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Dossier : 2005-3(EI)

ENTRE :

DANY AYOTTE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

GESTION IMMOBILIÈRE DUFOUR CINQ-MARS LTÉE.,

intervenante.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 28 juillet 2005 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable S.J. Savoie, Juge suppléant

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Jérôme Carrier

Avocate de l'intimé :

Me Julie David

Avocat de l'intervenante :

Me Jocelyn Vallerand

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JUGEMENT

          L'appel est rejeté et la décision rendue par le Ministre est confirmée selon les Motifs du jugement ci-joint.

Signé à Grand-Barachois (Nouveau-Brunswick), ce 4e jour d'octobre 2005.

« S.J. Savoie »

Juge suppléant Savoie


Référence : 2005CCI617

Date : 20051004

Dossier : 2005-3(EI)

ENTRE :

DANY AYOTTE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

GESTION IMMOBILIÈRE DUFOUR CINQ-MARS LTÉE.,

intervenante.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Savoie

[1]      Cet appel a été entendu à Québec (Québec) le 28 juillet 2005.

[2]      Il s'agit d'un appel portant sur l'assurabilité de l'emploi de l'appelant lorsqu'au service de Gestion Immobilière Dufour Cinq-Mars Ltée, le payeur, du 1er mai 2003 au 29 juin 2004, la période en litige. Le 2 décembre 2004, le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) a informé l'appelant de sa décision selon laquelle cet emploi n'était pas assurable.

[3]      En rendant sa décision, le Ministre s'est appuyé sur les faits présumés suivants :

a)          le payeur a été constitué en société le 11 juillet 1979; (admis)

b)          le payeur louait et gérait plus de 3000 logements; (admis)

c)          le payeur gérait notamment un complexe de 65 logements, répartis sur trois immeubles, dénommés Les Jardins du Roi et qui appartenait à Pâquerette Fortin; (admis)

d)          l'appelant a été embauché par le payeur comme concierge pour les immeubles Les Jardins du Roi; (admis)

e)          le 30 avril 2003, l'appelant et le payeur signaient un contrat à cet effet; (admis)

f)           les tâches de l'appelant consistaient à voir à l'entretien des aires communes, à l'enlèvement de la neige, à la tonte du gazon, à l'entretien de la piscine, aux petites réparations, à la visite des logements à louer et à collecter le paiement des loyers; (admis)

g)          l'appelant recevait un montant de 1 100,00 $ par mois comme concierge; (admis)

h)          l'appelant devait payer un loyer de 515 $ par mois pour son logement à l'intérieur des immeubles Les Jardins du Roi; (admis)

i)           l'appelant n'avait pas d'horaire de travail; (nié)

j)           l'appelant organisait l'exécution des tâches de concierge à sa guise; (nié)

k)          l'appelant recevait le montant de 1 100 $ peu importe le nombre d'heures réellement travaillées; (nié)

l)           l'appelant était payé, de plus, 10 $ de l'heure pour des travaux qui n'étaient pas inclus dans ses tâches de concierge; (nié)

m)         l'appelant était payé, de plus, 50 $ par bail pour un logement loué; (admis)

n)          dans sa déclaration de revenus pour l'année 2003, l'appelant se déclarait travailleur autonome et il déclarait des revenus d'entreprise; (admis)

o)          en 2003, l'appelant cotisait à la Régie des rentes du Québec à titre de travailleur autonome; (admis)

p)          dans l'exécution de ses tâches, l'appelant fournissait ses petits outils personnels; (admis)

q)          dans l'exécution des ses tâches, l'appelant confiait l'exécution de certains travaux à d'autres personnes; (nié)

r)           l'appelant choisissait lui-même les autres personnes à qui il confiait des travaux; (admis)

s)          l'appelant a déposé une plainte à la Commission des normes du travail (la Commission) contre le payeur pour des montants d'argent impayés; (admis)

t)           le 22 septembre 2004, la Commission fermait le dossier de l'appelant sans lui donner suite puisque l'appelant n'était pas un salarié. (admis)

[4]      L'appelant a prétendu à l'audition que l'entente conclue avec le payeur prévoyait un minimum de 25 heures de travail par semaine. Outre cette prétention, rien ne supporte cette conclusion. Le contrat signé par les parties n'en parle pas et le porte-parole du payeur, Maurice Bernatchez, l'a nettement contredit. Par ailleurs, l'affirmation de l'appelant à l'effet que ses services étaient requis 7 jours par semaine, 24 heures par jour, a aussi été contredite par M. Bernatchez.

