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Dossier : 2007-3200(IT)I

ENTRE :

HAROLD D. McINTYRE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 7 décembre 2007, à Fredericton (Nouveau‑Brunswick)

 

 

Devant : L’honorable juge T. O'Connor

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Deanna M. Frappier

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en application de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard de l’année d’imposition 2005 est rejeté sans dépens.

 

      


Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de décembre 2007.

 

 

 

« T. O'Connor »

Juge O'Connor

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de janvier 2008.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2007CCI754

Date : 20071214

Dossier : 2007-3200(IT)I

ENTRE :

HAROLD D. McINTYRE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O'Connor

 

[1]     Le présent appel a été entendu à Fredericton (Nouveau‑Brunswick), le 7 décembre 2007.

 

[2]     Les principaux faits sont les suivants :

 

1.       L’appelant, Harold D. McIntyre, verse une pension alimentaire pour enfants à son ex‑épouse, Anola Kathleen McIntyre, à l’égard de leur fils, Adam.

 

2.       L’appelant a intenté une action en justice en vue de faire éliminer la pension alimentaire pour enfants en faisant valoir qu’Adam était indépendant depuis 2004. L’appelant a eu gain de cause et, dans un jugement daté du 25 octobre 2004, la Cour du Banc de la Reine du Nouveau‑Brunswick a confirmé que l’appelant n’était plus tenu de verser la pension alimentaire pour enfants.

 

3.       L’appelant a dû payer des frais d’avocat de 22 600 $ dans le cadre de cette action en justice et a demandé la déduction de ces frais de 22 600 $ dans le calcul de ses revenus pour son année d’imposition 2005.

 

4.       Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a refusé la déduction en partant du principe que les frais d’avocat en question n’ont pas été engagés en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien, selon l’article 3 et l’alinéa 18(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

[3]     La question en l’espèce est de savoir si le ministre a eu raison de refuser la déduction en cause.

 

[4]     La question de savoir dans quelles circonstances une personne a le droit de déduire des frais d’avocat engagés dans le cadre d’une action en matière de pension alimentaire pour conjoint ou pour enfants a souvent fait l’objet de litiges. Il ne semble cependant pas y avoir de constance dans les décisions rendues.

 

[5]     L’appelant, qui se représentait lui‑même, a présenté un bon nombre de documents, ayant trait tant au droit qu’aux faits, établissant le manque apparent de clarté de certaines décisions. Il avait de la difficulté à comprendre le fondement de la plupart des décisions qui, dans l’ensemble, étaient un refus de la déduction des frais d’avocat dans des situations semblables à la sienne. De toute évidence, l’appelant était de bonne foi en soutenant que le ministre n’avait pas raison de lui refuser la déduction de ses frais d’avocat.

 

ANALYSE

[6]     À mon avis, le résumé le plus concis et précis de l’état actuel du droit a été formulé par le juge en chef Bowman dans la décision Loewig v. The Queen, 2006 D.T.C. 3500.

 

[7]     Dans cette décision, le juge en chef Bowman indique ce qui suit :

 

1          La Cour est saisie d’un appel interjeté à l’encontre d’une cotisation d’impôt sur le revenu établie pour l’année d’imposition 2003 de l’appelant. Bien que nombre de points litigieux aient été soulevés dans l’avis d’appel et la réponse à l’avis d’appel, M. Loewig a soumis une seule de ces questions à la Cour, à savoir la question qui portait sur la déductibilité de frais juridiques de 1 391 $ qu’il avait engagés dans le cadre d’une instance judiciaire dans laquelle il avait demandé la cessation des retenues de pension alimentaire que continuait à effectuer le Bureau des obligations familiales (le « BOF ») sur sa rémunération).

 

2          Les faits sont forts simples. L’appelant et sa première épouse (l’« ex‑épouse ») sont les parents d’une enfant, Alessandra, née le 7 mars 1989. Ils se sont séparés, et, en vertu d’un accord de séparation établi le 7 janvier 1992, l’ex‑épouse a eu la garde d’Alessandra. L’appelant était tenu de verser à son ex‑épouse une pension alimentaire au profit d’Alessandra jusqu’à ce qu’un événement parmi plusieurs survînt, l’événement pertinent en l’espèce correspondant au moment où Alessandra cesserait d’habiter principalement avec l’ex‑épouse. Alessandra a déménagé de la maison de l’ex‑épouse en mai 2003. […]

 

[8]     Le juge en chef poursuit et explique que M. Loewig devait obtenir une ordonnance judiciaire lui permettant de cesser de payer la pension alimentaire à l’égard d’Alessandra, ce qu’il a d’ailleurs fait, engageant ainsi des frais d’avocat. Le juge en chef indique aussi :

 

5          Les frais juridiques engagés en vue d’obtenir l’ordonnance judiciaire se chiffraient à 1 389 $. L’appelant les a déduits, mais leur déduction a été refusée.

