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Dossiers : 2001-2106(IT)G

2002-3202(IT)G

ENTRE :

ALAIN MARCEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appels entendus le 3 mai 2004 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable juge François Angers

Comparutions :

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :

Me Janie Payette

____________________________________________________________________

JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 sont admis, sans frais, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, le tout selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de septembre 2004.

« François Angers »

Juge Angers


Référence : 2004CCI585

Date : 20040927

Dossiers : 2001-2106(IT)G

2002-3202(IT)G

ENTRE :

ALAIN MARCEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Angers

[1]      L'appelant interjette appel à l'encontre des cotisations émises pour ses années d'imposition 1996, 1997 et 1998. Les deux dossiers ont été entendus sur preuve commune et certaines modifications apportées aux Réponses aux avis d'appel ont modifié quelque peu le litige. À cette fin, je reproduis les faits que le ministre du Revenu national a tenus pour acquis et la position des parties sur chacun :

Dossier 2001-2106(IT)G

Année d'imposition 1999 et 1997

Perte déductible au titre de placement d'entreprise réclamée

a)          L'appelant n'a pas prêté 5 000 $ à la société Polyclinique Médico-Santé Inc. et, s'il l'a fait, le prêt était sans intérêt, il n'était assujetti à aucune modalité de remboursement et la créance n'était pas irrécouvrable à la fin de l'année d'imposition 1998; (nié)

Dépenses d'emploi réclamées

b)          L'appelant est un employé de London Life Insurance Company; (admis)

c)          Les fonctions de l'appelant sont liées à la vente d'assurance-vie; (admis)

d)          L'appelant est tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter ses propres dépenses; (admis)

e)          L'appelant est habituellement tenu d'exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur; (admis)

f)           Sa rémunération consiste, en tout ou en partie, en commissions fixées par rapport au volume des ventes effectuées; (admis)

g)          La London Life Insurance Company a versé à l'appelant, au cours de l'année d'imposition 1998, une rémunération de 131 594 $; (admis)

h)          L'appelant n'est pas remboursé pour ses frais de déplacement et il ne reçoit pas d'allocation pour ses frais de déplacement; (admis)

i)           L'appelant réclame 68 182 $ en déduction de son revenu d'emploi au titre de dépenses de vendeur encourues au cours de l'année d'imposition 1998; (admis)

j)           Malgré le fait que l'appelant n'a pas joint à sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1998 le formulaire prescrit, signé par la London Life Insurance Company, qui atteste de ses conditions d'emploi, le ministre du Revenu national a accordé la déduction de 26 984 $ (maintenant 30 441 $) des 68 182 $ réclamés au titre de dépenses de vendeur; (nié)

k)          Le ministre du Revenu national a cependant refusé la déduction de l'autre 41 198 $ (maintenant 37 741 $) réclamés au titre de dépenses de vendeur de la manière suivante :

Commission versée à une société

l)           La London Life Insurance Company a versé 131 594 $ à l'appelant à titre de rémunération relativement à des ventes de contrats d'assurance-vie effectuées par ce dernier au cours de l'année d'imposition 1998; (admis)

m)         L'appelant réclame une déduction de 30 000 $ au titre de dépenses de vendeur pour des commissions qu'il prétend avoir versées à la société 9071-2852 Québec Inc. pour la participation de cette dernière à la conclusion de certains contrats d'assurance-vie; (nié)

n)          Cette société a été constituée par l'appelant le 2 décembre 1998; (admis)

o)          L'appelant et une fiducie au bénéfice de son fils sont les actionnaires de la société; (admis)

p)          L'appelant est administrateur de la société; (admis)

q)          La société n'a pas participé aux ventes de contrats d'assurance-vie effectuées pour lesquelles l'appelant prétend avoir versé les 30 000 $ de commissions; (nié)

r)           L'appelant n'a pas versé les 30 000 $ à la société et, s'il l'a fait, ce n'était pas en vue de gagner un revenu provenant de son emploi auprès de la London Life Insurance Company; (nié)

Frais d'avocat

s)          L'appelant réclame la déduction des 500 $ versés, au cours de l'année d'imposition 1998, à Me Céline Plante pour les services rendus par cette dernière relativement à la constitution de la société Bégin, Marceau, Morin Gestion Privée Inc.; (admis)

t)           Il ne s'agit pas d'une dépense engagée dans le but de gagner un revenu provenant de son emploi auprès de la London Life Insurance Company; (admis)

Petites polices payées (consentement à jugement)

[u et v] [...]

Frais de représentation

w)         Des 2 846 $ dépensés par l'appelant au cours de l'année 1998 pour des aliments, des boissons ou des divertissements, 1 426 $ ont été engagés à titre de frais de représentation dans l'accomplissement de son emploi auprès de la London Life Insurance Company, alors que 361 $ ont été engagés à titre de dépenses relatives aux loisirs et que 1 059 $ ont été engagés à titre de dépenses personnelles; (nié)

[ ... ]

Frais d'automobile

bb)        L'appelant a dépensé 6 484 $ à titre de frais afférents à un véhicule moteur au cours de l'année d'imposition 1998; (admis)

cc)        Ledit véhicule moteur était utilisé par l'appelant dans le cadre de son emploi auprès de la London Life Insurance Company ainsi qu'à des fins personnelles; (admis)

dd)        L'appelant ne tenait pas de registre de ses déplacements aux fins d'emploi au cours de l'année d'imposition 1998; (nié)

ee)        60% de ces frais, soit 3 890 $, ont été engagés dans l'accomplissement de son emploi auprès de la London Life Insurance Company et l'autre 40% de ces frais sont de nature personnelle; (nié)