[5]      Par contre, l'appelant a admis que le payeur acceptait sa méthode de travail.

[6]      La preuve a révélé que dans sa déclaration de revenu pour l'année 2003, l'appelant a qualifié son salaire de « revenu d'entreprise » . Cette déclaration a été produite sous la cote I-2. Quand on lui a demandé d'expliquer le T4A qu'il avait reçu du payeur pour l'année fiscale 2003, il a qualifié ce document de supercherie du payeur.

[7]      La preuve a révélé également que l'appelant était payé par chèque régulièrement sans aucune retenue à la source.

[8]      Par ailleurs, il a été révélé que certaines factures présentées au payeur par l'appelant réclament le remboursement de salaire payé à d'autres personnes. En guise d'explication, l'appelant n'a pu dire autre chose que cela n'était pas son écriture.

[9]      Le gestionnaire du payeur, M. Bernatchez, a affirmé que le 1 100,00 $ mensuel prévu comme rétribution à l'appelant représentait un montant forfaitaire, non pas un salaire pour un certain nombre d'heures. Certains, a-t-il dit, travaillent 40 heures par semaine, d'autres moins, d'autres davantage. Il a précisé que le payeur n'intervenait aucunement dans l'horaire des concierges. Ceux-ci, a-t-il dit, font le travail quand ils le veulent et de la manière dont ils le veulent.

[10]     Lors de l'audition, M. Bernatchez a affirmé qu'il était impossible pour le concierge d'être disponible 24 heures sur 24. Il a précisé que le service d'entretien des immeubles du payeur était assuré par le service d'urgence auquel s'était abonnée celui-ci. Il a ajouté que le payeur ne contrôlait aucunement la façon de travailler des concierges et que le genre de contrôle exercé par celui-ci n'était qu'un contrôle de résultat. Le concierge, a-t-il affirmé, fait son travail comme il le veut, quand il le veut. Dans son témoignage, monsieur Bernatchez a affirmé que l'appelant lui avait avoué qu'il confiait le travail de conciergerie à d'autres personnes puisqu'il n'avait pas le temps de le faire étant trop occupé à s'occuper de la location, travail pour lequel il était rémunéré 25,00 $ l'unité par le payeur. Dans son témoignage, monsieur Bernatchez a fait valoir que le concierge n'avait pas à être disponible en tout temps puisqu'il pouvait s'absenter, s'il le voulait, le service étant alors assuré par le système d'urgence, mis en place par le payeur. Par ailleurs, le payeur a fait la preuve que l'appelant n'était pas assujetti à un horaire fixe. Monsieur Bernatchez aurait informé l'appelant qu'il n'avait pas besoin d'être présent 24 heures sur 24, sept jours sur sept parce que c'était financièrement impossible.

[11]     Monsieur Bernatchez a ajouté dans son témoignage qu'il ne connaissait aucune situation où le concierge aurait été lié au payeur par un contrat de travail. Tous, a-t-il rapporté, travaillent comme entrepreneurs indépendants, tous sont des travailleurs autonomes, tous reçoivent des T4A et l'appelant ne faisait pas exception à cette règle. Aucun concierge n'est salarié, a-t-il dit. Monsieur Bernatchez a affirmé, en outre, que l'appelant n'avait pas à travailler exclusivement pour le payeur. Il n'était aucunement lié de cette façon. Il était libre de travailler pour d'autres employeurs. À titre d'exemple, il a rapporté que certains locataires voulant repeindre leur appartement recevaient la peinture requise du payeur et faisaient repeindre leur appartement par le concierge qu'ils se chargeaient de rémunérer.

[12]     Puisque les parties ont choisi de définir les termes de leur entente par écrit, il convient de reproduire ce document qui a été produit à l'audition sous la cote I-1 :

ENTENTE ENTRE

Les Jardins du Roi

Ici représentés par Gestion Immobilière Dufour Cinq Mars

ci-après nommé le propriétaire

ET

Dany Ayotte

ci-après nommé le concierge

Les parties conviennent de ce qui suit :

À compter du 1er juillet 2003, ou avant si le propriétaire en fait la demande, le concierge assumera les responsabilités de conciergerie des immeubles situés au : 101 à 125, 75e Rue Est et 7565 Loyola, Charlesbourg (QUÉBEC).

