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Dossier : 2001-2831(GST)G

ENTRE :

AIRPORT AUTO LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 25 août 2003 à Fredericton (Nouveau-Brunswick)

Devant : L'honorable juge Diane Campbell

Comparutions

Avocat de l'appelante :

Me Eugene J. Mockler, c.r.

Avocat de l'intimée :

Me Peter J. Leslie

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 27 avril 2000, pour la période du 1er janvier 1997 au 31 octobre 1998, et porte le numéro 01FE0100205, est accueilli, avec dépens, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de septembre 2003.

« Diane Campbell »

Juge Campbell

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de mars 2004.

Liette Girard, traductrice


Référence : 2003CCI683

Date : 20030930

Dossier : 2001-2831(GST)G

ENTRE :

AIRPORT AUTO LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Campbell

[1]      Le 27 avril 2000, un Avis de cotisation a été émis en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) pour la période du 1er janvier 1997 au 31 octobre 1998. Cet avis a été établi à l'égard de l'appelante parce qu'elle a omis de verser la TPS et la TVH sur certaines transactions relatives à un véhicule et qu'elle a fait des adaptations pour réclamer des crédits de taxe sur les intrants. Des pénalités ont également été imposées.

[2]      Au début de l'audience, les avocats des parties ont déposé un exposé conjoint partiel des faits ainsi qu'un consentement partiel à jugement. En conséquence, aucune preuve n'a été entendue. Les avocats n'ont fait que présenter leurs observations.

[3]      L'appelante, une société constituée en personne morale en vertu des lois de la province du Nouveau-Brunswick, exploite une entreprise de véhicules d'occasion à Moncton. Elle exploite une entreprise de voitures d'occasion depuis presque 25 ans. Je reproduis l'exposé conjoint partiel des faits puisqu'il contient les renseignements généraux essentiels :

                   [traduction]

EXPOSÉ CONJOINT PARTIEL DES FAITS

L'appelante et l'intimée, par la voix de leur avocat, reconnaissent les faits suivants, dans la mesure où : 1) ces admissions sont faites pour les besoins de la procédure uniquement et 2) les parties peuvent présenter des éléments de preuve supplémentaires qui ne sont pas contraires aux présents faits admis.

1.          L'appelante était un inscrit aux fins de la TPS et a reçu le numéro d'inscription 100094713RT0001 aux fins de la TPS.

2.          L'appelante était une société s'adonnant à la vente de véhicules à moteur.

3.          L'appelante était tenue par la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, dans sa version modifiée, (la « Loi » ) de produire ses déclarations de TPS tous les trois mois.

4.          Pendant toute la période pertinente, le directeur de l'exploitation et l'âme dirigeante de l'appelante était David Taylor.

5.          Durant la période en litige, l'appelante a acheté des véhicules à moteur auprès de Eagle Auto Sales Ltd. et de Belair Auto Ltd., comme l'indique l'annexe A ci-joint.

6.          Les montants indiqués à l'annexe A sous la mention « TPS et TVH payées » ont été indiqués à ce titre sur les factures d'achat et déclarés par l'appelante en tant que crédits de taxe sur les intrants dans ses déclarations produites pour la période en litige. Les montants indiqués ont en fait été payés par l'appelante à Eagle Auto Sales Ltd. et à Belair Auto Ltd.

7.          Ni Eagle Auto Sales Ltd. ni Belair Auto Ltd. n'a produit de déclarations de TPS/TVH pendant la période en litige, et elles n'ont pas non plus versé d'argent au titre de la TPS et de la TVH.

8.          Le ministre a entrepris des mesures de recouvrement contre Eagle Auto Sales Ltd. et a déposé un jugement devant la Cour fédérale en vertu de cette mesure. Aucune mesure de recouvrement n'a été entreprise contre Belair Auto Ltd.

9.          En ce qui concerne les transactions énumérées à l'annexe A, l'appelante a conservé tous les registres nécessaires exigés par la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, dans sa version modifiée, et les politiques administratives du ministre et elle a respecté ces exigences.