Stationnement

ff)          L'appelant a encouru 98 $ en frais de stationnement en vue de gagner un revenu provenant de son emploi auprès de la London Life Insurance Company au cours de l'année d'imposition 1998; (nié)

Logiciel

gg)        L'appelant n'a pas versé 159 $ pour l'acquisition d'un logiciel informatique au cours de l'année d'imposition 1998 et, s'il l'a fait, ce n'était pas en vue de gagner un revenu provenant de son emploi auprès de la London Life Insurance Company; (nié)

Dossier 2002-3202(IT)G

Année d'imposition 1998

Perte déductible au titre de placement d'entreprise

a)          Aucun document ne constate la souscription d'actions de la société Industrie d'émaillage Acryteck Inc. par l'appelant; (nié)

b)          Aucun document ne constate de paiement effectué par l'appelant pour la souscription de ces actions; (nié)

c)          Aucun certificat d'actions ne constate l'émission de ces actions à l'appelant; (admis)

Prime d'assurance-vie de certains clients : (consentement à jugement)

[d à n] [...]

23.        Sous réserve de ce qui est plaidé ci-dessus, le Sous-procureur général du Canada ajoute ce qui suit :

Perte déductible au titre de placement d'entreprise

a)          Le 14 mars 1994, l'appelant a consenti un prêt personnel de 15 000 $ à monsieur Alain Gamache; (nié)

b)          Il n'a jamais été question que l'appelant acquière des actions de la société Industrie d'émaillage Acryteck Inc.; (nié)

c)          Subséquemment, monsieur Gamache a fait cession de ses biens en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, tout comme la société Industrie d'émaillage Acryteck Inc.; (admis)

d)          L'appelant a fait une réclamation de 10 128 $ dans la faillite de la société Industrie d'émaillage Acryteck Inc. et non dans la faillite de monsieur Gamache afin d'obtenir un avantage fiscal, c'est-à-dire une perte déductible au titre de placement d'entreprise; (nié)

e)          L'appelant a fait signer aussi une lettre à monsieur Gamache, alors que ce dernier se trouvait dans une situation financière difficile, afin de rendre plausible cet avantage fiscal. (nié)

1996

[2]      Pour l'année 1996, l'appelant s'était vu refuser par l'intimée la déduction des primes d'assurance-vie payées par celui-ci pour des clients, au montant de 123 481 $. Dans la Réponse à l'avis d'appel modifiée, l'intimée accorde maintenant la déduction et consent donc au jugement. L'année 1996 n'est donc plus en litige et l'appel pour cette année est admis sur consentement.

1997

[3]      En ce qui concerne l'année d'imposition 1997, l'appelant s'était vu refuser une déduction semblable à celle pour l'année 1996. L'intimée, dans sa Réponse à l'avis d'appel modifiée, a accordé ladite déduction au montant de 74 173 $. Au début de l'audience, l'intimée a informé la Cour qu'une déduction additionnelle de primes d'assurance-vie (ou de commissions) payées par l'appelant à monsieur Lofti Ghattas, au montant de 5 000 $, était accordée et ajoutée au montant de 74 173 $. Le seul point en litige devant cette cour est de savoir si l'appelant a le droit de déduire une perte déductible de 11 250 $ au titre d'un placement d'entreprise pour l'année d'imposition 1997.

1998

[4]      L'appelant s'est vu accorder, dans la Réponse à l'avis d'appel modifiée, une déduction de 3 457 $ précédemment refusée par l'intimée concernant des primes d'assurance-vie payées par l'appelant. L'intimée a de plus informé la Cour qu'elle consentait à accorder une déduction de 2 589 $ au titre de commissions versées à des particuliers et précédemment refusée. De son côté, l'appelant abandonne une partie de son appel portant sur des frais d'avocat de 500 $ et sur des frais de représentation de 710 $, deux montants qui lui avaient été refusés.

[5]      Les dépenses réclamées par l'appelant et qui lui sont toujours refusées, selon la cotisation émise le 8 mars 2001 pour l'année d'imposition 1998, se résument comme suit :

Perte déductible au titre d'un placement d'entreprise

3 750 $

Commissions versées à une société

30 000 $

Frais d'automobile

3 281 $

Stationnement

502 $

Logiciel

159 $

[6]      L'appelant, durant les années d'imposition en litige, était un employé de la London Life Insurance Company. Il était affecté à la vente d'assurance-vie et exerçait ses fonctions ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur. Sa rémunération consistait en tout ou en partie en commissions fixées par rapport au volume des ventes qu'il effectuait. Il était tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter ses propres dépenses et ne recevait aucun remboursement de son employeur.

[7]      En 1997, il s'est vu refuser une déduction de 11 250 $ réclamée comme perte déductible au titre d'un placement d'entreprise. Cette affaire remonte à 1995. L'appelant a fait la connaissance de monsieur Alain Gamache, représentant de la société Industrie d'émaillage Acryteck Inc. (Acryteck). Cette dernière était désireuse d'obtenir certains crédits d'impôt en recherche et développement et voulait confier ce mandat à l'appelant. L'appelant détient une maîtrise en fiscalité de l'Université de Sherbrooke et a une certaine expérience dans ce domaine. Il fut convenu que l'appelant recevrait 15 % des sommes qu'il allait récupérer en crédits d'impôt en guise d'honoraires.

