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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-5160(IT)G

ENTRE :

BP CANADA ENERGY RESOURCES COMPANY

COMME SUCCESSEUR D'AMOCO CANADA RESOURCES LTD.,

appelante,

et

Sa Majesté La Reine,

intimée.

Appel entendu les 17, 18, 19 et 20 juin 2002 à Calgary (Alberta), par

l'honorable D. G. H. Bowman, juge en chef adjoint

Comparutions

Avocats de l'appelante :              Me Al Meghji

                                                Me Gerald A. Grenon

                                                Me Catherine E. Bradley

Avocats de l'intimée :                 Me William L. Softley

Me R. Scott McDougall

JUGEMENT

          Il est ordonné que l'appel de la cotisation établie en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1993 soit admis avec dépens et que la cotisation soit renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que les montants reçus de A & S et de PGT représentent le produit de la disposition d'immobilisations et sont donc des recettes imputables au capital.

Signé à Toronto, Canada, ce 16e jour d'octobre 2002.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour de septembre 2003.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20021016

Dossier: 2000-5160(IT)G

ENTRE :

BP CANADA ENERGY RESOURCES COMPANY

COMME SUCCESSEUR D'AMOCO CANADA RESOURCES LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

motifs du jugement

Le juge en chef adjoint Bowman

[1]      En 1993, l'appelante, qui se dénommait alors Amoco Canada Resources Ltd., a reçu une somme de 9 598 478 $ de l'Alberta and Southern Gas Co. Ltd. ( « A & S » ) et une somme de 1 066 498 $ de la Pacific Gas Transmission Company ( « PGT » ). Le ministre du Revenu national a traité ces montants comme un revenu. L'appelante prétend qu'ils sont imputables au capital. La question est légèrement plus complexe que la plupart des causes classiques d'imputation au capital et au revenu qui ont occupé les tribunaux canadiens et britanniques au cours du siècle passé. À l'origine, la position principale de l'appelante était que les montants reçus constituent une recette en capital non imposable, en fait, une rentrée d'argent fortuite. Sa position subsidiaire était que la recette était le produit de la disposition d'immobilisations donnant lieu à un gain en capital. Au procès, l'avocat de l'appelante a modifié ces deux positions et soutenu que son argument principal était que le montant était le produit de la disposition d'immobilisations et a prétendu que, subsidiairement, si la Couronne réussissait à prouver qu'il n'y avait pas eu disposition, je devrais déterminer si le montant était une recette en capital non imposable. La position de la Couronne tout au long des procédures est que les montants reçus constituaient un revenu, mais qu'il ne s'agit pas d'un revenu relatif à des ressources car il n'a pas été généré par la production mais par l'abstention de produire. L'appelante affirme que, si la recette est un revenu, il s'agit d'un revenu relatif à des ressources admissible à la déduction relative à des ressources.

[2]      Les montants ont été reçus dans le cadre d'une entente de « decontracting » entre l'appelante, A & S et PGT. Le terme anglais « decontract » ne se trouve pas dans la plupart des dictionnaires, et certainement pas dans le sens dans lequel il a été utilisé ici. Le seul dictionnaire que j'ai trouvé qui mentionne le mot est l'Oxford English Dictionary (unabridged), qui le qualifie de [traduction] « obsolète et rare » , et le définit comme [traduction] « s'engager à nouveau par contrat » , dans le sens d'abréger ou de réduire. Je tiens à soulever cette question dès le début car le mot a fortement empreint les négociations qui ont mené aux paiements. Il semble que le mot ait été créé pour les transactions en question en remplacement du terme précédent, [traduction] « plan de restructuration » , qui n'avait pas été accepté. Le terme decontract, tel qu'utilisé ici, conserve la connotation de restructuration du plan antérieur, et a également le sens de dégager les parties de leurs obligations contractuelles.

[3]      L'appelante, pendant l'année pertinente et avant celle-ci, exploitait une entreprise d'exploration et de production de pétrole et de gaz. La méthode par laquelle l'appelante et les autres producteurs canadiens avaient accès à des clients californiens était la vente à A & S, une filiale canadienne de Pacific Gas and Electric Company ( « PG & E » ), une société de services publics américaine qui fournissait du gaz naturel aux consommateurs californiens. A & S vendait le gaz naturel à PGT, une filiale américaine de PG & E, et PGT revendait le gaz à PG & E.

[4]      Dans les années 1950, PG & E voulait construire un pipeline qui amènerait le gaz d'Alberta en Californie. Avant la fin de la construction du pipeline, A & S avait conclu les contrats à long terme d'approvisionnement en gaz naturel avec des producteurs canadiens. Un de ces producteurs était Hudson's Bay Oil and Gas Company Limited, un prédécesseur de l'appelante. Une fois la construction du pipeline terminée, A & S a continué de conclure des contrats à long terme avec des producteurs canadiens afin d'obtenir du gaz naturel pour le marché californien. Au 22 septembre 1993, environ 190 producteurs détenaient des contrats d'approvisionnement en gaz naturel avec A & S. L'appelante était un des fournisseurs les plus importants.

[5]      Le 22 septembre 1993, l'appelante détenait 31 contrats de gaz naturel avec A & S. De ce nombre, sept devaient arriver à terme à des dates futures prédéterminées, s'étalant du 31 octobre 1993 au 30 juin 2010. Les 24 autres n'avaient pas de terme prédéterminé. Ils s'étendaient sur la vie entière du champ sur lequel ils portaient.

[6]      Les parties ont convenu que trois contrats d'approvisionnement sont représentatifs des 31 contrats d'approvisionnement en gaz naturel conclus avec A & S. Le contrat de la zone de Whitecourt est entré en vigueur le 28 novembre 1958 et est arrivé à terme, après une reconduction, le 31 octobre 1993. En vertu de ce contrat, l'appelante a affecté 417 milliards de pieds cubes de réserves des biens-fonds de l'appelante dans la zone de Whitecourt.

[7]      Le contrat du champ Fir est entré en vigueur le 31 juillet 1974 pour la durée de la vie du champ. En vertu de ce contrat, l'appelante a affecté exclusivement à l'exécution du contrat toutes ses réserves telles qu'établies de temps à autre sur les biens-fonds couverts par le contrat. La quantité contractuelle quotidienne était calculée en divisant les réserves, telles que déterminées de temps à autre, par 7 300 (le nombre de jours qu'il y a dans 20 ans). La durée du contrat était à l'origine évaluée à 25 ans, et sa durée a été rajustée afin de permettre la livraison de toutes les réserves des biens-fonds.

[8]      Le contrat d'approvisionnement du champ de Garrington a été conclu le 25 septembre 1974 pour une durée de 25 ans ou une période plus longue, jusqu'à ce que le champ soit épuisé.

[9]      Les réserves d'un champ donné étaient affectées par l'appelante à l'exécution des obligations qui lui étaient imposées par le contrat relatif audit champ. En vertu du contrat, l'appelante devait vendre tout le gaz d'un champ donné à A & S, et A & S devait l'acheter. La passation du titre a eu lieu à l'établissement de l'appelante.

[10]     Le prix payé par A & S à l'appelante en vertu des contrats, dénommé « prix à marge garantie » , était fondé sur les montants que A & S recevait de PGT, lequel dépendait lui-même du prix reçu par PG & E en Californie.

[11]     L'appelante, alors connue sous le nom d'Amoco Canada Resources Ltd., et une société liée (Amoco Canada Petroleum Company Ltd.), ont vendu pendant la période de 1993 précédant le 1er novembre environ 130 millions de pieds cubes de gaz naturel par jour, soit environ 13 % de leurs ventes quotidiennes.

[12]     J'en arrive maintenant aux événements qui ont conduit à l'entente de decontracting. Aux fins de cette cause, le récit de faits passablement complexes peut être abrégé car les motifs administratifs ou politiques qui ont poussé les organismes de réglementation américains à exiger ou à tout le moins à exercer des pressions sur PG & E et, indirectement, sur A & S afin de mettre fin aux ententes contractuelles avec les fournisseurs albertains sont moins importants que la résiliation elle-même et la nature du paiement reçu.

[13]     En bref, vers 1990, la California Public Utilities Commission ( « CPUC » ) estimait que le cours au comptant du gaz naturel en Alberta était inférieur au prix prévu par les contrats d'approvisionnement à long terme. Elle exerçait des pressions sur PG & E afin de rectifier la situation. De plus, la United States Federal Energy Regulatory Commission ( « FERC » ) a entrepris des mesures visant à mettre fin à ce qu'elle semblait considérer comme des pratiques monopolistiques dans la revente de gaz naturel.

[14]     Ces changements réglementaires ont abouti à la résiliation par A & S, PGT et PG & E des ententes sur l'achat, la vente et le transport du gaz naturel albertain pour le marché californien. Les gouvernements canadien et albertain, y compris l'Office national de l'énergie ( « ONE » ) ont considéré que les agissements de la CPUC et de la FERC étaient hostiles aux intérêts des fournisseurs et a entrepris des mesures pour les contrer. Sommairement, l'effet net des mesures prises par les gouvernements canadien et albertain et par l'ONE était de faire en sorte qu'il soit impossible pour A & S de substituer des contrats de gaz naturel à court terme avec des producteurs canadiens aux contrats à long terme existants.

[15]     Les changements réglementaires aux États-Unis, s'ils avaient été mis en vigueur, auraient causé des perturbations majeures dans les activités des producteurs albertains. J'ai résumé plus haut la réaction canadienne aux actions de la FERC et de la CPUC. Il est évident que le problème était grave, à la fois pour les producteurs canadiens et pour A & S, PGT et PG & E. Les actions des autorités des deux côtés de la frontière se sont soldées par une impasse. La province de l'Alberta a nommé un « facilitateur » pour représenter les producteurs dans les négociations avec A & S, PGT et PG & E. Ce poste a été créé par l'Alberta Petroleum and Marketing Commission ( « APMC » ). M. Dale Lucas, qui avait été président du conseil de l'APMC de 1984 à 1991, a été nommé à ce poste. M. Lucas a décrit l'atmosphère qui y régnait lorsqu'il est devenu facilitateur comme suit : [traduction] « empoisonnée... absolument terrible » .