Aussitôt qu'un logement de 41/2 pièces sera disponible dans l'un de ces immeubles, le concierge y aménagera. Le prix de location qu'il devra assumer est de 515 $ par mois, incluant l'eau chaude, le tout étant précisé sur un bail à intervenir dont la durée minimale sera de 12 mois, lequel est accessoire à la présente entente. Dans l'éventualité où le logement qui se libérera serait situé au demi sous-sol de l'un des immeubles, le concierge aura priorité pour déménager dans le premier logement de 41/2 pièces qui deviendra ensuite disponible à un étage supérieur (rez-de-chaussée ou plus haut).

DESCRIPTION :

1.-         Le travail de conciergerie sera effectué moyennant une rétribution mensuelle de mille dollars (1 000 $). Aussitôt que la conjointe du concierge aménagera avec lui, la rétribution sera haussée de 100 $ par mois pour s'établir à 1 100 $.

2.-         Un appareil téléphonique cellulaire sera mis à la disposition du concierge. Si ce dernier dépasse le temps alloué de 400 minutes par mois, les coûts excédentaires lui seront facturés et seront déduits de sa rémunération.

3.-         La ligne téléphonique actuellement en fonction aux Jardins du Roi (622-3148) sera mise à la disposition du concierge aussitôt qu'il occupera un logement aux Jardins du Roi; l'option « transfert d'appels » sera ajoutée si elle n'y est pas déjà. Aucun appel interurbain ne doit être effectué sur cette ligne à moins d'autorisation préalable. Tout appel interurbain personnel ou non autorisé sera facturé au concierge et sera être déduit directement de sa rémunération.

4.-         Le coût de tous les travaux qui ne sont pas inclus dans les travaux de base de conciergerie sera défrayé à raison de dix dollars (10,00 $) l'heure. Ces travaux devront être pré-autorisés par le propriétaire et le temps d'exécution déclaré sera vérifié avant que le paiement en soit accepté et effectué.

5.-         Le concierge doit inscrire dans un registre le détail et le temps alloué pour tous les travaux non compris dans le travail de base de conciergerie.

6.-         La rémunération relative à la conciergerie (1 000 $ par mois) sera payée en 2 versements : 485 $ le 15e jour de chaque mois et 515 $ le 1er jour de chaque mois (ce dernier montant étant appliqué directement au paiement du loyer). Lorsque la rémunération mensuelle sera fixée à 1 100 $ par mois, les chèques datés du 15 seront augmentés de 100 $ chacun pour s'établir à 585 $.

En ce qui a trait aux heures travaillées à tarif horaire, le concierge devra produire un état détaillé des travaux effectués et autorisés, au plus tard le lundi matin précédant le jeudi où la paye est versée. Les chèques de paye étant préparés le mardi avant-midi, tout retard à produire les états détaillés engendrera un retard d'au moins une semaine dans le versement de la rémunération. Ici aussi les paiements s'effectueront aux deux semaines. À titre d'information, les chèques sont émis aux dates suivantes : POUR MAI 2003, le 1er, le 15 et le 29; POUR JUIN 2003, le 12 et le 26; et ainsi de suite. Les factures devront donc être produites AU MOINS 3 JOURS AVANT CES DATES.

Le propriétaire pourra, sans préavis, mettre fin au présent contrat en tout temps.

Le concierge pourra également mettre fin au présent contrat avec préavis écrit de quatre-vingt-dix (90) jours.

Équipement : le concierge devra fournir son propre outillage, sauf en ce qui concerne l'équipement pour l'entretien des aires communes, le déneigement et l'entretien du gazon.

LA CONCIERGERIE DE BASE CONSISTE EN :

1.-         Louer les logements aux conditions déterminées par le propriétaire, recevoir les appels, faire visiter les logements, remplir les formulaires d'application et remplir les baux en prenant soin de NE RIEN SIGNER au nom du propriétaire, et de remettre le tout au gestionnaire sans délai.

2.-         Distribuer les avis de renouvellement et faire signer l'accusé réception aux locataires concernés.

3.-         Ne jamais remettre les clefs d'un logement à un nouveau locataire ou à quelque fournisseur que ce soit sans l'autorisation du propriétaire. De plus, à moins qu'il ne s'agisse d'une urgence, ne pas se présenter dans un logement sans en avoir préalablement obtenu l'autorisation du locataire.

