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Dossier : 2003-3762(IT)G

ENTRE :

MARIA MACKAY,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu à Toronto (Ontario) le 30 août 2006.

 

Devant : l’honorable juge T. O'Connor

 

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Brent E. Cuddy

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel de la cotisation et de la nouvelle cotisation établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard de l’année d’imposition 2001 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci-joints. Aucuns dépens ne sont adjugés.

 


       Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d’octobre 2006.

 

 

 

 

« T. O'Connor »

Juge O'Connor

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de janvier 2008.

                 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

Référence : 2006CCI530

Date : 20061002

Dossier : 2003-3762(IT)G

ENTRE :

MARIA MACKAY,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O’Connor

 

[1]     La seule question en litige dans le présent appel est de savoir si, pour l’année d’imposition 2001, l’appelante a subi une perte au titre d’un placement d’entreprise (« PTPE ») au sens de l’alinéa 39(1)c) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), ce qui lui donnerait droit à une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise (« PDTPE ») (soit la moitié de la PTPE) en vertu de l’alinéa 38c) de la Loi.

 

[2]     La réponse à l’avis d’appel fait également état d’une déduction demandée pour des frais juridiques au montant de 6 667 $ mais, tel que l’ont affirmé les deux parties à l’audition de l’appel, cette question ne constitue plus un point litigieux.

 

[3]     Le montant de la PDTPE en question est de 26 324,97 $. Il est attribuable à un prêt effectué par l’appelante en 1990. Il n’est pas nécessaire d’examiner le montant exact du prêt ni les montants remboursés avant que la dette ne devienne une perte sur créance, puisqu’il est bien établi que le montant réel de la PDTPE déduite était de 26 324,97 $. Des calculs présentés plus loin dans les présents motifs semblent corroborer ce montant.

 

[4]     Il n’est pas nécessaire, non plus, de passer en revue diverses conditions requises pour la déduction d’une PDTPE en vertu de l’article 3, des alinéas 38c) et 39(1)c) et du paragraphe 50(1) de la Loi. La seule question à analyser est de savoir si le prêt accordé par l’appelante l’a été à un particulier ou à une société, parce que les deux sociétés en cause, qui sont susceptibles d’être considérées comme le débiteur du prêt en question, sont présumées avoir qualité de société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») et que toutes les autres conditions sont présumées être réunies. Par conséquent, le prêt a‑t‑il été accordé à un particulier ou encore aux deux sociétés ou à l'une d’elles?

 

Exposé des faits

 

[5]     Une entente (« l’entente de 1990 ») signée le 23 avril 1990 par l’appelante (« Maria » ou Mme Mackay) et Tibor Zoltan Barath (« Tibor »), produite à l’onglet D de la pièce A‑1, constatait notamment que Mme Mackay et M. Barath vivaient ensemble dans une relation ayant les apparences d’une union maritale depuis 1987, que chacun était solvable, qu’il n’existait aucun droit matrimonial à l’égard de leurs biens respectifs et que ni l’une ni l’autre des parties n’obtiendrait les droits de propriété découlant de l’entente de cohabitation. L'entente de 1990 prévoyait en outre ce qui suit, à la page 7 :

 

            [TRADUCTION]

(4)        Maria et Tibor conviennent l’un et l’autre que Tibor est propriétaire de toutes les actions émises par 892076 Ontario Limited et que 892076 Ontario Limited possède une participation évaluée à 49 p. 100 dans Molnar Food Service Ltd. Les parties conviennent que Maria n’a aucun intérêt quel qu’il soit dans 892076 Ontario Limited et Molnar Food Service Ltd.