[16]     Cette situation n'est pas surprenante. Au sud de la frontière, les organismes de réglementation américains disaient aux acheteurs et aux transporteurs de gaz naturel albertains d'arrêter d'acheter en vertu des contrats à long terme, et, au nord de la frontière, les autorités canadiennes disaient qu'aucune vente ne pouvait être faite à A & S autrement qu'en application des contrats à long terme.

[17]     Le 10 février 1993, A & S, PGT et PG & E ont transmis un plan de restructuration aux producteurs. Ce plan n'a pas été accepté par les producteurs. Puisque le plan subséquent de decontracting (lequel a finalement été accepté par les producteurs) contenait plusieurs éléments qui se rapprochaient de ceux du plan de restructuration, je citerai l'aperçu du premier plan, qui était inclus dans le document transmis aux producteurs par A & S, PGT et PG & E.

                   [traduction]

1.1        Aperçu du plan de restructuration

Le plan de restructuration prévoit :

•            une période de transition pendant laquelle les ententes d'approvisionnement en gaz naturel continueront d'être appliquées, jusqu'au 1er août 1994;

•            la résiliation des contrats existants d'achat et de vente de gaz, prenant effet le 1er août 1994;

•            de nouvelles ententes à long terme de mise en marché du gaz, prenant effet le 1er août 1994;

•            la répartition proportionnelle entre les producteurs des nouvelles ententes à long terme de mise en marché du gaz et des marchés des ventes canadiens et non californiens de A & S;

•            la possibilité pour les producteurs de choisir de vendre le gaz directement à PG & E ou d'obtenir les facilités de transport directement des approvisionnements globaux d'A & S ou d'y participer à ces fins;

•            l'affectation de la capacité de transport des pipelines canadiens;

•            de nouveaux contrats d'achat de gaz entre A & S et tous les producteurs qui ont choisi de vendre une partie de leur gaz par l'entremise des approvisionnements globaux d'A & S; et

•            la résolution le règlement des réclamations contre A & S, PGT et PG & E pouvant découler des ententes existantes d'approvisionnement en gaz ou la restructuration de ces ententes.

J'ai laissé les parties barrées et surlignées telles qu'elles apparaissaient sur la page 4 de l'onglet 21 de la pièce A-1.

[18]     Le plan de decontracting daté du 29 juillet 1993 (pièce A-1, onglet 22) différait à certains égards du plan de restructuration. Lorsque le plan a été transmis aux producteurs, il était assorti d'un sommaire du plan de decontracting, qui renfermait l'énoncé suivant :

[traduction] Le plan de decontracting remplace le plan de restructuration transmis aux producteurs en février 1993 et a été élaboré en réaction à l'intérêt des producteurs. Il met en oeuvre les changements que prescrivent les développements réglementaires récents touchant la vente et la livraison de fournitures de gaz canadien au marché du nord et du centre de la Californie. Le plan de decontracting offre aux producteurs :

         Des occasions - Les producteurs recouvreront le contrôle des réserves qui sont actuellement affectées à A & S et seront de manière générale libres de conclure de nouvelles ententes de mise en marché après le 1er novembre 1993.

         Des choix - Des choix sur les ententes de vente existantes nouvelles et modifiées, de même que des possibilités de transport, sont offerts aux producteurs à compter du 1er novembre 1993.

Le résumé du plan de decontracting suit. Les termes du présent sommaire qui commencent par une majuscule ont le sens que leur donne le plan de decontracting.

[19]     Le plan de decontracting consistait en une série de sections et d'annexes. Il commençait par l'introduction qui suit :

[traduction]

Le plan de decontracting remplace le plan de restructuration déjà transmis aux Producteurs.

Les changements dans le contexte réglementaire font en sorte que l'Alberta and Southern Gas Co. Ltd. ( « A & S » ), la Pacific Gas Transmission Company ( « PGT » ) et la Pacific Gas and Electric Company ( « PG & E » ) doivent restructurer leurs contrats respectifs sur la vente, l'achat et le transport de fournitures de gaz canadien au marché du nord de la Californie.

Le présent document présente une description du plan (le « plan de decontracting » ) visant à restructurer ces ententes, y compris les nouvelles ententes et les ententes requises pour réagir et se conformer auxdits changements réglementaires.

Le plan de decontracting a été conçu pour permettre à tous les producteurs qui choisissent de participer au decontracting de conclure des ententes flexibles. L'avantage de telles ententes peut ne pas être offert aux producteurs qui ne participent pas.

En vertu du plan de decontracting, les contrats d'achat de gaz conclus entre les producteurs et A & E (les « contrats » ) arriveront à terme le 1er novembre 1993. Après le 1er novembre 1993, les producteurs pourront librement conclure de nouvelles ententes de mise en marché de leurs gaz.

En plus de la résiliation des contrats des producteurs, le plan de decontracting prévoit une combinaison de nouveaux contrats d'approvisionnement en gaz à court terme et la poursuite de certaines ententes de vente après le 1er novembre 1993 avec des modifications. Les droits de transport par pipeline à Kingsgate, Colombie-Britannique, seront également offerts aux producteurs.

Le présent Plan de decontracting doit être mis en oeuvre conjointement à la restructuration des ententes de vente et de transport existantes sur le système de pipeline de PGT. La restructuration du service sur le système de pipeline de PGT est bien engagée en vertu des travaux effectués conformément à l'ordonnance no 636 de la FERC relative à PGT. Par conséquent, il importe que les transactions prévues par le présent plan de decontracting soient complétées avant le 1er novembre 1993, lorsque l'imposition des droits approuvés en vertu desdites procédures pour le système de pipeline de PGT doit débuter.

Les détails de chaque partie du plan de decontracting et des considérations connexes sont présentés ci-dessous.

Un sommaire des termes définis utilisés dans le présent plan de decontracting est présenté à l'annexe A.

[20]     Un sommaire du plan de decontracting de quatre pages et demie précède les sections où figurent les dispositions détaillées; il est malheureusement nécessaire de le reproduire au long afin de montrer la nature et la portée de la refonte totale des ententes. En voici le libellé :

                   [traduction]

______________________________________________________

SECTION 1.0

SOMMAIRE DU PLAN DE DECONTRACTING

______________________________________________________

1.1        Sommaire du plan de decontracting

            Ce qui suit est un sommaire du plan de decontracting :

            a)          Ententes en vigueur jusqu'au 1er novembre 1993

Les ententes existantes entre A & S et les producteurs et entre A & S et PGT se poursuivront pendant la période allant de la date du présent plan de decontracting jusqu'au 1er novembre 1993 (la « date de decontracting » ).

Les activités d'A & S pendant cette période se poursuivront conformément aux activités actuelles.

            b)          Résiliation des ententes existantes

                        À la date de decontracting :

•            les contrats existants entre A & S et les producteurs qui participent au decontracting (les « producteurs participants » );

•            le contrat de vente de gaz international (le « contrat international » ) entre A & S et PGT; et

•            le contrat de service (le « contrat de service » ) entre PGT et PG & E;

            seront résiliés.

c)          Nouvelles ententes de mise en marché

            Les producteurs participants peuvent conclure de nouvelles ententes de vente avec d'autres acheteurs, courtiers-fournisseurs ou représentants de mise en marché après la date de decontracting et appliquer le decontracting aux biens-fonds actuellement affectés à A & S afin d'aider à la réalisation de ces ententes de vente.

Ces nouvelles ententes de vente peuvent comprendre les nouveaux marchés offerts par PG & E en vertu du présent plan de decontracting.

d)          Ententes de vente et de transport de gaz nouvelles et existantes

•            Marchés de PG & E

            PG & E propose de conclure de nouveaux contrats de vente de gaz (les « contrats transitoires d'achat et de vente de gaz de PG & E » ) pour une partie des besoins des petits abonnés et des abonnés groupés de PG & E pendant la période allant du 1er novembre 1993 au 31 juillet 1994. En vertu de ces contrats, PG & E achètera d'A & S et des producteurs qui auront choisi de transiger directement avec PG & E leurs parts des niveaux de vente modifiés résultant de la nouvelle détermination annuelle du prix pour 1993-1994 en vertu du contrat international.

            Les contrats transitoires d'achat et de vente de gaz de PG & E seront des contrats standard.

            PG & E propose également de conclure un nouveau contrat d'achat de gaz (le « contrat d'achat et de vente de gaz de PG & E » ) avec A & S ou le successeur d'A & S. Ce marché ne sera offert qu'à certains producteurs admissibles (les « producteurs admissibles » ) décrits ci-dessous pour une partie des besoins des petits abonnés et des abonnés groupés de PG & E pendant la période allant du 1er août 1994 au 31 juillet 1997. Par ledit contrat d'achat et de vente de gaz de PG & E, PG & E achètera 75 millions de pieds cubes par jour des producteurs admissibles qui choisissent de participer à la fourniture de gaz pour le contrat.

•            Marchés canadiens d'A & S

            A & S continuera de faire des ventes dans différents marchés canadiens (les « marchés canadiens d'A & S » ) en vertu des contrats de vente à long terme existants. Ces contrats de vente stipulent la fourniture de quantités de gaz pouvant atteindre jusqu'à 184 millions de pieds cubes, y compris les ententes de compensation des pertes de Cochrane. Ces stipulations peuvent être modifiées suivant le résultat de négociations à l'égard de l'extraction existante et des ententes de compensation des pertes de Cochrane.

•            Capacité de transport d'A & S

            La capacité de transport d'A & S dans les pipelines canadiens sera offerte aux producteurs afin de leur permettre de desservir les marchés en aval.

e)          Part des producteurs dans les ententes de vente et de transport nouvelles et existantes.

            Sans qu'il n'y soit obligé, chaque producteur pourra, sans en avoir l'obligation :

•            fournir une partie (la « partie » ) des quantités de gaz devant être achetées en vertu des contrats de transition d'achat et de vente de gaz; et

•            acquérir une partie de la capacité de transport d'A & S.

Les producteurs admissibles auront la possibilité, mais non l'obligation, de participer en proportion au contrat d'achat et de vente de gaz de PG & E.

