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Dossier : 2004-3220(IT)I

ENTRE :

GAÉTAN MATHIEU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

et

CAROLE SMITH,

partie jointe.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 14 novembre 2005 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Michel Poulin

Avocate de l'intimée :

Me Marie-Claude Landry

Pour la partie jointe :

Carole Smith elle-même

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 2002 est accordé et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant pour acquis que l'appelant a droit au crédit d'impôt pour déficience physique grave et prolongée pour l'année en litige.

          En ce qui a trait à la déduction pour paiement de pension alimentaire, l'appelant n'y a pas droit et la partie jointe n'a pas à inclure le montant payé dans le calcul de son revenu.

          Les frais sont accordés à l'appelant à l'encontre de l'intimée pour la moitié.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour de mars 2006.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Référence : 2006CCI204

Date : 20060329

Dossier : 2004-3220(IT)I

ENTRE :

GAÉTAN MATHIEU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

et

CAROLE SMITH,

partie jointe.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre Proulx

[1]      Il s'agit de l'appel de monsieur Gaétan Mathieu pour l'année d'imposition 2002.

[2]      Il y a deux questions en litige relativement à cet appel. La première est de savoir si l'appelant peut déduire une somme de 22 000 $ à titre de pension alimentaire payée à son ex-épouse, madame Carole Smith. À l'égard de cette question, par une ordonnance de cette Cour rendue en vertu de l'article 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), madame Smith a été jointe à l'appel de monsieur Mathieu, car si l'appelant est en droit de déduire le montant payé, elle devra l'inclure dans le calcul de son revenu.

[3]      La deuxième question en litige ne concerne que l'appelant. Il s'agit de savoir si l'appelant a droit à un crédit d'impôt pour déficience physique grave et prolongée en vertu de l'article 118.3 de la Loi.

[4]      Les faits sur lesquels le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) s'est appuyé pour établir sa nouvelle cotisation sont décrits au paragraphe 6 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ), comme suit :

a)          en produisant sa déclaration de revenus, à l'égard de l'année d'imposition 2002, l'appelant n'y avait pas annexé un formulaire T2201 intitulé « Certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées » à l'appui de sa réclamation d'un crédit d'impôt pour déficience mentale ou physique;

b)          suite à une demande écrite du ministre datée du 27 août 2003, l'appelant a soumis un formulaire T2201 intitulé « Certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées » qui fut complété par un médecin autorisé, le docteur Alain Bédard qui diagnostiquait chez son patient un syndrome post-commotionnel chronique, une dépression majeure en rémission partielle et une discarthrose lombaire sévère;

c)          le 25 octobre 2003, le ministre avisait par écrit l'appelant de son refus à lui accorder le crédit d'impôt pour personnes handicapées, puisque le formulaire T2201 produit n'indiquait pas le besoin de soins thérapeutiques essentiels au maintien de la vie ou que vous subissiez une déficience grave et prolongée qui limite de façon marquée une des activités courantes de la vie quotidienne;

d)          à l'étape des oppositions, le ministre a communiqué verbalement avec le docteur Alain Bédard qui confirmait que l'appelant n'est plus capable de travailler, mais n'est pas handicapé et aucune de ses activités courantes de la vie quotidienne est limité de façon marquée;

e)          le mariage de l'appelant et de madame Carole Smith fut célébré le 9 février 1973;

f)           le mariage de l'appelant et de madame Carole Smith a été dissous par jugement de divorce daté du 16 novembre 1992, mais qui a pris effet le 17 décembre 1992;

g)          quatre enfants furent issus de l'union de l'appelant et de madame Carole Smith :

i)

Michael, né le 16 juillet 1976,

ii)

Mary-Ann, née le 13 avril 1978,

iii)

Cathy, née le 23 décembre 1980,

iv)

Tammy-Sue, née le 6 mai 1982;

h)          il y a eu séparation de fait en avril 1990;

i)           le jugement de divorce du 16 novembre 1992 donnait acte aux parties de leur consentement sur mesures accessoires, signé le même jour prévoyant que la garde des quatre enfants, alors mineurs serait confiée à madame Carole Smith avec droit d'accès à l'appelant selon entente entre les parents;

j)           les clauses 3 et 4 du consentement sur mesures accessoires fixaient en ces termes la pension alimentaire pour les besoins des enfants ainsi que pour ceux de madame Carole Smith :

i)