[4]      L'appelante achetait des véhicules auprès de Eagle Auto Sales ( « Eagle » ) et de Belair Auto ( « Belair » ). Les factures comportaient des montants de TPS et de TVH. L'appelante a payé tous les montants requis pour la TPS et la TVH, à l'égard de chaque véhicule acheté auprès de Eagle et de Belair. Ces montants ont été versés à Eagle et à Belair dans chacun des cas. Ce fait n'est pas contesté, et rien n'indique qu'il y a eu fraude ou collusion en l'espèce. Le problème est survenu lorsque Belair et Eagle n'ont pas versé la taxe touchant ces transactions qui était due au ministre en vertu de la Loi. Il n'est pas contesté que ces transactions constituaient des fournitures légitimes et que l'appelante, en tant qu'acquéreur des fournitures, a payé la taxe requise imposée par les fournisseurs, Belair et Eagle. Le ministre tente maintenant de percevoir la taxe auprès de l'appelante, ce qui reviendrait à faire payer cette taxe par l'appelante une deuxième fois.

[5]      Il s'agit simplement de se demander si le ministre peut percevoir la taxe d'un contribuable qui l'a déjà payée au fournisseur à l'égard d'une fourniture légitime mais que le fournisseur a omis de verser. En d'autres termes, l'appelante doit-elle payer les taxes une deuxième fois lorsque le vendeur ou le fournisseur (Belair et Eagle) n'a pas versé la taxe qu'elle lui a payée pour chacun des achats de véhicule?

[6]      Le paragraphe 165(1) de la Loi constitue la principale disposition d'application de la section II, qui impose une taxe à chaque acquéreur d'une fourniture taxable de la façon suivante :

Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l'acquéreur d'une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 7 % sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

[7]      En vertu des articles 225 et 228 de la Loi, les fournisseurs de la fourniture taxable (Belair et Eagle) doivent produire des déclarations et verser la taxe nette appropriée. En l'espèce, même si l'appelante a payé la taxe requise pour chaque achat de véhicule, les fournisseurs n'ont pas versé la taxe qui avait été payée par l'appelante.

[8]      Les dettes envers le ministre sont récupérables en vertu de l'article 313 de la Loi. Cependant, le paragraphe 315(1) précise que le ministre ne peut prendre de mesures de recouvrement relativement à un montant susceptible de cotisation que si le montant a fait l'objet d'une cotisation par le ministre. Par conséquent, la Loi prévoit des procédures de recouvrement à l'égard de cotisations touchant des montants à payer ou à verser. L'appelante a soutenu que lorsqu'elle a payé la taxe sur les véhicules, elle a rempli son obligation imposée par la loi. L'omission en l'espèce est celle de Eagle et de Belair de verser la taxe.

[9]      L'article 296 prévoit les cotisations établies par le ministre. L'alinéa 296(1)a) permet au ministre d'établir une cotisation pour déterminer la taxe nette prévue à la section V. L'alinéa 296(1)b) permet au ministre d'établir une cotisation pour déterminer la taxe payable en application de la section II (ainsi que IV ou IV.1), ce qui comprend le paragraphe 165(1) de la Loi. Les alinéas 296(1)a) et b) sont ainsi rédigés :

Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire pour déterminer :

a)          la taxe nette d'une personne, prévue à la section V, pour une période de déclaration;

b)          la taxe payable par une personne en application des sections II, IV ou IV.1;

[10]     C'est cet alinéa, 296(1)b), que le ministre a utilisé pour établir une cotisation à l'égard de l'appelante pour déterminer son assujettissement à l'impôt. Selon l'intimée, cet alinéa permet au ministre d'établir une cotisation à l'égard de l'appelante, dans les circonstances de l'espèce, où la taxe a été payée au vendeur ou au fournisseur pour chaque transaction. Il n'y a certainement pas d'allégation de fraude ou de collusion en l'espèce, mais l'intimée soutient que la motivation ou l'état d'esprit d'un contribuable ne constitue pas une condition préalable pour que ce dernier soit trouvé responsable en vertu de l'alinéa 296(1)b).

[11]     L'intimée soutenait que le paragraphe 334(2) est précis et non équivoque lorsqu'il précise ceci :

Le paiement ou versement qu'une personne est tenue de faire en application de la présente partie n'est réputé effectué que le jour de sa réception par le receveur général.

