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Dossier : 2005-4280(CPP)

ENTRE :

LAMBROS CONTRACTING LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 26 juillet 2006, à Edmonton (Alberta).

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Ronald Agar

 

Représentant de l’intimé :

Tyler Lord (stagiaire en droit)

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est accueilli et la décision du ministre est annulée en ce qui concerne M. Richard Lamontagne.

 

          L’appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée en ce qui concerne Mme Carla Lamontagne, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

 


Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 18e jour d’août 2006.

 

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de novembre 2006.

 

 

 

Nathalie Boudreau, traductrice


 

 

 

Référence : 2006CCI461

Date : 20060818

Dossier : 2005-4280(CPP)

ENTRE :

LAMBROS CONTRACTING LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

 

A.      Les faits

 

[1]     L’appelante a été constituée en société en 2003 sous le régime des lois de la province d’Alberta.

 

[2]     L’appelante exploitait une entreprise de charpentage et de construction de maisons.

 

[3]     Richard Lamontagne (ci‑après appelé « M. Lamontagne ») était le président et l’unique actionnaire et administrateur de l’appelante.

 

[4]     M. Lamontagne fournissait des services de gestion et de main d’œuvre à l’appelante. Parmi ses tâches, il organisait les équipes de travail, supervisait les travailleurs, préparait les factures et gérait l’entreprise de l’appelante.

 

[5]     Carla, la femme de M. Lamontagne, fournissait des services de gestion de bureau à l’appelante. Entre autres, elle traitait les factures, préparait les chèques et classait les dossiers et les documents pour l’appelante. M. Lamontagne a témoigné qu’il s’attendait à ce que Carla apprenne à utiliser l’ordinateur pour organiser les dossiers financiers de l’appelante et pour les tenir à jour. Toutefois, cela ne s’était jamais produit, et c’était Ronald Agar, CA, qui s’occupait des dossiers financiers de l’appelante.

 

[6]     En 2004, M. Lamontagne a reçu des honoraires de gestion de 50 000 $ de l’appelante.

 

[7]     En 2004 et en 2005, l’appelante a versé les montants suivants à Carla Lamontagne :

 

                                      2004                      6 300 $

                                      2005                      1 250 $

 

B.      Point en litige

 

[8]     Il s’agit de savoir si M. Lamontagne et Carla Lamontagne exerçaient des emplois ouvrant droit à pension au sens du Régime de pensions du Canada.

 

C.      Analyse et décision

 

[9]     Au fil des ans, les tribunaux canadiens ont établi divers critères visant à déterminer si les travailleurs sont des employés ou des entrepreneurs indépendants. Ces quatre critères sont exposés par le juge MacGuigan dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. v. M.N.R., 87 DTC 5025 comme suit :

 

          1.       le contrôle exercé par le prétendu employeur;

 

          2.       la propriété des instruments de travail;

 

3.                 les chances de bénéfice et les risques de perte;

 

          4.       le critère d’intégration.

 

Un cinquième critère a récemment été établi et précisé par les cours. Il s’agit du critère de l’intention des parties. L’exemple le plus récent de l’application de ce critère se trouve dans l’arrêt Royal Winnipeg Ballet c. Canada, [2006] A.C.F. no 339, rendu par la juge Sharlow de la Cour d’appel fédérale. J’examinerai maintenant l’applicabilité des cinq critères.

 

[10]    Je vais tout d’abord formuler des commentaires sur chaque critère.

 

 

1.       Contrôle

 

[11]    Selon le témoignage de M. Lamontagne, les travailleurs n’étaient pas surveillés de la même façon que des employés sont normalement surveillés. M. Lamontagne a précisé qu’il décidait lui‑même ce qu’il devait faire au moment où il se trouvait sur les lieux de travail.

 

[12]    En ce qui concerne le critère du CONTRÔLE, le témoignage que j’ai entendu me porte à conclure que M. Lamontagne n’était pas contrôlé de la même façon qu’un employé est normalement contrôlé. Je ne dispose pas d’une preuve suffisante relative au contrôle exercé sur Carla Lamontagne.

 

2.       Propriété des instruments de travail

 

[13]    La preuve montre que M. Lamontagne fournissait ses propres instruments de travail et son propre outillage. Il s’agit d’une situation semblable à celle dans l’arrêt Precision Gutter c. Canada, [2002] A.C.F. no 771. Même si j’estime que ce critère n’est qu’un facteur parmi d’autres, je crois que l’appelante y répond. Je ne dispose pas d’une preuve suffisante à cet égard en ce qui concerne Carla Lamontagne.