La partie du producteur sera fondée sur les quantités contractuelles affectables ( « QCA » ) en vertu du contrat d'achat de gaz des producteurs avec A & S au 1er juillet 1993.

f)           Choix des producteurs

Chaque producteur pourra choisir, au plus tard le 23 août 1993, si et dans quelle mesure il :

•            transigera directement avec PG & E pour sa partie des contrats de transition d'achat et de vente de gaz de PG & E;

•            vendra sa partie des contrats de transition d'achat et de vente de gaz de PG & E par les approvisionnements globaux d'A & S;

•            acquérra une partie de la capacité de transport d'A & S; et

•            s'il y a lieu, participera au contrat d'achat et de vente de gaz de PG & E.

g)          Obligations des producteurs

            Après la date de decontracting, les producteurs :

•            devront continuer à :

•            procéder aux ventes qu'ils ont convenu de faire en vertu du programme de gaz pour clients spécifiés; et

•            fournir leur partie des quantités de gaz aux marchés canadiens d'A & S; et

•            seront responsables pour le point de réception de NOVA et pour la capacité de NUL qui leur est affectée.

h)          Biens-fonds affectés au decontracting

              Les terres affectées à A & S en vertu du contrat d'un producteur seront libérées à la date de decontracting. Les producteurs devront réaffecter une partie de leurs terres à A & S en appui à la poursuite de leurs ventes par l'entremise d'A & S.

i)           Nouveaux contrats d'achat de gaz d'A & S

            Les producteurs doivent conclure des contrats standard d'achat de gaz avec A & S, lesquels prendront effet à la date de decontracting.

j)           Conclusion commerciale

            La conclusion des transactions commerciales nécessaires à la mise en oeuvre du decontracting (la « conclusion commerciale » ) aura lieu le 15 septembre 1993 (la « date de conclusion commerciale » ).

k)          Confirmations des conclusions commerciales

            Les confirmations que la conclusion commerciale s'est produite (les « confirmations de conclusions commerciales » ) comprendront des confirmations qu'un nombre suffisant de producteurs a participé à la conclusion commerciale et que les producteurs participants ayant des droits similaires ont été traités de manière uniforme à l'égard du règlement de leurs réclamations.

l)           Conditions d'effectivité

            La mise en oeuvre du plan de decontracting sera sujette à différentes conditions, y compris l'obtention de certaines approbations réglementaires et gouvernementales requises.

            Pour que le decontracting survienne à la date de decontracting, les conditions d'efficacité décrites au paragraphe 6.1 doivent être remplies ou avoir fait l'objet d'une renonciation à cette date ou à une date antérieure.

m)         Mise en oeuvre du Plan de decontracting

            Si toutes les conditions applicables au decontracting sont respectées, la date de mise en oeuvre complète du decontracting, y compris le début des livraisons en vertu des nouveaux contrats transitoires d'achat et de vente de gaz de PG & E, sera le 1er novembre 1993.

n)          Règlement des réclamations

            Les réclamations contre A & S, PGT et PG & E, y compris toute réclamation contre PGT consécutive à la résiliation du contrat international, doivent être réglées dans le cadre du decontracting.

o)          Paiements à titre de règlement

            Un paiement à titre de règlement (le « paiement à titre de règlement » ) sera fait à chaque producteur participant après que les Conditions d'effectivité auront été remplies ou qu'elles auront fait l'objet d'une renonciation, et que le recouvrement du paiement à titre de règlement du producteur aura été approuvé par la Federal Energy Regulatory Commission (la « FERC » ) par l'entremise du mécanisme de recouvrement des coûts de transition proposé par PGT dans le cadre des travaux effectués conformément à l'ordonnance no 636.

[21]     J'ai cité au long le sommaire détaillé car il montre bien que le decontracting a eu un effet important sur une grande partie des structures d'affaires des producteurs. Les paiements à titre de règlement, que j'analyserai plus en détail plus tard, faisaient partie de l'entente globale.

[22]     La section 3.0 du Plan traite du règlement et des réclamations, et le paragraphe 3.2 indique que [traduction] « des principes et des hypothèses communs ont été utilisés pour établir les paiements à titre de règlement respectifs des producteurs » . Ces principes et hypothèses sont énoncés à l'annexe F. Puisque les principes énoncés à l'annexe F sont censés être ceux utilisés pour en arriver aux paiements qui sont ici en litige, je citerai l'annexe F dans son intégralité :

                   [traduction]

ANNEXE F

______________________________________________

PRINCIPES APPLICABLES À L'ÉTABLISSEMENT DES PAIEMENTS À TITRE DE RÈGLEMENT

_____________________________________________________

            Les principes et les hypothèses communs applicables à l'établissement des paiements à titre de règlement respectifs des producteurs comprennent ce qui suit :

a)          Perte de valeur antérieure

            Certains producteurs affirment avoir subi une perte de valeur (la « perte de valeur antérieure » ) en raison du prétendu défaut par A & S de respecter les exigences d'achat minimales prévues dans les contrats de ces producteurs avec A & S à l'égard des années contractuelles 1990-1991 et 1991-1992 ou d'une de ces années.

            Les paiements à titre de règlement pour les producteurs qui prétendent avoir subi une perte de valeur antérieure comprendront en conséquence un montant reflétant la valeur de ladite perte. La valeur de la perte de valeur antérieure pour chaque tel producteur a été estimée conformément aux principes qui suivent :

    •        Les quantités manquantes évaluées étaient représentées par la différence entre les obligations d'achat minimales d'A & S en vertu des contrats à facteur de capacité spécifié sur le fondement des dispositions applicables du contrat et des quantités réellement demandées ou obtenues par A & S pendant chacune des années contractuelles 1990-1991 et 1991-1992.

    •        Il est présumé que les producteurs n'ont pas réussi à mitiger les manques dans les quantités subis pour l'année contractuelle 1990-1991.

    •        Les producteurs à qui les contrats donnent le droit (les « droits de vente excédentaire » ) de vendre du gaz des réserves affectées à des acheteurs autres qu'A & S si A & S n'achète pas toutes les quantités contractuelles sont présumés avoir mitigé de 50 % le manque dans les quantités pour l'année contractuelle 1991-1992 (les « quantités mitigées » ) en vendant lesdites quantités mitigées sur le marché au comptant intra-albertain. La seule perte de valeur subie par les producteurs à l'égard desdites quantités mitigées est représentée par la différence entre le prix moyen affectable pour l'année contractuelle 1991-1992 et le cours au comptant intra-albertain moyen pour ladite année contractuelle, lequel cours est présumé avoir été obtenu pour lesdites quantités.

    •        Le manque dans les quantités subi pour l'année contractuelle 1990-1991 et la partie du manque dans les quantités subie pour l'année contractuelle 1991-1992 qui n'est pas présumée avoir été mitigée grâce à l'exercice des droits de vente excédentaire sont désignés ensemble les « quantités non mitigées » .

    •        Lesdites quantités non mitigées sont présumées avoir été vendues par les producteurs pendant les années contractuelles 1994-1995, 1995-1996 et 1996-1997 aux cours marchands prévus pour chacune desdites années contractuelles.

    •        La perte de valeur antérieure d'un producteur est représentée par la différence entre :

    •        le total de la perte de valeur sur la vente des quantités mitigées et la perte de profit qui aurait été gagné sur la vente des quantités non mitigées pendant les années contractuelles 1990-1991 et 1991-1992 sur le fondement des prix applicables pour chacune desdites années contractuelles; et

    •        le profit présumé avoir été gagné sur la vente des quantités non mitigées pendant les années contractuelles 1994-1995, 1995-1996 et 1996-1997 sur le fondement des prévisions de prix publiées pour lesdites années contractuelles; et

    •        dans l'établissement de la perte de valeur antérieure des producteurs :

    •        les bénéfices sur les revenus des sous-produits associés à la vente des quantités non mitigées ont été inclus en utilisant la marge de profit moyenne par million de pieds cubes en Alberta des quantités non mitigées, rajustée en fonction de ce que le contenu en sous-produit des réserves de gaz d'un producteur est surtout faible, élevé ou moyen;

    •        les coûts d'exploitation et les taux des redevances ont été déduits, sur le fondement des coûts d'exploitation et des taux de redevance moyens de l'industrie; et

    •        tous les montants ont été rajustés pour refléter la valeur de ces montants au 1er novembre 1993.

b)          Manques antérieurs à la date de decontracting

            Les données évaluées à ce jour indiquent qu'aucun manque dans les quantités devant être achetées par A & S en vertu des contrats à facteur de capacité spécifié ne s'est produit durant l'année contractuelle 1992-1993 et qu'aucun n'est prévu se produire pendant la période allant du 1er juillet 1993 jusqu'à la date de decontracting. Les activités menées au cours de cette période n'auront donc aucune incidence sur l'établissement des paiements de règlement.

c)          Perte de valeur future

            Le paiement à titre de règlement qui est proposé pour chaque producteur comprendra un montant qui reflétera la perte de valeur prévue par certains producteurs consécutive à la modification de leurs droits et de leurs obligations prévus par les ententes actuelles pour cause de mise en oeuvre du présent plan de decontracting. Le montant de ladite perte de valeur (la « perte de valeur future » ) pour chaque producteur a été estimé conformément aux principes suivants :

    •        la perte de valeur future pour chaque producteur a été calculée en multipliant la quantité de gaz (la « quantité évaluée » ) qu'A & S aurait dû acheter du producteur en vertu du ou des contrats existants avec le producteur pendant la période allant du 1er juillet 1994 au 30 juin 2005 (la « période d'évaluation » ) par un écart de prix;

    •        tous les principes et les hypothèses applicables à l'établissement de la quantité évaluée de chaque producteur comprennent ce qui suit :

    •        les ventes par A & S à PGT pendant la période d'évaluation sont présumées être de 900 millions de pieds cubes par jour;

    •        les ventes aux marchés canadiens d'A & S pendant la période d'évaluation sont présumées être de 184 millions de pieds cubes par jour.