4.-         Voir à la surveillance générale des immeubles sous contrat, y incluant notamment le chauffage, l'électricité et la ventilation. S'il y a défectuosité, il devra réparer ou rapporter le trouble immédiatement; en cas d'urgence, il fera le nécessaire pour que cette défectuosité soit corrigée le plus tôt possible.

5.-         Travaux à effectuer

a)          Une fois par semaine, et au besoin : passer l'aspirateur dans les espaces communs; lorsque nécessaire : laver les planchers des aires communes, etc.

b)          effectuer le ménage des salles de lavage, des salles électriques et des salles d'entreposage;

c)          enlever les taches sur les murs et sur les rampes d'escaliers lorsque cela s'avère nécessaire;

d)          une fois par année, balayer le stationnement, racler le gazon et laver les grandes vitres sur la façade des immeubles;

e)          remplacer les ampoules, les fluorescents et les fusibles lorsque cela s'avère nécessaire;

f)           tondre le gazon et ramasser l'herbe coupée, s'il y a lieu;

g)          enlever les détritus qui se trouvent sur la propriété à l'extérieur comme à l'intérieur;

h)          balayer, enlever la neige, déglacer les entrées et enlever les glaçons sur le contour des toitures s'il y a lieu; faire de même pour les sorties communes et de secours;

i)           aviser les locataires pour qu'ils déplacent leur auto lors du déneigement;

j)           ouverture de la piscine au printemps, entretien durant la saison d'exploitation et fermeture à l'automne; surveillance de la piscine durant six (6) fins de semaine par année, en établissant avec le « life guard » régulier, les fins de semaine qui seront dévolues à chacun;

6.-       Effectuer divers petits travaux d'entretien et de réparations dont entre autres, et sans que ce soit limitatif : ajustement de serrures, de flottes de toilettes, d'un ou deux panneaux d'armoires, etc.). Le changement de pièces s'effectuera à tarif horaire ou à contrat s'il y a lieu.

7.-       Voir au maintien de l'ordre et de la paix dans les immeubles sous sa surveillance.

8.-       Tenir à jo8ur une liste de ses locataires, y incluant la date du début et de la fin du bail.

9.-       Effectuer promptement la perception des loyers. Le concierge devra obligatoirement apporter les sommes perçues au 1535, chemin Sainte-Foy, bureau 200, au plus tard le 2e jour du mois courant afin d'éviter des délais dans le paiement de certaines obligations du propriétaire. De plus, le concierge demeurera responsable des argents collectés tant et aussi longtemps que ces sommes ne seront pas remises au bureau de Gestion Dufour Cinq-Mars. Si le propriétaire doit envoyer quelqu'un chercher et/ou percevoir les argents de loyer à la place du concierge, ce dernier pourra être tenu d'assumer les coûts reliés à cette perception.

10.-     Surveiller les services de vidanges et de déneigement et rapporter au gérant tout manque de service qui est de nature à incommoder les locataires.

11.-     Garder un double des clefs de tous les logements et faire le nécessaire pour les obtenir, s'il y a lieu. Ces clefs devront être gardées dans un endroit sécuritaire.

12.-     Voir aux changements de serrures exigés par les locataires avec l'accord du propriétaire.

13.-     Voir à ce que les noms des locataires apparaissent sur leur boîte aux lettres.

14.-     Signaler tout locataire qui garde sans droit des animaux nuisibles au bien-être général des locataires.

15.-     Faire le ménage de base des logements qui deviennent vacants s'il y a lieu, de même que nettoyer les appareils électriques, dans les plus brefs délais.

16.-     Les 2 parties conviennent que le nombre d'heures travaillées pour la rémunération ci haut indiquée doit respecter toutes les clauses prescrites par la Loi sur les normes du travail. Tout temps excédentaire doit être autorisé expressément par le propriétaire.

17.       Le concierge ne doit se livrer à aucune forme de discrimination dans l'exercice de ses fonctions. Il doit également éviter toute intervention qui serait de nature à contrevenir à la charte des Droits et Libertés et à la Loi régissant la vie privée. Il convient de se conduire en conséquence.