[8]      Acryteck était toutefois en difficulté financière et c'est à ce moment-là que l'appelant a décidé d'investir 15 000 $ dans l'entreprise afin de lui venir en aide. Il a donc fait un chèque de 15 000 $, mais payable à monsieur Alain Gamache. Il devait en retour recevoir de monsieur Gamache soit des actions ordinaires de ce dernier ou des actions privilégiées d'Acryteck nouvellement émises, rachetables et donnant droit à des dividendes au taux de 10%. L'appelant n'a pas produit le chèque qui, il semblerait, pourrait indiquer l'année 1994. L'appelant dit qu'il s'agit évidemment d'une erreur. Il a cependant indiqué l'année 1994 dans sa déclaration de revenus de 1997 comme étant l'année où il a fait l'acquisition des actions, sans décrire le nombre d'actions ou la catégorie. En fin de compte, selon l'appelant, il devait finalement recevoir des actions privilégiées. Il ne peut expliquer pourquoi il a fait le chèque à Alain Gamache au lieu d'Acryteck. L'appelant n'a pas présenté de preuves pouvant démontrer que les fonds remis à Alain Gamache ont été déposés dans les coffres d'Acryteck.

[9]      N'ayant reçu aucun certificat d'actions, l'appelant s'est rendu voir Alain Gamache. Il a été informé par ce dernier que l'avocat à qui on aurait confié la tâche d'émettre les certificats d'actions avait été radié du Barreau et était incapable de compléter son mandat. Le 1er avril 1996, l'appelant recevait d'Alain Gamache un chèque de 11 000 $ tiré sur le compte d'Acryteck et payable à l'appelant, avec l'annotation « Remboursement argent sur prêt » et des instructions de ne pas encaisser le chèque car Acryteck n'avait pas suffisamment de fonds. Le 18 juin de la même année, un second chèque d'Acryteck de 5 000 $ a été remis à l'appelant, avec la mention « Remboursement prêt balance » et des instructions identiques, à savoir de ne pas le négocier en raison d'un manque de provisions. Les deux chèques, en fait, n'ont jamais été encaissés.

[10]     L'appelant a témoigné qu'il s'agit du remboursement des actions privilégiées auxquelles il devait souscrire et, par après, il ajoute que c'était pour faire le rachat des actions privilégiées. Aucune résolution d'Acryteck n'a été déposée en preuve confirmant un achat d'actions par l'appelant. En fait, il est important de souligner ici que l'appelant a également mentionné dans son témoignage qu'il a pris des mesures avec Alain Gamache pour acheter la créance. Il s'est repris pour parler du rachat des actions privilégiées. Cette même imprécision s'est produite à nouveau au paragraphe 31 de l'Avis d'appel de l'appelant que je reproduis :

21.        En 1994, un chèque de 15 000 $ est effectué à Monsieur Alain Gamache pour qu'il place le montant dans la société Industrie d'émaillage Acryteck en contrepartie de dette ou de capital-actions de la société. Basé sur la confiance, ledit montant devait permettre en la souscription d'une dette mais suivant des représentations de monsieur Gamache le montant devait être porté en actions de la société. Monsieur Gamache a fait faillite personnelle peut de temps après la transaction. Le président de la compagnie par la suite est informé de la mise de fonds dans l'entreprise sous forme de capital-actions.

[11]     D'ailleurs, tout au long de son témoignage, l'appelant semblait confondre dette et créance avec capital-actions ou souscription d'une dette.

[12]     Le 8 novembre 1996, Alain Gamache a fait cession de ses biens en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Acryteck subissait le même sort et cédait ses biens en vertu de la même loi le 1er avril 1997. La cession des biens d'Acryteck est signée par monsieur Michel Pageau, président d'Acryteck à l'époque. On indique une créance de 10 128 $ à l'appelant, ce qui représente ses honoraires pour services rendus à Acryteck relativement aux crédits d'impôt. Aucune créance à l'appelant n'est identifiée dans la cession d'Alain Gamache.

[13]     Lors de la vérification en 1999, l'appelant a demandé à Alain Gamache une confirmation de ce qu'ils avaient convenu au moment où le montant de 15 000 $ a été avancé à ce dernier. Une lettre non datée a été envoyée par télécopieur à l'appelant le 20 septembre 1999. Cette lettre, dont l'auteur n'a pas témoigné, parle d'inscription au capital-actions d'Acryteck suite à la mise de fonds de l'appelant. Ce même auteur avait pourtant indiqué sur les chèques du 1er avril 1996 et du 28 juin 1996 qu'il s'agissait du remboursement d'un prêt.

[14]     La vérification de l'appelant a débuté le 14 décembre 1998. Cette vérification visait les années d'imposition 1996 et 1997. Le 21 septembre 1999, l'appelant a été avisé verbalement qu'il devait produire sa déclaration de revenus pour l'année 1998 et le 22 septembre 1999, il en était avisé par écrit. L'appelant a produit sa déclaration de revenus pour 1998 le 30 novembre 1999 au Centre fiscal de Québec. Après certaines confusions et après la fin de l'opposition, la cotisation portée en appel pour 1998 est datée du 8 mars 2001.