L'intimée a utilisé ce paragraphe pour faire valoir que la responsabilité d'un contribuable à l'égard de la taxe demeure tant que le receveur général n'a pas reçu la taxe payable, au titre de l'assujettissement à l'impôt des inscrits. L'intimée a soutenu qu'il s'agit d'une loi fiscale et qu'il faut tenir compte de l'application de la Loi dans son ensemble, ce qui comprend les crédits aux contribuables qui demandent des crédits de taxe sur les intrants. Le paragraphe 225(1) de la Loi prévoit une formule selon laquelle la taxe nette d'un inscrit est calculée, comme toutes les taxes perçues et devant être perçues, moins tous les crédits de taxe sur les intrants admissibles. L'article 228 exige qu'un inscrit calcule sa taxe nette pour chaque période de déclaration et de verser le montant dû. Subsidiairement, un inscrit peut demander le remboursement d'un crédit auprès du ministre si le calcul de la taxe nette a un résultat négatif. L'intimée soutient que, même si le paragraphe 221(1) exige qu'un vendeur ou un fournisseur perçoive la taxe à titre de mandataire de la Couronne, c'est le libellé du paragraphe 334(2) qui précise clairement que l'acheteur ou l'acquéreur sera réputé ne pas avoir payé la taxe si cette dernière n'est pas reçue par le receveur général. L'intimée invoque ensuite l'alinéa 296(1)b) pour faire valoir qu'un acheteur ou un acquéreur d'une fourniture peut faire l'objet d'une cotisation à l'égard de la taxe, même si cette dernière a été payée par cet acheteur ou cet acquéreur, dans l'éventualité où le receveur général n'a pas reçu la taxe due par le vendeur ou le fournisseur.

[12]     Je souscris à l'interprétation faite par l'appelante de ces dispositions. L'alinéa 296(1)b) précise que le ministre peut établir une cotisation pour déterminer la « taxe payable » en vertu de la section II de la Loi. Cela comprendrait le paragraphe 165(1). Pour que l'alinéa 296(1)b) s'applique, il doit y avoir une taxe payable en vertu de la section II. En l'espèce, l'appelante a payé la taxe requise à Eagle et à Belair selon les factures pour chaque achat de véhicule, et il n'y avait donc plus de taxe payable. Lorsque le paragraphe 165(1) est la disposition d'application, l'alinéa 296(1)b) est la disposition permettant l'établissement de la cotisation. Comme l'appelante est l'acquéreur de la fourniture et qu'elle a payé toutes les taxes dues, il ne peut y avoir de taxe payable. L'alinéa 296(1)b) ne peut s'appliquer dans les circonstances puisque l'appelante n'a pas à payer de taxe.

[13]     L'appelante s'est fondée sur les commentaires du juge Hamlyn dans l'affaire Carlson & Associates Advertising Ltd. c. Canada,[1997] A.C.I. no 966 au paragraphe 34 :

Une fois que la taxe est payée, il n'y a plus de taxe payable, et ce fait constituerait une défense complète pour faire rejeter toute autre procédure de perception intentée contre l'appelante ou toute autre personne. (Je souligne.)

[14]     Dans l'affaire Carlson, la contribuable n'avait pas payé la taxe. L'appelante et contribuable en l'espèce a toutefois payé la taxe requise. Lorsque la taxe est payée, je souscris aux remarques du juge Hamlyn selon lesquelles cette taxe n'est plus payable et que le paiement constitue un moyen de défense complet à l'égard de toute procédure de recouvrement contre le contribuable visé. Cette décision a été maintenue par la Cour d'appel fédérale [1998] A.C.F no 423. Au paragraphe 33 de la décision, le juge Hamlyn a déclaré ce qui suit :

[...] La possibilité d'une « double taxation » est réduite dans la mesure où le ministre est uniquement habilité à demander le paiement du montant de la TPS non payée, que ce soit par le fournisseur ou par l'acquéreur d'une fourniture taxable, tant que la taxe est payable.

Certes, le cas d'un contribuable ou d'un acquéreur devant payer la TPS ou la TVH non payée sur une fourniture taxable ne peut être comparé à celui d'un contribuable ou d'un acquéreur devant payer une nouvelle fois la taxe que le fournisseur a omis de verser. Dans le premier cas, la taxe n'a jamais été payée par le contribuable au vendeur de la fourniture. Le contribuable ne paie pas deux fois lorsque le paiement requis vise le montant qui aurait dû être payé au vendeur au départ et qui ne l'a jamais été. Dans le deuxième cas, le contribuable ou l'acquéreur a payé la taxe requise lors de l'achat de la fourniture auprès du vendeur ou du fournisseur mais cette dernière n'a jamais été versée par ce vendeur.

