Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20020715

Dossier: 2000-3477-GST-I

ENTRE :

JEAN-MARIE PLAMONDON,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Angers, C.C.I.

[1]            L'appelant interjette appel à l'encontre d'une cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) relativement à la taxe sur les produits et services ( « TPS » ). La question faisant l'objet du présent appel est celle de savoir si, étant donné l'omission de Bar les yeux bleus inc. de payer la taxe, l'appelant, monsieur Jean-Marie Plamondon, est tenu de verser un montant de taxe nette en vertu du paragraphe 323(1) de la Loi ainsi que les intérêts et les pénalités y afférents. La cotisation en date du 8 juin 1999 couvre la période allant du 30 juin 1996 au 31 octobre 1997. Elle fut ratifiée par le ministre du Revenu (le « Ministre » ) le 16 mai 2000.


Faits

[2]            L'appelant Jean-Marie Plamondon est âgé de 71 ans et demeure à St-Raymond (Québec). Il est à la retraite depuis six ans, soit depuis le transfert à son fils de son entreprise dans le domaine de l'automobile. Il exploitait cette entreprise depuis 1970 avec d'autres actionnaires puis, éventuellement, seul avec son fils jusqu'à la vente de l'entreprise à ce dernier. Avant d'exploiter cette entreprise, il a exploité un poste d'essence avec service. Il a réussi à faire grimper le chiffre d'affaire de son entreprise, qui est passé de 100 000 $ au début des années 1970 à plus de 4 à 5 millions de dollars dans les années 1995 et 1996.

[3]            Au tout début de sa retraite, soit en 1996, après la vente de sa participation dans cette entreprise, il a investi une partie de son argent dans une société connue sous le nom de Bar les yeux bleus inc. Cette société exploitait un bar à Drummondville (Québec), soit à quelques 160 kilomètres de sa résidence. La société appartenait à quatre actionnaires, dont un dénommé Daniel Côté, qui était le beau-frère du fils de l'appelant. Il fit la connaissance de Daniel Côté en 1996 et, le 2 juillet de cette même année, l'appelant et Daniel Côté signaient une convention d'achat des actions des trois autres actionnaires dans une proportion telle que l'appelant et Daniel Côté devenaient respectivement détenteurs à parts égales de toutes les actions émises de la société Bar les yeux bleus inc.

[4]            Le prix d'achat de ces actions était symbolique. Cela était sans aucun doute dû au fait que l'état financier annexé à la convention d'achat des actions laissait voir que la société en question au 31 décembre 1995 avait réalisé une perte de 51 522 $. Dans un extrait du procès-verbal d'une assemblée des administrateurs de la société en date du 7 juin 1996, on peut lire que l'appelant, à cette date, a été nommé administrateur, qu'il occupait le poste de secrétaire-trésorier et que Daniel Côté était son président.

[5]            Les nouveaux actionnaires s'engageaient dans cette même convention à voir à ce que la société rembourse ce qu'elle devait aux actionnaires-vendeurs. Des modalités de remboursement étaient prévues à cet effet dans la convention, dont un paiement de 18 000 $ au moment de la signature. De plus, on y reconnaissait que des charges fiscales étaient dues et exigibles en raison d'un déficit né dans les derniers mois d'exploitation. Aucun montant n'était toutefois indiqué.

[6]            Selon l'appelant, lui et monsieur Côté devaient faire des mises de fonds égales dans la société mais cela ne s'est pas produit. Au début de sa participation, l'appelant a investi près de 35 000 $ dans la société. Par la suite, il a effectué une série de mises de fonds à différents intervalles, totalisant 108 665,30 $. Une partie de cet argent provenait de son Régime enregistré d'épargne retraite. Ces mises de fonds ont permis à la société de respecter ses engagements envers ses créanciers, notamment le Ministre.

[7]            L'appelant a témoigné qu'il s'est embarqué dans cette aventure pour venir en aide à Daniel Côté. Il croyait qu'une gestion plus serrée, des coupures de dépenses et des augmentations dans les ventes assureraient un meilleur rendement. Il croyait aussi que Daniel Côté possédait les habilités nécessaires pour atteindre cet objectif car l'appelant ne participait pas à la gestion quotidienne de la société. En fait, le Bar les yeux bleus inc. était géré et dirigé par Daniel Côté. L'appelant a témoigné que tout allait bien jusqu'à ce que le ministère du Revenu du Québec (MRQ), la CSST et la SOCAM (droits d'auteurs) réclament leur dû en septembre 1996.