« l'appelant paiera à madame Carole Smith une pension alimentaire non indexée de 250 $ par semaine pour chacun des enfants tant qu'il poursuivra à plein temps, de façon régulière, assidue et appliquée aux études, le samedi de chaque semaine à compter du 1er novembre 1992, ainsi que les coûts additionnels de ses études supérieures » ,

ii)

« l'appelant paiera à madame Carole Smith, pour tenir lieu de toute pension alimentaire, une somme forfaitaire de 150 000 $ à titre d'aliments payable dans les cinq ans de la date du jugement à intervenir et portant intérêt au taux de 5 % l'an à compter du début de la cinquième année » ;

k)          la clause 6 du consentement sur mesures accessoires accordait à madame Carole Smith, pour une période de 25 ans, un droit d'habitation pour elle et les enfants du condominium du 1049, Montée Masson à Laval; l'hypothèque de 115 000 $ serait à la charge de l'appelant pendant que madame Carole Smith devrait acquitter les taxes, assurances, frais de condo et autres charges reliés à l'immeuble;

l)           l'appelant n'a pas payé de pension alimentaire depuis les mois de mars ou avril 1993 et avait accumulé des arrérages totalisant une somme dépassant les 500 000 $ au mois d'août 2002;

m)         suite à une requête en modification de pension alimentaire et en annulation d'arrérages de pension alimentaire sollicitée par l'appelant en 2002, l'honorable juge Gilles Mercure siégeant à la Cour supérieure prononça le 22 octobre 2002 un jugement par lequel il annule la pension alimentaire pour le futur et fixe à 175 000 $ les arrérages sur la pension alimentaire dus à madame Carole Smith pour elle-même et pour les enfants en vertu du jugement de divorce du 16 novembre 1992 et condamne l'appelant à verser à madame Carole Smith ces arrérages de 175 000 $.


[5]      Les motifs au soutien de la position du Ministre sont les suivants :

9.          Il soutient que l'appelant n'a pas droit, dans le calcul de ses crédits d'impôt non remboursables pour l'année d'imposition 2002, au crédit d'impôt pour déficience mentale ou physique, grave et prolongée, parce qu'il ne s'est pas trouvé manifestement limité dans ses activités courantes de la vie quotidienne en raison d'une déficience mentale ou physique, grave et prolongée au sens des articles 118.3 et 118.4 de la « Loi » .

10.        Il soutient que le ministre a correctement refusé toute déduction dans le calcul de son revenu, au titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement, à l'égard de l'année d'imposition 2002, parce que les paiements payés à madame Carole Smith sont considérés comme versements à valoir sur un montant forfaitaire, en vertu du paragraphe 56.1(4) de la Loi.

[6]      L'avis d'appel décrit ainsi les motifs concernant le premier point en litige :

Je désire contester la cotisation établie car j'ai droit à la déduction pour paiement d'arrérages de pension alimentaire que j'ai payé à mon épouse durant l'année 2002. Les arrérages de pension alimentaire couvrent l'ordonnance rendue en décembre 1992 par laquelle je devais payer $250.00 de pension alimentaire par enfant par semaine, pour un total de $1,000.00 par semaine, avec périodicité établie par convention et entérinée par jugement en 1992.

Suite à un jugement rendu à l'automne 2002 me condamnant à payer des arrérages de pension alimentaire de $175,000.00, mon revenu de rente d'invalidité a été saisi et les arrérages de pension alimentaire dus à mon ex-épouse sont déduits de mon revenu total et sont perçus périodiquement par Revenu Québec.

Mon revenu imposable devrait donc se lire à $20,016.00 et non à $33,016.00, compte tenu qu'en 2002 j'ai payé à mon ex-épouse $22,564.10 en arrérages de pension alimentaire.

Comme il s'agit d'une requête en modification de pension alimentaire et annulation d'arrérages de pension alimentaire, il faut s'en reporter à l'objet de ma demande pour décider l'admissibilité aux déductions pour paiement de pension alimentaire.

De plus, les frais engagés et les paiements de pension effectués relèvent du jugement de 1992, et le jugement de 2002 est accessoire à la décision de 1992, compte tenu du fait que j'ai demandé l'annulation de ladite pension alimentaire rétroactivement et que le tribunal a accordé une diminution des arrérages qui devaient être payés, soit la somme de $175,000.00 plutôt que la somme de $580,000.00.

[7]      Les motifs d'appel concernant le deuxième point en litige sont les suivants :

Je suis atteint d'une déficience physique grave qui me limite de façon marquée dans mes activités, telles que marcher, m'asseoir, me vêtir, et ce problème existe de façon prolongée. Je suis également atteint de perte de mémoire importante et d'un état dépressif général suite à un accident de travail, tel qu'établi par attestation médicale.