[15]     L'appelant, dans sa déclaration de revenus de 1998, a notamment déduit une perte au titre d'un placement d'entreprise de 3 750 $, qui lui a été refusée. Je reviendrai plus tard aux autres dépenses refusées pour l'année 1998. Les explications relatives aux démarches de l'appelant ont été fournies par monsieur Pierre Trépanier, qui était directeur des opérations de la Polyclinique Médico-Santé Inc. en 1997 et 1998. Au moment pertinent, soit en 1996, une dénommée madame Veilleux était directrice des opérations.

[16]     Selon monsieur Trépanier, la Polyclinique Médico-Santé Inc. (Polyclinique) occupait un local loué d'un établissement appelé Germain-des-Prés à Québec durant l'année 1996. Ce local était devenu trop petit et la Polyclinique devait se porter acquéreur d'un immeuble; l'achat devait se faire le 16 décembre 1996. Ayant besoin d'une aide financière dans l'attente de l'acquisition de l'immeuble, monsieur Trépanier sollicitait des emprunts qu'il a qualifiés de temporaires. C'est ainsi qu'il a sollicité l'appelant. Le but était d'emprunter temporairement de l'argent et de remettre par après des actions. Lors du contre-interrogatoire, il a reconnu que les actions auraient été celles d'une nouvelle société à être constituée dans le but de se porter acquéreur de l'immeuble. Ces deux sociétés auraient par la suite fait fusion.

[17]     Le 28 août 1996, l'appelant a remis un chèque de 5 000 $ à la Polyclinique. Selon monsieur Trépanier, cet emprunt devait porter intérêt au taux de 10 %. Il qualifie toutefois ce chèque de chèque de souscription, sans plus de précision. Quant au chèque lui-même, il n'y a rien d'inscrit pouvant éclairer la situation. En 1998, la Polyclinique a connu des difficultés financières et devint incapable de rembourser ses créanciers, y compris l'appelant. Lors du contre-interrogatoire, monsieur Trépanier a précisé que l'appelant avait le choix, lors de l'acquisition de l'immeuble, d'acheter des actions dans la nouvelle société ou d'être remboursé. Il reconnaît aussi qu'aucune modalité de remboursement n'avait été négociée avec l'appelant.

[18]     Les états financiers de la Polyclinique ont été déposés en preuve. Sous la rubrique des dettes à long terme, on y retrouve une dette à un particulier non identifié, sans modalité de remboursement ni intérêt, au montant de 5 000 $. Cette information aurait été communiquée au comptable par madame Veilleux ou pour monsieur Trépanier; selon monsieur Trépanier, il s'agirait de la dette à l'appelant. Quant à l'appelant, il reconnaît n'avoir aucun document sur le prêt en raison de sa confiance dans les gens et d'un manque d'énergie de sa part à en obtenir.

[19]     Il y a t'il dans ces deux cas, une perte déductible au titre d'un placement d'entreprise (PDTPE)? Dans l'affaire Gill c. Canada, [1998] A.C.I. no 765 (Q.L.), le juge Brulé de notre Cour a défini la PDTPE dans les termes suivants au paragraphe 14 :

La perte au titre d'un placement d'entreprise résulte de la disposition d'un bien en immobilisation dans les conditions énoncées à l'alinéa 39(1)c). Ces conditions sont les suivantes. Premièrement, le bien en immobilisation doit être une action du capital-actions d'une « société exploitant une petite entreprise » ou une créance du contribuable sur une telle société. Deuxièmement, à moins que le paragraphe 50(1) ne s'applique, il doit être disposé des actions ou de la créance en faveur d'une personne avec laquelle le contribuable n'a aucun lien de dépendance.

[20]     Il faut par la suite poursuivre l'analyse de la première condition en se penchant sur la définition de l'expression « société exploitant une petite entreprise » que l'on retrouve au paragraphe 248(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ). L'alinéa 248(1)a) de cette définition nous renvoie aux paragraphes 248(1) et 125(7) pour retrouver la définition de « société exploitée activement » . Ces deux définitions, en termes presque identiques, nous renvoient quant à elles aux définitions de « entreprise de placement déterminée » et « entreprise de prestation de services personnels » au paragraphe 125(7) de la Loi.

[21]     Afin de pouvoir déterminer s'il y a respect de la deuxième condition énoncée par le juge Brulé, il est également nécessaire d'établir qu'il y a eu « disposition » des actions ou de la créance. Conformément au paragraphe 50(1) de la Loi, il peut y avoir disposition présumée dans plusieurs situations. Dans l'affaire Roy c. Canada, [2002] A.C.I. no 134 (Q.L.), le juge Tardif de notre Cour a résumé le tout dans les termes suivants au paragraphe 17 :

Il y a disposition présumée d'une créance lorsque la créance devient irrécouvrable. Il y a disposition présumée d'une action lorsque la société qui a émis l'action (1) devient un failli; (2) devient insolvable au sens de la Loi sur les liquidations et au sujet de laquelle une ordonnance de mise en liquidation en vertu de cette loi a été émise au cours de l'année; ou (3) est insolvable à la fin de l'année et que ni la société ni une société qu'elle contrôle n'exploite d'entreprise.

[22]     En dernier lieu, il est nécessaire pour le contribuable qui veut se prévaloir d'une PDTPE de prouver que la créance a été acquise en vue de tirer un revenu. À défaut de cette preuve, la perte subie risque d'être déclarée nulle selon le sous-alinéa 40(2)g)(ii) de la Loi.