TOUTES LES TÂCHES DOIVENT ÊTRE EFFECTUÉES AU BESOIN DE FAÇON À CE QUE LES LIEUX SOIENT IMPECCABLES

En ce qui concerne l'occupation du logement par le concierge il est convenu de ce qui suit :

·      si la fin du contrat fait suite à l'envoi au propriétaire de l'avis de 90 jours par le concierge, le logement devra se libérer à l'expiration de ce délai.

·      si la fin du présent contrat n'est pas due à de la fraude ou à un mauvais comportement de la part du concierge, une entente pourra intervenir entre les parties afin qu'un délai additionnel maximum de soixante (60) jours lui soit accordé pour qu'il puisse se reloger ailleurs.

·      dans tous les autres cas, les lieux devront être libérés sur le champ.

ET LES PARTIES ONT SIGNÉ À QUEBEC CE ___________30 avril 2003

_________________________________

DANY AYOTTE, concierge

                                                            ____________________________________

                                                            LES JARDINS DU ROI, propriétaire

                                                            par André Lavoie

ANNEXE À L'ENTENTE DE CONCIERGERIE

INTERVENUE

ENTRE

Les Jardins du Roi

et

Dany Ayotte

Nonobstant l'entente intervenue le 30 avril 2003, et suite à la mise à pied des concierges précédents le 12 mai 2003, les parties conviennent de ce qui suit (après discussion avec la propriétaire) :

·         pour le mois de mai 2003 uniquement, bien que Monsieur Ayotte n'ait débuté son emploi que le douzième jour du mois, il obtiendra pleine et entière rémunération, soit 1 000 $;

·         en contrepartie, il effectuera le rattrapage des travaux de conciergerie que les concierges précédents n'ont pas effectué (ménage de tous les passages et escaliers, lavage des rampes et enlèvement des taches, classement de l'équipement et de l'outillage, enlèvement des meubles et appareils ménagers actuellement dans les corridors et dans les locaux des réservoirs à eau chaude, etc.).

·         en somme, il mettra les immeubles dans l'état où ils auraient dû être si les concierges précédents avaient effectué leur travail de façon constante et consciencieuse durant les dernières semaines de leur emploi.

Cette rémunération sera versée sous la forme suivante :

·         500 $ le 22 mai 2003

·         500 $ le 31 mai 2003

Par la suite, la rémunération sera versée selon les modalités prévues au contrat initial, à savoir :

·         485 $ le 15e jour de chaque mois (le 1er versement étant daté du 15 juin 2003)

·         515 $ le 1er jour de chaque mois (le 1er versement étant daté du 1er juillet 2003, et applicable directement au paiement du loyer de juillet 2003).

Ces deux versements représenteront le paiement des frais de conciergerie pour le mois de juin 2003. Et ainsi de suite.

À moins d'impondérables, le bail de Monsieur Ayotte devrait débuter le 1er juillet 2003 si le concierge précédent a libéré son logement pour cette date.

Les parties ont signé et accepté le présent document ce quinzième jour de mai 2003.

________________________________

DANY AYOTTE, concierge

                                                                        ____________________________

                                                                        ANDRÉ LAVOIE

                                                                        pour Les Jardins du Roi

[13]     La question en litige est de savoir si l'appelant occupait un emploi assurable aux fins de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ). La disposition pertinente est l'alinéa 5(1)a) de la Loi, qui énonce ce qui suit :

Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

a) l'emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

[Je souligne]

[14]     L'article précité contient la définition du contrat assurable. C'est celui que l'on occupe en vertu d'un contrat de louage de services, c'est-à-dire, un contrat de travail. Cependant, la Loi ne définit pas ce qui constitue un tel contrat. Dans l'affaire qui nous préoccupe, il existe un contrat écrit. Il a été reproduit ci-haut. L'intention des parties est exprimée dans ce contrat.

[15]     Le contrat de louage de services est une notion de droit civil que l'on trouve dans le Code civil du Québec. C'est donc en vertu des dispositions pertinentes du Code civil qu'il faudra déterminer la nature de ce contrat.