 

(5)        Maria et Tibor conviennent que, pour faciliter l’investissement de Tibor dans les sociétés mentionnées précédemment, ils se sont engagés à faire ce qui suit :

 

a)         Maria a grevé la résidence familiale d’une nouvelle hypothèque de premier rang pour un capital de 145 000 $, remplaçant un prêt hypothécaire d’employé antérieur au montant de 60 000 $;

 

b)         Maria prêtera à Tibor la somme de 85 000 $ pour l’achat des actions des sociétés mentionnées précédemment, en contrepartie de laquelle Tibor s’engage à garantir le remboursement dudit prêt hypothécaire;

 

c)         Maria devra verser la somme de 600 $ par mois pour rembourser ledit prêt hypothécaire et Tibor devra payer la différence ainsi que tous les frais juridiques et autres charges connexes liés à la négociation et à l’enregistrement de ladite hypothèque;

 

d)         Tibor s'engage à rembourser le capital de 85 000 $ et les intérêts courus dans les dix (10) ans de la date d’acquisition de sa participation dans les sociétés mentionnées précédemment. Il aura la faculté de faire des versements anticipés pour rembourser le prêt hypothécaire suivant les modalités prévues et ces versements seront crédités sur sa dette correspondant au capital dudit prêt de Maria;

 

e)         jusqu’au remboursement complet dudit prêt, Maria conservera un privilège sur les actions détenues par Tibor dans 892076 Ontario Limited, suivant les modalités suivantes :

 

(1)        Maria recevra l’équivalent de 50 p. 100 des bénéfices nets, y compris les revenus et les dividendes, touchés par Tibor ou par 892076 Ontario Limited au titre de leur participation dans Molnar Food Service Ltd.;

 

(2)        Tibor s’engage à indemniser Maria en cas de réclamation découlant de l’hypothèque grevant la résidence familiale dans la mesure de ses obligations énoncées précédemment;

 

(3)        Après le remboursement du capital et des intérêts courus susdits, Maria renoncera à toute réclamation à l’égard desdites actions ou sociétés.

 

[6]     Les instructions (voir l’onglet E de la pièce A‑1) transmises au procureur chargé de l'opération lui indiquaient notamment de payer la somme de 75 000 $ à 892076.

 

[7]     Par conséquent, bien que le prêt ait été consenti à M. Barath et que les deux sociétés ne soient pas parties à l’entente, Mme Mackay se voit accorder par lui un genre de privilège sur les actions de 892076, à qui la somme de 75 000 $ doit être payée, sur le produit du prêt. Ces faits et le libellé imprécis de l’entente de 1990 ajoutent aux difficultés d’interprétation de celle‑ci. L’entente stipule toutefois clairement qu’en faisant les versements au titre de la nouvelle hypothèque de premier rang (« l’hypothèque »), M. Barath s’acquittera de son obligation aux termes « dudit prêt de Maria ».

 

[8]     De 1990 à 1997, M. Barath a fait les versements prévus dans l’entente de 1990. Après leur rupture (au cours de 1995), Mme Mackay et M. Barath ont signé une nouvelle entente (« l’entente de modification ») le 7 janvier 1997. Celle‑ci est présentée sous la cote P.5 et à la suite de l’onglet K de la pièce A‑1. Le document renvoie à l’entente de 1990 et modifie les montants et les modalités concernant les remboursements respectifs des parties en ce qui a trait au prêt hypothécaire. Il expose plus particulièrement en détail les montants exacts du prêt hypothécaire dont M. Barath conserve la responsabilité. Il prévoit également que Mme Mackay a droit à la moitié de la part de M. Barath dans les bénéfices de fin d’exercice avant impôt sur le revenu de Molnar, jusqu’à ce qu’il lui ait remboursé au complet sa part du prêt hypothécaire. L’entente de modification prévoyait également ce qui suit :

 

                   [TRADUCTION]

4.         Tibor s’engage à signer un contrat de nantissement, selon la formule qui est jointe aux présentes et qui constitue l’annexe A, en vertu duquel les certificats de toutes les actions qu’il détient dans 892076 et de toutes les actions que détient 892076 dans Molnar seront confiés à l’avocat de Mme Mackay, Michael Woods, agissant en qualité de dépositaire légal, comme sûreté pour le remboursement de la part de Tibor dans le prêt hypothécaire.