[8]            Le fonds de roulement de la société ne suffisant pas pour acquitter les montants dus aux agences gouvernementales, l'appelant a dû faire d'autres mises de fonds pour permettre à la société de respecter toutes ses obligations. L'appelant a témoigné avoir contacté très souvent la comptable de la société, madame Josée Béchard, pour s'enquérir à propos du rendement de la société. Elle le rassurait en lui disant que la société était serrée mais qu'elle allait se tirer d'affaires. De plus, l'appelant s'est rendu voir madame Béchard à quelques reprises. Il se fiait à elle pour évaluer la rentabilité de la société. Elle lui télécopiait les états financiers maison et, sur ceux d'octobre 1996, les sommes réclamées par le MRQ, la CSST et la SOCAM étaient nettement inférieures à celles qu'ils ont éventuellement exigées. Madame Béchard était membre d'un cabinet comptable qui était indépendant de la société et elle avait comme mandat de faire la tenue de livres de la société de même que de produire les déclarations de TPS et de TVQ sur une base mensuelle.

[9]            Les sommes dues au MRQ se rapportaient à une créance qui aurait pris naissance avant l'achat des actions par l'appelant. Ce dernier savait que les déclarations de TPS et de TVQ devaient être faites mensuellement et, selon lui, elles étaient préparées par la comptable. En fait, il affirme que toutes les déclarations ont été faites car la société a été facturée par madame Béchard pour ce travail, ainsi que le démontre une série de factures pour des honoraires professionnels se rapportant à la production des déclarations de TPS allant de juillet 1996 jusqu'à juillet 1997 et produites sous la cote A-19.

[10]          En décembre 1996, l'appelant et Daniel Côté ont rencontré les représentants du Ministre pour négocier, au nom de la société, les modalités de remboursement de la dette. Ils ont convenu qu'un paiement initial de 1 300 $ allait être fait le 23 janvier 1997 et qu'une série de onze chèques de 2 500 $ chacun, encaissables à chaque mois subséquent, seraient affectés au solde. L'appelant a témoigné qu'après décembre 1996, la comptable faisait certaines vérifications à l'occasion afin de s'assurer que les caisses internes correspondaient à l'information déclarée dans ses déclarations mensuelles de TPS et de TVQ. Les déclarations de TPS produites en preuve par l'appelant portaient sur les mois de février, de mars et de mai de l'année 1997 et les chèques de remboursement de TPS produits en preuve portaient sur la période de janvier à mai 1997. Selon monsieur Pierre Lévesque, agent de recouvrement fiscal pour le Ministère, les déclarations de TPS ont été fournies jusqu'à juin 1997. Quoique l'appelant eu le pouvoir d'apposer sa signature sur les chèques de remboursement de TPS, ces derniers ont tous été signés par Daniel Côté.

[11]          En contre-interrogatoire, l'appelant a réitéré sa satisfaction quant au rendement de la société que reflétait le bilan d'octobre 1996. Il a déclaré que c'est la facture inattendue de 25 000 $ du MRQ qui les a déroutés. Il a dit avoir avisé Daniel Côté à ce moment-là de cesser de fournir des primes aux clients. Sa confiance envers Daniel Côté n'a pas été mise en doute puisque la cause des problèmes financiers était antérieure à 1996. Il a donc continué à se fier à lui. Il a déclaré toutefois que cette confiance envers les autres lui avait déjà coûté 25 000 $, somme qu'il avait investie dans un restaurant appartenant à son gendre et qu'il a éventuellement perdue.

[12]          La société a mis fin à ses activités en novembre 1997. Monsieur Pierre Lévesque, agent de recouvrement fiscal, a expliqué les démarches entreprises par le Ministère afin de récupérer les sommes dues par la société en ce qui concerne notamment la TPS et la TVQ. Au moment où le dossier lui a été confié en février 1997, la société était en retard mais tout a été réglé à la suite de l'entente de décembre 1996 et de janvier 1997. Par la suite, il n'y a pas eu d'autres retards. L'entente a été respectée, les déclarations mensuelles ont été fournies et les chèques ont été encaissés jusqu'à la fin de l'été 1997. La déclaration de juillet et août 1997 n'ayant pas été produite, il a procédé à une demande de cautionnement pour mettre fin à cette entente. Il a expliqué que le Ministère a obtenu un jugement contre la société et qu'il a procédé à une vérification. Un nouveau jugement contre la société a été obtenu après la vérification et le Ministère a tenté de saisir les biens de la société mais sans succès.

