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Dossier : 2005-2422(IT)I

ENTRE :

CALOGERO SCALIA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appels entendus le 23 novembre 2005, à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Claude Lamoureux

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JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 2001, 2002 et 2003 sont rejetés, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de janvier 2006.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Référence : 2006CCI9

Date : 20060105

Dossier : 2005-2422(IT)I

ENTRE :

CALOGERO SCALIA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre Proulx

[1]      Il s'agit d'appels pour les années d'imposition 2001, 2002 et 2003. Il y a trois questions en litige. La première concerne les frais pour droit d'usage d'une voiture, la deuxième est de savoir si les dépenses engagées pour changer un système de chauffage dans un immeuble de location sont de nature courante ou capitale et la troisième, de savoir si la totalité des intérêts sur emprunt hypothécaire peut être déduite dans le calcul du revenu locatif.

[2]      Les faits que le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) a pris en compte pour établir ses nouvelles cotisations sont décrits au paragraphe 9 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) comme suit :

a)          Au cours des années d'imposition en litige, l'appelant et madame Justine Figura étaient actionnaires de la société « Services Financiers C. Scalia inc. » (ci-après, la « société » ) dans des proportions de 50/50;

b)          Le siège social de la société est situé au 6455 Jean-Talon est, suite 802, Montréal, Québec;

c)          Madame Justine Figura est la conjointe de l'appelant (ci-après, la « conjointe » );

d)          Au cours des années d'imposition en litige, l'appelant était aussi employé de la société;

FRAIS POUR DROIT D'USAGE D'UNE AUTOMOBILE

e)          Au cours des années d'imposition en litige, l'appelant avait à sa disposition un véhicule appartenant à la société;

f)           L'appelant a mentionné au vérificateur du Ministre, que lors de l'achat du véhicule, l'odomètre indiquait 50 000 kilomètres; et qu'au moment de la vérification, l'odomètre indiquait 115 000 kilomètres;

g)          Le vérificateur du Ministre a estimé à 50% l'utilisation pour des fins personnelles du véhicule;

h)          Le vérificateur du Ministre a établi à 5 870,19 $ pour chacune des années d'imposition 2001 et 2002, l'avantage que l'appelant tirait du droit d'usage du véhicule appartenant à la société (voir détail en annexe);

CAPITALISATION DES DÉPENSES

i)           Dans ses déclarations de revenu pour ses années d'imposition 2001 et 2002, l'appelant a présenté les informations suivantes :

Description

     2001     

     2002     

Revenu brut

de location

121 148 $

169 649 $

(Perte nette

de location)

( 4 528 $)

( 9 777 $)

j)           L'appelant et sa conjointe ont acheté un immeuble à logements (ci-après, l' « immeuble à logements » ), le 3 février 1999;

k)          L'immeuble à logements a été acheté pour une somme de 320 000 $;

l)           L'immeuble à logements est sis au 5638-5642, rue Des Narcisses à Montréal-Nord, en la province de Québec;

m)         L'immeuble à logements compte vingt (20) logements;

n)          L'immeuble à logements était chauffé par un système de chauffage central au gaz;

o)          En 2002, l'appelant a fait remplacer le système de chauffage central au gaz par une unité de chauffage électrique et un chauffe-eau pour chacun des vingt logements;

p)          L'appelant a installé des « thermostats » individuels pour chacun des vingt logements;

q)          L'appelant a encouru des frais de 85 808 $ à titre de dépenses pour ces travaux;

r)           L'appelant a réclamé le montant de 85 808 $ à titre de dépenses courantes, à l'encontre de ses revenus de location pour son année d'imposition 2002;

s)          Le Ministre a déterminé que ces dépenses constituaient plutôt des dépenses de nature capitale; et a par conséquent, refusé à l'appelant le montant de 85 808 $ réclamé par celui-ci à titre de dépenses de location pour son année d'imposition 2002;

INTÉRÊTS SUR EMPRUNTS

t)           Le 8 mai 1996, l'appelant et sa conjointe ont contracté un emprunt hypothécaire auprès de la Banque Laurentienne du Canada;

u)          L'emprunt était pour une somme de 300 000 $ et portait intérêts au taux de 8,51% l'an;

v)          Le prêt était garanti par les immeubles sis :

i)

Au 11 985, Matte, Montréal-Nord, Québec;

ii)

