu’elle a été appelée à décider de la nature du paiement versé en vertu d’une transaction. Elle a conclu qu’il était clair, à la lumière des mémoires déposés durant la poursuite, que la contribuable visait à être dédommagée des bénéfices perdus. La Cour d’appel fédérale a confirmé l’ensemble de sa décision. Dans Bourgault, la contribuable avait reçu un montant forfaitaire, et l’avait déclaré à titre de gain en capital. La juge Woods a conclu que le montant forfaitaire était un dédommagement pour les bénéfices perdus, et constituait donc un revenu. Dans Tsiaprailis, précité, l’appelante a reçu un paiement forfaitaire représentant son droit à des prestations échues. La Cour suprême avait conclu que ce paiement constituait un revenu imposable puisqu’il avait remplacé des paiements qui n’avaient pas été faits à temps, et qui auraient été imposables s’ils l’avaient été.

 

[15]    Dans les présents appels, la question n’est pas de savoir si le paiement reçu par les appelants en vertu de la transaction l’a été à titre de capital ou de revenu, mais plutôt de savoir s’il s’agit de capital ou de quelque chose d’autre qui ne serait pas imposable. En fait, les appelants soutiennent que le paiement ne constituait pas une attribution de capital, puisqu’il a résulté d’un compromis négocié et de la réunion de plusieurs éléments.

 

[16]    En résumé, les appelants affirment que le paiement reçu en vertu de la transaction ne peut constituer du capital pour les raisons suivantes : (i) le contrat de société de personnes en commandite ne prévoit pas le remboursement du capital; (ii) il ne peut s’agir d’une distribution effectuée par la société de personnes, parce que tous les associés n’ont pas touché l’argent; (iii) la société n’avait pas l’intention de recevoir du capital; (iv) il s’agit d’un compromis résultant de négociations, pas d’un remboursement de capital; (v) c’est le cabinet d’avocats qui a versé le paiement, et non la société de personnes; (vi) le paiement visait à indemniser les demandeurs de la perte de bénéfices futurs; (vii) le paiement ne correspond pas au cadre établi par l’alinéa 53(2)c) de la Loi.

 

[17]    L’intimée soutient, entre autres, que le paiement constitue du capital pour les raisons suivantes : (i) il a remplacé le capital investi par les appelants, l’intimée renvoie ici à l’arrêt Tsiaprailis; (ii) dans la poursuite, les appelants réclamaient un montant identique à celui qu’ils avaient investi; (iii) ils ont réclamé le remboursement des 100 000 $ investis et ils ont reçu 98 300 $; (iv) la preuve documentaire démontre clairement qu’il s’agit d’un remboursement de capital; (v) le contrat de société de personnes en commandite a réellement expiré en 1991.

 

[18]    Je crois que si les appelants avaient investi 10 000 $ plutôt que 100 000 $, le paiement qu’ils auraient reçu en vertu de la transaction aurait été d’environ 10 000 $. Bien qu’il s’agisse là d’une question difficile à trancher, je conclus, tout compte fait, que la nature du paiement se rapproche davantage du remboursement de capital que d’une indemnité quelconque, sous forme de dommages‑intérêts ou autre. Je suis aussi d’avis que le paiement s’inscrit dans le cadre établi par l’alinéa 53(2)c).

 

[19]    Quant à l’argument voulant que les appelants aient le droit de déduire les frais d’intérêts qu’ils ont payés en 1992 et en 1993, je conclus que ces frais n’ont pas été payés en exécution d’une obligation légale de verser des intérêts sur de l’argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien durant ces années, aux termes de l’alinéa 20(1)c), puisque les activités de la société  avaient cessé, à toute fin pratique, en 1991, et que la source des revenus s’était tarie.

 

[20]    Le commentaire reproduit ci‑dessous, formulé par la juge Deschamps de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Moufarrège c. Québec (Sous‑ministre du Revenu)[3] est également applicable à la présente affaire. La juge Deschamps a dit ce qui suit au sujet de l’arrêt Bronfman Trust c. La Reine[4] :

 

[…] c’est l’utilisation  actuelle plutôt que primitive qui est retenue pour déterminer si les intérêts sont déductibles.

 

Elle a aussi commenté l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Stewart c. Canada[5] de la façon suivante :

 

            L’arrêt Stewart […] n’a pas modifié le principe voulant que, lorsque disparaît l’expectative raisonnable de gagner un revenu, disparaît aussi le droit à la déduction. […]      

 

Enfin, la Cour suprême a affirmé :

 

            Pour ce qui est des actions, la compagnie en question a fait faillite et le dossier ne laisse voir aucune possibilité de reprise des activités.  Par conséquent, dans ce cas-là également, la source de revenu a disparu, même si la compagnie n’est pas dissoute.         

 

[21]    Pour ces motifs, les appels sont rejetés avec dépens. Le jugement formel inclura une recommandation portant que la demande quant aux intérêts présentée par M. et Mme Tesainer en vertu des dispositions en matière d’équité doit recevoir une réponse favorable en raison de l’intervalle déraisonnable de 10 ans séparant les événements en cause et l’établissement des nouvelles cotisations.

 

      


Signé à Ottawa (Canada) ce 20e jour de février 2008.

 

 

« C.H. McArthur »

Juge McArthur

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour d’avril 2008.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2008CCI101

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2006-2259(IT)G et 2006-2260IT(G)

 

INTITULÉ :

Mary Lynne Tesainer et Silvano Tessainer et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 janvier 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge C.H. McArthur

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 12 février 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Richard van Banning

Avocate de l’intimée :

Me Margaret J. Nott

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour les appellants :

 

Nom :

Me Richard van Banning

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 



[1]           2005 DTC 5126.

[2]           2006 CCI 449.

[3]           2005 CSC 53.

[4]           1 R.C.S. 32.

[5]           2002 CSC 46.

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