[15]     La deuxième partie de l'argument de l'appelante exige la détermination de la question de savoir si l'appelante ou l'acquéreur a rempli l'obligation de payer la taxe après avoir payé les vendeurs (Eagle et Belair), en leur qualité de mandataire de la Couronne.

[16]     Le paragraphe 221(1) crée une relation de mandataire dans le cadre de laquelle le vendeur ou le fournisseur devient un mandataire du receveur général lorsqu'il perçoit la taxe sur les fournitures taxables. Ce paragraphe précise ce qui suit :

La personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II.

[17]     Bien que le paragraphe 165(1) impose une taxe payable par les acquéreurs de fournitures taxables, le paragraphe 221(1) établit clairement que les vendeurs ou fournisseurs sont des mandataires pour ce qui est de la perception de la taxe. L'appelante soutient que lorsqu'un contribuable paie la taxe imposée sur une fourniture au vendeur qui devient le mandataire de la Couronne, la dette devient alors éteinte en vertu de cette disposition. L'intimée soutient que même si le paragraphe 221(1) crée une relation de mandataire, il ne s'agit pas d'une [TRADUCTION] « relation de mandataire régulière » .

[18]     En dépit de l'argumentation habile de Me Peter Leslie au nom de la Couronne, je ne peux souscrire à son analyse. Je ne vois rien dans le libellé du paragraphe 221(1) qui crée une relation de mandataire autre que l'habituelle relation envisagée par le droit en matière de mandat. Le libellé de l'article est clair. Il fait de la Couronne un bénéficiaire des sommes perçues par le vendeur d'une fourniture. Si l'on applique le simple droit en matière de mandat en l'espèce, une fois que le contribuable a payé la taxe au vendeur, qui est considéré comme un mandataire de la Couronne en vertu du paragraphe 221(1), l'acquéreur a effectivement payé la taxe. Il s'ensuit que le vendeur détient en fait ces sommes, payées par l'acquéreur, en tant que mandataire de la Couronne, et cette dernière devient un bénéficiaire de ces sommes.

[19]     Bien que le paragraphe 165(1) impose l'obligation législative de payer la taxe, un mandataire a l'obligation imposée par la loi de verser les sommes perçues au receveur général. Les montants payés au vendeur à titre de la taxe sur une fourniture deviennent des fonds en fiducie, ce qui donne à la Couronne tous les recours d'une relation fiduciaire, notamment le suivi de fonds. Lorsque les sommes perçues deviennent des fonds en fiducie, la Couronne possède automatiquement un intérêt dans ces sommes en tant que bénéficiaire désigné. Le paragraphe 221(1) parle d'un vendeur percevant une « taxe payable » , mais en l'espèce, la taxe a été payée. Lorsqu'un contribuable acquiert une fourniture et paie la taxe sur la fourniture au vendeur, la responsabilité du contribuable de payer cette taxe est étendue. Je ne peux interpréter la Loi d'une autre façon. La conclusion logique est simplement qu'en l'absence de fraude ou de collusion, lorsque l'acquéreur paie la taxe à un vendeur, en sa qualité de mandataire de la Couronne, l'acquéreur n'est plus responsable de la taxe. Tout autre résultat serait ridicule.

[20]     L'appelante s'est fondée sur l'énoncé de politique P-112R du gouvernement pour appuyer sa position. Il précise ce qui suit :

[...] En général, l'ADRC n'intervient pas pour établir la taxe payable par l'acquéreur en application de l'article 165. Cependant, dans le cas où il y a une perte de recettes possible, le Ministre peut exercer son pouvoir aux termes de l'alinéa 296(1)b) de la LTA et établir une cotisation à l'égard de l'acheteur insolvable ou failli pour la TPS/TVH non payée à un fournisseur.

Il n'est pas nécessaire de formuler d'autres commentaires à l'égard de cet énoncé à la lumière de mon interprétation des dispositions pertinentes, sauf pour déclarer qu'il étaye mon interprétation des articles puisqu'il laisse entendre que le gouvernement n'intentera pas d'action contre un acquéreur à moins que la taxe n'ait pas été payée au vendeur.

