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Dossier : 2002-2758(IT)I

ENTRE :

KIMBERLEY MONK,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appels entendus le 6 novembre 2003 à Halifax (Nouvelle-Écosse)

Par : L'honorable juge C. H. McArthur

Comparutions :

Avocates de l'appelante :

Me Claire McNeil et

Emily Watson (stagiaire en droit)

Avocate de l'intimée :

Me Rebecca Gasek

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Tel que cela a été convenu par l'intimée, l'appel interjeté à l'encontre de la détermination faite en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année de base 1998 est accueilli et la détermination est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l'appelante était le « particulier admissible » à des prestations fiscales pour enfants en vertu de l'article 122.6 de la Loi pendant les mois de juillet à novembre 1999 à l'égard de son fils Mitchell.

L'appel interjeté à l'encontre de la détermination faite en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année de base 1999 est accueilli et la détermination est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l'appelante était le « particulier admissible » à des prestations fiscales pour enfants en vertu de l'article 122.6 de la Loi pendant les mois de juin à novembre 2000 à l'égard de ses fils Mitchell et Logan.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de janvier 2004.

« C. H. McArthur »

Juge McArthur

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'avril 2004.

Nancy Bouchard, traductrice


Référence : 2004CCI35

Date : 20040113

Dossier : 2002-2758(IT)I

ENTRE :

KIMBERLEY MONK,

appelante,

Et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge McArthur

[1]      Il s'agit d'un appel interjeté à l'encontre d'une détermination de la prestation fiscale pour enfants établie pour les années de base 1998 et 1999. Le ministre du Revenu national a déterminé que l'appelante n'était pas admissible à cette prestation pour la période du 1er mars 1999 au 28 février 2001 au motif que pendant cette période, elle ne s'occupait pas principalement de Mitchell et de Logan ( « les enfants » ). L'audience a été chargée d'émotions, et les parties conviennent que la période en question est en fait du 1er décembre 1999 au 30 novembre 2000, l'intimée ayant reconnu que l'appelante est le particulier admissible pour la période du mois de juillet au mois de novembre 1999.

[2]      Mitchell et Logan sont nés en 1993 et en 1994 d'une union de fait entre l'appelante et Robert Monk. Ils se sont séparés en 1994 et en décembre de cette même année, le tribunal de la famille de la Nouvelle-Écosse a émis une ordonnance sur consentement modifiée[1] accordant à l'appelante la garde exclusive des deux enfants.

[3]      Le 20 novembre 2000, ce même tribunal a émis une ordonnance de dérogation provisoire[2] stipulant que les enfants vivraient avec leur père, Robert, pendant la semaine et accordant des droits de visite à l'appelante pendant les fins de semaine.

[4]      Après s'être séparée de Robert, l'appelante a marié le cousin de ce dernier, Richard Monk, avec qui elle a eu trois autres enfants. Au cours de l'automne 1999, l'appelante qui vivait alors à Dartmouth a traversé une période difficile. Conséquemment, l'appelante et Robert ont convenu qu'il serait préférable que les enfants vivent avec leur père à Ship Harbour jusqu'à ce qu'elle soit de nouveau en mesure émotionnellement et physiquement de reprendre la garde des enfants. Ces derniers ont été transférés de l'école Bicentennial à Dartmouth à l'école Harbourside Elementary à Ship Harbour. En deux semaines (soit en décembre 1999), Kim et Richard ainsi que leurs trois autres jeunes enfants ont déménagé pour aller s'installer à Lake Charlotte, à environ 10 minutes de Ship Harbour où Mitchell et Logan habitaient avec leur père dans la maison de quatre chambres à coucher qui appartenait à ses parents (Tom et Margaret), ce qui a permis à Kim d'être près de ses enfants.

[5]      Au printemps 2000, l'appelante, Richard et leurs trois enfants ont aménagé dans une petite maison[3] située à 500 pieds de la résidence où habitaient Mitchell et Logan. L'appelante y est demeurée jusqu'à la fin de la période en question.

[6]      Ce qui suit est une brève description des personnes dont il est fait mention dans l'affaire en l'espèce :

(i)       Kim Monk, l'appelante et la mère de Mitchell et de Logan nés en 1993 et en 1994;

(ii)       Robert Monk, le père de Mitchell et de Logan;

(iii)      Tom et Margaret Monk, les parents de Robert et les grands-parents paternels des enfants;

(iv)      Joseph M. Monk, le frère de Tom Monk et le père de Richard Monk;

(v)      Richard Monk, maintenant l'époux de Kim et le père de Joseph, de Kalen et de David qui ne sont pas concernés par le présent appel;

(vi)      Anna Mae Conrad, l'enseignante des enfants à l'école Ship Harbour Elementary.

