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Dossier : 2006-2725(IT)I

 

ENTRE :

RAYMONDE DRYSDELLE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 14 juin 2007, à Miramichi (Nouveau-Brunswick)

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

 

Avocate de l’intimée :

Me Christina Ham

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des années d'imposition 2002, 2003 et 2004 est rejeté.

 

 

Signé à Edmundston, Nouveau-Brunswick, ce 18e jour de juillet 2007.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 


 

 

 

Référence : 2007CCI390

Date : 20070718

Dossier : 2006-2725(IT)I

 

ENTRE :

RAYMONDE DRYSDELLE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]     Par avis de cotisation datés du 29 mai 2003, du 18 mars 2004 et du 3 mars 2005, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi l’obligation fiscale de l’appelante pour les années d’imposition 2002, 2003 et 2004 respectivement.

 

[2]     Par avis de nouvelle cotisation daté du 11 octobre 2005, le ministre a informé l’appelante que le crédit équivalent pour personne entièrement à charge lui avait été refusé pour les années d’imposition 2002, 2003 et 2004 (la « période pertinente »), puisqu’elle avait un conjoint de fait.

 

[3]     Le ministre a réévalué l’admissibilité de l’appelante à la prestation fiscale canadienne pour enfants et a établi une cotisation pour un paiement en trop de 221,16 $, calculé comme suit :

 

année de base 2002, pour les mois de juillet 2003 à juin 2004 :                   85,67 $

année de base 2003, pour les mois de juillet 2004 à juin 2005 :                 100,78 $

année de base 2004, pour les mois de juillet 2005 à septembre 2005 :        34,71 $

Total du paiement en trop :                                                                    221,16 $

 

[4]     Le ministre a réévalué l’admissibilité de l’appelante au supplément de la prestation nationale pour enfants et a établi une cotisation pour un paiement en trop pour 3 125,22 $, calculé comme suit :

 

année de base 2002, pour les mois de juillet 2003 à juin 2004 :              1 463,00 $

année de base 2003, pour les mois de juillet 2004 à juin 2005 :              1 354,97 $

année de base 2004, pour les mois de juillet 2005 à septembre 2005 :       307,25 $

Total du paiement en trop :                                                                 3 125,22 $

 

[5]     Le ministre a réévalué l’admissibilité de l’appelante au crédit pour taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée et a établi une cotisation pour un paiement en trop de 1 154,85 $, calculé comme suit :

 

année de base 2002, pour les trimestres se terminant en juillet et

octobre 2003 et en janvier et avril 2004 :                                                 322,05 $

année de base 2003, pour les trimestres se terminant en juillet et

octobre 2004, et en janvier et avril 2005 :                                                545,80 $

année de base 2004, pour les trimestres se terminant en juillet

et octobre 2005 :                                                                                   287,00 $

Total du paiement en trop :                                                                 1 154,85 $

 

[6]     L’appelante s’est opposée aux cotisations et le ministre a ratifié le tout le 6 juin 2006. L’appelante porte donc les cotisations en appel devant cette Cour. Il s’agit de déterminer si l’appelante et un certain M. Conrad Duclos vivaient en union de fait pendant la période pertinente.

 

[7]     L’appelante est venue s’installer dans la région de Miramichi il y a de cela environ douze ans. C’est à cette époque qu’elle a rencontré M. Conrad Duclos et que ce dernier l’a invitée à vivre chez lui. Ayant de la difficulté à joindre les deux bouts, elle a accepté. L’appelante s’occupe de l’entretien de la maison, elle prépare les repas et fait le ménage et le lavage pour tous les occupants de la maison, soit M. Duclos et son fils, ainsi que l’appelante et sa fille Karine. M. Duclos défraie toutes les dépenses de la maison, y compris la nourriture. L’appelante ne contribue à l’achat de la nourriture que lorsqu’elle a un excédent d’argent, ce qu’elle dit arriver très rarement.

 

[8]     La maison qu’ils occupent comprend trois chambres à coucher au rez-de-chaussée et deux au sous-sol. Depuis environ deux ans, l’appelante, sa fille et M. Duclos occupent les trois chambres du rez-de-chaussée. L’appelante déclare qu’elle occupait auparavant une chambre au sous-sol. La maison est située rue Rioux à St-Isidore, au Nouveau-Brunswick.