[16]     Dans une publication intitulée « contrat de travail » : « Pourquoi Wiebe Door Services Ltd. ne s'applique pas au Québec et par quoi on doit le remplacer? » , devant être publié au cours du quatrième trimestre de 2005 par l'Association de planification fiscale et financière (APFF) et le ministère fédéral de la Justice dans le Second recueil d'études en fiscalité de la collection l'Harmonisation de la législation fédérale avec le droit civil québécois et le bijuridisme canadien, le juge Pierre Archambault de cette Cour décrit, à l'égard de toute période d'emploi postérieure au 30 mai 2001, la démarche que doivent faire les tribunaux, depuis l'entrée en vigueur le 1er juin 2001 de l'article 8.1 de la Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), Ch. 1-21, modifié, lorsque confrontés à un litige comme celui sous étude. Voici ce que le législateur a édicté dans cet article :

Propriété et droits civils

8.1 Le droit civil et la common law font pareillement autorité et sont tous deux sources de droit en matière de propriété et de droits civils au Canada et, s'il est nécessaire de recourir à des règles, principes ou notions appartenant au domaine de la propriété et des droits civils en vue d'assurer l'application d'un texte dans une province, il faut, sauf règle de droit s'y opposant, avoir recours aux règles, principes et notions en vigueur dans cette province au moment de l'application du texte.

[Je souligne.]

[17]     Il convient de reproduire les dispositions pertinentes du Code civil qui serviront à déterminer l'existence d'un contrat de travail au Québec pour le distinguer du contrat d'entreprise :

Contrat de travail

2085     Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne, l'employeur.

2086     Le contrat de travail est à durée déterminée ou indéterminée.

Contrat d'entreprise ou de service

2098     Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.

2099     L'entrepreneur ou le prestataire de services a le libre choix des moyens d'exécution du contrat et il n'existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution.

[Je souligne.]

[18]     Les dispositions du Code civil reproduites ci-dessus établissent trois conditions essentielles à l'existence d'un contrat de travail :

          1)        la prestation sous forme de travail fournie par le salarié; 2) la rémunération de ce travail par l'employeur; et 3) le lien de subordination. Ce qui distingue de façon significative un contrat de service d'un contrat de travail, c'est l'existence du lien de subordination, c'est-à-dire le fait pour l'employeur d'avoir un pouvoir de direction ou de contrôle sur le travailleur.

[19]     Les auteurs de doctrine se sont penchés sur la notion de « pouvoir de direction ou de contrôle » et sur son revers, le lien de subordination. Voici ce que l'auteur Robert P. Gagnon écrivait dans « Le droit du travail du Québec, 5e ed. » Les Éditions Yvon Blais Inc., 2003 Cowansville (QC) :

c) La subordination

90 - Facteur distinctif - L'élément de qualification du contrat de travail le plus significatif est celui de la subordination du salarié à la personne pour laquelle il travaille. C'est cet élément qui permet de distinguer le contrat de travail d'autres contrats à titre onéreux qui impliquent également une prestation de travail au bénéfice d'une autre personne, moyennant un prix, comme le contrat d'entreprise ou de service régi par les articles 2098 et suivants C.c.Q. Ainsi, alors que l'entrepreneur ou le prestataire de services conserve, selon l'article 2099 C.c.Q., « le libre choix des moyens d'exécution du contrat » et qu'il n'existe entre lui et son client « aucun lien de subordination quant à son exécution » , il est caractéristique du contrat de travail, sous réserve de ses termes, que le salarié exécute personnellement le travail convenu sous la direction de l'employeur et dans le cadre établi par ce dernier.

[...]

92 - Notion - Historiquement, le droit civil a d'abord élaboré une notion de subordination juridique dite stricte ou classique qui a servi de critère d'application du principe de la responsabilité civile du commettant pour le dommage causé par son préposé dans l'exécution de ses fonctions (art. 1054 C.c.B.-C.; art. 1463 C.c.Q.). Cette subordination juridique classique était caractérisée par le contrôle immédiat exercé par l'employeur sur l'exécution du travail de l'employé quant à sa nature et à ses modalités. Elle s'est progressivement assouplie pour donner naissance à la notion de subordination juridique au sens large. La diversification et la spécialisation des occupations et des techniques de travail ont, en effet, rendu souvent irréaliste que l'employeur soit en mesure de dicter ou même de surveiller de façon immédiate l'exécution du travail. On en est ainsi venu à assimiler la subordination à la faculté, laissée à celui qu'on reconnaîtra alors comme l'employeur, de déterminer le travail à exécuter, d'encadrer cette exécution et de la contrôler. En renversant la perspective, le salarié sera celui qui accepte de s'intégrer dans le cadre de fonctionnement d'une entreprise pour la faire bénéficier de son travail. En pratique, on recherchera la présence d'un certain nombre d'indices d'encadrement, d'ailleurs susceptibles de varier selon les contextes : présence obligatoire à un lieu de travail, assignation plus ou moins régulière du travail, imposition de règles de conduite ou de comportement, exigence de rapports d'activité, contrôle de la quantité ou de la qualité de la prestation, etc. Le travail à domicile n'exclut pas une telle intégration à l'entreprise. (Le souligné est de moi)