Toutes ces personnes susmentionnées, à l'exception de Richard Monk, ont témoigné.

[7]      Les faits, tels qu'ils m'ont été présentés, se résument à ce qui suit. Pendant les six premiers mois de la période pertinente, les enfants résidaient presque tous les jours de la semaine dans la maison de leurs grands-parents paternels où habitait également leur père. Toutes les semaines, ils couchaient à la résidence de l'appelante deux ou trois nuits. Lorsque l'appelante a habité à Charlotte Lake, soit de décembre 1999 à mai 2000, elle s'occupait de ses enfants après l'école, de 14 h 30 à 18 h puis, après le souper, Tom ou Robert venait les prendre pour les ramener à la résidence de leurs grands-parents. Pendant la semaine, durant les jours d'école, soit peut-être deux jours par semaine, l'appelante s'y rendait pour donner le bain à ses enfants puis les mettait au lit. Joseph Monk a témoigné que son frère Tom, qui percevait des prestations d'invalidité, passait plus de temps avec les enfants que son fils Robert.

[8]      Après avoir entendu plusieurs témoins, il ne fait aucun doute dans mon esprit que Tom était un grand-père extraordinaire. Pendant la semaine, alors que les enfants allaient à l'école, il préparait les repas, leur donnait le bain, jouait avec eux et les mettait au lit. Son épouse Margaret et son fils Robert travaillaient tous les deux à l'extérieur et n'avaient pas autant de temps libre que Tom. Certains soirs, pendant la semaine, Robert passait du temps avec ses enfants puis les mettait au lit. Il participait également aux réunions de parents.

[9]      En juin 2000, l'appelante et sa famille ont déménagé à Ship Harbour en vue de s'installer à deux pas de la résidence de Tom pour être plus près de ses enfants. Robert occupait un emploi à temps plein. Quant à l'appelante, elle était une mère au foyer. Pendant l'été, les cinq enfants de l'appelante jouaient ensemble, et celle-ci s'occupait d'eux mais presque exclusivement durant la journée. Parce que sa maison était petite et que celle-ci n'était pas dotée de toutes les installations nécessaires, les enfants prenaient leur bain et dormaient à la résidence de leurs grands-parents. Les parents de Richard, John et son épouse, amenaient les trois jeunes enfants à leur maison à Dartmouth pratiquement toutes les fins de semaine. Ils étaient également des grands-parents dévoués.

[10]     Tom a généreusement continué à consacrer du temps aux enfants pendant la période en question. Quant à Robert, il faisait ce qu'il pouvait, mais il était toujours très occupé avec sa petite entreprise de journal et les responsabilités qu'il devait assumer en tant que conseiller scolaire. Mme Conrad, l'enseignante des enfants, a témoigné qu'elle était plus souvent en contact avec Robert qu'avec Kim.

[11]     Jusqu'à l'automne 2000, les principaux pourvoyeurs de soins des enfants, soit Kim, Robert et Tom, interagissaient en harmonie en faisant passer les intérêts supérieurs des enfants avant tout. Il n'était pas facile de s'occuper d'eux et tout particulièrement de Mitchell, et tous les trois tentaient d'être attentifs à leur manière, du mieux qu'ils le pouvaient. Kim et Tom avaient plus de temps libre à consacrer aux enfants que Robert.

[12]     Du 1er décembre 1999 au 31 mai 2000, les enfants ont plus souvent dormi chez Tom que chez Kim. Du mois de juin au mois de novembre 2000, l'appelante a consacré plus de temps aux enfants que Tom et Robert ensemble. Ils restaient avec Kim durant la journée et couchaient plus souvent chez Tom (quatre ou cinq fois par semaine).

[13]     L'époux de Kim, Richard, est un charpentier, et il a construit une rallonge annexée à leur modeste résidence qui servait de chambre à coucher, mais qui n'était doté d'aucun système d'alimentation en eau.