 

[9]     Karine Saulnier est venue confirmer les dires de sa mère quant aux circonstances qui les ont amenées toutes deux à vivre chez M. Duclos. Elle était âgée de 12 ans à l’époque. Elle témoigne que sa mère et M. Duclos sont amis et qu’elle ne les a jamais considérés comme conjoints. Elle déclare aussi ne jamais avoir vu sa mère coucher avec M. Duclos. Elle reconnaît toutefois qu’ils font de petites sorties au restaurant une ou deux fois par mois et que M. Duclos le fait en guise de reconnaissance.  En contre-interrogatoire, elle avoue avoir été très près de sa mère.

 

[10]    La chose qui est assez étonnante est que l’appelante indiquait l’adresse de sa mère, soit le chemin Tilley, sur ses déclarations de revenus et ce, depuis son retour au Nouveau-Brunswick. Elle attribue à une négligence le fait qu’elle n’a jamais changé son adresse à celle de M. Duclos. Elle admet que lorsqu’elle faisait une demande de carte de crédit, elle donnait l’adresse de M. Duclos.  L’intimée a aussi déposé en preuve les certificats d’immatriculation pour les deux véhicules qu’elle possède et l’adresse est celle de M. Duclos. Une autre pièce provenant du Centre hospitalier de Tracadie indique l’adresse de sa mère, mais le numéro de téléphone est celui de M. Duclos. L’appelante témoigne qu’une fois déménagée, elle indiquait l’adresse de M. Duclos pour toute autre correspondance.

 

[11]    L’appelante reconnaît aussi qu’ils faisaient des sorties sociales au restaurant, mais en tant qu’amis. M. Duclos, selon l’appelante, aime l’amener au restaurant car elle fait tout dans la maison et il aime la gâter. Elle reconnaît aussi qu’ils prenaient leurs repas ensemble dans la maison. Elle affirme ne pas avoir d’homme dans sa vie et elle ne connaît pas les ouï-dire de la communauté à leur égard.

 

[12]    M. Daniel Blacquière est vérificateur à l’Agence du revenu. Il a fait la vérification des déclarations de revenus de M. Duclos en 2005. Il a constaté que l’appelante et M. Duclos vivaient ensemble sous le même toit. Au moment de la vérification, qui s’est faite selon l’avoir net, il a demandé à M. Duclos de préparer la liste de ses dépenses personnelles. Lors d’une conversation avec M. Duclos le 9 juin 2005 au sujet du formulaire de dépenses personnelles remis par ce dernier au vérificateur, M. Duclos aurait dit que sa femme avait rempli le formulaire avec l’aide de son comptable.

 

[13]    Le vérificateur mentionne qu’à l’occasion de ses premières rencontres avec M. Duclos, celui-ci lui aurait demandé d’inclure le salaire de sa conjointe ou de sa femme (il est incertain du terme exact) dans les calculs de l’avoir net. C’est alors que M. Blacquière a fait enquête sur l’adresse de l’appelante et a constaté qu’aux fins de ses déclarations de revenus et des prestations d’assurance-emploi, l’appelante utilisait l’adresse de sa mère. Elle a d’ailleurs utilisé l’adresse de sa mère aux fins du présent appel. Il a vérifié les adresses des immatriculations des automobiles de l’appelante et l’adresse de M. Duclos y était indiquée. Il a alors inclus les revenus de l’appelante dans les calculs de l’avoir net de M. Duclos.

 

[14]    M. Blacquière témoigne avoir envoyé une lettre de proposition à l’appelante le 19 août 2005 à l’adresse de la rue Rioux, lui indiquant que son état civil était différent que celui indiqué sur ses déclarations de revenus (l’appelante se déclarait célibataire dans ses déclarations de revenus). N’ayant pas obtenu de réponse, il a téléphoné à l’appelante chez monsieur Duclos, et elle lui a admis au téléphone avoir reçu la lettre envoyée à la rue Rioux. Elle lui a confirmé qu’elle était le conjoint de fait de M. Duclos pour les trois années en litige et qu’elle ne savait pas la différence entre un conjoint de fait et un célibataire. Ils ont donc fait le changement. De son côté, l’appelante déclare qu’elle n’a pas dit ça, qu’elle n’a pas avoué ce fait et qu’elle lui aurait plutôt dit qu’ils n’étaient pas des conjoints.

