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Dossier : 2004-3698(IT)G

ENTRE :

AMETHYST GREENHOUSES LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

 

Requête entendue le 5 octobre 2006 à Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

Devant : L’honorable juge G. Sheridan

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

M. Paul Houweling

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Ron D. F. Wilhelm

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

Vu la requête présentée par l’appelante visant à obtenir l’infirmation du jugement rendu par le juge Little le 22 août 2006;

 

Et vu les allégations des parties et le contenu des documents déposés;

 

          LA COUR ORDONNE, conformément aux motifs de l’ordonnance ci‑joints, que :

 

1.       la requête de l’appelante soit rejetée relativement aux années d’imposition 1999, 2000 et 2001;

 

2.       pour l’appel visant l’année d’imposition 2002, la requête soit accueillie et que le jugement rendu par le juge Little le 22 août 2006 soit modifié de sorte que l’appel soit accueilli, sans frais, pour ce qui est de ramener à 202 264 $ le montant du revenu d’entreprise non déclaré de l’appelante;

 

3.       chaque partie assume ses propres frais à l’égard de la présente requête.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour d’octobre 2006.

 

 

« G. Sheridan »

Juge Sheridan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de janvier 2008.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


 

 

Référence : 2006CCI575

Date : 20061026

Dossier : 2004-3698(IT)G

ENTRE :

AMETHYST GREENHOUSES LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

La juge Sheridan

 

[1]     L’appelante, la société Amethyst Greenhouses Ltd., sollicite l’infirmation du jugement rendu par le juge Little le 22 août 2006, dans lequel il a rejeté les appels qu’elle a interjetés à l’encontre de cotisations établies par le ministre du Revenu national (le « ministre ») pour les années d’imposition 1999, 2000, 2001 et 2002.

 

[2]     L’appelante a déposé son avis d’appel le 14 septembre 2004. L’intimée a déposé sa réponse le 20 octobre 2004. Quatorze mois plus tard, les parties ont été sommées de comparaître[1] et elles ont effectivement comparu devant un juge de la Cour le 14 décembre 2005 pour expliquer pourquoi les appels ne devaient pas être rejetés pour cause de retard. À la suite de l’audience, le juge Beaubier a rendu une ordonnance[2] par laquelle il a fixé les dates pour le dépôt et la signification des listes de documents ainsi que pour la fin des interrogatoires préalables et l’exécution des engagements. De plus, la Cour a enjoint à M. Houweling de déposer une requête en autorisation de représenter l’appelante.

 

[3]     Dans une ordonnance de la Cour datée du 25 janvier 2006, M. Houweling a été nommé représentant de l’appelante, et, avec le consentement des parties à l’instance, il a été fixé que les appels seraient instruits les 14 et 15 août 2006 à Vancouver, en Colombie‑Britannique. De temps à autre, entre janvier et août 2006, l’appelante et l’avocat de l’intimée ont communiqué l’un avec l’autre concernant la présente affaire et les appels de M. Houweling relatifs à son impôt sur le revenu.

 

[4]     À l’heure fixée pour la tenue de l’audience, le 14 août 2006, l’appelante n’a pas comparu. L’intimée a demandé le rejet des appels. Par une ordonnance rendue le 22 août 2006, le juge Little a rejeté les appels « au motif que l’appelante ne les a pas poursuivis ». Celle‑ci sollicite maintenant l’infirmation de cette ordonnance en application du paragraphe 140(2) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), lequel est ainsi rédigé :

 

140      (1) Si à l’audience, une partie omet de comparaître, la Cour peut accueillir l’appel, rejeter l’appel ou donner une directive appropriée.

 

(2) Pourvu que la demande soit faite dans les trente jours qui suivent le prononcé du jugement ou de l’ordonnance, la Cour peut infirmer ou modifier, aux conditions qui sont appropriées, un jugement ou une ordonnance obtenu contre une partie qui n’a pas comparu à l’audience, à l’audience sur l’état de l’instance ou à la conférence préparatoire à l’audience.