[20]     Il faut préciser que ce qui caractérise le contrat de travail, ce n'est pas le fait que la direction ou le contrôle a été exercé effectivement par l'employeur, mais le fait qu'il avait le pouvoir de l'exercer. Dans Gallant c. M.R.N., [1986] A.C.F. No 330 (Q.L.), le juge Pratte de la Cour d'appel fédérale affirme :

... Ce qui est la marque du louage de services, ce n'est pas le contrôle que l'employeur exerce effectivement sur son employé, c'est plutôt le pouvoir que possède l'employeur de contrôler la façon dont l'employé exécute ses fonctions. ...

[21]     Il incombe à cette Cour, qui est chargée de déterminer le type de contrat au Québec auquel sont liées les parties, de considérer et de suivre l'approche préconisée par le juge Archambault de cette Cour, dans la publication précitée, et dont il a repris le thème dans l'arrêt Vaillancourt c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [2004] A.C.I. no 685 où il écrivait ce qui suit :

15         À mon avis, les règles régissant le contrat de travail en droit québécois ne sont pas identiques à celles de la common law et, par conséquent, il n'est pas approprié d'appliquer des décisions de common law comme les arrêts Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553 (C.A.F.) et 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, 2001 CSC 59 [Pour un exposé approfondi des motifs justifiant cette conclusion, voir l'article sur Wiebe Door, précité.]. Au Québec, un tribunal n'a pas d'autre choix que de conclure à l'existence ou à l'absence du lien de subordination pour décider si un contrat constitue un contrat de travail ou un contrat de service.

16         L'approche qu'il faut suivre est celle adoptée notamment par le juge Létourneau de la Cour d'appel fédérale [Voir également Sauvé c. Canada, [1995] A.C.F. no 1378 (Q.L.), Lagacé c. Canada, [1994] A.C.F. no 885 (Q.L.) (C.A.F.), confirmant une décision de la Cour canadienne de l'impôt, [1991] T.C.J. No. 945 (Q.L.) et Charbonneau c. Canada, [1996] A.C.F. no 1337 (Q.L.). Il faut toutefois mentionner que la Cour d'appel fédérale dans D & J Driveway et Charbonneau n'a pas écarté explicitement l'application de Wiebe Door.], qui, dans l'affaire D & J Driveway Inc. c. Canada, (2003), 322 N.R. 381, 2003 CAF 453, a conclu à l'absence d'un contrat de travail en se fondant sur les dispositions du Code civil et, en particulier, en constatant l'absence d'un lien de subordination, lien qui constitue « la caractéristique essentielle du contrat de travail » [Par. 16 de la décision.]

[22]     En l'espèce, existerait-il un lien de subordination entre l'appelant et le payeur nous permettant de conclure à la présence d'un contrat de travail? Dans l'exercice de ce mandat confié à cette Cour, j'ai trouvé utile le raisonnement du juge Dussault, de cette Cour, dont voici un extrait puisé de l'arrêt Lévesque c. Canada (ministre du Revenu national - M.RN.), [2005] A.C.I. no 183 :

24         Par ailleurs, dans l'affaire D & J Driveway Inc. c. Canada, C.A.F., no A-512-02, 27 novembre 2003, 322 N.R. 381, [2003] A.C.F. no 1784 (Q.L.), le juge Létourneau de la Cour d'appel fédérale affirmait que ce n'est pas parce qu'un donneur d'ouvrage peut contrôler le résultat du travail qu'il existe nécessairement une relation employé-employeur. Voici comment il s'exprimait à cet égard au paragraphe 9 du jugement :

9     Un contrat de travail requiert l'existence d'un lien de subordination entre le payeur et les salariés. La notion de contrôle est le critère déterminant qui sert à mesurer la présence ou l'étendue de ce lien. Mais comme le disait notre collègue le juge Décary dans l'affaire Charbonneau c. Canada (ministre du Revenu national - M.RN.), (1996), A.C.F. no 1337, [1996] 207 N.R. 299, suivie dans l'arrêt Jaillet c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), 2002 CAF 394, il ne faut pas confondre le contrôle du résultat et le contrôle du travailleur. Au paragraphe 10 de la décision, il écrit :

Rares sont les donneurs d'ouvrage qui ne s'assurent pas que le travail est exécuté en conformité avec leurs exigences et aux lieux convenus. Le contrôle du résultat ne doit pas être confondu avec le contrôle du travailleur.