 

[15]    Le terme « conjoint de fait » est défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu  comme suit :

 

Quant à un contribuable à un moment donné, personne qui, à ce moment, vit dans une relation conjugale avec le contribuable et qui, selon le cas :

 

a)      a vécu ainsi tout au long d’une période d’un an se terminant avant ce moment;

b)      est le père ou la mère d’un enfant dont le contribuable est le père ou la mère, compte non tenu des alinéas 252(1)c) et e) ni du sous-alinéa 252(2)a)(iii).

[. . .]

 

[16]    Plusieurs décisions ont porté sur la question de savoir si deux personnes étaient des « conjoints de fait » afin d’établir si elles vivaient séparément sous le même toit ou si elles avaient une relation conjugale. Le juge O’Connor de notre Cour, dans l’affaire Benson c. La Reine, no 2002-436(IT)I, a repris les critères établis dans l’arrêt Molodowich c. Penttinen (1980), 17 R.F.L. (2d) 376, et ensuite repris dans Kelner c. Canada, no 94-868(IT)I, [1995] A.C.I. no 1130, Rangwala c. Canada, no 2000-993(IT)I, [2000] A.C.I. no 624, et Roby c. Canada, no 2001-3029(IT)I, [2001] A.C.I. no 801. Ces critères sont les suivants :

 

1.     Logement

a.      Les intéressés vivaient-ils sous le même toit?

b.     Couchaient-ils dans le même lit?

c.     Y avait-il quelqu’un d’autre qui habitait chez eux?

 

2.     Comportement sexuel et personnel

a.      Les intéressés avaient-ils des rapports sexuels? Si non, pourquoi?

b.     Étaient-ils fidèles l’un à l’autre?

c.     Quels étaient leurs sentiments l’un pour l’autre?

d.     Existait-il une bonne communication entre eux sur le plan personnel?

e.      Prenait-il leurs repas ensemble?

f.       Que faisaient-ils pour s’entraider face aux problèmes ou à la maladie?

g.     S’offraient-ils des cadeaux à des occasions spéciales?

 

3.     Services

      Comment les intéressés agissaient-ils habituellement en ce qui concerne :

a.      La préparation des repas;

b.     Le lavage et le raccommodage des vêtements;

c.     Les courses;

d.     L’entretien du foyer;

e.      Les autres services ménagers?

 

4.     Relations sociales

a.      Les intéressés participaient-ils ensemble ou séparément aux activités du quartier et de la collectivité?

b.     Quelle était la nature des rapports de chacun d’eux avec les membres de la famille de l’autre et comment agissaient-ils envers ces derniers, et inversement, quel était le comportement de ces familles envers les intéressés?

 

5.     Attitude de la société

a.      Quelle attitude et quel comportement la collectivité avait-elle envers les intéressés, considérés individuellement et en tant que couple?

 

6.     Soutien (économique)

a.      Quelles dispositions financières les intéressés prenaient-ils pour ce qui était de fournir les choses nécessaires à la vie (vivres, vêtements, logement, récréation, etc.) ou de contribuer à les fournir?

b.     Quelles dispositions prenaient-ils relativement à l’acquisition et à la propriété de biens?

c.     Existait-il entre eux des arrangements financiers particuliers que tous deux tenaient pour déterminants quant à la nature de leurs relations globales?

 

7.     Enfants

a.      Quelle attitude et quel comportement les intéressés avaient-ils à l’égard des enfants?

 

[17]    Il est précisé dans l’affaire Rangwala, précitée, que chacun des critères doit recevoir le poids qu’il convient de lui accorder dans le contexte de chaque cause particulière afin que l’on puisse déterminer si une relation conjugale existe ou non.

 

[18]    Le juge en chef Bowman, dans l’affaire Roby, précitée, avait à décider si deux conjoints vivaient séparés afin de décider si l’appelant avait droit à la prestation fiscale canadienne pour enfants ainsi qu’au crédit équivalent pour personne entièrement à charge. Voici ce qu’il disait :

 

[7] Dans l'affaire Kelner c. La Reine, C.C.I., no 94-868(IT)I, 29 septembre 1995 ([1996] 1 C.T.C. 2687), j'ai passé en revue la jurisprudence qui existe dans ce domaine et j'ai conclu qu'il était possible que des époux vivent « séparés»" tout en demeurant sous le même toit. Cette proposition est inattaquable sur le plan du droit, mais, sur le plan des faits, il est toujours nécessaire de produire une preuve convaincante. Dans les affaires Rangwala c. La Reine, C.C.I., no 2000-993(IT)I, 19 septembre 2000 ([2000] 4 C.T.C. 2430), et Raghavan c. La Reine, C.C.I., no 2000-2088(IT)I, 26 avril 2001 ([2001] 3 C.T.C. 2218), la juge Campbell en est arrivée à la même conclusion.