 

Analyse

 

[5]     L’appelante a déposé un document de quelque 411 pages, décrit comme un « affidavit », à l’appui de sa requête. Étant donné que l’appelante n’a pas été représentée par un avocat et que la forme irrégulière du document n’a pas été invoquée par l’intimée, j’ai déclaré celui‑ci recevable tel qu’il avait été déposé, même si une grande partie de son contenu est sans rapport direct avec la présente requête. Par précaution, j’ai fait prêter serment à M. Houweling, étant donné que ses observations à l’appui de la requête de l’appelante comprenaient, en général, à la fois des éléments de preuve et des arguments juridiques.

 

[6]     L’obstacle auquel doit faire face l’appelante dans le cadre de la présente requête est de démontrer que, dans ses appels, elle avait une cause défendable sur le fond et que les circonstances pour lesquelles elle n’a pas comparu justifient l’infirmation du jugement par défaut[3].

 

[7]     J’exposerai ci‑dessous les circonstances entourant le défaut de comparution de l’appelante. M. Houweling ne conteste pas qu’elle ait consenti aux dates de l’audience ou qu’elle ait reçu l’ordonnance rendue le 25 janvier 2006 fixant l’instruction des appels aux 14 et 15 août 2006. La raison de l’appelante pour ne pas avoir comparu à l’instruction était que M. Houweling l’avait tout simplement oubliée. Il a expliqué que, depuis plusieurs années, lui et l’appelante menaient une bataille juridique acharnée contre son frère, un ancien actionnaire de celle‑ci. Ce conflit a donné lieu à des procès devant divers tribunaux, y compris des comparutions de M. Houweling devant la Cour canadienne de l’impôt à titre personnel et en tant que représentant de l’appelante. En août 2006, il était accablé par les ravages, sur les plans personnel et financier, qui résultent typiquement de litiges prolongés (et généralement infructueux). Il a témoigné que sa famille et lui avaient été délogés de leur résidence et que certains des documents de l’appelante avaient été éparpillés – bien que je n’aie pas pu déterminer, à la lumière de ses observations, à quel moment exactement ces événements avaient eu lieu ou si les documents en question avaient quelque rapport que ce soit avec les appels dont l’instruction était prévue pour le 14 août. Il semblait aussi avoir l’impression que la présente requête et le défaut de comparution de l’appelante auraient pu être évités si seulement l’avocat de l’intimée ou les fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada avaient pris la peine de lui rappeler la date imminente de l’audience.

 

[8]     À commencer par le dernier point, je dois dire que l’intimée n’était nullement tenue de veiller à ce que M. Houweling comparaisse à l’audience à la date fixée pour l’instruction des appels interjetés par l’appelante. Cela dit, je dois reconnaître que l’avocat de l’intimée a plus que rempli ses obligations à titre de fonctionnaire judiciaire en aidant M. Houweling et en étant patient à son endroit tout au long des instances portant sur les présents appels et les appels qu’il a introduits à titre personnel. Quoi qu’il en soit, en tant que représentant de l’appelante, M. Houweling avait la responsabilité de faire tout le nécessaire pour poursuivre les appels dans les délais prescrits. Après avoir écouté pendant un certain temps la description donnée par M. Houweling des circonstances dans lesquelles il se trouvait en août 2006, je n’ai aucun doute que sa vie était grandement agitée. À ce moment‑là, cependant, une situation aussi malheureuse que celle‑là avait perdu son caractère exceptionnel. Il ne s’agissait plus du genre d’événement hors de l’ordinaire qui pourrait justifier un défaut de comparution à une audience. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’appelante a rempli la première condition du critère énoncé dans la décision Farrow.

 

[9]     Le second volet de ce critère est que la partie qui sollicite l’infirmation d’un jugement doit pouvoir démontrer que ses appels ne sont pas dénués de fondement. En l’espèce, l’appelante interjette appel des cotisations établies à son égard pour les années d’imposition 1999, 2000, 2001 et 2002. Aucune déclaration de revenus n’a été produite pour ces années. En 2004, le ministre a fixé le revenu non déclaré de l’appelante à 20 149 $ pour 1999, à 479 139 $ pour 2000, à 661 747 $ pour 2001 et à 762 830 $ pour 2002. Il a fondé ces cotisations sur les revenus indiqués dans les déclarations de TPS produites par l’appelante pour ces années‑là.