[14]     Kim était très émotive lorsqu'elle a témoigné. Quant à Robert, il a témoigné de façon plus articulée en s'efforçant de se présenter sous son meilleur jour. Je considère comme un fait établi que du 1er décembre 1999 au 31 mai 2000, les grands-parents paternels et Robert étaient les principaux pourvoyeurs de soins des enfants et que du 1er juin au 30 novembre 2000, c'était l'appelante qui s'est principalement occupée de ses enfants.

[15]     L'article 122.6 de la Loi de l'impôt sur le revenu définit en partie le terme « particulier admissible » de cette façon :

122.6       Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente sous-section.

[...]

            « particulier admissible » S'agissant, à un moment donné, du particulier admissible à l'égard d'une personne à charge admissible, personne qui répond aux conditions suivantes à ce moment :

            a)          elle réside avec la personne à charge;

b)          elle est la personne - père ou mère de la personne à charge - qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de cette dernière;

[...]

De même, l'article 6302 du Règlement stipule ceci :

6302     Pour l'application de l'alinéa h) de la définition de « particulier admissible » à l'article 122.6 de la Loi, les critères suivants servent à déterminer en quoi consistent le soin et l'éducation d'une personne à charge admissible :

           

a)          le fait de surveiller les activités quotidiennes de la personne à charge admissible et de voir à ses besoins quotidiens;

b)          le maintien d'un milieu sécuritaire là où elle réside;

c)          l'obtention de soins médicaux pour elle à intervalles réguliers et en cas de besoin, ainsi que son transport aux endroits où ces soins sont offerts;

d)          l'organisation pour elle d'activités éducatives, récréatives, athlétiques ou semblables, sa participation à de telles activités et son transport à cette fin;

e)          le fait de subvenir à ses besoins lorsqu'elle est malade ou a besoin de l'assistance d'une autre personne;

f)           le fait de veiller à son hygiène corporelle de façon régulière;

g)          de façon générale, le fait d'être présent auprès d'elle et de la guider;

h)          l'existence d'une ordonnance rendue à son égard par un tribunal qui est valide dans la juridiction où elle réside.

[16]     Dans l'affaireR. c. Marshall[4], le juge Stone a déclaré ceci :

          Cet article [122.6] de la Loi prévoit qu'un seul des deux parents est un « particulier admissible » aux fins d'admissibilité aux avantages. L'article ne prévoit aucun partage proportionnel entre deux parents qui prétendent être des parents admissibles. Seul, le Parlement peut prévoir le partage proportionnel des avantages, mais il ne l'a pas fait.   

[17]     L'admissibilité d'un parent à demander la prestation fiscale pour enfants doit être déterminée à un moment donné. Bien que cet avantage ne puisse être partagé proportionnellement entre Robert et Kim, une détermination doit être établie à un moment donné et non sur une base annuelle. Lorsqu'un parent répond aux critères énoncés à l'article 6302 du Règlement au cours d'une longue période, soit six mois dans l'affaire en l'espèce, ce parent est pour cette période le « particulier admissible » , tel que le prévoient les paragraphes 122.61 et 122.62.

[18]     L'appelante était le particulier admissible à l'égard de Mitchell et de Logan du 1er juin au 30 novembre 2000 puisqu'elle résidait avec eux et qu'elle était le parent qui assumait principalement la responsabilité pour leur soin et leur éducation, comme le définit l'article 122.6.

[19]     Par conséquent, l'appel est accueilli et, tel que cela a été convenu par l'intimée, la détermination établie pour l'année de base 1998 est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l'appelante était le particulier admissible aux termes de l'article 122.6 de la Loi pendant une période de cinq mois, soit du mois de juillet au mois de novembre 1999 à l'égard de son fils Mitchell. De plus, j'ordonne que l'appel interjeté pour l'année de base 1999 soit également accueilli et déféré au ministre au motif que l'appelante était le particulier admissible à l'égard de ses fils, Mitchell et Logan, pendant une période de six mois, soit du 1er juin jusqu'au mois de novembre 2000.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de janvier 2004.

« C. H. McArthur »

Juge McArthur

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'avril 2004.

Nancy Bouchard, traductrice



[1]           Pièce A-1.

[2]           Pièce R-2.

[3]           Je crois que la maison de deux chambres à coucher était d'une superficie de 24 pieds sur 24 pieds et n'était dotée d'aucun système de plomberie.

[4]           [1996]C.A.F., no A-544-95, 26 mars 1996 (96 DTC 6292), au paragraphe 2.

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