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Référence : 2007CCI746

Date : 20071221

Dossier : 2006-1932(IT)I

ENTRE :

MITESH ANJARIA,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés à l’audience à
Hamilton (Ontario), le 5 décembre 2007)

 

La juge V.A. Miller

 

[1]     L’appelant se livrait à la vente de drogues illicites. Le 4 mai 2000, il a fait l’objet d’une saisie au montant de 33 974 $, représentant le produit d’activités criminelles. En l’an 2000 ou en 2001, l’appelant a été déclaré coupable de [traduction] « possession en vue du trafic » et de [traduction] « complot en vue du trafic » d’une substance illégale. L’appelant ne se rappelle pas la date à laquelle il a été déclaré coupable; toutefois, ce jour‑là, le montant de 33 974 $ a été confisqué en faveur de la Couronne. Par un avis de nouvelle cotisation daté du 24 janvier 2005, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a inclus le montant confisqué dans le revenu de l’appelant pour l’année d’imposition 2000 et a établi des pénalités en vertu du paragraphe 163(2).

 

[2]     Dans le présent appel, l’appelant soulève la question de savoir s’il a le droit de déduire le montant confisqué à titre de dépense d’entreprise et si les pénalités prévues au paragraphe 163(2) ont été à juste titre établies.

 

 

 

 

LE MONTANT CONFISQUÉ

 

[3]     L’appelant était représenté par Janet Thompson, C.A. L’appelant et Harald Mattson, avocat au criminel, ont comparu comme témoins à l’audition de l’appel. Selon la position prise par l’appelant, [traduction] « les sommes confisquées représentant le produit des activités criminelles sont déductibles à titre de dépense étant donné que l’acte que l’appelant avait commis visait à permettre à celui‑ci de gagner un revenu et qu’il en a résulté une perte pour le contribuable ». La représentante a affirmé que la confiscation était de nature punitive et assimilable à une pénalité ou à une amende. L’acte commis par l’appelant consistait à vendre des drogues et cet acte avait entraîné une pénalité. La confiscation était directement liée à l’acte commis par l’appelant, à savoir la vente de drogues. La représentante a ensuite invoqué l’arrêt 65302 British Columbia Ltd. v. R., [2001] 1 C.T.C. 57, de la Cour suprême du Canada, à l’appui de la position de l’appelant selon laquelle les dépenses engagées en vue de tirer un revenu d’actes illégaux sont déductibles.

 

[4]     Selon la position prise par l’intimée, la confiscation ne constituait pas une dépense d’entreprise. Le montant confisqué représentait en fait le bénéfice ou le revenu net tiré par l’appelant de la vente de drogues et la confiscation ne visait pas à permettre à l’appelant de gagner un revenu d’entreprise. Dans l’arrêt 65302 British Columbia Ltd. v. R., le juge Iacobucci a déclaré ce qui suit au paragraphe 69 :

 

69        Finalement, au par. 17, mon collègue fait observer que les amendes pénales ne sont pas, au sens juridique du terme, engagées en vue de tirer un revenu. Il est vrai que l’al. 18(1)a) permet expressément la déduction de dépenses engagées en vue de tirer un revenu de l’entreprise. Cependant, il est tout aussi vrai que si le contribuable ne peut démontrer que l’amende a en fait été encourue en vue de tirer un revenu, l’amende ou la pénalité ne peut alors être déduite et l’analyse s’arrête là.

 

 

[5]     L’alinéa 18(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») énonce comme suit les restrictions qui s’appliquent aux déductions qui peuvent être faites d’un revenu d’entreprise.

 

ARTICLE 18 : Exceptions d’ordre général.

 

(1) Dans le calcul du revenu du contribuable tiré d’une entreprise ou d’un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles :

 

a) Restriction générale – les dépenses, sauf dans la mesure où elles ont été engagées ou effectuées par le contribuable en vue de tirer un revenu de l’entreprise ou du bien;

 

 

[6]     Lorsque l’on se demande si la confiscation du montant de 33 974 $ constituait une dépense que l’appelant avait effectuée en vue de tirer un revenu de son entreprise de vente de drogues, il faut clairement répondre par la négative. Premièrement, la confiscation du produit des activités criminelles n’était pas une dépense engagée par l’appelant. Le produit des activités criminelles était le bénéfice ou le revenu net gagné par l’appelant. La confiscation ne visait pas à permettre à l’appelant de gagner un revenu d’entreprise et n’aidait pas l’appelant à générer un revenu de son entreprise de vente de drogues. Le juge Angers a récemment statué sur l’appel Brizzi v. R., [2007] 4 C.T.C. 2334, dans lequel les faits étaient fort semblables à ceux qui sont ici en cause. Je souscris à la décision du juge Angers, et plus particulièrement au paragraphe 7, lorsqu’il a déclaré ce qui suit :

 

[...] Selon moi, la perte subie du fait de la confiscation est une conséquence de l’exploitation d’une entreprise illégale et donc certainement pas une dépense ayant facilité ou généré la production d’un revenu.

 

[7]     L’appelant n’a pas le droit de déduire le montant de 33 974 $ qui a été confisqué en faveur de la Couronne à titre de produit des activités criminelles.

 

PÉNALITÉS ÉTABLIES EN VERTU DU PARAGRAPHE 163(2)

 

[8]     Afin de justifier l’imposition de pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, le ministre a la charge d’établir que l’appelant, « sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde », a fait un faux énoncé ou une omission dans sa déclaration.

 

[9]     Le seul élément de preuve que le ministre a présenté à l’appui des pénalités établies en vertu du paragraphe 163(2) était l’affidavit de Denis Desloges, agent des litiges à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), à Ottawa. Selon cet affidavit, l’appelant avait déclaré un revenu nul dans la déclaration de revenus qu’il avait produite pour l’année 2000.

 

[10]    L’appelant a déclaré que c’était toujours son père qui préparait ses déclarations de revenus. Il n’a pas dit à son père qu’il avait gagné un revenu en l’an 2000 et la déclaration qui a été produite indiquait un revenu nul. L’appelant ne savait pas que le revenu tiré d’une entreprise illégale était imposable. En l’an 2000, l’appelant était âgé de 22 ans. Le niveau d’instruction de l’appelant n’a pas été établi.

 

[11]    Je conclus que l’appelant a fait une omission dans sa déclaration de l’année 2000. Toutefois, je conclus également que l’intimée ne s’est pas acquittée de l’obligation qui lui incombait d’établir que l’omission avait été faite dans des circonstances équivalant à faute lourde.

 

[12]    Par conséquent, l’appel est accueilli, mais uniquement en vue de supprimer la pénalité.

 

 

          Signé à Halifax (Nouvelle‑Écosse), ce 21e jour de décembre 2007.

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de février 2008

 

D. Laberge, LL.L.


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI746

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2006-1932(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Mitesh Anjaria

                                                          c.

                                                          Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Hamilton (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 5 décembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Valerie Miller

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 21 décembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentante de l’appelant :

Mme Janet C. Thompson

Avocat de l’intimée :

MLaurent Bartleman

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

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