La question de la déductibilité de frais juridiques engagés en vue d’obtenir une ordonnance alimentaire se pose depuis longtemps. Elle est examinée en détails par le juge Noël de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Nadeau v. R., 2003 FCA 400 (CanLII), [2004] 1 C.T.C. 293. Pendant quarante ans, les juges de la Cour ont affirmé que les frais juridiques engagés en vue d’établir ou de maintenir un droit à des aliments étaient déductibles au motif que le droit à une pension alimentaire était un bien et, donc, que les sommes déboursées en vue de gagner un revenu issu d’une pension alimentaire étaient déductibles et qu’elles n’étaient pas visées à l’alinéa 18(1)a), qui interdit la déduction de dépenses qui n’ont pas été engagées en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien. Le juge Archambault a refusé de se conformer à cette jurisprudence bien établie. La Cour d’appel fédérale a statué que le juge Archambault avait eu tort, mais elle a confirmé sa conclusion selon laquelle les frais engagés par le payeur n’étaient pas déductibles. Au paragraphe 18 de ses motifs, la Cour d’appel fédérale a dit :

 

18 Inversement, les dépenses encourues par le payeur d'une pension alimentaire (soit pour empêcher qu'elle soit établie ou augmentée, ou soit pour la diminuer ou y mettre fin), ne peuvent être considérées comme ayant été encourues pour gagner un revenu et les tribunaux n'ont jamais reconnu de droit à la déduction de ces dépenses (voir, par exemple, Bayer, supra).

 

7          Selon ce raisonnement, bien que le bénéficiaire d’une pension alimentaire puisse engager des dépenses en vue de gagner un revenu, on ne peut pas en dire autant du payeur.

 

8          M. Loewig a affirmé, dans une plaidoirie motivée de façon soigneuse et détaillée, que sa démarche avait pour but d’établir un droit préexistant et de lui permettre de récupérer les sommes qui avaient été retenues à tort sur son salaire. Il se fonde sur le paragraphe 18 du bulletin d’interprétation IT‑99R5 (consolidé), qui est ainsi rédigé :

 

18. Les frais juridiques engagés pour faire respecter un droit déjà existant à une pension alimentaire provisoire ou permanente sont déductibles. Un droit déjà existant à une pension alimentaire peut résulter d'un accord écrit, d'une ordonnance d'un tribunal ou de dispositions législatives comme les articles 11 et 15.1 de la Loi sur le divorce à l'égard d'une ordonnance alimentaire au profit d'un enfant, ou la partie III de la Loi sur la famille de l'Ontario, et la mise en application d'un droit de ce type n'établit pas un nouveau droit (voir la décision rendue dans l'affaire La Reine c. Burgess, [1981] CTC 258, 81 DTC 5192 (CFSPI)). En outre, les frais juridiques engagés pour contester la réduction d'une pension alimentaire sont déductibles, étant donné qu'ils ne créent pas de nouveaux droits à un revenu (voir la décision rendue dans l'affaire Le Procureur général du Canada c. Norma McCready Sembinelli, [1994] 2 CTC 378, 94 DTC 6636 (CAF.)).

 

9          Je compatis sincèrement avec l’appelant, dont la position me semble tout à fait compatible avec l’équité et le bon sens. Néanmoins, les frais engagés par l’appelant en vue de récupérer des sommes payées en sus des montants versés conformément à l’accord de séparation, sommes qui, lorsqu’il les a récupérées, ne représentaient pas un revenu entre ses mains (il n’a pas déduit les sommes payées après le 1er juillet 2003), ne peuvent pas être tenues pour des frais engagés en vue de gagner un revenu.

 

10        Bien que les bulletins d’interprétation n’aient pas force de loi, le paragraphe 21 du bulletin IT-99R5 contient, à mon avis, un exposé juste du droit applicable, et il est compatible avec l’arrêt Nadeau. Ce paragraphe est ainsi rédigé :

 

21. Pour le payeur, les frais juridiques engagés pour la négociation ou la contestation d'une demande de pension alimentaire ne sont pas déductibles, étant donné qu'ils constituent des frais personnels ou de subsistance. De même, les frais juridiques engagés pour mettre fin à une pension alimentaire ou en réduire le montant ne sont pas déductibles, étant donné que le succès d'une telle démarche ne produit pas un revenu d'une entreprise ou d'un bien. Les frais juridiques engagés pour obtenir le droit de garde ou le droit de visite d'un enfant ne sont pas déductibles non plus.

 

[9]     Je souscris à la décision du Juge en chef Bowman, qui va dans le même sens que l’arrêt de la Cour d’appel fédérale auquel la Cour canadienne de l’impôt est liée.  

 

[10]    Par conséquent, pour les motifs énoncés ci‑dessus, l’appel est rejeté sans dépens.

 

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de décembre 2007.

 

 

« T. O'Connor »

Juge O'Connor

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de janvier 2008.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI754

 

N° DE DOSSIER :                             2007-3200(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Harold D. McIntyre c. La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Fredericton (Nouveau‑Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 7 décembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge T. O'Connor

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 14 décembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Deanna M. Frappier

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                        Nom :                       

 

                     Cabinet :

 

           Pour l’intimée :                        John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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