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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Dossier : 2001-887(IT)G

ENTRE :

MARY MADSEN,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu à Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 avril 2003.

Devant : L'honorable juge L. M. Little

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me Timothy Clarke

Avocat de l'intimée :

Me Eric Douglas

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ORDONNANCE

          Vu la requête de l'appelante conformément à l'article 69 et à l'alinéa 168b) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) pour que les termes du prononcé du jugement rendu par la Cour le 29 juillet 2004 soient examinés de nouveau;

          Et vu les arguments écrits des parties;

          La Cour ordonne que le jugement du 29 juillet 2004 soit maintenu conformément aux motifs de l'ordonnance et aux motifs supplémentaires du jugement ci-joints.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 25e jour de février 2005.

« L. M. Little »

Juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour de décembre 2005.

Yves Bellefeuille, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Référence : 2005CCI110

Date : 20050225

Dossier : 2001-887(IT)G

ENTRE :

MARY MADSEN,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

MOTIFS SUPPLÉMENTAIRES DU JUGEMENT

Le juge Little

A.       LES FAITS

[1]      L'appel a été entendu à Vancouver (Colombie-Britannique) le 14 avril 2003.

[2]      L'appel soulevait deux questions :

a)        L'appelante est-elle responsable du paiement de la somme de 102 500 $ que lui demande le ministre du Revenu national (le « ministre » ) en application de l'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » )?

b)       La décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l'affaire La Reine c. Markevich et al.[1] s'applique-t-elle? Si le raisonnement qui a été fait dans l'arrêt Markevich s'applique en l'espèce, le fisc fédéral ne peut pas recouvrer la dette fiscale fédérale et la dette fiscale provinciale, et ce, à cause de la loi sur la prescription.

[3]      Par des motifs de jugement en date du 29 juillet 2004, j'ai conclu que la décision rendue dans l'affaire Markevich ne s'applique pas en l'espèce.

[4]      L'avocat de l'appelante a déposé un avis de requête daté du 13 août 2004. Dans cet avis, l'avocat me demandait d'examiner de nouveau les termes des motifs de jugement que j'avais prononcés.

[5]      Dans l'avis de requête, l'avocat de l'appelante a dit ce qui suit :

[traduction]

6.          L'appelante demande donc au juge Little d'examiner de nouveau les termes du prononcé de son jugement et de ses motifs et de traiter expressément de la question principale parce que cette question a été accidentellement omise ou qu'il n'en a pas été tenu compte dans le prononcé.

[6]      L'article 168 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) est libellé comme suit :

168. Lorsque la Cour a prononcé un jugement disposant d'un appel, toute partie peut, dans les dix jours de la date à laquelle elle a pris connaissance du prononcé du jugement, demander, par voie de requête, un nouvel examen des termes du prononcé du jugement, mais seulement pour l'une ou l'autre des raisons suivantes :

a) le prononcé n'est pas en accord avec les motifs, le cas échéant;

b) on a négligé ou accidentellement omis de traiter dans le jugement d'une question dont on aurait dû traiter.

[7]      J'ai minutieusement examiné le dossier et les motifs de jugement et j'ai conclu que l'avocat de l'appelante a raison en déclarant, dans l'avis de requête, que je n'ai pas traité de la question principale. Dans ces motifs supplémentaires de jugement, j'examine les faits pertinents et je traite de la question principale.

[8]      Les faits peuvent être résumés comme suit :

A.       LES FAITS

[9]      Gunnar Madsen (l' « auteur du transfert » ) est l'époux de l'appelante.

[10]     Vers le 1er août 1989, l'auteur du transfert a transféré à l'appelante sa part de moitié dans une résidence située au 3065, rue Lazy A, à Port Coquitlam, en Colombie-Britannique (le « bien » ).

[11]     Au moment du transfert du bien à l'appelante le 1er août 1989, l'auteur du transfert devait des impôts sur le revenu de plus de 685 000 $. Ces impôts visaient les années d'imposition 1982 et 1983. L'auteur du transfert a contesté les avis de cotisation. Aucun des appels qu'il a interjetés à la Cour canadienne de l'impôt[2], à la Cour d'appel fédérale[3] et à la Cour suprême du Canada[4] n'ont été accueillis.

[12]     Au moment du transfert du bien en faveur de l'appelante, la juste valeur marchande de celui-ci, telle qu'elle a été établie par le ministre, était de 205 000 $ et la juste valeur marchande de la part de l'auteur du transfert dans le bien s'élevait à 102 500 $. (Remarque : L'avocat de l'appelante a signalé au début de l'audience que la juste valeur marchande du bien au 1er août 1989, telle qu'elle a été établie par le ministre, n'était pas en litige.)

[13]     À l'audience, l'appelante a témoigné que lorsque son mari lui avait transféré le droit qu'il possédait sur la résidence de la rue Lazy A, elle avait promis de lui verser un montant correspondant à la juste valeur marchande du bien lorsqu'elle aurait suffisamment d'argent pour le faire.

[14]     L'appelante a déclaré avoir personnellement préparé, avec l'aide d'une amie (Mme Vierke), le document qui a servi au transfert du droit afférent à la moitié du bien (elle n'a pas eu recours à un avocat).

[15]     La valeur du bien, telle qu'elle a été établie par l'appelante au moment du transfert, était de 135 500 $.

[16]     Selon le document de transfert, la contrepartie payée par l'appelante était d'un dollar.

[17]     Le 21 juin 1994, l'appelante a acheté un terrain en Arizona en utilisant son propre argent. L'appelante a témoigné avoir fait enregistrer le titre y afférent comme suit :

                   L'appelante                      -                   50 p. 100

                   M. Madsen                      -                   50 p. 100

[18]     Selon l'avocat de l'appelante, le droit afférent à la moitié du terrain en Arizona, que l'appelante a transféré à M. Madsen en 1994, représentait au moins 142 000 $ canadiens.