25         En l'espèce, existait-il un lien de subordination entre madame St-Jules et monsieur Lévesque nous permettant de conclure à la présence d'un contrat de travail? Plusieurs indices peuvent être pris en considération afin de détecter la présence ou l'absence d'un lien de subordination. Dans sa décision dans l'affaire Seitz c. Entraide populaire de Lanaudière inc., Cour du Québec (chambre civile), no 705-22-002935-003, 16 novembre 2001, [2001] J.Q. no 7635 (Q.L.), la juge Monique Fradette de la Cour du Québec a fourni une série d'indices pouvant permettre de déterminer s'il y a subordination ou non. Voici comment elle s'exprimait sur ce point aux paragraphes 60 à 62 du jugement :

60 La jurisprudence exige, pour qu'il y ait un contrat de travail, l'existence d'un droit de surveillance et de direction immédiate. Le simple fait qu'une personne donne des instructions générales sur la manière d'effectuer le travail, ou qu'elle se réserve un droit d'inspection et de supervision sur le travail, ne suffit pas à convertir l'entente en un contrat de travail.

61 Une série d'indices développée par la jurisprudence permet au tribunal de déterminer s'il y a présence ou non d'un lien de subordination dans la relation des parties.

62         Les indices d'encadrement sont notamment :

            -            la présence obligatoire à un lieu de travail

            -            le respect de l'horaire de travail

            -            le contrôle des absences du salarié pour des vacances

            -            la remise de rapports d'activité

            -            le contrôle de la quantité et de la qualité du travail

            -            l'imposition des moyens d'exécution du travail

            -            le pouvoir de sanction sur les performances de l'employé

            -            les retenues à la source

            -            les avantages sociaux

            -            le statut du salarié dans ses déclarations de revenus

            -            l'exclusivité des services pour l'employeur

[23]     Il faut signaler que dans les faits présentés à la Cour lors de l'audition, on ne peut trouver aucun des indices d'encadrement énumérés ci-haut, ce qui nous amène à conclure que la preuve, au contraire, supporte la notion que nous sommes en présence d'un contrat d'entreprise.

[24]     Il faut rappeler, en terminant, que l'appelant avait le fardeau de prouver la fausseté des présomptions de fait du Ministre. Il ne l'a pas fait.

[25]     Au contraire, la preuve testimoniale et documentaire produite à l'audition supporte la notion que l'appelant oeuvrait pour le payeur comme travailleur autonome, dans un contrat d'entreprise.

[26]     Donc l'appelant, pour la période en litige, n'occupait pas un emploi assurable selon la définition énoncée à l'alinéa 5(1)a) de la Loi, ni tel que défini par les dispositions du Code civil, précitées.

[27]     En conséquence, l'appel est rejeté et la décision rendue par le Ministre est confirmée.

Signé à Grand-Barachois, Nouveau-Brunswick, ce 4e jour d'octobre 2005.

« S.J. Savoie »

Juge suppléant Savoie


RÉFÉRENCE :                                   2005CCI617

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2005-3(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :               DANY AYOTTE ET M.R.N. ET GESTION IMMOBILIÈRE DUFOUR CINQ-MARS LTÉE.

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 28 juillet 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable S.J. Savoie, Juge suppléant

DATE DU JUGEMENT :                    le 3 octobre 2005

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelant :

Me Jérôme Carrier

Avocate de l'intimé :

Me Julie David

Avocat de l'intervenante :

Me Jocelyn Vallerand

AVOCATE INSCRITE AU DOSSIER :

       Pour l'appelant :

                   Nom :                              Me Jérôme Carrier

                   Étude :                             Me Jérôme Carrier

                                                          Lévis (Québec)

       Pour l'intervenante :

                   Nom :                              Me Jocelyn Vallerand

                   Étude :                             Gingras Vallerand Barma Laroche Amyot

                                                          Québec (Québec)

       Pour l'intimé :                              John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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