[23]     Les dispositions légales pertinentes sont les suivantes :

39(1) Pour l'application de la présente loi :

[. . .]

c)          une perte au titre d'un placement d'entreprise subie par un contribuable, pour une année d'imposition, résultant de la disposition d'un bien quelconque s'entend de l'excédent éventuel de la perte en capital que le contribuable a subie pour l'année résultant d'une disposition, après 1977 :

(i)          soit à laquelle le paragraphe 50(1) s'applique,

(ii)         soit en faveur d'une personne avec laquelle il n'avait aucun lien de dépendance,

d'un bien qui est :

(iii)        soit une action du capital-actions d'une société exploitant une petite entreprise,

(iv)        soit une créance du contribuable sur une société privée sous contrôle canadien (sauf une créance, si le contribuable est une société, sur une société avec laquelle il a un lien de dépendance) qui est :

(A)        une société exploitant une petite entreprise,

(B)        un failli, au sens du paragraphe 128(3), qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où il est devenu un failli pour la dernière fois,

(C)        une personne morale visée à l'article 6 de la Loi sur les liquidations qui était insolvable, au sens de cette loi, et qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où une ordonnance de mise en liquidation a été rendue à son égard aux termes de cette loi,

[. . .]

40(2)     Malgré le paragraphe (1) :

[. . .]

g)          est nulle la perte subie par un contribuable et résultant de la disposition d'un bien, dans la mesure où elle est :

(i)          une perte apparente,

(ii)         une perte résultant de la disposition d'une créance ou d'un autre droit de recevoir une somme, sauf si la créance ou le droit a été acquis par le contribuable en vue de tirer un revenu (qui n'est pas un revenu exonéré) d'une entreprise ou d'un bien, ou en contrepartie de la disposition d'une immobilisation en faveur d'une personne avec qui le contribuable n'avait aucun lien de dépendance,

[. . .]

50(1)     Pour l'application de la présente sous-section, lorsque, selon le cas :

a)          un contribuable établit qu'une créance qui lui est due à la fin d'une année d'imposition (autre qu'une créance qui lui serait due du fait de la disposition d'un bien à usage personnel) s'est révélée être au cours de l'année une créance irrécouvrable;

b)          une action du capital-actions d'une société (autre qu'une action reçue par un contribuable en contrepartie de la disposition d'un bien à usage personnel) appartient au contribuable à la fin d'une année d'imposition et :

(i)          soit la société est devenue au cours de l'année un failli au sens du paragraphe 128(3),

(ii)         soit elle est une personne morale visée à l'article 6 de la Loi sur les liquidations, insolvable au sens de cette loi et au sujet de laquelle une ordonnance de mise en liquidation en vertu de cette loi a été rendue au cours de l'année,

(iii)        soit les conditions suivantes sont réunies à la fin de l'année :

(A)        la société est insolvable,

(B)        ni la société ni une société qu'elle contrôle n'exploite d'entreprise,

(C)        la juste valeur marchande de l'action est nulle,

(D)        il est raisonnable de s'attendre à ce que la société soit dissoute ou liquidée et ne commence pas à exploiter une entreprise,

le contribuable est réputé avoir disposé de la créance ou de l'action à la fin de l'année pour un produit nul et l'avoir acquise de nouveau immédiatement après la fin de l'année à un coût nul, à condition qu'il fasse un choix, dans sa déclaration de revenu pour l'année, pour que le présent paragraphe s'applique à la créance ou à l'action.

54 « disposition de biens » Sont compris dans la disposition de biens, sauf dispositions contraires expresses :

a)          toute opération ou tout événement donnant droit au contribuable au produit de disposition de biens;

b)          toute opération ou tout événement par lequel, selon le cas :

(i)          un bien d'un contribuable qui est une action, une obligation, un billet, un certificat, une hypothèque, une convention de vente ou un autre titre semblable, ou bien un droit y afférent, est racheté, en totalité ou en partie, ou est annulé,

(ii) une créance d'un contribuable ou un autre droit qu'a un contribuable de recevoir une somme sont réglés ou annulés,

[. . .]

125(7) « entreprise de placement déterminée » Entreprise, sauf une entreprise exploitée par une caisse de crédit ou une entreprise de location de biens autres que des biens immeubles, dont le but principal est de tirer un revenu de biens, notamment des intérêts, des dividendes, des loyers et des redevances. Toutefois, sauf dans le cas où la société est une société à capital de risque de travailleurs visée par règlement au cours de l'année, l'entreprise exploitée par une société au cours d'une année d'imposition n'est pas une entreprise de placement déterminée si, selon le cas :

a)          la société emploie dans l'entreprise plus de cinq employés à plein temps tout au long de l'année;

b)          une autre société associée à la société lui fournit au cours de l'année, dans le cadre de l'exploitation active d'une entreprise, des services de gestion ou d'administration, des services financiers, des services d'entretien ou d'autres services semblables et il est raisonnable de considérer que la société aurait eu besoin de plus de cinq employés à plein temps si ces services ne lui avaient pas été fournis.