[21]     Dans l'énoncé de politique P-012R du gouvernement, Responsabilité de verser une taxe nette sur le transfert des éléments d'actif d'une entreprise, 9 avril 1992, révisé le 4 janvier 1999, on précise ce qui suit :

[...] En règle générale, l'acquéreur d'une fourniture est tenu, en application de l'article 165 de la section II, de payer une taxe sur la fourniture, et le fournisseur est tenu, aux termes de l'article 221, de percevoir ce montant auprès de l'acquéreur. Normalement, ni l'une ni l'autre de ces personnes n'est tenue d'assumer l'obligation fiscale de l'autre personne.

Cet énoncé de politique poursuit en explorant les circonstances dans le cas où les deux parties deviennent responsables conjointement. Il convient également de noter que cet énoncé de politique vise les transferts d'éléments d'actif d'une entreprise. Cependant, il précise que « normalement » ni l'une ni l'autre de ces personnes n'est tenue d'assumer l'obligation fiscale de l'autre personne.

[22]     En résumé, en réponse à la principale question en l'espèce, qui est celle de savoir si la contribuable appelante ou la Couronne supporte le fardeau fiscal lorsqu'un vendeur n'a pas versé la taxe qu'il avait reçue, j'ai conclu que c'était la Couronne et non l'appelante. Le régime législatif établit que les vendeurs qui perçoivent la taxe sur une fourniture le font en tant que mandataires de la Couronne. L'omission en l'espèce est celle de verser la taxe perçue auprès de l'appelante. Permettre à la Couronne de percevoir la taxe pour une deuxième fois auprès de ce contribuable, alors qu'il n'y a pas eu fraude ou collusion, nécessiterait un libellé de la loi très explicite. Ce n'est le cas pour aucune des dispositions pertinentes. Bien que le paragraphe 334(2) prévoie que l'acquéreur d'une fourniture est réputé ne pas avoir payé la taxe, si elle n'est pas reçue par le receveur général, je ne crois pas que cela avait pour but d'obtenir le paiement de la taxe une deuxième fois auprès d'un contribuable acquéreur qui l'avait déjà payée. Si je devais interpréter le paragraphe 334(2) de cette manière, je ne peux qu'envisager une foule de complications ridicules, lorsque le fardeau est placé sur les acquéreurs qui consacreront du temps, de l'argent et de l'énergie pour s'assurer que la taxe qu'ils versent à un vendeur lors de l'acquisition d'une fourniture parvient au receveur général dans chaque cas. Je ne crois pas que la loi avait pour objectif de placer chaque acquéreur dans une situation aussi précaire. En effet, chaque acquéreur serait tenu de vérifier si un vendeur a versé la taxe perçue. Ce serait le cas pour l'achat d'un article de 20 $ ou de 20 000 $. En termes simples, le sens commun dicte que le paragraphe 334(2) ne peut être interprété de façon aussi littérale qu'il imposerait des exigences impossibles à chaque acquéreur qui achète une fourniture taxable. On ne peut concevoir que l'on ait eu l'intention d'utiliser le paragraphe 334(2) de façon à ce que la Couronne puisse établir une cotisation à l'égard d'un acquéreur pour la taxe en vertu de l'article 296 dans des circonstances où le vendeur a perçu la taxe sur les fournitures dans le premier cas, mais qu'il n'a pas versé l'argent au ministre.

[23]     L'appel est accueilli avec dépens, au motif que l'alinéa 296(1)b) de la Loi, en l'absence de fraude ou de collusion, ne peut être interprété de façon à permettre au ministre de percevoir la taxe auprès de l'appelante, alors que cette dernière a déjà payé la taxe au vendeur ou au fournisseur.

[24]     Avant que j'entende les observations, l'appelante a présenté un Avis de requête pour modifier l'Avis d'appel. Plusieurs modifications ont été demandées, et l'intimée ne s'est opposée qu'à une seule, le droit de l'appelante d'inclure un argument fondé sur la Déclaration canadienne des droits, L.C. 1960, ch. 44, al. 1a). J'ai accueilli la requête de l'appelante pour modifier l'Avis d'appel, en accordant du temps à l'intimée et à l'appelante pour fournir des observations écrites sur la modification touchant la Déclaration canadienne des droits. Bien entendu, ces observations n'étaient requises que si j'avais tranché l'appel en faveur de l'intimée. Comme j'ai accueilli l'appel, d'autres observations portant sur la Charte et la Déclaration canadienne des droits ne sont plus nécessaires.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de septembre 2003.

« Diane Campbell »

Juge Campbell

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de mars 2004.

Liette Girard, traductrice

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