    •        Généralement, les réserves d'un producteur en vertu des contrats existants sont présumées avoir décliné au cours de la période d'évaluation à un taux moyen de diminution prévu pour tout le système d'A & S qui tienne compte des droits des producteurs de faire des forages intercalaires et de mener toute autre opération visant à maintenir le niveau des QCJ en vertu de leurs contrats. Les taux de diminution spécifiques aux contrats ont été utilisés :

    •        pour les contrats dont les réserves sont en purge;

    •        pour les contrats dont les réserves, étant donné leur âge ou leur taille, déclineront à un rythme significativement différent du taux moyen de ce système; et

    •        dans les cas où les producteurs ont le droit d'exiger d'A & S qu'elle achète plus de gaz des biens-fonds qui ne sont pas actuellement affectés en vertu de leurs contrats avec A & S.

    •        Les contrats à utilisation non spécifiée ont été présumés assortis d'un engagement théorique d'achat minimum égal à 30 % de la QCJ du contrat.

    •        Les contrats à utilisation spécifiée sont présumés assortis d'un engagement d'achat minimal égal à l'engagement d'achat minimal applicable en vertu de chacun desdits contrats.

    •        Les contrats fermes sont présumés assortis d'un engagement théorique d'achat minimal équivalant à 100 % des QCA.

    •        Tous les montants ont été rajustés afin de refléter la valeur desdits montants au 1er novembre 1993.

d)          Rajustements en fonction du risque

            Les montants de la perte de valeur antérieure et de la perte de valeur future établis pour chaque producteur ont été ensuite rajustés afin de refléter :

    •        les différences dans la force relative de droits contractuels particuliers; et

    •        les risques d'exécution des contrats, en tenant compte à la fois des défenses juridiques spécifiques et générales dont A & S, PGT et PG & E disposent relativement aux contrats, y compris :

    •        la possibilité d'évoquer la force majeure et des défenses similaires; et

    •        que A & S est la seule partie envers qui une éventuelle réclamation pour une perte de valeur antérieure, une perte de valeur future ou toute autre perte en vertu des contrats pourrait réussir.

[23]     Le 18 août 1993, le Comité de gestion d'Amoco Canada a écrit une note de service, signée par le président, M. Stacy, qui se lit comme suit (pièce A-2, onglet 26) :

[traduction]

Amoco Canada recommande l'acceptation des dispositions d'un plan de decontracting proposé par Alberta and Southern Gas Co. Ltd. (A & S) et sa société-mère, Pacific Gas and Electric Company (PG & E). Le plan prévoit qu'Amoco Canada (ainsi que les autres producteurs d'A & S) résiliera ses contrats existants avec A & S le 31 octobre 1993 et dégagera A & S de toutes ses obligations d'achat passées et de certaines de ses obligations d'achat futures en contrepartie de la préservation de droits d'extraction significatifs de liquides de gaz naturel et d'un paiement en espèces de 21 millions de dollars US. Le plan exige également qu'Amoco Canada accepte la cession du point de réception de NOVA Corporation of Alberta (NOVA) et de la fonction de transport de Northwestern Utilities Limited (NUL) associée avec ses terres affectées (PVO 74 millions de dollars US).

Bien que cela ne soit pas exigé par le plan de decontracting, Amoco Canada recommande également l'acceptation de la cession du point de livraison de NOVA et de la capacité de transport d'Alberta Natural Gas Pipeline Ltd. (ANG) associée avec ses propriétés affectées (jusqu'à un maximum de 130 millions de pieds cubes par jour/PVO 83 millions de dollars US). La remise de cette capacité de transport à Kingsgate (jonction des pipelines d'ANG et de Pacific Gas Transmission Company (PGT) à la frontière internationale) est souhaitable parce que Kingsgate devrait être un point de regroupement clé et présenter le coût d'accès le plus bas pour les ventes de gaz canadien au marché américain (que les droits soient imposés à PGT selon la méthode différentielle ou selon la méthode de la péréquation). Les ventes de gaz canadien sur le marché de Kingsgate devraient générer des primes (par rapport aux ventes sur les marchés albertains) supérieures au seuil de rentabilité de 1,8 % selon les prévisions basses de JFC et de 1,3 % selon les prévisions hautes de JFC.

L'alternative d'Amoco Canada est d'accepter le plan de decontracting proposé ou de reprendre les litiges pour les pertes antérieures et continuer les (incertaines) livraisons futures à A & S. Bien que sa position juridique semble bien fondée, Amoco Canada estime que la poursuite de procédures peut entraîner la perte de droits d'extraction de liquides de gaz naturel associés aux propriétés d'A & S affectées à toute l'industrie. A & S et PG & E ont convenu d'intégrer la reconduction des droits d'extraction des liquides de gaz naturel d'Amoco Canada à leur plan de decontracting.

Amoco Canada recommande l'acceptation du plan de restructuration car la valeur de la préservation des droits d'extraction des liquides de gaz naturel, combinée au paiement à titre de règlement, dépasse les sommes qu'Amoco Canada peut raisonnablement s'attendre à recouvrer par la poursuite des litiges avec la famille de PG & E et par des négociations séparées pour les droits d'extraction avec les producteurs d'A & S dégagés des contrats. L'acceptation du plan de decontracting proposé produira un PV11 de 0,5 million de dollars US selon la prévision basse de JFC et de 14,8 millions de dollars US selon la prévision élevée de JFC. De plus, en acceptant du plan de decontracting Amoco Canada évite de s'engager dans ce qui pourrrait être une longue et coûteuse bataille devant les tribunaux canadiens et américains et elle obtient un contrôle accru sur les approvisionnements en gaz qu'elle désire.

[24]     La mise en oeuvre du plan de decontracting a nécessité un certain nombre d'ententes. L'effet net des diverses étapes nécessaires à la mise en oeuvre du plan de decontracting était le suivant :

a)        les contrats d'approvisionnement en gaz naturel conclus entre les producteurs et A & S ont été résiliés;

b)       les terres affectées aux contrats d'approvisionnement en gaz naturel ont été libérées, permettant ainsi aux producteurs de vendre à qui ils désiraient;

c)        les producteurs ont dû accepter toutes les obligations de transport relatives à l'admission dans le système de pipelines de NOVA et à la capacité du pipeline de Northwestern Utilities Limited pour le gaz produit sur les biens-fonds antérieurement affectés à A & S;

d)       les producteurs pouvaient également accepter d'autres obligations de transport pour d'autres systèmes de pipelines de gaz naturel;

e)        les producteurs ont conclu des contrats de gaz naturel transitoires et à court terme avec A & S et PG & E pour offrir le gaz naturel sur le marché californien.

[25]     Un des changements importants qui furent apportés dans le cadre de l'entente de decontracting concernait le Cochrane Extraction Plant Partnership ( « CEPP » ). Amoco avait une entente avec le CEPP qui prévoyait que cette dernière détenait les droits à long terme d'extraction des liquides de tous les gaz naturels qu'A & S achetait et transportait en Californie qui passaient à l'usine d'extraction de Cochrane. Amoco détenait le droit à long terme d'acheter les liquides de gaz naturel et de les vendre partout en Amérique du Nord. Le decontracting a menacé cette entente. Si A & S n'était plus responsable du transport, elle n'était plus obligée de fournir à CEPP du gaz naturel pour en extraire les liquides.

[26]     Ce problème fut résolu par un addenda au plan de decontracting (pièce A-2, onglet 23), dont l'effet était d'exiger dans le cadre du decontracting, que tous les producteurs concluent une entente avec CEPP lui donnant le droit d'extraire les liquides de gaz naturel et l'éthane de tout gaz naturel transporté par les producteurs par l'usine d'extraction de Cochrane à concurrence des montants quotidiens maximaux prévus par les contrats des producteurs avec A & S.

[27]     La résolution du problème d'extraction du gaz naturel a de toute évidence satisfait Amoco, qui a approuvé le plan de decontracting.

[28]     L'onglet 24 de la pièce A-2 est une note rédigée par le chef de l'unité opérationnelle des liquides de gaz naturel, à la suite de la conclusion d'une négociation sur les activités d'extraction des liquides de gaz naturel. La note se lit comme suit :

                   [traduction]

État des négociations avec PG & E - 12 août 1993

PG & E va de l'avant avec les producteurs avec les modalités de droits d'extraction négociés, sous réserve de ce qui suit :

1)          Le groupe des droits d'extraction doit signer aujourd'hui l' « Entente de principe sur les ententes de Cochrane proposées » .

Nota : Dans le cas d'Amoco, nous nous assurerons que cela n'emporte pas acceptation des modalités de la proposition de decontracting, de la poursuite judiciaire, etc. PG & E a confirmé oralement que ce n'était pas son intention.

2)          PG & E peut mettre fin aux « ententes de Cochrane » en tout temps avant le 18 octobre 1993 si elle estime que le plan de decontracting ne peut être mis en oeuvre d'une manière qui respecte l'essentiel des dispositions du plan.

J'ai été avisé par PG & E qu'elle ne souhaite pas aller de l'avant avec le Plan de decontracting ou avec les ententes de Cochrane sans la participation d'Amoco. Ils n'augmenteront pas le règlement d'Amoco à plus de 22 millions de dollars et exigent l'acceptation d'Amoco pour le 15 septembre environ afin de satisfaire au processus d'approbation de la FERC.

Je recommande qu'Amoco accepte le règlement de 22 millions de dollars parce que :

1)          Gas Marketing a indiqué qu'elle désirait 6 à 8 millions de dollars en « valeur » additionnelle mais qu'elle règlerait pour moins. La valeur des droits d'extraction de Cochrane est beaucoup plus élevée que celle qui est indiquée dans la note ci-jointe. Le bénéfice d'exploitation d'Amoco attribuable à l'entente avec ANG est de 20 à 25 millions de dollars par année.

Nota : PG & E sait à peu près combien Amoco reçoit parce qu'elle sait combien ANG gagne et a des copies des ententes entre ANG et Amoco; elle peut donc se replier sur ses positions.

2)          Il y a sans doute quelque avantage à préserver une relation raisonnable avec PG & E comme client. Elle demeurera un gros client à long terme dans un marché attrayant pour le gaz canadien.

[29]     La poursuite mentionnée dans la note était celle qui avait été déposée contre A & S et PG & E par Amoco Canada Resources Ltd. (le prédécesseur de l'appelante) et sa société liée Amoco Petroleum Company Ltd. pour dommages et intérêts pour bris de contrat d'un montant respectif de 49 100 000 $ et de 35 600 000 $ pour le défaut allégué d'avoir acheté les volumes annuels minimaux prévus par les contrats de gaz naturel.