Au 8980, Claudel, St-Léonard, Québec;

w)         Le 10 mai 1996, l'appelant a acheté un immeuble sis au 11 895, Matte, Montréal-Nord, en la province de Québec (ci-après, l' « immeuble rue Matte » );

x)          L'immeuble rue Matte a été acheté pour une somme de 201 500 $;

y)          Le 10 mai 1996, la conjointe a acheté un immeuble sis au 8980 Claudel, St-Léonard, en la province de Québec (ci-après, l' « immeuble rue Claudel » );

z)          L'immeuble rue Claudel a été acheté pour une somme de 200 000 $;

aa)        Selon les registres du Ministre, l'appelant et sa conjointe habitent l'immeuble rue Claudel depuis 1997;

bb)        Pour les années d'imposition 2001 et 2002, l'appelant a réclamé les montants respectifs de 19 686,46 $ et de 17 110 $ à titre de dépenses d'intérêts à l'encontre de ses revenus de location;

cc)        Le vérificateur du Ministre a déterminé que le montant d'intérêts rattaché à l'immeuble rue Matte était de 13 222,74 $ en 2001, et de 11 492,22 $ en 2002;

dd)        Le vérificateur du Ministre a donc déterminé que des montants de 6 463,72 $ et 5 617,78 $ respectivement, pour les années d'imposition 2001 et 2002, étaient de nature personnelle, puisqu'ils sont reliés à la partie de l'emprunt hypothécaire servant à financer la résidence familiale de l'appelant et de sa conjointe;

PERTE NETTE AUTRE QU'EN CAPITAL REPORTÉE

ee)        L'appelant a appliqué à son année d'imposition 2003, un montant de 7 403 $ à titre de pertes nettes autres qu'en capital reportées de l'année d'imposition 2002;

ff)          Compte tenu des modifications apportées aux années d'imposition 2001 et 2002 de l'appelant lors des nouvelles cotisations du 6 décembre 2004, celui-ci ne peut reporter de perte nette autre qu'en capital puisque, selon les registres du Ministre, il n'a aucun solde de pertes nettes autres qu'en capital reportable.

[3]      Les alinéas 9 a) à 9 f), 9 i) à 9 r) et 9 t) à 9 bb) de la Réponse ont été admis.

La voiture

[4]      L'appelant a affirmé lors de son témoignage que l'utilisation personnelle de la voiture n'était pas plus de 5%. Lors du contre-interrogatoire, il a admis que lors d'une des années en cause, il avait utilisé la voiture pour aller en Floride. La famille, composée des deux époux et de deux enfants, n'avait pas d'autre voiture à sa disposition. L'un des enfants est né en 1986 et l'autre en 1990. L'appelant mentionne que l'école était tout près de la résidence familiale et admet aussi, qu'à cette époque, il était conseiller en sécurité financière et louait un espace dans un cabinet de courtage situé rue de Maisonneuve. Il s'occupait de la gestion de ses immeubles à logements situés Boulevard St-Michel (sept logements), rue Matte (huit logements) et rue Narcisse (20 logements).

[5]      Il a déposé comme pièce A-1 les états financiers de C. Scalia Financial Services Inc. pour les années se terminant les 30 juin 2001 et 2002. Les dépenses afférentes à la voiture pour l'année 2001 sont au montant de 8 559 $ et pour l'année 2002 au montant de 7 101 $.

[6]      La pièce I-1 est le contrat d'achat dans l'année 2001 de la voiture Mercedes au montant total de 22 859,39 $.

[7]      L'appelant admet qu'il n'a pas tenu de registre concernant l'utilisation de la voiture.

L'emprunt hypothécaire

[8]      La pièce I-2 est l'acte de prêt sur hypothèque immobilière en date du 8 mai 1996. Les emprunteurs sont l'appelant et son épouse. Le prêt est de 300 000 $. Les propriétés données en garantie sont celle située sur la rue Matte à Montréal-Nord et celle située rue Claudel à St-Léonard.

[9]      La pièce I-3 est le contrat d'achat par l'appelant de la propriété située sur la rue Matte en date du 10 mai 1996. La pièce I-4 est le contrat d'achat par l'épouse de l'appelant de la propriété située rue Claudel à St-Léonard, en date du 10 mai 1996. La pièce I-5 montre que les paiements de l'emprunt hypothécaire se faisaient pour les deux propriétés.

Analyse et conclusion

[10]     En vertu des alinéas 6(1)e) et 6(1)k) et du paragraphe 6(2) de la Loi, un employé doit inclure dans son revenu la valeur des avantages découlant de l'utilisation d'une voiture fournie par l'employeur. Deux calculs doivent être faits : celui des frais pour droit d'usage (6(1)e) et 6(2)) et celui des frais de fonctionnement (6(1)k)).