125(7) « entreprise de prestation de services personnels » S'agissant d'une entreprise de prestation de services personnels exploitée par une société au cours d'une année d'imposition, entreprise de fourniture de services dans les cas où :

a)          soit un particulier qui fournit des services pour le compte de la société - appelé « employé constitué en société » à la présente définition et à l'alinéa 18(1)p);

b)          soit une personne liée à l'employé constitué en société, est un actionnaire déterminé de la société, et où il serait raisonnable de considérer l'employé constitué en société comme étant un cadre ou un employé de la personne ou de la société de personnes à laquelle les services sont fournis, si ce n'était de l'existence de la société, à moins :

c)          soit que la société n'emploie dans l'entreprise tout au long de l'année plus de cinq employés à temps plein;

d)          soit que le montant payé ou payable à la société au cours de l'année pour les services ne soit reçu ou à recevoir par celle-ci d'une société à laquelle elle était associée au cours de l'année.

125(7) « entreprise exploitée activement » Toute entreprise exploitée par une société, autre qu'une entreprise de placement déterminée ou une entreprise de prestation de services personnels mais y compris un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial.

248(1) « entreprise exploitée activement » Relativement à toute entreprise exploitée par un contribuable résidant au Canada, toute entreprise exploitée par le contribuable autre qu'une entreprise de placement déterminée ou une entreprise de prestation de services personnels.

248(1) « société exploitant une petite entreprise » Sous réserve du paragraphe 110.6(15), société privée sous contrôle canadien et dont la totalité, ou presque, de la juste valeur marchande des éléments d'actif est attribuable, à un moment donné, à des éléments qui sont :

a)          soit utilisés principalement dans une entreprise que la société ou une société qui lui est liée exploite activement principalement au Canada;

b)          soit constitués d'actions du capital-actions ou de dettes d'une ou de plusieurs sociétés exploitant une petite entreprise rattachées à la société au moment donné, au sens du paragraphe 186(4) selon l'hypothèse que les sociétés exploitant une petite entreprise sont, à ce moment, des sociétés payantes au sens de ce paragraphe;

c)          soit visés aux alinéas a) et b).

Pour l'application de l'alinéa 39(1)c), est une société exploitant une petite entreprise la société qui était une telle société à un moment de la période de douze mois précédant le moment donné; par ailleurs, pour l'application de la présente définition, la juste valeur marchande d'un compte de stabilisation du revenu net est réputée nulle.

[24]     Le témoignage de l'appelant sur la nature des deux opérations pour lesquelles il réclame une PDTPE est pour le moins très ambigu. Il a eu extrêmement de difficulté, durant tout le procès, à préciser sa pensée de façon certaine. Qu'il me suffise de signaler, lors de l'opération avec Acryteck, la difficulté que présente l'année pendant laquelle le chèque a été tiré et le fait qu'il ait été payable à Alain Gamache plutôt qu'à Acryteck, de qui il devait souscrire des actions. Est-ce qu'il s'agissait d'un achat d'actions d'Alain Gamache ou d'Acryteck? Est-ce que la société a finalement reçu ces fonds ou non? Aucun certificat d'actions n'a été émis et les deux chèques non encaissés réfèrent à un prêt. Par la suite, l'appelant a témoigné qu'il voulait acheter la créance ou racheter des actions privilégiées.

[25]     L'appelant n'a présenté aucun témoin pouvant confirmer quoi que ce soit, sauf une lettre non datée d'Alain Gamache produite lors de la vérification et indiquant que la mise de fonds de l'appelant était inscrite au capital-actions d'Acryteck. Alain Gamache n'a pas témoigné et j'accorde très peu d'importance à cet élément de preuve.

[26]     Devant cette ambiguïté, il est difficile de connaître la nature exacte de l'opération. Il semble que le bien en immobilisation soit une créance et non des actions du capital-actions d'Acryteck. Aucune action n'a été émise à l'appelant. Le chèque de 1 500 $ ayant été émis à M. Alain Gamache, cela ne crée pas une créance sur une société exploitant une petite entreprise.

[27]     Lors de l'opération de la Polyclinique, il est encore très difficile de connaître la nature exacte de l'opération. S'agissait-il d'un prêt, ou encore d'une souscription d'actions de la Polyclinique ou d'une société à être constituée? Aucun certificat d'actions n'a été émis au nom de l'appelant. S'il s'agit d'un prêt, aucune modalité de remboursement n'a été discutée. Est-ce que la Polyclinique est une société exploitant une petite entreprise? L'appelant n'a présenté aucune preuve sur cette question.

[28]     Devant ces ambiguïtés, l'appelant n'a pas satisfait au fardeau qui lui incombait. Pour ces motifs, j'en conclus que l'appelant n'a pas subi de perte au titre d'un placement d'entreprise pour les années d'imposition 1997 et 1998.

[29]     Une deuxième déduction refusée à l'appelant pour l'année d'imposition 1998 est décrite comme étant des commissions de 30 000 $ versées à une société. L'appelant a témoigné que son contrat d'emploi avec son employeur ne reflétait pas la réalité, puisqu'il avait son propre bureau et que sa situation ne correspondait pas à celle d'un employé. Il a donc demandé à son employeur, en septembre 1998, s'il pouvait changer de statut au motif qu'il possédait toutes les compétences. Il voulait constituer une société qui allait devenir le représentant de son employeur. Cette demande a toutefois été retardée et ce n'est que le 22 mars 1999 que la London Life signait une convention intitulée « Convention du représentant constitué en société » avec 9071-2852 Québec Inc., société dont les actions sont détenues par l'appelant, et avec une fiducie au bénéfice de son fils et constituée le 7 décembre 1998. Ce document a d'ailleurs été déposé en preuve par l'intimée.