[30]     Les montants totaux réclamés étaient composés de plusieurs chiffres, constitués de pertes imputables à la fois au revenu et au capital. Les paragraphes 10 à 13 de la déclaration modifiée (pièce A-2, onglet 40) se lisent comme suit :

[traduction]

10.        Par suite du défaut d'acheter et de prendre les volumes annuels minimaux de gaz naturel comme l'exigent les Contrats d'Amoco Petroleum et d'Amoco Resources tel qu'il a été précédemment mentionné, les Demandeurs affirment qu'ils ont subi des pertes et des dommages résultant de ventes perdues s'élevant à 29 400 000 $ pour Amoco Petroleum et à 22 900 000 $ pour Amoco Resources.

11.        De plus, en raison dudit défaut d'acheter et de prendre, les Demandeurs affirment que ce qui peut être à terme recouvré des différents champs est réduit par la déplétion des réserves due à leur nature instable et aux retards de production, et les Demandeurs ont ainsi subi des pertes s'élevant à 2 200 000 $ à l'égard d'Amoco Petroleum et d'un montant identique à l'égard d'Amoco Resources.

12.        De plus, en raison dudit défaut d'acheter et de prendre, les Demandeurs affirment qu'ils ont subi des pertes consécutives au drainage de différents réservoirs par la production par d'autres, d'un montant de 500 000 $ pour Amoco Petroleum et de 500 000 $ pour Amoco Resources.

13.        De plus, en raison dudit défaut d'acheter et de prendre, les Demandeurs affirment qu'ils ont subi d'autres pertes résultant de la perte d'usage des sommes affectées aux dépenses d'immobilisations et aux coûts d'exploitation qui n'ont pas été nécessaires, à hauteur de 17 millions de dollars pour Amoco Petroleum et de 10 millions de dollars pour Amoco Resources.

[31]     Le premier témoin de l'appelante, M. Dowhanik, un haut dirigeant de l'appelante, était le chef de l'équipe qui a négocié le paiement à titre de règlement et la restructuration et le decontracting des ententes d'A & S. Il a rédigé une note à la direction (pièce A-2, onglet 25) recommandant l'acceptation du plan de decontracting en application duquel Amoco (les deux sociétés) recevrait 21 millions de dollars US. La note comparait les résultats économiques nets de l'acceptation du plan de decontracting. Il a utilisé des hypothèses optimistes et des hypothèses pessimistes dans le calcul du coût d'acceptation du plan; la différence entre les deux hypothèses était d'environ 14 millions de dollars US.

[32]     Je citerai maintenant sa brève description du plan de decontracting :

                   [traduction]

Éléments du plan de decontracting

    ◆       Amoco/A & S/PGT/PG & E résilient tous les contrats et Amoco reçoit 21 millions de dollars US de A & S/PGT/PG & E. Condition : abandon des restrictions canadiennes à l'exportation.

Amoco recouvre le contrôle sur l'approvisionnement et reçoit une somme en espèces. Les organismes de réglementation canadiens sont prêts à abandonner les restrictions pour favoriser un règlement appuyé par l'industrie. Les contrats transitoires dureront neuf mois.

    ◆      Amoco préserve les droits d'extraction des liquides de gaz naturel.

L'extraction des liquides du gaz naturel d'A & S à Cochrane est la pierre angulaire de notre activité lucrative de liquides. La préservation de cette activité était une partie cruciale du règlement d'Amoco. Marges sur 4 000 barils par jour de liquides de gaz naturel.

    ◆      Amoco reçoit la capacité du point de réception de NOVA/NUL (frais liés à la demande de 74,1 millions de dollars US).

Ce transport peut être assimilé aux coûts de collecte. Il nous permet de pénétrer le réseau intraprovincial, ce qui est obligatoire pour les ventes de gaz. Nous payions ces coûts sur une base d'un prix à marge garantie par l'intermédiaire d'A & S, bien que nous n'y étions pas vraiment obligés. 265 millions de pieds cubes par jour en transport pour environ huit ans.

    ◆      Amoco détient une option en deux étapes sur la livraison de NOVA et sur la capacité de transport d'ANG jusqu'à la frontière internationale (frais liés à la demande de 12,8 millions de dollars US).

Ce transport nous ouvre l'accès aux marchés internationaux (Californie et Pacific Northwest). Les droits sur ce transport nous permettront de faire des ventes garanties sur ces marchés, plutôt que des ventes interruptibles. Les primes pour les ventes fermes dépasseront les frais liés à la demande. Nous demandons 20 millions de pieds cubes par jour pour ces ventes, ainsi que 50 millions de pieds cubes par jour pour une vente antérieurement autorisée. La restructuration nous offre l'occasion de s'accaparer du transport antérieurement autorisé.

    ◆      Amoco dégage A & S/PG & E de toute réclamation liée à nos procédures judiciaires.

Les procédures judiciaires seront suspendues jusqu'au decontracting. Elles seront alors abandonnées. Le règlement nous permet d'éviter des frais juridiques dont le montant pourrait être élevé.

[33]     Sa recommandation se lit comme suit :

[traduction]

Decontractingd'A & S/PGT/PG & E

Recommandation Accepter le plan de decontracting, car la valeur de la préservation des droits d'extraction des liquides de gaz naturel ajoutée à celle du paiement de règlement excède la valeur qu'Amoco pourrait raisonnablement espérer obtenir par des procédures judiciaires.

Il s'agit d'une très bonne transaction pour les raisons suivantes :

    ◆      Éviter le risque de perdre les procédures

Le résultat des procédures n'est pas certain. Il n'est pas certain que la question du voile corporatif soit décidée en notre faveur. Le règlement, lui, est certain.

    ◆      Préserver l'extraction des liquides de gaz naturel

Une partie clé du règlement est la préservation de la force de notre position concurrentielle à Cochrane.

    ◆      Résolution de l'impasse réglementaire

L'ingérence future des organismes de réglementation serait limitée et la stabilité serait favorisée.

    ◆      Fournit le transport vers le centre du marché

Le règlement prévoit le transport au point de concurrence du gaz canadien dans le Pacific Northwest et en Californie.

[34]     Le contre-interrogatoire de M. Dowhanik par Me Softley a été complet et habile et, lors de ce contre-interrogatoire, il s'efforça d'étayer le fondement sur lequel la cotisation a été établie. La réponse modifiée à l'avis d'appel affirme que la cotisation était fondée sur les hypothèses suivantes :

[traduction]

a)          les faits tels qu'admis;

b)          les paiements reçus par l'appelante en vertu de l'entente de decontracting et de l'entente de modification ont été calculés en appliquant l'écart de prix entre le prix du gaz naturel dans les contrats d'approvisionnement de gaz résiliés et le cours marchand courant aux volumes de gaz naturel devant être livrés en vertu des contrats d'approvisionnement en gaz;

c)          les paiements compensaient les montants qui auraient été autrement reçus et crédités au bénéfice de l'entreprise de l'appelante;

d)          l'appelante a continué de produire du pétrole et du gaz naturel pour la vente après la résiliation des contrats d'approvisionnement de gaz avec A & S en application de l'entente de decontracting et de l'entente modifiée;

e)          les paiements n'ont pas été faits pour une production réelle de gaz naturel par l'appelante.

[35]     Le contre-interrogatoire cherchait à établir que, au cours des années où M. Dowhanik était à l'emploi de l'appelante ou de ses prédécesseurs, se sont produits un certain nombre de changements qui s'inscrivaient dans une évolution graduelle. Les changements amenés par le decontracting s'inscrivaient tout simplement dans cette tendance évolutive. En d'autres termes, la méthode de fonctionnement n'avait pas changé fondamentalement après le decontracting. Je reviendrai à cette prétention plus tard dans les présents motifs.

[36]     M. Dowhanik a convenu que les ventes brutes de gaz naturel d'Amoco (l'appelante et Amoco Canada Resources Ltd.) étaient d'environ 1 milliard de pieds cubes par jour et que, de ce montant, environ 13 % étaient vendus en application des contrats à A & S, et le reste, 87 %, était vendu à d'autres acheteurs. Une partie importante de la portion de 87 % était vendue à d'autres courtiers-fournisseurs; le témoin a déclaré que les ventes à A & S représentaient entre 15 % et 20 % des ventes d'Amoco à tous les courtiers-fournisseurs.

[37]     Le deuxième aspect du contre-interrogatoire de M. Dowhanik par Me Softley portait sur la méthode de calcul du paiement. L'échange s'est concentré sur l'annexe F du plan de decontracting, citée plus haut.

[38]     Je reproduirai ici les parties du contre-interrogatoire sur ce point (transcriptions, volume II, pages 179 à 186) :

[traduction]

Q.         Cela dit, je vous réfère à l'annexe F du document, et vous verrez que l'annexe F est intitulée Principes applicables à l'établissement des paiements de règlement

R.          Oui.

Q.         Une fois encore, conviendriez-vous avec moi que, à ce moment-là, vous, chez Amoco, avez compris que les principes qui guideraient l'établissement des paiements de règlement devant être faits par A & S étaient ceux qui sont exprimés dans cette annexe et que ces principes émanaient d'autres discussions subséquentes au plan de restructuration?

R.          C'est ce que ce document dit.

Q.         Et c'est ce que vous avez compris?

R.          Le calcul est en fait indéterminé, on ne peut calculer un nombre précis. Vous pouvez le calculer à un milliard de dollars. Je ne crois pas que c'est ce qui aurait été devant nous.

Q.         J'essaie de comprendre ce que vous venez de dire. Êtes-vous en train de me dire que, si le calcul avait été d'un milliard de dollars, alors vous auriez cru qu'A & S aurait sursauté et n'aurait pas procédé à énoncer ces principes, est-ce que c'est ce que vous êtes en train de dire?

R.          Oui, comme je vous l'ai dit en janvier et avril. Nous avions des négociations avec A & S et ce plan de decontracting était vraiment une présentation d'A & S, c'est eux qui l'ont écrit, ils l'ont présenté aux 190 producteurs et c'était une manière pour eux de nous vendre le decontracting, ils ont donc probablement estimé qu'ils devaient fournir une justification.