[11]     L'appelant trouve que le montant imposé comme avantage est trop élevé étant donné la valeur résiduelle de la voiture en question. Cela se peut mais le calcul des frais raisonnables pour droit d'usage d'une automobile est fondé sur son coût en vertu de la définition de « C » de la formule exprimée au paragraphe 6(2) de la Loi. La valeur résiduelle n'est pas prise en compte.

[12]     La proposition de l'appelant voulant qu'il n'ait utilisé que pour 5% à des fins personnelles la voiture qu'il avait à son entier usage n'a été étayée par aucune preuve écrite. En contre-interrogatoire, il a admis avoir utilisé la voiture pour aller en Floride. Il n'y avait pas d'autre voiture à la disposition de la famille. L'appelant avait un bureau de conseiller financier dans un autre immeuble que sa maison privée. Il s'agit de circonstances où la seule affirmation de l'appelant ne peut être acceptée et où un registre des déplacements est essentiel.

[13]     L'appelant soutient que tout l'argent emprunté a été utilisé pour fins d'affaires ou pour avoir une marge de manoeuvre.

[14]     L'emprunt hypothécaire a été fait au même moment que les acquisitions immobilières données en garantie de l'emprunt. Le Ministre a conclu que la totalité de l'emprunt hypothécaire avait été faite pour l'acquisition de ces propriétés. Le vérificateur a accordé le montant complet pour l'acquisition de l'immeuble à logements et 98 000 $ pour la résidence.

[15]     Si l'usage de l'argent emprunté a été différent de celui fort logiquement proposé par le vérificateur, il appartenait à l'appelant de le démontrer. Il n'y a eu aucune preuve montrant un usage différent. Selon l'alinéa 20(1)c) de la Loi, sont déductibles les intérêts versés sur de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

[16]     En ce qui concerne les frais engagés pour remplacer le système de chauffage, l'avocat de l'intimée s'est référé à une décision de cette Cour, soit Bergeron c. M.R.N, [1989] A.C.I. no 923 (QL), et plus particulièrement au passage suivant :

Dans Vancouver Tug Boat Company Limited et Thompson Construction (Chemong) Limited (précité) [11 DTC 1127], la Cour de l'Échiquier du Canada a déterminé que le remplacement d'une machine de bateau ainsi que celui d'un moteur d'une pelle mécanique étaient des dépenses à titre de capital...L'arrêt de Haddon Hall Realty Inc. (précité) [16 DTC 1001] est une décision de la Cour suprême du Canada. Il s'agissait d'un immeuble à appartements sis à Montréal. Le contribuable avait engagé des dépenses pour remplacer les cuisinières, les réfrigérateurs et les stores. Ici encore, vu qu'il ne s'agissait pas de réparations mais de remplacement, la Cour a décidé qu'il s'agissait d'un débours à titre de capital.

Dans le cas de Canada Steamship Lines Ltd. (précité) [66 DTC 5205], la Cour de l'Échiquier du Canada a décidé que le remplacement des planchers et cloisons de la cale d'un cargo était la réparation de planchers et cloisons détériorés par l'usage et ne constituait pas l'acquisition d'un nouvel actif. Il n'en était pas de même pour le remplacement des chaudières. Au sujet des réparations, le juge Jackett apporte la nuance suivante à la page 5207 de son jugement:

I exclude, of course, a possible replacement by something so different in kind from the thing replaced that it constitutes a change in the character - an upgrading - of the thing upon which the money is expended instead of being a mere repair.

...

Dans Shabro Investments Limited [79 DTC 5104], le juge en chef de la Cour d'appel fédérale [Jackett] a décidé que le remplacement d'un plancher qui reposait sur le sol d'un édifice par un autre supporté par des poutres ou piliers d'acier enfoncés dans le sol « was a single operation whereby an improvement was made to the building that was essentially different in kind from a repair to the building as it originally was » . ...

[17]     Dans la présente affaire, le remplacement d'un système de chauffage central au gaz par des unités de chauffage électrique et des chauffe-eau pour chacun des logements est une modification intrinsèque du système de chauffage. Il ne s'agit pas d'un simple acte de réparation. C'est une dépense de nature capitale et non une dépense courante.

[18]     En conclusion, la cotisation du Ministre est correctement fondée en fait et en droit. L'appel doit être rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de janvier 2006.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


RÉFÉRENCE :                                   2006CCI9

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2005-2422(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               CALOGERO SCALIA ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 23 novembre 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                    le 5 janvier 2006

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Claude Lamoureux

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelant:

                   Nom :                             

                   Étude :

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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