[30]     Le Conseil des assurances de personnes a émis deux certificats à la société 9071-2852 Québec Inc., soit un le 15 mars 1999 et un autre le 30 avril 1999. Ces certificats sont identiques et attestent que la société 9071-2852 s'est conformée aux dispositions de la Loi sur les intermédiaires de marché et du Règlement du Conseil des assurances de personnes et que 9071-2852 est autorisée à exercer ses activités à titre de cabinet.

[31]     L'appelant a déposé un guide publié par la London Life sur la constitution en société qui explique notamment la marche à suivre pour la constitution en société. Je reproduis ci-après cette démarche afin d'illustrer le processus et ses incidences juridiques :

Marche à suivre pour la constitution en société

1.          Soumettre une demande de constitution en société par écrit à son directeur régional. La demande doit être endossée par le directeur régional, le vice-président régional et le vice-président principal.

2.          Choisir une raison sociale après avoir effectué une recherche de raisons sociales, puis établir cette raison sociale conformément aux règles provinciales.

3.          Constituer la société, avec une description détaillée de ses objectifs et de son capital social, et émettre des actions aux actionnaires voulus.

4.          Préparer et rédiger un contrat d'engagement entre la nouvelle société et son employé principal (le représentant).

5.          Remplir la demande d'enregistrement de la société, laquelle peut être obtenue du Service des permis des services extérieurs, au bureau 304. Ce document doit lui être retourné accompagné des détails de la constitution en société, y compris les statuts de constitution et la date de la constitution en société.

6.          En plus de ces documents, le Service des permis des services extérieurs exigera une lettre d'instructions la cession absolue ou une copie d'une convention de rachat afin que les commissions futures soient versé [sic] la société et que les commissions existantes soient transférées du compte personnel du représentant au compte de la société.

7.          La lettre d'instructions devrait préciser que les commissions et les renouvellements futurs seront transfér [sic] du représentant à la société. L'entente devrait également indiquer que le représentant renonce à tous ses droits relativement à toutes les commissions et que toutes les polices doivent être transférées.

8.          Une fois ces documents de cession absolue ou de convention de rachat soumis, toutes les commissions subséquentes seront versées à la société, y compris la commission de première année et les commissions [sic] renouvellement d'assurance-vie individuelle de deuxième et troisième années. Nous encourageons le représentant à discuter des conséquences fiscales de cette cession absolue avec son conseiller fiscal.

9.          Signer devant témoin deux exemplaires du contrat de constitution en société, envoyé par le Service des permis des services extérieurs, une fois que les autorités provinciales auront délivré le certificat d'enregistrement. Ces documents sont retournés au Service des relations avec les services extérieurs, au bureau 314, accompagnés d'un avis officiel de résiliation de la Convention du représentant. Un fondé de pouvoir de la London Life signe les deux exemplaires de la convention et en retourne un au représentant.

10.        Demander au Service des permis des services extérieurs, au bureau 304, de vous fournir une proposition pour participer au régime d'assurance collective des représentants constitués en société. Remplir et retourner la proposition reçue de la Great-West.

11.        Ouvrir un compte de banque au nom de la société pour qu'y soient déposées les paies et se procurer un numéro de téléphone au nom de la société, de même que du papier à lettres è [sic] en-tête et des cartes professionnelles arborant le nom de la société.

12.        Afficher le nom de la société dans les tableaux indicateurs de l'immeuble et, si possible, aux entrées du bureau.

[32]     À partir du moment où l'appelant a pris cette décision en septembre 1998, il a décidé de transférer ses commissions pour octobre, novembre et décembre 1998 à sa société. Ayant reçu de la London Life des commissions pour un montant total de 131 594 $ pour l'année 1998, il a simplement pris les trois-quarts de ses revenus de l'année et a arbitrairement fixé le montant de la commission à 30 000 $. Selon son témoignage, sa société assumait déjà tous ses frais d'exploitation et aurait pris en charge ses contrats avec son employeur. Le 15 décembre 1998, 9071-2852 produisait une facture de 30 000 $ pour les commissions jusqu'au 31 décembre 1998.

[33]     Pour payer le transfert de ses commissions, il explique avoir transféré à sa société le droit d'acquérir des terrains qu'il avait lui-même convenu d'acheter de la Caisse populaire Saint-Thomas d'Aquin. En effet, le 12 novembre et le 18 décembre 1998, l'appelant a remis à la Caisse populaire en question deux chèques, dont un de 25 000 $ et l'autre de 15 000 $, en guise de dépôt pour l'achat de terrains.

[34]     L'opération s'est conclue le 11 mars 1999. Un acte de transfert indiquant 9071-2852 comme acquéreur a été déposé. Dans l'état des rajustements, selon l'appelant, on voit un montant de 40 000 $ en guise d'acompte remis au vendeur. Toujours selon l'appelant, cet acompte correspond au total des deux chèques décrits ci-haut, dont 30 000 $ aurait servi au paiement de la facture de 9071-2852 et 10 000 $, selon l'appelant, aurait servi d'avance à sa société 9071-2852. Aucun document provenant de 9071-2852 n'a été déposé pour confirmer ces états de choses.