 

[8] On ne fait certainement pas erreur en prenant comme point de départ la décision rendue par le juge Holland dans l'affaire Cooper v. Cooper (1972), 10 R.F.L. 184 (H.C. de l'Ont.), où il a déclaré à la page 187 :

 

[TRADUCTION]

 

Peut-on dire que les parties en cause en l'espèce vivent séparées? Nul doute que des époux qui vivent sous le même toit peuvent aussi vivre séparés l'un de l'autre dans les faits. Le problème a souvent été examiné dans le cadre de litiges fondés sur le sous-alinéa 4(1)e)(i) de la Loi sur le divorce, et, généralement parlant, les juges en sont arrivés à la conclusion que les parties vivaient séparées lorsque les circonstances suivantes étaient présentes :

 

(i) Les conjoints occupent des chambres à coucher distinctes.

(ii) Les conjoints n'ont pas de relations sexuelles.

(iii) Il y a peu de communication entre les conjoints, pour ne pas dire aucune.

(iv) La femme n'effectue pas de travaux ménagers pour le mari.

(v) Les conjoints prennent leur repas séparément.

(vi) Les conjoints n'ont pas d'activités sociales communes.

 

Voir les affaires Rushton v. Rushton (1968), 1 R.F.L. 215, 66 W.W.R. 764, 2 D.L.R. (3d) 25 (C.-B.); Smith v. Smith (1970), 2 R.F.L. 214, 74 W.W.R. 462 (C.-B.); Mayberry v. Mayberry, [1971] 2 O.R. 378, 2 R.F.L. 395, 18 D.L.R. (3d) 45 (C.A.).

 

[9] La juge Campbell et moi-même avons tous deux considéré que ces critères constituent un guide utile, quoiqu'ils ne soient nullement exhaustifs et qu'aucun d'eux ne soit déterminant. Je suis enclin à souscrire aux observations formulées par le juge Wilson dans l'affaire Macmillan-Dekker v. Dekker, 4 août 2000, dossier 99-FA-8392, et citées par la juge Campbell dans l'affaire Rangwala, à la page 7 (C.T.C : aux pages 2435 et 2436) :

 

[TRADUCTION]

 

Se basant sur une synthèse de la jurisprudence, la Cour a établi une liste faisant état de sept facteurs à utiliser pour déterminer si une union conjugale existe ou existait. Ces questions d'organisation permettent au juge présidant un procès de voir la relation globalement pour déterminer si les parties vivaient ensemble comme conjoints. Le fait de tenir compte de ces sept facteurs permettra d'éviter que l'accent soit mis à tort sur un facteur à l'exclusion d'autres facteurs et de faire en sorte que tous les facteurs pertinents soient pris en considération.

 

[. . .]

 

Je conclus qu'il n'y a pas un seul et unique modèle statique d'union conjugale ou de mariage. Il y a plutôt un groupe de facteurs reflétant la diversité des unions conjugales et mariages qui existent dans la société canadienne moderne. Chaque cas doit être examiné selon les faits objectifs qui lui sont propres.

 

[10] Tenant donc compte du fait qu'aucun facteur ne doit l'emporter sur les autres et que c'est la relation globale qui est en dernière analyse l'élément déterminant, peut-on dire que les époux en l'espèce vivaient séparés pour cause d'échec de leur mariage?

 

 

[19]    Il faut signaler que l’appelante a le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle n’avait pas de relation conjugale avec M. Duclos (voir Richard c. Canada, 2003 CCI 774, et Drolet c. Canada, 2004 CCI 538). Je reconnais d’emblée qu’il est possible pour deux personnes non mariées de demeurer sous le même toit tout en n’étant pas des conjoints de fait, tout comme il est possible que des époux vivent « séparés » tout en demeurant sous le même toit. Comme le disait le juge Bowman, cette proposition est inattaquable sur le plan du droit, mais sur le plan des faits, il est toujours nécessaire de produire une preuve convaincante.