[19]     Le 3 mai 1999, le ministre a établi à l'égard de l'appelante une cotisation d'un montant de 102 500 $ au titre de l'impôt. Selon l'avis de cotisation (la « cotisation » ), la cotisation se rapporte à :

[TRADUCTION]

une obligation, en application du paragraphe 160(1) de la Loi, d'un montant de 102 500 $ à l'égard d'un terrain situé au 3065, rue Lazy A, à Port Coquitlam (Colombie-Britannique), que Gunnar Madsen a transféré à Mary Madsen le 1er août 1989 ou vers cette date.

B.       POINT LITIGIEUX

[20]     Il s'agit de savoir si l'appelante est responsable du paiement de la somme de 102 500 $ que lui demande le ministre en application de l'article 160 au moyen d'une cotisation établie le 3 mai 1999.

C.       ANALYSE

[21]     L'article 160 de la Loi permet au ministre de recouvrer une dette fiscale auprès de quelqu'un d'autre que le débiteur fiscal, dans la mesure où les diverses conditions prévues par cette disposition sont remplies.

[22]     Le paragraphe 160(1) de la Loi est rédigé comme suit :

160.(1) Lorsqu'une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d'une fiducie ou de toute autre façon à l'une des personnes suivantes :

a) son conjoint ou une personne devenue depuis son conjoint;

b) une personne qui était âgée de moins de 18 ans;

c) une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

les règles suivantes s'appliquent :

d) le bénéficiaire et l'auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement d'une partie de l'impôt de l'auteur du transfert en vertu de la présente partie pour chaque année d'imposition égale à l'excédent de l'impôt pour l'année sur ce que cet impôt aurait été sans l'application des articles 74.1 à 75.1 de la présente loi et de l'article 74 de la Loi de l'impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts revisés du Canada de 1952, à l'égard de tout revenu tiré des biens ainsi transférés ou des biens y substitués ou à l'égard de tout gain tiré de la disposition de tels biens;

e) le bénéficiaire et l'auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d'un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(i) l'excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

(ii) le total des montants dont chacun représente un montant que l'auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi au cours de l'année d'imposition dans laquelle les biens ont été transférés ou d'une année d'imposition antérieure ou pour une de ces années;

[...]

[23]     Le paragraphe 160(2) est rédigé comme suit :

160.(2) Le ministre peut, en tout temps, établir une cotisation à l'égard d'un contribuable pour toute somme payable en vertu du présent article. Par ailleurs, les dispositions de la présente section s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux cotisations établies en vertu du présent article comme si elles avaient été établies en vertu de l'article 152.

[...]

[24]     L'avocat de l'appelante a dit que, selon la prétention de sa cliente, le transfert, par l'époux à l'appelante, du droit sur la moitié de la résidence de la rue Lazy A devait correspondre à la juste valeur marchande du bien. L'avocat de l'appelante a affirmé que l'appelante avait l'intention de remettre à son mari la valeur de son intérêt dans le bien en 1989. Toutefois, l'appelante a affirmé ne pas avoir suffisamment d'argent pour payer son mari en 1989. L'appelante a affirmé que son mari et elle avaient convenu que lorsqu'elle aurait suffisamment d'argent, elle paierait son mari.

[25]     L'avocat de l'appelante a affirmé qu'en 1991, une société appelée GMT Holdings Ltd. a été constituée et que la société a prospéré.

[26]     Comme il en a ci-dessus été fait mention, l'appelante a témoigné qu'en 1994, son mari et elle avaient conjointement acheté un terrain en Arizona. En fait, l'appelante a utilisé son propre argent pour acheter le droit afférent au terrain en Arizona pour son mari.

[27]     L'avocat de l'appelante maintient qu'en achetant ainsi le droit afférent au terrain en Arizona pour son mari en 1994, l'appelante avait payé son mari au complet pour le droit afférent à la résidence de la rue Lazy A qu'il lui avait transféré en 1989.

[28]     J'ai minutieusement examiné la preuve que l'appelante a présentée au sujet du transfert du droit que son mari possédait sur la moitié de la résidence de la rue Lazy A en 1989 et j'ai conclu que l'idée selon laquelle l'appelante devait verser à son mari un montant correspondant à la juste valeur marchande de la résidence de la rue Lazy A « lorsqu'elle aurait suffisamment d'argent » n'était qu'une promesse vague et incertaine sans aucune condition expresse. Aucun écrit ne confirmait cette entente et le document de transfert n'a pas été préparé par un avocat. En outre, la Cour ne disposait d'aucun élément de preuve confirmant le témoignage intéressé de l'appelante. À mon avis, la « vague promesse » que l'appelante verserait à son mari un montant correspondant à la juste valeur marchande ne peut pas être considérée comme une contrepartie suffisante pour empêcher l'application de l'article 160.

[29]     L'appel est rejeté, avec dépens.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 25e jour de février 2005.

« L. M. Little »

Juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour de décembre 2005.

Yves Bellefeuille, réviseur



[1][2003] 1 R.C.S. 94, 2003 D.T.C. 5185.

[2]Voir Madsen et al. c. La Reine, no 94-2177(IT)G, 23 mars 1998, 98 D.T.C. 1668.

[3]Voir Madsen c. La Reine, no A-267-98, 22 décembre 2000, 99 D.T.C. 5470 (C.A.F.).

[4]Voir Madsen c. Canada, no 28439, 23 août 2001, [2001] C.S.C.R. no 96.

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