[13]          La vérification du Ministère a permis de constater que la société n'avait pas versé de TPS sur les primes offertes aux clients. En conséquence, le montant de la TPS due a augmenté de façon considérable.

[14]          En contre-interrogatoire, l'avocat de l'appelant a tenté de jeter un doute sur le montant cotisé par le Ministère et surtout sur la période que couvre la cotisation. Il a aussi voulu soulever un doute sur le sens que pouvait avoir pour la société les avis de cotisation et d'autres documents, étant donné que le nom de la société qui y figurait pouvait faire naître une certaine ambiguïté. Toutefois, les tentatives de l'avocat de l'appelant ont échoué. Je suis convaincu que la cotisation étblie par le Ministre couvre seulement la période où l'appelant était un administrateur de la société, que le jugement de la Cour fédérale a été rendu contre la société en question et qu'il ne restait plus de biens de la société à saisir. Le montant de la cotisation et les montants adjugés par la cour contre la société n'ont pas été contestés par cette dernière et aucune preuve contraire n'a été présentée.

[15]          Plusieurs documents faisant état des témoignages rendus par l'appelant et de l'intervention des agents du Ministre dans leurs efforts pour récupérer les taxes dues par cette société ont été déposés en preuve. La position du Ministre a été bien défendue dans un mémoire d'opposition de leur conseillère juridique et auquel l'appelant a souscrit sauf évidemment en ce qui concerne les conclusions. Un jugement de la Cour du Québec concernant les parties à la convention d'achat d'actions a également été déposé. Je ne suis pas lié par les conclusions de fait énoncées dans ce jugement, mais les parties ont convenu de les déposer. Je suis conscient des difficultés éprouvées par l'appelant, en particulier celles concernant Daniel Côté.

Analyse

[16]          Les dispositions législatives pertinentes au présent litige se trouvent à l'article 323 de la Loi :

323. (1) Responsabilité des administrateurs — Les administrateurs de la personne morale au moment où elle était tenue de verser une taxe nette comme l'exigent les paragraphes 228(2) ou (2.3), sont, en cas de défaut par la personne morale, solidairement tenus, avec cette dernière, de payer cette taxe ainsi que les intérêts et pénalités y afférents.

323. (2) Restrictions — L'administrateur n'encourt de responsabilité selon le paragraphe (1) que si :

(a) un certificat précisant la somme pour laquelle la personne morale est responsable a été enregistré à la Cour fédérale en application de l'article 316 et il y a eu défaut d'exécution totale ou partielle à l'égard de cette somme;

(b) la personne morale a entrepris des procédures de liquidation ou de dissolution, ou elle a fait l'objet d'une dissolution, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant le premier en date du début des procédures et de la dissolution;

(c) la personne morale a fait une cession, ou une ordonnance de séquestre a été rendue contre elle en application de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant la cession ou l'ordonnance.

[17]          L'appelant s'appuie sur la défense de diligence raisonnable qui est prévue au paragraphe 323(3) et qui se lit comme suit :

323. (3) Diligence — L'administrateur n'encourt pas de responsabilité s'il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement visé au paragraphe (1) que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

[18]          Dans ses arguments, l'avocat de l'intimée a beaucoup insisté sur le fait que l'appelant était un homme d'affaires averti et expérimenté. Il a ajouté que l'appelant avait été naïf de se fier au président Daniel Côté et qu'il n'avait rien fait pour prévenir l'omission de verser la taxe nette comme l'exigeait la Loi. Je crois que la décision de l'appelant d'investir dans cette société n'était certainement pas motivée par ce que recherche en temps normal un homme d'affaires expérimenté et averti, soit un rendement raisonnable résultant de la réalisation de profits. Les états financiers de la société au moment de l'acquisition des actions par l'appelant laissaient guère présager un rendement profitable. Il n'y a aucun doute que l'appelant a pris un risque important en achetant des actions dans cette société. La convention d'achat des actions laissait la porte ouverte à toutes sortes de surprises, dont les charges gouvernementales non identifiées et non quantifiées qui ont éventuellement porté le coup fatal à ce qui était déjà une entreprise fragile. Le fait que l'établissement commercial était situé à 160 km de la résidence de l'appelant, que ce dernier était à la retraite et que la société avait des obligations financières à respecter et à payer au moment de la signature de la convention d'achat des actions sont tous des indices contribuant au risque. La preuve n'a pas révélé de façon précise les raisons qui ont motivé l'appelant à investir dans l'entreprise, sauf celle que Daniel Côté était le beau-frère de son fils.