Q.         Ils ne l'ont pas juste estimé, c'est ce qu'ils ont fait et c'est précisé dans ce document. Ne serait-il pas juste de dire que vous avez compris qu'ils donnaient les mêmes principes et la même justification à l'égard de la configuration et de l'établissement du paiement à titre de règlement qu'ils avaient donnés dans le plan de restructuration?

R.          Ils ont des mots qui disent presque exactement la même chose.

Q.         Oui, en effet, merci.

R.          Et quand vous regardez ça, je ne sais pas exactement quelle était leur intention. Je sais que nous avons négocié avec eux le paiement à titre de règlement.

Q.         Et, après cette discussion, vous conviendrez que le système qui était proposé dans ce plan et qui est finalement devenu le système en vigueur quand l'entente de decontracting a été signée, que les paiements à titre de règlement seraient versés, calculés et donnés aux producteurs comme Amoco et qu'un examinateur indépendant affirmerait dans son examen de ces paiements que les divers participants avaient reçu un traitement égal?

R.          Quand j'ai parlé hier à Me Meghji, j'ai fait certains commentaires sur la confirmation de traitement égal qui était donnée par Deloitte et Touche et je me demande encore ce que cette confirmation signifie parce que je n'ai vraiment pas l'impression qu'ils avaient beaucoup de - ce n'était pas clair exactement qu'est-ce qu'ils confirmaient, que des producteurs dont la situation était semblable étaient traités en gros de la même manière et pour moi ça leur donnait énormément de latitude pour déterminer si le traitement était égal.

Q.         Bien.

R.          Au moment du decontracting, tous les producteurs affichaient un gros sourire de satisfaction. Personne ne savait exactement ce que cela voulait dire. Je crois que c'était surtout pour le facilitateur.

Q.         Mais ça faisait aussi partie des ententes contractuelles que vous avez signées, n'est-ce pas?

R.          Je ne l'ai pas signée, mais ça faisait partie du document de conclusion.

Q.         Bien, je suppose que nous pourrions argumenter jusqu'à quel point on peut donner du sens aux composants que les sociétés ont signés.

            Vous conviendrez avec moi que, en bout de ligne, Amoco a reçu son chèque?

R.          Je conviens que nous avons reçu un chèque de 22 millions de dollars.

Q.         Et vous avez reçu une confirmation de traitement égal de l'examinateur indépendant?

R.          Ça faisait partie de notre registre de conclusions, oui.

[...]

Q.         ME SOFTLEY : Est-ce que, au moment où Amoco a reçu la confirmation de traitement égal de l'examinateur, vous aviez l'impression que celui-ci agissait conformément aux principes et aux orientations du plan et de l'entente de decontracting?

R.          Je vais essayer de répondre prudemment de deux manières différentes. La confirmation de traitement égal dit que c'est ce qu'ils ont fait. Est-ce que nous croyons que c'est ce qu'ils ont fait? Maître, ce serait exagéré de croire que le chiffre qui a été calculé était 22 millions suivis de huit zéros. Un tel degré de précision pour aboutir avec un chiffre aussi rond avec une formule qui est constituée de principes que nous avons continuellement modifiés, c'est un peu exagéré.

Q.         Monsieur, je ne crois pas ce que je comprends ce que vous voulez dire quand vous parlez de 22 millions suivis de huit zéros?

R.          C'est comme avoir dix chiffres significatifs en mathématiques. Ça veut dire que chaque chiffre est significatif parce que celui qui suit ne le change pas donc quand vous regardez ça, il y a 22, zéro, zéro, zéro, zéro, zéro, zéro, virgule, zéro, zéro. Avec une formule aussi compliquée que celle de l'annexe F prétend être vous n'arriveriez jamais à obtenir quelque chose qui arrive à 22 millions tout rond. Ce serait la coïncidence de beaucoup - la probabilité serait tellement faible.

Q.         Je crois que je comprends ce que vous dites au sujet de la précision mathématique, mais vous conviendrez avec moi que l'exercice était ou qu'il était compris qu'il était de fournir un paiement conforme à des principes communs?

R.          C'est ce que la confirmation de traitement égal dit.

[...]

R.          Je l'ai.

Q.         Si vous pouvez aller à la page 17, clause 8.7.

R.          Oui.

Q.         Ça s'intitule « Confirmation de traitement égal » , et j'aimerais juste, aux fins de l'audience, le lire avec vous, et ça dit :

« L'assurance de la confirmation de traitement égal par l'examinateur constituera une preuve définitive que les principes utilisés pour calculer les paiements à titre de règlement des producteurs participants, y compris les paiements à titre de règlement des vendeurs, ont en général été appliqués uniformément et qu'en général les producteurs participants ayant des droits similaires ont été traités de manière uniforme à l'égard des paiements à titre de règlement qui leur auront été payés. »

            Maintenant que nous l'avons lu ensemble, Monsieur, est-ce que vous ne seriez pas d'accord avec moi qu'Amoco n'a jamais soulevé avec A & S, PGT ou PG & E que la confirmation de traitement égal qu'ils ont reçue de l'examinateur n'a pas été fournie conformément à cette clause?

R.          La confirmation de traitement égal a été fournie en vertu de cette clause.

[39]     Quand je lis le témoignage de M. Dowhanik, je ne peux arriver à la conclusion que la somme de 21 millions de dollars reçue par Amoco a été calculée comme étant le « l'écart de prix entre le prix du gaz naturel dans les contrats d'approvisionnement de gaz résiliés et le cours marchand courant aux volumes de gaz naturel devant être livrés en vertu des contrats d'approvisionnement en gaz » . Je ne crois pas qu'Amoco, représentée par M. Dowhanik, l'a considérée comme étant un calcul ou un montant qui devait être crédité au bénéfice de l'entreprise. C'était essentiellement un chiffre arbitraire qui s'inscrivait dans la restructuration globale de la relation avec le marché californien.

[40]     Le caractère essentiellement arbitraire de ce chiffre est confirmé par la preuve présentée par M.    Jenkins-Stark, lequel était, à l'époque, le dirigeant responsable de l'équipe de négociation de decontracting de PG & E. Essentiellement, il est parti d'un chiffre de 199 millions de dollars US (augmenté par la suite à 210 millions de dollars à la suite d'une erreur) qu'il était disposé à payer à tous les producteurs. Son principal problème était de répartir ce montant entre les producteurs.

[41]     Quelques passages de son interrogatoire principal sont particulièrement révélateurs (transcription, volume II, pages 242 à 247) :

[traduction]

Q.         Mais, en termes du chiffre final auquel vous êtes arrivé, disons avec Amoco, comment ce chiffre a-t-il été obtenu?

R.          Nous avions en général une fourchette de chiffres qu'Amoco avait exigée, et je ne me rappelle plus maintenant ce qu'ils étaient, mais je savais quelle était la fourchette de chiffres qu'ils exigeaient et, vous savez, souvent les producteurs n'arrivent pas clairement avec une exigence spécifique parce qu'ils ne veulent pas affaiblir leur position, mais, de ce que je me rappelle, nous connaissions une fourchette de chiffres et nous savions aussi qu'étant donné les contrats d'Amoco et en appliquant certaines pondérations à chacune des caractéristiques de leurs contrats, lorsqu'on appliquait ces pondérations à tout le groupe, on arrivait à un chiffre dans les 22 millions, donc je savais que si Amoco disait : « On ne le fera pas à moins de 30 millions de dollars » , je ne pouvais pas accepter ce chiffre parce que j'aurais dépassé mon plafond de 199, et là-dessus j'étais inflexible. Donc, en gros, nous sommes arrivés en bout de ligne à une entente avec Amoco au cours d'un souper sur ce que le chiffre final serait et nous avons utilisé ce chiffre et toutes les caractéristiques des ententes d'Amoco pour extrapoler ce que serait le résultat pour le groupe au complet et on est alors arrivés en-dessous du chiffre 199 que j'avais établi.

Q.         Monsieur, je vais mettre devant vous un document qui est dans un classeur ici.

                        Monsieur le juge, je réfère le témoin à l'onglet 22.

                        Monsieur Jenkins-Stark, reconnaissez-vous ce document?

R.          Oui.

Q.         Est-ce le plan de decontracting qui avait été transmis aux producteurs en juillet 93?

R.          Ça en a l'air.

Q.         Pouvez-vous vous rendre à l'article 3, s'il vous plaît?

R.          Oui.

Q.         Cette section traite du règlement des réclamations et, si on va au deuxième paragraphe, il dit :

« Des analyses économiques ont été entreprises afin d'établir toute éventuelle perte de valeur subie par A & S ou par les producteurs par suite de la mise en oeuvre du plan. Ces analyses économiques conduisent à différents résultats, suivant les hypothèses juridiques et économiques utilisées. »

Voyez-vous cela?

R.          Oui.

Q.         Et ensuite, ça dit :

« Compte tenu qu'il est possible que les résultats de l'analyse économique puissent mener à des interprétations différentes, afin de mener à terme de manière expéditive le plan de decontracting, les paiements à titre de règlement seraient faits à chaque producteur qui participe au decontracting. » ?

R.          Oui.

Q.         Est-ce que ces analyses économiques ont été menées, comme le dit la phrase ici, de quelle sorte d'analyse s'agirait-il?

R.          Je crois que ça renvoie aux facteurs qui ont été utilisés dans le régime de répartition qui comprenait, je crois --

Q.         Est-ce que vous regardez l'annexe F?

R.          Oui. Donc chacun d'entre eux a été utilisé dans le chiffrier pour calculer le paiement particulier des producteurs, toutefois il y a certains paragraphes clés de l'annexe F qui sont très importants pour ce chiffrier global car dans quelques cas, vous verriez que les estimations des prix futurs ont été utilisées et il y a aussi une estimation que la force relative de certains droits contractuels et la possibilité d'opposer certaines défenses à PG & E.

Q.         Je vais vous amener à ça, si vous regardez à la page F4 de l'annexe F, la dernière section dit :

                        « Rajustements en fonction du risque »

Est-ce que c'est de ça que vous parlez? Je crois que le mot que vous avez utilisé était « significatif » ou quelque chose du genre?