 

5.         Pour garantir l’exécution de son obligation prévue aux présentes, Tibor s'engage également à faire signer par 892076 une sûreté, suivant la formule qui est jointe aux présentes et qui constitue l’annexe B, et il s’engage à faire signer et délivrer par Molnar une reconnaissance et un engagement formel, suivant la formule qui est jointe aux présentes et qui constitue l’annexe C.

 

[9]     Bien que l’entente de modification fasse état d’une garantie signée par 892076, laquelle constitue l’annexe B, et d’une reconnaissance et d’un engagement formel signés par Molnar, lesquels constituent l’annexe C, ces documents n’ont pas été déposés. Par ailleurs, le contrat de nantissement, désigné comme étant l’annexe A, a été produit à l’onglet G de la pièce A‑1. Il porte également la date du 7 janvier 1997 et les parties désignées sont Mme Mackay, à titre de créancière gagiste, M. Barath, à titre de débiteur gagiste, et 892076, comme telle. Le contrat de nantissement comporte les principales clauses suivantes :

 

                   [TRADUCTION]

[…]

 

CONSIDÉRANT que le débiteur gagiste est, à la date des présentes, le propriétaire inscrit ou le bénéficiaire de cent (100) actions ordinaires du capital‑actions de 892076 (ci‑après appelées les « actions de 892076 ») et que 892076 est, à la date des présentes, le propriétaire inscrit ou le bénéficiaire de quarante‑neuf (49) actions ordinaires du capital‑actions de MOLNAR FOOD SERVICE LTD. (ci‑après appelées les « actions de Molnar »);

 

            ET CONSIDÉRANT que, comme sûreté accessoire générale et continue des obligations ci‑après définies, le débiteur gagiste s’est engagé à donner en garantie les actions de 892076 et que 892076 s’est engagée à donner en garantie les actions de Molnar;

 

[…]

1.         Définitions

            […]

 

g)         « obligations » s’entend de l’obligation de rembourser le prêt de 85 000 $ consenti par la créancière gagiste au débiteur gagiste, en avril 1990, ou vers cette date, dont un montant de 80 288,90 $ demeurait impayé en date du 1er mai 1995, ainsi que tout autre montant actuellement dû, ou qui le deviendra, en vertu de la convention de vie commune ou de mariage datée du 23 avril 1990 ou d’une entente de modification, en date des présentes, apportant des changements aux modalités de la convention de vie commune ou de mariage;

 

            […]

 

            i)          « garantie remise en nantissement » s’entend :

 

i.          des actions de 892076 et de toutes les actions ci-après détenues ou acquises par le débiteur gagiste dans 892076, ainsi que les actions de Molnar et toutes les actions ci‑après détenues ou acquises par 892076 dans Molnar Food Service Ltd.;

                        […]

 

[Les dispositions ii, iii, iv ne sont pas pertinentes.]

 

[10]    Le contrat de nantissement comportait également les clauses suivantes :

 

2.         REMISE DES ACTIONS EN NANTISSEMENT

 

a)         Remise de la garantie. À titre de sûreté accessoire générale et continue, pour le paiement et l’exécution des obligations, le débiteur gagiste et 892076, par les présentes, affectent chacun en garantie en faveur de la créancière gagiste tous les biens constituant la garantie remise en nantissement et lui accordent un droit de sûreté sur ceux‑ci.

 

b)         Accusé de réception. La créancière gagiste reconnaît avoir reçu du débiteur gagiste le certificat d’actions no ___________ délivré le ___________ 199_ à l’égard des actions de 892076 et avoir reçu de 892076 le certificat d’actions no ___________ délivré le ___________ 199_ à l’égard des actions de Molnar, lesquels certificats étaient dûment endossés en blanc en vue du transfert ou accompagnés d’une procuration dûment signée en vue du transfert en blanc.