Je suis également bénéficiaire d'une rente d'invalidité, tel qu'établi par la Régie des rentes du Québec.

[8]      Lors du témoignage des parties, les différents documents ont été produits. Je reprends ceux qui sont pertinents. Le 12 novembre 1992, il y a eu un Consentement sur les mesures accessoires (pièce A-1). Les paragraphes 3 et 4 de ce consentement se lisent comme suit :

3.-         Le défendeur paiera à la demanderesse une pension alimentaire non indexée de 250,00$ par semaine pour chacun des enfants tant qu'il poursuivra à plein temps, de façon régulière, assidue et appliquée ses études, le samedi de chaque semaine à compter du 1er novembre 1992, ainsi que les coûts additionnels de ses études supérieures;

4.-         Le défendeur paiera à la demanderesse, pour tenir lieu de toute pension alimentaire, une somme forfaitaire de 150 000,00$ à titre d'aliments payable dans les cinq (5) ans de la date du jugement à intervenir et portant intérêts au taux de 5% l'an à compter du début de la cinquième année;

[9]      Le jugement de divorce fût prononcé en date du 16 novembre 1992, (pièce I-2). Il a entériné le consentement ci-dessus.

[10]     Il y a eu faillite de monsieur Mathieu en février 1993 (pièce A-3).

[11]     En date du 22 octobre 2002, il y a un jugement de la Cour supérieure (pièce A-4). Selon le paragraphe 9 de ce jugement, monsieur Mathieu aurait versé la pension alimentaire prévue à l'entente sur les mesures accessoires jusqu'en mars 1993.

[12]     Je cite les paragraphes 32, 41 et une partie du paragraphe 44 du jugement :

[32]       À entendre Monsieur, ces chiffres montrent clairement qu'il n'avait pas de revenus suffisants, entre 1993 et 1999, pour verser des aliments à Madame et aux enfants, lui qui devait compter sur la générosité de sa conjointe Anne Delisle pour survire. À compter de 1999, Madame occupait déjà son emploi et les quatre enfants nés du mariage - avec lesquels il n'a plus aucun contact depuis environ quatre ans - étaient majeurs et autonomes. Les conclusions qui s'imposent sont claires : le Tribunal se doit d'annuler tous les arrérages de pension alimentaire accumulés depuis le jugement de divorce lesquels, selon le tableau préparé par le procureur de Madame, s'élèvent à 517 594 $, incluant la somme forfaitaire de 150 000 $ et les intérêts sur cette somme calculée au taux de 5 % l'an depuis le 16 novembre 1997.

[41]       Il faut se rendre à l'évidence. Monsieur, à compter de sa faillite en 1993, ne disposait plus des mêmes ressources financières et du haut niveau de vie qui était le sien au moment du divorce. Il ne pouvait plus verser 1 000 $ par semaine pour les enfants en plus de payer à Madame la somme forfaitaire de 150 000 $ qui allait être due en 1997.

[44]       Devant une preuve aussi incomplète, le Tribunal considère qu'il y a lieu de maintenir les arrérages de pension alimentaire, tant pour Madame que pour les enfants, pour un montant de 175 000 $.

...

ANNULE la pension alimentaire pour le futur;

FIXE à 175 000 $ les arrérages sur la pension alimentaire dus à Madame pour elle-même et pour les enfants en vertu du jugement de divorce du 16 novembre 1992;

[13]     En ce qui concerne le motif de l'agent aux appels de refuser la demande de déduction pour pension alimentaire, voici ce qu'elle dit dans son Rapport sur une opposition, produite comme pièce I-3 :

... En ce qui concerne la déduction pour pension alimentaire, le client devait en pension alimentaire un montant de 517 594 $ en date du 22 octobre 2002. Le tribunal a fixé les arrérages de la pension alimentaire au montant de 175 000 $. Puisque le payeur a été libéré d'une obligation alimentaire, nous considérons le montant comme paiement forfaitaire et le montant n'est plus déductible comme pension alimentaire.

[14]     Le crédit d'impôt pour déficience physique grave et prolongée est demandé relativement à la capacité de marcher.

[15]     Deux certificats du médecin Alain Bédard, l'un en date du 1er octobre 2003 et l'autre en date du 9 décembre 2003 ont été produits par l'intimée comme pièce I-1. Dans les deux certificats à la question « Votre patient peut-il marcher? » le médecin a répondu « oui » . La question est ainsi formulée :

Votre patient peut-il marcher?