 

3.       Chances de bénéfice et risques de perte

 

[14]    La preuve montre que M. Lamontagne recevait un montant fixe comme rémunération et n’était pas expressément tenu de travailler un nombre minimum d’heures. 

 

[15]    Même si, à mon avis, il ne s’agit pas d’un critère important en l’espèce, je crois que l’appelante y répond en ce qui concerne M. Lamontagne. Je ne dispose pas d’une preuve suffisante relative à Carla Lamontagne à cet égard.

 

4.       Critère d’intégration

 

[16]    Il semblerait que M. Lamontagne faisait partie intégrante de l’entreprise de l’appelante pendant les années visées par l’appel. Toutefois, je suis certain que l’appelante aurait pu engager d’autres travailleurs pour remplacer M. Lamontagne et Carla Lamontagne. 

 

 

5.       Intention des parties

 

[17]    La preuve montre que l’appelante et M. Lamontagne comprenaient clairement que M. Lamontagne était engagé comme entrepreneur indépendant et il gérait ses affaires en conséquence.

 

[18]    En ce qui concerne le critère de l’intention des parties, je renvoie aux motifs du jugement de la juge Sharlow, dans lesquels elle a dit ce qui suit au paragraphe 64 :

 

64.       Dans les circonstances, il me semble qu’il serait contraire aux principes applicables de mettre de côté, en le considérant comme dépourvu de toute force probante, le témoignage non contredit des parties quant à la façon dont elles comprennent la nature de leur relation juridique, même si ce témoignage ne saurait être déterminant. Le juge aurait dû examiner les facteurs de Wiebe Door à la lumière de ce témoignage non contredit et se demander si, dans l’ensemble, les faits étaient compatibles avec la conclusion selon laquelle les danseurs étaient des travailleurs indépendants, comme les parties le pensaient, ou s’ils étaient davantage compatibles avec la conclusion selon laquelle les danseurs étaient des employés. [Non souligné dans l’original.]

 

[19]    Si j’applique le critère de l’intention des parties, tel qu’il a été établi par la juge Sharlow, je conclus que les faits en l’espèce sont davantage compatibles avec une conclusion selon laquelle M. Lamontagne était travailleur indépendant, et c’est ce que je conclus.

 

[20]    De plus, je voudrais citer avec approbation les commentaires formulés par la juge en chef MacLachlin dans l’arrêt Shell Canada Ltd. c. Canada, [1999] A.C.S. no 30, où elle a dit ce qui suit au paragraphe 39 :

 

[…] nous avons décidé qu'en l'absence d'une disposition expresse contraire de la Loi ou d'une conclusion selon laquelle l'opération en cause est un trompe-l'œil, les rapports juridiques établis par le contribuable doivent être respectés en matière fiscale. Une nouvelle qualification n'est possible que lorsque la désignation de l'opération par le contribuable ne reflète pas convenablement ses effets juridiques véritables :

 

[21]    En l’espèce, l’appelante et M. Lamontagne avaient conclu une entente avec l’intention de créer une relation d’entrepreneur par opposition à une relation employeur-employé et s’étaient comportés en conséquence.

 

[22]    À la lumière des diverses sources faisant autorité que j’ai consultées, je suis d’avis que M. Lamontagne était un entrepreneur indépendant et non un employé de l’appelante. Je conclus donc que l’appelante n’avait aucune responsabilité envers M. Lamontagne en vertu du Régime de pensions du Canada.

 

[23]    Vu la preuve présentée, je ne suis pas convaincu que Carla Lamontagne était entrepreneure indépendante. À mon avis, Carla Lamontagne était une employée de l’appelante, qui doit reconnaître le statut d’employée de Carla Lamontagne au sens du Régime de pensions du Canada.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 18e jour d’août 2006.

 

 

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de novembre 2006.

 

 

 

Nathalie Boudreau, traductrice


 

 

RÉFÉRENCE :

2006CCI461

 

NO DU DOSSIER :

2005-4280(CPP)

 

INTITULÉ :

Lambros Contracting Ltd. et

Le ministre du Revenu national

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 juillet 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 18 août 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

Ronald Agar

 

Représentant de l’intimé :

Tyler Lord (stagiaire en droit)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimé :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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