[…]

 

4.         DÉFAUT ET EXÉCUTION

 

a)         Recours. En cas de défaut dans l’exécution ou le paiement en bonne et due forme des obligations (un « cas de défaut »), la garantie constituée par les présentes deviendra applicable sur‑le‑champ et la créancière gagiste pourra, à son gré, prendre une ou plusieurs des mesures suivantes :

 

i.          faire enregistrer et obtenir de 892076 ou de Molnar Food Service Ltd. un ou des certificats à l’égard des actions données en garantie, au nom de la créancière gagiste ou de son ou ses représentants, et, à cet égard, la créancière gagiste est, par les présentes, irrévocablement désignée comme étant la fondée de pouvoir du débiteur gagiste et de 892076 par délégation complète des pouvoirs à la créancière gagiste et à son ou ses représentants pour endosser et transférer toutes les actions données en garantie;

 

ii.          exercer le droit de vote rattaché aux actions données en garantie (transférées ou non au nom de la créancière gagiste) et tous les autres droits et pouvoirs et signer tous les actes relatifs à la propriété de celles‑ci au même titre que le débiteur gagiste ou 892076;

 

[11]    M. Barath a fait une cession de faillite le 30 janvier 1998. Il avait fait jusqu’à cette date les versements requis sur le prêt hypothécaire. La procédure de faillite a duré jusqu’en 2001. Mme Mackay avait produit une preuve de créance de 83 282,22 $ au cours de cette procédure. Le 31 janvier 2001, ou vers cette date, certains biens de la société Molnar ont été vendus. L’affectation en garantie des actions de Molnar en faveur de Mme Mackay a été prise en compte dans la procédure de faillite. Le produit de la vente des actifs de Molnar correspondant à une participation de 49 pour 100 s'élevait à 30 632,28 $. Ce montant ayant apparemment été payé, le solde de la créance de Mme Mackay s’établit donc à 52 649,94 $. Ce montant constitue la PTPE dont la moitié, soit 26 324,97 $, correspond au montant de la PDTPE déduite par Mme Mackay à l’égard de l’année d’imposition 2001. Il ne fait aucun doute que la créance, qui avait été réduite à 52 649,94 $ en 2001, est devenue irrécouvrable la même année. Le bilan non vérifié de 892076 au 31 mars 1997, figurant à l’onglet H de la pièce A‑1, indique au passif un montant de 77 181,73 $ payable à titre de prêt hypothécaire.

 

Arguments de l’appelante

 

[12]    Dans ses observations, Mme Mackay fait valoir essentiellement qu’elle a toujours cru que, parce que les fonds avancés avaient été investis dans une ou dans les deux sociétés, elle était devenue propriétaire d’une dette d’une SPCC et que, si cette dette devenait irrécouvrable, elle pouvait déduire une PDTPE. Elle croyait également que l’existence des documents dont il a été question précédemment, particulièrement l’entente de modification et le contrat de nantissement signés en 1997, et le fait que, dans la procédure de faillite, elle a reçu 49 p. 100 du produit de la vente des actifs de la société Molnar indiquaient que l’une des sociétés, sinon les deux, était le débiteur.

 

Arguments de l’intimée

 

[13]    Les arguments de l’avocat de l’intimée sont présentés dans les extraits suivants de la transcription de l’audience :


          [TRADUCTION]

[…]

 

Dans la présente affaire, le ministre fait valoir qu’en 2001 ou à tout moment pertinent auparavant, ni la société ontarienne 892076 ni Molnar Food n’avaient de dettes envers l’appelante et qu’il n’existait pas de lien actionnaire‑créancier entre l’appelante et 892076.

 

[…]

 

Nous avons une entente intervenue en 1990 entre l’appelante et son conjoint de fait à l’époque. La clause 4, à la page 7 de l’entente, laquelle figure à l’onglet D de la pièce A‑1, stipule que M. Barath, conjoint de fait de l’appelante à l’époque, était propriétaire des actions de la société ontarienne 892076 et que 892076 détenait une participation de 49 pour 100 dans le capital‑actions de Molnar Food Service Ltd. Il est convenu que l’appelante n’a aucun intérêt quel qu’il soit dans la société à numéro ou dans Molnar.