Répondez non uniquement si, même à l'aide d'appareils, de médicaments ou en suivant une thérapie, votre patient est toujours ou presque incapable de marcher 50 mètres sur un terrain plat, ou s'il lui faut un temps excessif pour le faire ............................................

oui

non

[16]     Voici ce que dit le diagnostic du médecin :

Syndrome post-commotionnel chronique, dépression majeure en rémission partielle, discarthrose lombaire sévère, totalement invalide.

[17]     La dernière mention « totalement invalide » a été ajoutée dans le deuxième certificat qui autrement est identique au premier.

[18]     En avril 2005, l'agent aux appels a communiqué avec le médecin pour comprendre ce qu'il voulait dire par « totalement invalide » . Le médecin lui a répondu que son patient était invalide pour le travail mais qu'il n'était pas un handicapé (pièce I-3).

[19]     L'appelant a relaté qu'il avait eu un accident du travail en Ontario en février 1999. Il était tombé dans un trou ou un puits et s'était grièvement blessé le dos.

[20]     Le 10 novembre 2004, le médecin écrit la lettre qui suit (pièce A-5) :

Madame, Monsieur,

Les activités courantes de Monsieur Gaétan Mathieu sont affectés car celui-ci ne peut demeurer dans la même position plus de 10 minutes (debout, assis, en marche ou couché).

En conséquence nous le déclarons atteint d'une déficience physique avec handicap.

[21]     En date du 7 novembre 2005, il y a un autre certificat signé par le même médecin (pièce A-7).

[22]     Voici l'énoncé de la question relativement à la capacité de marcher et la réponse du médecin :

Marcher

Votre patient est considéré limité de façon marquée dans sa capacité de marcher si, toujours ou presque toujours, selon le cas :

·              il est incapable de marcher, même à l'aide de soins thérapeutiques, d'appareils et de médicaments appropriés;

·               il prend un temps excessif pour marcher, même à l'aide de soins thérapeutiques, d'appareils et de médicaments appropriés.

Remarques :

·              Des appareils pour marcher incluent des cannes, des ambulateurs, etc.

·               Prendre un temps excessif pour marcher signifie prendre considérablement plus de temps que la moyenne des personnes n'ayant pas la déficience.

Exemples de « limité de façon marquée » dans la capacité de marcher (les exemples ne sont pas exhaustifs) :

·              Votre patient doit toujours se servir d'un fauteuil roulant, même pour parcourir de courtes distances hors de la maison.

·              Toujours ou presque toujours, votre patient ne peut marcher 100 mètres (environ un pâté de maisons) qu'en prenant un temps considérable et ce, dû à des pauses qu'il doit prendre en raison de la douleur ou du manque de souffle.

Votre patient est-il limité de façon marquée dans sa capacité de marcher, tel que décrit ci-dessus ? ...........................................

oui

non

Si oui, à quelle date est-il devenu limité de façon marquée dans sa capacité de marcher ? .............................................................

1999

[23]     Le certificat émis par le Dr. Alain Bédard dit ce qui suit en ce qui concerne l'effet de la déficience relativement à la capacité de marcher de l'appelant :

Ne peut marcher que lentement et que sur courtes distances seulement (moins de 100 m) et ne peut demeurer dans la même position plus de 10 minutes depuis le 6-2-1999.

Diagnostic (si disponible) : syndrome post-commotionnel chronique discarthrose lombaire sévère.

[24]     L'appelant a admis en contre-interrogatoire qu'il était venu avec sa propre voiture, avait rencontré son avocat, était allé prendre un café avec lui et qu'il pouvait marcher. Il a toutefois répété qu'il ne pouvait rester dans la même position plus de dix minutes, qu'il marchait avec une excessive lenteur et que son dos le faisait constamment souffrir.

Analyse et conclusion

[25]     La Cour d'appel fédérale dans l'affaire La Reine c. Barbara D. Sills, [1985] 2 C.F. 200, a accepté que des paiements d'arrérages de pensions alimentaires avaient été faits en conformité avec l'alinéa 56(1)b) de la Loi, qu'ils pouvaient être déduits dans le calcul du revenu du payeur et devaient être inclus dans le calcul du revenu du bénéficiaire. Toutefois, il s'agissait de circonstances relatives à des paiements en retard et ces paiements en retard étaient les paiements des allocations périodiques exigibles en vertu de l'accord de séparation.

[26]     Il ne s'agit pas dans la présente affaire de circonstances de cette nature.