 

[10]    L’avis d’appel est rédigé dans le même style décousu et incohérent que l’« affidavit » déposé au nom de l’appelante dans la présente requête, de sorte qu’il s’avère difficile, si ce n’est impossible, de discerner le fondement sur lequel l’appelante conteste les cotisations du ministre. À l’instruction de la requête, j’ai invité M. Houweling à développer le contenu de l’avis d’appel de l’appelante. Il a admis que cette dernière n’avait pas produit de déclarations de revenus pour les années d’imposition en cause. Le point principal de son appel me semble être que les difficultés qu’il a eues avec son frère (et peut-être d’autres personnes) ont rendu impossible à l’appelante de fournir les renseignements exigés dans la déclaration et que ses convictions personnelles l’ont empêché de signer un document qui, incomplet selon lui, aurait été « faux ». De plus, l’appelante n’a pas tenu des livres de comptes et des registres adéquats. M. Houweling a aussi reproché aux fonctionnaires de l’ARC de ne pas l’avoir aidé à remplir ses formules de déclaration de revenus, déclarant croire qu’ils savaient très bien de quoi il avait besoin et qu’ils étaient parfaitement informés des difficultés qu’il avait avec son frère, des allégations de fraude et de complot, ainsi que de l’effet négatif de tout cela sur sa capacité à déclarer les revenus de l’appelante. Or, aucun de ces éléments ne peut servir de fondement raisonnable à un appel. Il incombe à l’appelante de prouver le caractère erroné des hypothèses du ministre. Faute de pièces justificatives et étant donné l’incapacité de M. Houweling – qu’il admet lui-même – à donner des renseignements détaillés sur les opérations de l’appelante, force m’est de conclure que l’avis d’appel n’expose pas de thèse défendable relativement aux appels portant sur les années 1999, 2000 et 2001.

 

[11]    L’appel visant l’année 2002, cependant, n’a pas le même fondement que les autres appels. Dans sa réponse à l’avis d’appel, l’intimée a demandé que l’appel soit accueilli relativement à l’année 2002 [traduction] « pour corriger l’erreur décelée au paragraphe 8 ci‑dessus » [4], qui est ainsi rédigé :

 

[traduction]

 

8.         En établissant une nouvelle cotisation à l’égard de l’appelante pour son année d’imposition 2002, le fonctionnaire du ministre a mal lu le montant du revenu d’entreprise qu’elle avait déclaré aux fins de la TPS relativement à cette année‑là. En fait, l’appelante a déclaré un revenu d’entreprise de 252 830 $ et, par l’application de la réduction supposée de 20 % pour des dépenses d’entreprise déductibles, il a été fixé qu’elle avait eu un revenu non déclaré de 202 264 $ en 2002.

 

[12]    À l’instruction de la présente requête, l’avocat de l’intimée a confirmé que celle‑ci était prête à consentir à la modification du jugement rendu sur l’appel visant l’année 2002 pour rectifier l’erreur de calcul commise dans la cotisation du ministre. Je suis convaincue que, dans l’intérêt de la justice, la décision du juge Little doit être modifiée pour que l’erreur en question soit corrigée.

 

[13]    Par conséquent, la requête de l’appelante est rejetée relativement aux années d’imposition 1999, 2000 et 2001. Pour l’appel visant l’année 2002, la requête est accueillie, et le jugement rendu par le juge Little le 22 août 2006 est modifié pour que l’appel soit accueilli, sans frais, pour ce qui est de ramener à 202 264 $ le montant du revenu d’entreprise non déclaré de l’appelante. Compte tenu du fait que les parties à la présente requête ont eu partiellement gain de cause, chacune devra assumer ses propres frais à l’égard de celle‑ci.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour d’octobre 2006.

 

 

« G. Sheridan »

Juge Sheridan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de janvier 2008.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


RÉFÉRENCE :                                  2006CCI575

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2004-3698(IT)G

 

INTITULÉ :                                       Amethyst Greenhouses Ltd. et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie‑Britannique)

                                                                      

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 5 octobre 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :     L’honorable juge G. Sheridan

 

DATE DE L’ORDONNANCE :          Le 26 octobre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

M. Paul Houweling

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Ron D. F. Wilhelm

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Par une ordonnance rendue le 14 novembre 2005.

 

[2] En date du 29 décembre 2005.

[3] Farrow c. Canada [2003] A.C.I. nº 713 (le juge en chef adjoint Bowman, maintenant juge en chef).

[4] Réponse à l’avis d’appel, au paragraphe 12.

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