 

[…]

 

Nous avons une entente intervenue entre l’appelante et son conjoint de fait. Il n’y avait aucune créance payable à l’appelante par la société à numéro ou par Molnar. Outre l’entente de 1990, il n’y a pas eu à l’époque d’autres ententes qui auraient créé d’autres obligations. Ni la société à numéro ni Molnar n’étaient parties à cette entente.

 

[…]

 

De 1990 à 1997, M. Barath a effectué les versements. Il ressort de la preuve présentée par l’appelante que M. Barath a fait les versements tous les mois. En 1997, à la suite de leur rupture survenue en 1995, une entente de modification est intervenue, encore une fois entre l’appelante et M. Barath. Par cette entente, M. Barath s’engageait une fois de plus à faire les versements de prêt hypothécaire et certains paiements relatifs aux bénéfices de la société à numéro. De plus, l’entente créait une sûreté réelle pour l’appelante. Si M. Barath ne s’acquittait pas de ses obligations, l'appelante aurait accès aux actions de Molnar et de la société à numéro en garantie.

 

Lorsque M. Barath a fait faillite en 1998, l’appelante a exercé la garantie pour gérer les actions de la société à numéro et de Molnar. En fin de compte, les actifs de Molnar ont été vendus en 2001 et l’appelante a tiré environ 38 000 $ de cette opération.

 

Dans le cadre du présent appel, l’appelante doit démontrer qu’elle a subi une perte en capital à la suite de la disposition des actions d’une société exploitant une petite entreprise ou de la disposition d’une créance payable par une SPCC au cours de l’année. Si le prêt a été consenti à M. Barath, et non à la société à numéro, l’appelante ne peut établir qu’elle a droit à une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise.

 

Le ministre soutient que les documents fournis, à savoir l’entente de 1990 et l’entente de modification, sont signés par l’appelante. Ces ententes sont intervenues entre l’appelante et Tibor Barath, et non entre l’appelante et la société à numéro. L’obligation de payer, stipulée dans ces ententes, incombait à M. Barath.

 

Suivant la première entente, celle d’avril 1990, le prêt visait à faciliter l’acquisition de la société à numéro et de Molnar par M. Barath. Il n’existe aucune obligation envers les sociétés ou l’appelante. La seule fois où une société est mentionnée ou visée dans ces ententes, c’est dans l’annexe de l’entente de modification se rapportant aux actions données en garantie et, à notre avis, c’était simplement pour garantir que les actions passeraient à l'appelante en cas de défaut de M. Barath.

 

Si l’on se fie aux ententes, c’est Tibor Barath qui a contracté la dette. Il avait l’obligation de faire les paiements. C’est lui qui perdrait ses actions dans la société s’il ne faisait pas les paiements. C'est M. Barath qui a investi dans la société à numéro et dans Molnar, et non l’appelante.

 

La seule entente que nous avons est celle de 1990 où l’appelante s'engage à fournir les fonds à M. Barath, et non à la société à numéro. Le transfert subséquent des actions en raison du défaut de M. Barath et la vente subséquente de ces actions, à mon sens, faisaient partie de sa démarche en vue du recouvrement de la dette que M. Barath avait envers elle. Elle essaie de recouvrer l’argent qu’il lui a emprunté et ne lui a pas remboursé. Il ne s’agit pas d’un investissement fait dans une société qui devient insolvable. La créance devient irrécouvrable lorsque M. Barath fait faillite et cesse de faire les paiements. Il y a défaut et elle exerce ses droits en vertu de l’entente conclue avec M. Barath pour prendre possession des actions.

 

Analyse

 

[14]    Dans une décision de la Cour d’appel fédérale, à savoir Rich v. The Queen, 2003 D.T.C. 5117, le juge Rothstein a passé en revue les règles de la PDTPE.