[27]     Je me réfère à la décision du juge Dussault de cette Cour dans Bégin c. Canada, [2003] A.C.I. no 737 (QL), paragraphe 24 :

24         En ce sens, j'estime que le montant de 34 000 $ n'est pas de même nature et ne reflète pas les obligations alimentaires imposées à l'appelant par le jugement du 22 février 1999. Il s'agit d'un paiement de nature capitale fait par l'appelant dans le but d'obtenir la libération des obligations alimentaires imposées par ce jugement. En conséquence, le paiement d'une partie de ce montant, soit une somme de 7 494 $ n'est pas déductible à titre de pension alimentaire aux termes du paragraphe 56.1(4) et de l'alinéa 60b) de la Loi.

[28]     La juge Lamarre de cette Cour s'exprime ainsi dans Lebreton c. R, 2002 CarswellNat 2437, au paragraphe 14 :

14         En ce qui concerne le versement de la somme de 11 680 $ payée par l'appelant en règlement final des arrérages de pension alimentaire non payés aux termes du jugement de divorce de 1993, je suis d'avis que ces paiements ont été établis et effectués en vertu de la Convention de 1999 dans le but, entre autres, de le libérer de façon finale des obligations que le jugement de divorce de 1993 lui imposait à l'endroit de son ex-conjointe. Ceci ressort clairement de la Convention de 1999. En ce sens, les paiements d'arrérages n'ont pas été faits conformément au jugement de divorce 1993, mais plutôt pour libérer l'appelant de l'obligation qui lui était imposée par le jugement de 1993. Ceci se rapproche plutôt de la situation dans l'affaire M.N.R. v. Armstrong, [1956] S.C.R. 446, où il a été jugé que le paiement d'une somme forfaitaire versée pour se libérer d'une obligation juridique imposée par un jugement n'était pas un montant payable conformément au jugement de divorce. Un tel paiement ne se qualifiait pas comme une allocation périodique payable conformément à une ordonnance ou un jugement aux termes de dispositions législatives analogues à l'alinéa 60b).

[29]     De la même façon, dans la présente affaire, les sommes reçues par l'ex-épouse de l'appelant, ne l'ont pas été en vertu du jugement de 1992 mais en vertu du jugement de 2002. Ce dernier jugement prévoit à son paragraphe 32 l'annulation de tous les arrérages de pension alimentaire accumulés depuis le jugement de divorce incluant la somme forfaitaire de 150 000 $ et, à son paragraphe 44, fixe à 175 000 $ les arrérages sur la pension alimentaire dus à Madame pour elle-même et pour les enfants en vertu du jugement de divorce du 16 novembre 1992.

[30]     Ce montant forfaitaire prescrit a pour but de libérer l'appelant des sommes dues en vertu du jugement de divorce. La nature de ce paiement est de la nature du capital. Il ne s'agit pas du paiement d'une pension alimentaire tel que définie au paragraphe 56.1(4) de la Loi. Il ne s'agit pas du paiement en retard des allocations périodiques exigibles en vertu du jugement en divorce. Je le répète, le paiement est fait en vertu du jugement de 2002 et non en vertu du jugement de 1992, bien que la détermination du montant à payer ait pris en considération notamment certains éléments relevant du jugement de 1992.

[30]     En ce qui concerne le crédit d'impôt pour invalidité, je suis d'avis que, vu la lettre du médecin en date du 10 novembre 2004 et le certificat en date de novembre 2005, l'appelant souffre d'une déficience physique grave et prolongée.

[31]     L'appel est accordé en ce qui concerne le crédit d'impôt pour déficience physique grave et prolongée. L'appelant n'a pas droit à une déduction pour paiement de pension alimentaire dans le calcul de son revenu et la partie jointe n'a pas à inclure le montant payé dans le calcul de son revenu.

[32]     Les frais sont accordés à l'appelant à l'encontre de l'intimée pour la moitié.

Signé à Ottawa, Ontario, ce 29e jour de mars 2006.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


RÉFÉRENCE :                                   2006CCI204

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2004-3220(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               GAÉTAN MATHIEU c. LA REINE ET CAROLE SMITH

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 14 novembre 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                    le 29 mars 2006

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelant :

Me Michel Poulin

Avocat de l'intimée :

Me Marie-Claude Landry

Pour la partie jointe :

Carole Smith elle-même

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelant:

                   Nom :                              Me Michel Poulin

                   Cabinet:                           Poulin, Vézina, Dignard et Pettigrew

                                                          Sainte-Foy (Québec)

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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