[19]          L'appelant a donc choisi d'investir dans cette société et il nous a témoigné sa confiance en Daniel Côté d'en faire un succès. Il a dit en fait que le rendement était satisfaisant jusqu'au moment où la société fut informée qu'elle devait des sommes substantielles aux deux ministères du Revenu, à la CSST et à la SOCAM. Il était au courant du montant de ces créances qui figurait aux états financiers mais n'a vraiment réalisé l'ampleur des montants qu'après l'achat des actions. Malgré tout, l'appelant a intervenu personnellement dans le règlement de cette dette et a négocié une entente de remboursement avec le Ministère. Il a de plus fait des mises de fonds additionnelles dans la société pour que cette dernière puisse respecter ses obligations financières. Il est devenu conscient des difficultés de la société à faire ses versements de TPS et autres au mois de décembre 1996, soit à peine cinq mois après être devenu actionnaire-administrateur.

[20]          Il a témoigné avoir communiqué à quelques reprises avec Josée Béchard, une comptable indépendante retenue par la société, afin de s'enquérir de la situation financière de la société, de s'assurer que les déclarations de TPS et de TVQ étaient préparées, soumises et payées et de s'assurer que la société respectait ses obligations financières envers tous ses créanciers.

[21]          Il a continué à faire des mises de fonds personnelles et ce de façon régulière, non seulement durant l'automne de 1996, mais aussi en 1997, soit de janvier à juillet et aussi en octobre 1997. La société a effectivement été facturée par cette comptable pour avoir produit les déclarations de TPS de la société à partir de la date du début de la participation de l'appelant jusqu'à la cessation des activités de l'établissement. L'appelant n'avait donc aucune raison de penser que Daniel Côté ne fournissait pas à la comptable toute l'information nécessaire à la production des déclarations de TPS et de TVQ et il n'avait aucune raison d'en douter. En fait, ce n'est qu'après la vérification par les agents du Ministère qu'il a réalisé que la TPS n'avait pas été payée et qu'elle se rapportait principalement à des primes offertes aux clients par Daniel Côté.

[22]          L'appelant, en raison des contacts qu'il avait avec Daniel Côté et la comptable, de la vérification des factures par cette dernière, et des mises de fonds régulières qu'il effectuait, était convaincu que les déclarations de TPS étaient produites et les remises faites. Les déclarations ont effectivement été produites et la taxe nette versée jusqu'à la fin de juin 1997.

[23]          J'en conclus que l'appelant était un administrateur externe de cette société, qu'il était un bailleur de fonds et non l'administrateur gestionnaire. La responsabilité d'un tel administrateur a été établie par le juge Robertson de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Neil Soper c. La Reine [1998] 1 C.F. 124. Aux pages 160 et 161, il décrit cette obligation comme suit :

On ne peut donc pas obliger un administrateur externe à aller jusqu'à prendre les mesures susmentionnées. À titre d'exemple, je ne m'attendrais pas à ce qu'un administrateur externe, au moment de sa nomination au sein du conseil d'administration de l'une des sociétés canadiennes qui dominent le marché, se rende directement au bureau du contrôleur pour se renseigner sur les retenues et les versements. De toute évidence, si je ne m'attendais pas à ce que les gens d'affaires les plus avertis prennent de telles mesures, alors je ne m'attendrais certainement pas à ce que les personnes qui ont une moins grande expérience des affaires en fassent autant. Je ne veux pas donner à entendre qu'un administrateur peut adopter une attitude entièrement passive, mais seulement que, à moins qu'il n'existe des motifs d'avoir des soupçons, il est permis de compter sur les personnes qui s'occupent de la gestion quotidienne de la société pour payer des dettes comme les créances de Sa Majesté. Cela correspond à la quatrième affirmation faite dans l'arrêt City Equitable: voir l'analyse ci-dessus, aux pages 146 et 147. La question qui subsiste, toutefois, est de savoir à quel moment l'obligation expresse d'agir prend naissance.