 

LES RÈGLES RELATIVES À LA PDPE

 

            [4]        Dans son ouvrage intitulé Fundamentals of Canadian Income Tax, 6e éd. (Toronto : Carswell, 2000), à la page 423, le professeur Krishna explique qu’une PDPE est un genre spécial de perte en capital qui bénéficie d’un traitement préférentiel aux fins de l’impôt sur le revenu. Une PDPE se produit lorsqu’il est disposé d’actions ou de créances d’une société exploitant une petite entreprise. Une « société exploitant une petite entreprise » est une société privée sous contrôle canadien qui utilise la totalité ou presque de ses actifs dans une entreprise active au Canada […]

 

            [5]        À moins que le prêteur n’ait pour métier de prêter de l’argent, une créance irrécouvrable sera en général considérée comme une perte en capital. Cependant, contrairement aux pertes en capital ordinaires, qui ne peuvent être déduites que de gains en capital, une PDPE peut être déduite du revenu tiré de toutes sources.

 

            […]

 

            [7]        L’avocat de l’appelant a expliqué que l’objet des règles relatives à la PDPE était d’encourager les investissements dans les sociétés exploitant des petites entreprises. Lorsqu’une créance ne peut être recouvrée d’une société exploitant une petite entreprise, elle peut être déduite du revenu du prêteur tiré de toutes sources, bien que le montant de la déduction soit limité […]

 

[15]    Je comprends bien la situation de l’appelante, mais je suis convaincu que les observations de l’avocat de l’intimée sont exactes. L’appelante peut avoir été mal conseillée sur le plan juridique et l’entente de modification et le contrat de nantissement signés en 1997, combinés au fait que 49 p. 100 du produit de la vente des actifs de Molnar lui a été remis dans la procédure de faillite, peuvent l’avoir amenée à croire que son débiteur était réellement l’une des sociétés, ou les deux. Toutefois, les documents sont éloquents. Il est manifeste que la dette était due par M. Barath et non par l’une ou l’autre des sociétés. Il ne fait absolument aucun doute que, de 1990 à 1997, cette affirmation était exacte. Le prêt n’avait aucun lien avec les sociétés, mis à part le fait qu’il était consenti à M. Barath afin de lui fournir les fonds nécessaires pour acquérir les actions de 892076. Il est admis que, sur le montant total du prêt, l’avocat a versé 75 000 $ à 892076, mais que l’entente de 1990 établit clairement que ce montant a servi à payer les actions de 892076 acquises par M. Barath.

 

[16]    Le seul lien réel avec les sociétés remonte à 1997, au moment de la signature de l’entente de modification et de l’affectation en garantie des actions des sociétés. L’appelante a par la suite exercé sa garantie. L’entente de modification et le contrat de nantissement n’ont pas opéré de conversion de la dette initialement due par M. Barath en une dette incombant aux sociétés. Les fonds empruntés n’ont pas été investis dans une SPCC. Ils ont été prêtés à M. Barath pour lui permettre d’acquérir les actions de 892076. Ils n’ont pas été confiés à M. Barath pour qu’il les investisse dans les sociétés, en tant que fiduciaire, pour Mme Mackay. Il est également manifeste que Mme Mackay n’est jamais devenue actionnaire de l’une ou l’autre des sociétés. La conclusion malheureuse mais relativement évidente est que la dette était une dette de M. Barath et non une dette des sociétés. Par conséquent, l’appelante n’a pas le droit de déduire la PDTPE.

 

[17]    Puisque le présent appel n’intéresse pas la question de savoir si l’appelante a droit à une perte en capital nette (contrairement à une PDTPE) susceptible d’être utilisée comme déduction applicable aux gains en capital à l’égard d’une ou de plusieurs années d’imposition, je n’ai pas à trancher cette question.

 

[18]    En conclusion, pour les divers motifs exposés précédemment, l’appel est rejeté. Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d’octobre 2006.

 

 

 

« T. O'Connor »

Juge O'Connor

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de janvier 2008.

 

                 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


RÉFÉRENCE :                                  2006CCI530

 

NO DE DOSSIER DE LA COUR :      2003-3762(IT)G

 

INTITULÉ :                                       MARIA MACKAY

                                                          c.
SA MAJESTÉ
LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 30 août 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge T. O'Connor

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 2 octobre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Brent E. Cuddy

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :

 

                   Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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