R.          Oui.

Q.         Maintenant, pourquoi est-ce que cette clause de rajustements en fonction des risques est significative, pourquoi en parleriez-vous de cette manière?

R.          Bien, elle est significative pour deux raisons et l'une d'elles est réelle, c'est-à-dire qu'il y avait des différences entre les droits contractuels spécifiques de chaque partie et, bien entendu, il y a des risques associés à tout litige et il y avait des défenses dont PG & E et ses filiales pouvaient se prévaloir, donc c'est significatif parce que c'est réel.

                        La deuxième raison pour laquelle c'est significatif est que, quel que soit le résultat du calcul qui précède, je peux le multiplier par un nombre pour arriver au nombre juste pour chaque producteur dans tout le groupe, donc de manière purement hypothétique disons que le calcul de tout ce qui précède arrive à 1 million de dollars et que si on l'appliquait à tout le groupe, j'en arrivais à un calcul d'un milliard de dollars, eh bien, si ça n'arrivait pas en dessous de mon plafond de 199, je prendrais ce million de dollars et je lui appliquerais un rajustement en fonction du risque de 0,2, et tout d'un coup j'ai un paiement de 200 000 $ qui, si je l'applique à tout le pool, donne un résultat de 200 millions de dollars, donc c'était à dessein dans les calculs mais c'était aussi réel, ça représentait des questions juridiques réelles.

Q.         Monsieur, les principes énoncés dans les annexes reflètent-ils la raison pour laquelle PG & E a payé aux producteurs ce montant dans le cadre du decontracting?

R.          Non, ils n'indiquent pas pourquoi nous avons payé, nous avons payé dans notre propre intérêt commercial.

Q.         Que font ces principes, Monsieur?

R.          Ils prévoient le mécanisme par lequel chaque producteur peut être assuré de recevoir sa juste valeur de la cagnotte de paiement, donc si leur situation est similaire, les producteurs sont traités de manière similaire, ce qui était, comme je l'ai dit, un principe de base pour le gouvernement albertain et l'APMC.

                        Maintenant, je pense qu'ils disent effectivement comment c'est calculé, mais, ce qui est le plus important de se rappeler, c'est qu'il y a une ou deux hypothèses plus l'évaluation du risque de litige qui nous permettent de garder tous les paiements en dessous du plafond que j'avais imposé à l'équipe.

Q.         Monsieur, après que ces contrats ont été annulés, est-ce que PG & E a conclu à nouveau d'autres contrats à long terme semblables?

R.          J'étais directement responsable des achats de gaz de PG & E par la suite, nous n'avons pas, bien qu'il y a eu des ententes transitoires dans le cadre de la restructuration, un seul tout petit contrat.

                        Maintenant, nous sommes passés à ce qui se produit vraiment aujourd'hui partout en Amérique du Nord, qui est une série d'ententes contractuelles au comptant et à court terme, certaines peuvent s'étendre sur plusieurs mois, certaines peuvent être pour une journée et d'autres pour une semaine, c'est un mélange de contrats, mais les jours - bien, Alberta and Southern a été dissoute après le decontracting et a été dissoute et il y avait des parties d'Alberta & Southern qui ont été vendues.

[42]     J'ai longuement cité la preuve présentée par ces deux importants témoins, un représentant le payeur et un le bénéficiaire, pour tenter de déterminer si l'allégation que les paiements ont été calculés en se fondant sur les profits perdus ou les revenus perdus peut être étayée, car il s'agit en l'essence de la prémisse sur laquelle se fonde la cotisation. Je ne crois pas que la preuve appuie une telle désignation du paiement ou une telle manière de le calculer. Un chiffre arbitraire, partie de la régularisation d'une restructuration majeure d'une partie importante de l'entreprise de l'appelante, a été utilisé. De plus, une partie du règlement permettait d'éviter un procès important et compliqué, dont le résultat était à tout le moins incertain.

[43]     L'alinéa d) des hypothèses, qui porte que l'appelante a continué de produire du pétrole et du gaz pour la vente après la résiliation des contrats d'approvisionnement en gaz avec A & S, est juste. L'entreprise de l'appelante n'a pas pris fin. Toutefois, la partie de l'entreprise qui touchait A & S était exploitée selon une structure très différente. Les contrats étaient à court terme, l'établissement des prix était différent et les biens-fonds et les réserves de l'appelante qui fournissaient le gaz et le pétrole à A & S ont été libérées et n'étaient plus affectées aux exigences d'un acheteur particulier, A & S. De plus, les ententes de transport ont été modifiées de manière significative.

[44]     L'intimée a soutenu que le montant reçu par l'appelante représentait une simple compensation pour l'annulation d'un contrat de vente. En toute déférence, j'estime que c'est là une simplification excessive. Les ententes avec A & S ont causé l'affectation aux contrats des réserves de certains biens-fonds particuliers et ont également relevé Amoco de toutes ses obligations de transport. Une fois les contrats résiliés, les biens-fonds ont été libérés et Amoco a pu conclure ses propres ententes de transport.

[45]     Avant de me tourner vers la jurisprudence, je désirerais soulever un dernier point. Me Meghji a lu à l'audience certaines parties de l'interrogatoire préalable d'un fonctionnaire de la Couronne dans lequel il fut admis que les contrats étaient des immobilisations. Il a dit (transcription, volume II, page 287) :

Q. D'accord. En étudiant les documents et en établissant cette cotisation, vous n'avez jamais supposé que ces contrats étaient à un moment donné de l'inventaire, n'est-ce pas?

R.          Non.

Q.         Ces contrats n'ont pas été acquis pour la vente?

R.          Non.

Q.         Ces contrats ont été acquis par Amoco ou Amoco les a conclus pour gagner des revenus grâce à eux?

R.          Oui.

Q.         Donc, ils ont toujours été des immobilisations?

R.          Des immobilisations à cet égard, oui.

R.          D'accord. Vous ne disconvenez pas que, en essence, il y a eu dissolution de ces contrats par suite du paiement de decontracting?

Ça ne fait aucun doute?

R.          En effet, ils ont été résiliés.

[46]     Bien entendu, il était tout à fait adéquat de poser ces questions au fonctionnaire de la Couronne et de les faire verser au dossier, mais les aveux sont des aveux sur une question de droit ou, dans le meilleur des cas, des aveux mixtes sur une question de fait et de droit, et elles ne lient pas la Cour. Cela dit, je suis d'accord avec le fonctionnaire de la Couronne. Il serait difficile de décrire ces contrats à long terme autrement que comme des immobilisations.

[47]     Les précédents ne manquent pas dans ce domaine du droit. L'avocat a cité plus de quarante arrêts au total, et je suis certain que ce n'est que la pointe de l'iceberg. Dans le passé, les tribunaux canadiens se sont guidés sur l'imposant corpus jurisprudentiel anglais portant sur la distinction entre les recettes et les paiements imputables au capital ou au revenu. Par exemple, dans M.N.R. v. Algoma Central Railway, 68 DTC 5096, la Cour suprême du Canada a cité avec approbation une décision du Conseil privé, B.P. Australia Ltd. v. Commissioner of Taxation of the Commonwealth of Australia, [1966] A.C. 224, à la p. 264, dans laquelle Lord Pearce affirme :

[traduction] La solution à ce problème ne réside pas dans un critère ou une description rigide. Elle doit être inférée des différents aspects de toutes les circonstances, dont certaines sont orientées dans une direction, d'autres dans l'autre. Un élément peut être orienté si clairement qu'il domine d'autres indications plus vagues orientées dans la direction contraire. C'est l'application du bon sens à toutes les caractéristiques pertinentes qui nous donnera finalement la réponse.

[48]     Cette observation est utile, que nous ayons affaire à des recettes ou à des paiements. Puisque les tribunaux canadiens ont élaboré leur propre jurisprudence, il est peut-être moins nécessaire de citer les arrêts anglais, quoique je considère qu'il est toujours utile de voir comment les tribunaux anglais ont réglé des problèmes similaires. Évidemment, s'il y a divergence, il faudra retenir les précédents canadiens.[1]

[49]     Je commencerai donc en citant deux précédents anglais, lesquels ont tous deux été cités avec approbation et suivis au Canada, et je crois qu'ils expriment bien le droit canadien. Le premier est Van den Berghs Ld. v. Clark, [1935] A.C. 431. Dans cette affaire, l'appelante et sa rivale, une société néerlandaise, avaient conclu une série d'ententes pour réglementer la manière dont ils faisaient affaire et pour regrouper leurs bénéfices. Des différends naquirent, suivis de longues négociations et d'un long arbitrage. L'affaire fut réglée lorsque la société néerlandaise accepta de payer aux appelants 450 000 livres [traduction] « à titre de dommages » . La Chambre des Lords a décidé que la recette était imputable au capital. Aux pages 438 et 439, Lord Macmillan dit :

[traduction] Vos Seigneuries, le problème de la distinction entre une recette imputable au revenu et une recette imputable au capital et entre un débours imputable au revenu et un débours imputable au capital en est un qui a souvent retenu l'attention de Vos Seigneuries ces dernières années. En règle générale, la distinction se fait et s'applique facilement, mais, de temps à autre, se présentent certaines affaires qui ne sont pas faciles à trancher, et dans ces cas la tâche de déterminer s'il s'agit de revenu ou de capital en devient une d'un grand raffinement, comme le montrent les décisions. Les lois de l'impôt sur le revenu ne définissent nulle part le terme « revenu » , pas plus qu'elles ne définissent le terme « capital » ; elles décrivent les sources de revenu et prévoient des méthodes de calcul du revenu, mais elles s'abstiennent discrètement de dire ce qui constitue un revenu. Elles ne définissent pas non plus « les profits ou les gains » ; quant au « commerce » , l'article d' « interprétation » de la Loi de 1918 ne fait que nous informer, avec un subtil mépris pour la logique, qu'il « comprend tout commerce, fabrication, projet ou affaire de nature commerciale » . Par conséquent, c'est dans les décisions que nous devons rechercher la lumière. Bien que la décision dans chaque affaire dépende des faits qui lui sont propres, et qu'aucun critère infaillible n'émerge, les décisions sont utiles à titre d'illustration et pour donner des indications sur le genre de considérations pertinentes à garder à l'esprit dans l'approche du problème.