À mon avis, l'obligation expresse d'agir prend naissance lorsqu'un administrateur obtient des renseignements ou prend conscience de faits qui pourraient l'amener à conclure que les versements posent, ou pourraient vraisemblablement poser, un problème potentiel. En d'autres termes, il incombe vraiment à l'administrateur externe de prendre des mesures s'il sait, ou aurait dû savoir, que la société pourrait avoir un problème avec les versements. La situation typique dans laquelle un administrateur est, ou aurait dû être, au courant de cette éventualité est celle de la société qui a des difficultés financières. À titre d'exemple, dans l'affaire Byrt (H). c. M.R.N. [1991] 2 C.T.C. 2174 (C.C.I.), un administrateur externe a signé des états financiers qui révélaient un résultat déficitaire et, par conséquent, savait, ou aurait dû savoir, que la société avait des difficultés financières.

Il ajoute aux pages 162-163 :

[...] C'est au juge de la Cour de l'impôt qu'il appartiendra dans chaque cas de déterminer si, d'après les renseignements ou les documents financiers que possédait l'administrateur, celui-ci aurait dû savoir qu'il y avait un problème réel ou éventuel avec les versements. La question de savoir si l'administrateur visé a satisfait à la norme de prudence, telle qu'elle est maintenant définie, est donc avant tout une question de fait qu'il faut trancher à la lumière des connaissances personnelles et de l'expérience de ce dernier.

[24]          En l'espèce, l'appelant n'a vraiment pris connaissance de la gravité du problème des versements de la société qu'à l'automne de 1997 lorsque les agents du Ministre l'ont informé du montant réel des arriérés, lesquels étaient plus importants que ceux indiqués dans les états financiers au moment de l'acquisition des actions. C'est à ce moment qu'il a pris des arrangements pour le remboursement de ces sommes dues et qu'il a personnellement investi les fonds nécessaires dans la société afin de permettre à cette dernière de s'acquitter de ses obligations, et ce, même si les créances avaient pris naissance avant qu'il ne devienne actionnaire de la société.

[25]          Il s'est assuré par l'entremise de la comptable que les déclarations de TPS soient produites et la taxe versée. Il en était convaincu après avoir communiqué avec cette dernière et Daniel Côté. Les déclarations ont effectivement été produites et les taxes versées. Pour l'appelant, la question de cette obligation était réglée. Ce n'est qu'après la vérification par les agents du Ministre que la question des versements de TPS sur les primes aux clients a été soulevée. De la façon dont l'appelant comprenait le problème des primes pour la société, c'est que Daniel Côté en accordait trop. Il ne savait pas que la TPS sur ces primes n'était pas versée. La comptable n'a pas relevé cette omission non plus.

[26]          Je conclus que l'appelant était un administrateur externe sans connaissances particulières des activités de cette société qui, par ses mises de fonds régulières, voulait s'assurer que cette dernière respecte ses obligations financières envers tous ces créanciers, y compris le versement de la TPS. Il croyait sans doute qu'avec le temps, le rendement de la société allait s'améliorer et, pendant cette courte période où il a été administrateur, il avait raison de croire que les déclarations de TPS étaient produites et que les remises étaient versées, ce qui était le cas. Il a découvert le manquement après la vérification du Ministère. Il lui était impossible à ce moment-là de faire quoi que ce soit pour y remédier. Pour ces motifs, je conclus que l'appelant a agi avec autant de soins, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement visé par la Loi, soit l'omission de verser la taxe nette, que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

[27]          L'appel est accueilli et la cotisation du Ministre à l'encontre de l'appelant est annulée.

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 15e jour de juillet 2002.

« François Angers »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :                        2000-3477(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                                 JEAN-MARIE PLAMONDON

                                                                                                                et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                                    le 10 mai 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :                         L'honorable juge François Angers

DATE DU JUGEMENT :                                      15 juillet 2002

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                                                    Me Léonce-E. Roy

Pour l'intimée :                                                       Me Louis Cliche

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                                Nom :                                       Me Léonce-E. Roy

                                Étude :                                     Sainte-Foy (Québec)

Pour l'intimée :                                                       Morris Rosenberg

                                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                                Ottawa, Canada

2000-3477(GST)I

ENTRE :

JEAN-MARIE PLAMONDON,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 10 mai 2002 à Québec (Québec) par

l'honorable juge François Angers

Comparutions

Avocat de l'appelant :                                   Me Léonce-E. Roy

Avocat de l'intimée :                                     Me Louis Cliche

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 8 juin 1999 et porte le numéro PQ-994335 pour la période de cotisation du 30 juin 1996 au 31 décembre 1997, est admis, et la cotisation est annulée, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 15e jour de juillet 2002.

« François Angers »

J.C.C.I.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.