 

[20]    En l’espèce, l’appelante maintient qu’elle est célibataire et qu’elle demeure chez M. Duclos et non avec lui. Elle ne partage pas la même chambre et ne fait qu’habiter là. Cela répond aux besoins de M. Duclos et à ceux de l’appelante qui, à l’époque de cet arrangement, éprouvait des difficultés financières. La preuve, cependant, ne nous révèle pas pourquoi l’appelante ne pouvait pas continuer à demeurer chez sa mère à son retour dans la région de Miramichi vu ses difficultés financières, ni pourquoi elle continue à demeurer chez M. Duclos maintenant que sa situation financière semble rétablie.

 

[21]    L’appelante demeure chez M. Duclos depuis près de 10 ans. Elle accomplit toutes les tâches ménagères, prépare les repas pour tous les occupants de la maison et prend ses repas avec M. Duclos. Elle ne contribue ni ne paie pour quoi que ce soit, si ce n’est un peu d’argent pour les épiceries si elle a un excédent dans son budget. L’appelante et M. Duclos sortent ensemble pour aller au restaurant une ou deux fois par mois, au motif qu’il s’agissait d’une gâterie de la part de M. Duclos à l’endroit de l’appelante. Cet état de choses me paraît plus compatible avec une relation de couple qu’avec la relation que décrit l’appelante. Cela me paraît davantage évident lorsqu’on considère que M. Duclos accorde le même traitement à la fille de l’appelante, du moins en ce qui concerne le logement et la nourriture. Il tient presque lieu de parent envers la fille de l’appelante. Il s’agit certes d’une situation très inhabituelle où la preuve doit être très convaincante, comme le disait le juge Bowman.

 

[22]    Selon l’appelante et sa fille, M. Duclos occupe seul sa chambre. L’appelante témoigne qu’ils n’ont pas de relations sexuelles et la fille de l’appelante est venue confirmer cette affirmation. À mon avis, il est difficile d’accorder du poids à cette confirmation de la part de la fille de l’appelante, au motif qu’il ne s’agit pas du genre d’activité qu’elle peut confirmer ou infirmer. Elle peut, comme elle l’a d’ailleurs fait, témoigner qu’elle ne les considère pas comme conjoints. Il aurait par contre fallu qu’elle donne davantage de détails sur ce dernier point afin que l’on puisse mieux comprendre cette affirmation.

 

[23]    Il faut aussi se demander pourquoi l’appelante, pendant près de 10 ans, n’a jamais indiqué l’adresse exacte de sa résidence dans ses déclarations de revenus. Cette même erreur se retrouve dans ses demandes de prestations d’assurance-emploi et dans l’avis d’appel de la présente instance. Cette question devient pertinente puisque lorsqu’il s’agit de l’immatriculation des automobiles et de ses cartes de crédit, elle utilise l’adresse de M. Duclos, de même que son numéro de téléphone.

 

[24]    Je ne peux faire abstraction des conversations du vérificateur avec M. Duclos, lorsque ce dernier référait à l’appelante comme étant sa femme ou sa conjointe. Même s’il s’agit de ouï-dire et qu’il faut habituellement accorder peu de poids à ce genre de preuve, il n’en demeure pas moins qu’en l’espèce, elle confirme la conversation qu’a eue le vérificateur avec l’appelante après l’envoi de sa lettre à cette dernière le 19 août 2005. C’est lors de cette conversation que l’appelante a reconnu qu’elle était conjointe de fait de M. Duclos. Il s’agit là d’une réponse spontanée qui, à mon avis, confirme que l’appelante jouait un rôle beaucoup plus important qu’elle veut le laisser croire dans sa relation avec M. Duclos. En tenant compte de tous les facteurs, et particulièrement de la relation globale qu’entretiennent l’appelante et M. Duclos, il est plus probable que non que l’appelante et M. Duclos sont des conjoints de fait.

 

[25]    L’appelante n’a donc pas satisfait à son fardeau de la preuve. Je ne peux faire abstraction du fait que M. Duclos n’a pas témoigné dans cette affaire. Son témoignage était, à mon avis, d’une très grande importance et l’explication voulant qu’il était occupé à son travail ne me parait pas justifiable vu l’importance de la question en litige. Je ne peux qu’inférer que son témoignage n’aurait pas été favorable à l’appelante. L’appel est rejeté.

 

 

Signé à Edmundston, Nouveau-Brunswick, ce 18e jour de juillet 2007.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI390

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2006-2725(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Raymonde Drysdelle et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Miramichi (Nouveau-Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 14 juin 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 18 juillet 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante:

L’appelante elle-même

 

 Avocate de l’intimée:

Me Christina Ham

 

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante:

 

                     Nom :

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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