[35]     La version des faits de l'appelant revêt encore une dose d'invraisemblance où il est étonnant de constater la facilité avec laquelle l'appelant arrange ses affaires. La société 9071-2852 constituée par l'appelant n'a été capable de toucher des commissions qu'à partir du 15 mars et du 30 avril 2000 selon la preuve documentaire présentée. La société 9071-2852 Québec Inc. a vu le jour le 7 décembre 1998. Le montant de 30 000 $ que l'appelant affirme avoir transféré à sa société n'est en réalité qu'un transfert de commissions et donc de revenu. Il n'a donc pas été déboursé dans le but de tirer un revenu d'un emploi. En l'espèce, il ne s'agit en plus que d'une estimation qui ne reflète en rien la réalité.

[36]     L'appelant n'a corroboré aucun de ses dires par une preuve documentaire quelconque pouvant démontrer que le paiement a réellement été fait à 9071-2852 Québec Inc. Aucun contrat de gestion conclu par l'appelant et la société 9071-2852 ni aucune preuve de la prise en charge des contrats par sa société et la London Life avant mars 1999 n'ont été déposés. À mon avis, il ne s'agit pas ici d'une dépense engagée dans le but de tirer un revenu d'un emploi selon les exigences prévues à l'alinéa 8(1)f) de la Loi. Le ministre avait donc raison de refuser cette dépense.

[37]     Pour ce qui est de ses dépenses d'automobile, l'appelant a déclaré dans sa déclaration de revenus avoir parcouru 20 000 kilomètres en 1998, dont 18 000 km pour les affaires et 2 000 km à des fins personnelles. Dans son témoignage, il a reconstitué à l'aide de son agenda pour 1998 les voyages qu'il a faits en 1998. Selon ses nouveaux calculs, il arrive à 20 500 kilomètres. Il n'a pas noté le nombre total de kilomètres parcourus par sa voiture pour l'année et ne peut donc pas calculer le kilométrage effectué à des fins personnelles. Il ne croit cependant pas avoir dépassé les 24 000 kilomètres que son contrat de location lui permettait. En tout, il soutient que cela correspond à la situation de l'année précédente, où il a réclamé 90% de ses dépenses.

[38]     De son côté, le vérificateur, au moment de sa vérification, n'avait rien pouvant lui permettre d'établir un pourcentage d'utilisation à des fins personnelles, l'appelant ne lui ayant fourni aucun registre de ses déplacements. Il a donc arbitrairement alloué 60 % des dépenses d'automobiles. L'appelant a toutefois témoigné avoir deux voitures et utiliser très rarement sa voiture à des fins personnelles, sauf pour se rendre au travail, une distance d'environ 6 kilomètres.

[39]     Parmi les dépenses d'automobile, l'appelant a réclamé 2 000 $ en dépenses de carburant. Le vérificateur a réduit ce montant à 1 265 $, somme équivalant aux pièces justificatives de l'appelant. Ce dernier n'a rien produit au procès pour justifier le montant de 735 $ manquant. Le vérificateur n'a pas accordé les frais d'assurance-automobile de 750 $, l'appelant n'ayant pas de reçu. Il n'en a pas déposé au procès.

[40]     Sous la rubrique des dépenses de stationnement, seulement 98 $ ont été accordés par le vérificateur de la dépense totale de 600 $ réclamée par l'appelant. Il a déposé en preuve des reçus additionnels de stationnement pour un total de 161,04 $, de même que d'autres reçus indiquant 47 $ au total. L'intimée a consenti à ces deux derniers montants. L'appelant termine sur cette question en disant qu'il s'agit d'argent déposé dans des parcomètres et qu'il n'a pas de reçus.

[41]     Il incombe à l'appelant de faire la preuve des dépenses qu'il réclame. Il est évident en l'espèce que l'appelant utilise des valeurs purement arbitraires et approximatives puisqu'il n'a maintenu aucun registre pouvant lui permettre d'établir le kilométrage parcouru durant son année d'imposition et le pourcentage lié à son travail. Il n'a également produit aucun reçu pouvant justifier le montant de 735 $ pour l'achat d'essence qu'il réclame en sus du 1 265 $ que le vérificateur lui a accordé. Il en va de même pour les frais de stationnement aux parcomètres. L'appelant n'a fourni aucune explication pouvant justifier cette dépense et encore moins pouvant expliquer comment il se fait que la dépense totale correspond au montant rond de 600 $. Cela se reproduit également avec ses autres dépenses. La position du ministre est donc raisonnable dans les circonstances.

[42]     La dernière dépense refusée par le vérificateur est l'achat d'un logiciel de 159 $ pour lequel l'appelant n'a pas de reçu. Selon l'appelant, il aurait payé comptant ce montant à son frère Sylvain Marceau. Il s'agit d'un logiciel de déclaration fiscale pour sociétés qui, à mon avis, n'a rien à voir avec une dépense dans le but de tirer un revenu d'un emploi. Le Ministre a donc correctement refusé cette dépense.

[43]     Les appels sont admis en partie et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations. Vu le succès partagé des parties, je n'accorde aucun dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de septembre 2004.

« François Angers »

Juge Angers


RÉFÉRENCE :

2004CCI585

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2001-2106(IT)G

2002-3202(IT)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Alain Marceau

LIEU DE L'AUDIENCE :

Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

le 3 mai 2004

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'hon. juge François Angers

DATE DU JUGEMENT :

le 27 septembre 2004

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

Pour l'intimée :

Me Janie Payette

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER:

Pour l'appelant :

Nom :

Étude :

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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