La jurisprudence peut être classée en deux catégories : il y a les affaires dans lesquelles le sujet prétend qu'une recette ne devrait pas être incluse dans le calcul de ses bénéfices, et celles dans lesquelles le sujet prétend qu'un débours devrait être inclus dans les déductions admissibles dans le calcul de ses bénéfices. Dans le premier cas, la Couronne soutient que la recette est imputable au revenu, dans les autres cas, qu'elle est imputable au capital. Par conséquent, l'argument alterne suivant qu'il s'agit d'une recette ou d'un débours, et le contribuable et la Couronne se trouvent à arguer selon le cas en faveur d'une interprétation stricte ou large du concept de revenu.

[50]     Aux pages 440 et 441, il dit :

Vos Seigneuries, si l'on étudie et l'on classe les nombreuses décisions, nous trouverons qu'elles présentent un degré satisfaisant de compatibilité avec le principe de distinction de Lord Cave. Certaines portent sur les droits sur les bénéfices excédentaires et non sur l'impôt sur le revenu, mais, aux fins qui nous occupent, cette distinction n'est pas importante. Une somme déboursée pour établir un fonds de retraite pour les employés, comme cela est déjà établi, est une dépense en capital : British Insulated and Helsby Cables, Ld. v. Atherton (4), comme l'est une somme payée par un marchand de charbon pour acquérir les droits sur les contrats de fournitures de charbon en vigueur : John Smith & Son v. Moore (5), l'est également un paiement par une société de charbonnage représentant le prix devant être payé pour se libérer de certaines couches non rentables couvertes par son bail : Mallett v. Staveley Coal & Iron Co. (6). Dans le même ordre d'idées, une somme reçue par une société de terres à feu en compensation pour avoir laissé la terre à feu non traitée sous le chemin de fer a été jugée être une recette en capital : Glenboig Union Fireclay Co. v. Commissioners of Inland Revenue (7).

En revanche, une somme accordée par la Cour des compensations de guerre à une société exploitant l'entreprise de marchands de bière, de vin et d'alcool pour la saisie forcée de ses stocks de rhum par l'Amirauté a été jugée être une recette commerciale ou un revenu : Commissioners of Inland Revenue v. Newcastle Breweries, Ld. (8), a également été ainsi considérée une somme payée à une société de construction navale pour l'annulation d'un contrat de construction d'un bateau : Short Brothers, Ld. v. Commissioners of Inland Revenue (1), aussi, un paiement forfaitaire reçu par une société exploitant une carrière remplaçant quatre paiements annuels et en contrepartie duquel la société avait libéré un client de son obligation contractuelle d'acheter une certaine quantité de craie par année pour une période de dix ans et de construire un quai où elle pourrait être embarquée a reçu cette qualification : Commissioners of Inland Revenue v. Northfleet Coal and Ballast Co. (2), de même qu'une somme recouvrée par les assureurs d'une société forestière pour la destruction par le feu de leurs réserves de bois : J. Gliksten & Son v. Green. (3) Réciproquement, lorsqu'une société déboursa une somme pour se débarrasser d'un administrateur à vie dont la présence à titre de membre d'un conseil était considérée comme nuisible à l'exploitation rentable des affaires de la société, le paiement a été considéré comme un débours imputable au revenu : Mitchell v. R.W. Noble, Ld. (4), de la même manière, a été ainsi considéré le paiement fait dans l'affaire Anglo-Persian Oil Co. v. Dale (5) afin de dégager la société d'un contrat de mandat trop exigeant. Il y a beaucoup de cas cités dans la jurisprudence, mais j'en ai cité assez pour illustrer mon propos.

(4) [1926] A.C. 205.

(5) [1921] 2 A.C. 13.

(6) [1928] 2 K.B. 405.

(7) 1922 S.C. (H.L.) 112.

(8) (1927) 17 Tax Cas. 927.

(1) (1927) 12 Tax Cas. 955.

(2) (1927) 12 Tax Cas. 1102.

(3) [1929] A.C. 381.

(4) [1927] 1 K.B. 719.

(5) [1932] 1 K.B. 124.

[51]     Et, aux pages 442 et 443 :

[traduction] À quoi les appelants renonçaient-ils? Ils renonçaient à tous les droits qui leur étaient accordés par les contrats pour 13 ans. Ces contrats sont nommés en l'espèce « contrats de regroupement » , mais cette désignation est très inadéquate, car leur portée dépassait largement l'établissement d'un système de regroupement et de partage des bénéfices. Si les appelants ne faisaient que recevoir en une seule somme le total des bénéfices qu'ils auraient autrement reçus au cours de plusieurs années, le paiement forfaitaire pourrait être considéré comme étant de la même nature que les ingrédients dont il se compose. Mais, même si un paiement est mesuré par des recettes annuelles, il n'est pas forcément lui-même un revenu. Comme l'a fait remarquer Lord Buckmaster dans Glenboig Union Fireclay Co. v. Commissioners of Inland Revenue (1) : « Il n'y a aucun lien entre la mesure utilisée pour calculer un résultat donné et la qualité du chiffre auquel on arrive au moyen du critère. »

Les trois contrats que les appelants ont consenti à annuler n'étaient pas des contrats normaux conclus dans l'exercice de l'exploitation de leur commerce - ce n'étaient pas des contrats visant la disposition de leurs produits, ni l'embauche de préposés ou d'autres employés nécessaires à l'exploitation de leur entreprise, ce n'étaient pas non plus de simples ententes de répartition des bénéfices commerciaux éventuels comme en sont conclus entre cocontractants - les contrats annulés avaient pour objet toute la structure du mécanisme de génération de bénéfices des appelants. Ils réglementaient leurs activités, définissaient ce qu'ils pouvaient et ne pouvaient faire, et avaient des incidences sur toute l'exploitation de leur entreprise. J'ai de la difficulté à voir comment des sommes versées pour assurer une organisation aussi fondamentale des activités d'un commerçant ou des sommes reçues pour l'annulation d'une telle organisation peuvent être considérées comme un débours ou une recette imputable au revenu. M. Hills a eu grandement raison de prévenir Vos Seigneuries contre le risque d'être induit en erreur au sujet de la qualification juridique du paiement en raison de son importance, car cette importance est relative, et nous avons affaire à des sociétés qui brassent des millions. Mais l'importance de la transaction a tout de même une certaine pertinence. La distinction juridique entre un correctif et un renouvellement peut être influencée par l'importance de la dépense engagée. En l'espèce, toutefois, ce n'est pas l'importance de la somme qui importe, mais la nature de l'actif auquel il a été renoncé. Selon moi, cet élément d'actif, la collection des droits dont jouissaient les appelants en vertu des contrats et qui ont été abandonnés en contrepartie d'un paiement, était une immobilisation.

(1) 1922 S.C. (H.L.) 112,115.

[52]     Quelles lumières peut-on tirer de ce texte vénérable en l'an 2002? Plusieurs des affirmations de Lord Macmillan sont importantes :

a)        Un contrat qui forme une partie fondamentale de la structure d'affaires d'une société est une immobilisation.

b)       Si un contrat est une immobilisation, un paiement visant son annulation est une recette imputable au capital.

c)        Dans la distinction entre les montants imputables au capital et ceux imputables su revenu, les mêmes principes s'appliquent qu'il s'agisse de paiements ou de recettes. Je ne suis pas certain d'adhérer sans réserve à cette affirmation. Ce n'est toutefois pas la question que je dois trancher ici.

d)       Les décisions citées par Lord Macmillan, qui ont placé les différentes espèces d'un côté de la distinction ou de l'autre, illustrent la difficulté d'atteindre une cohérence parfaite dans ce domaine.

[53]     Van den Berghs se situe à une extrémité du spectre. À l'autre, se trouve London and Thames Haven Oil Wharves, Ltd. v. Attwooll (Inspector of Taxes), [1967] 2 All E.R. 124 (C.A.), dans lequel Lord Diplock, aux pages 134 et 135, fait l'affirmation suivante, qui a souvent été citée et approuvée par les tribunaux canadiens :

[traduction] La question de déterminer si une somme d'argent reçue par un commerçant doit être incluse dans le calcul des bénéfices ou des gains générés par ses activités commerciales au cours d'une année donnée en est une qui devrait pouvoir être résolue en appliquant des critères rationnels, et je crois qu'elle peut effectivement être ainsi résolue. J'estime que la jurisprudence n'est pas fixée au point de me convaincre que cette question de droit, bien que de droit fiscal, ne peut être résolue par la logique, et c'est là ce que je me propose témérairement de faire.

Je débuterai en formulant ce que je crois être la règle pertinente. Lorsque, au titre d'un droit légal, un commerçant reçoit d'une autre personne une compensation du défaut pour ledit commerçant de recevoir une somme d'argent qui, si elle avait été reçue, aurait été créditée aux bénéfices, le cas échéant, générés au cours d'une année par le commerce exploité par lui au moment où la compensation est ainsi reçue, ladite compensation doit être traitée aux fins de l'impôt sur le revenu de la même manière que ladite somme aurait été traitée si elle avait été reçue au lieu de la compensation. La règle s'applique quelle que soit la source du droit légal du commerçant de recouvrer la compensation. Il peut découler d'une obligation contractuelle principale, comme un contrat d'assurance; d'une obligation secondaire découlant de l'inexécution d'un contrat, comme le droit à des dommages-intérêts, qu'ils soient ou non liquidés, comme c'est le cas de la clause de surestarie d'une charte-partie; d'une obligation de payer des domages-intérêts, comme c'est le cas dans la présente affaire; d'une obligation législative; ou de toute autre manière dont peut naître une obligation légale.

La source du droit légal est toutefois pertinente au premier problème que soulève l'application de la règle à l'espèce, c'est-à-dire la détermination de ce pour quoi la compensation a été payée. Si la solution du premier problème est que la compensation a été payée pour le défaut du commerçant de recevoir une somme d'argent, le deuxième problème est alors de décider si, dans l'hypothèse où ladite somme d'argent avait été reçue par le commerçant, elle aurait été créditée aux bénéfices (le cas échéant) générés au cours d'une année donnée du commerce exploité par lui à la date de la recette, c'est-à-dire qu'elle aurait été ce que j'appellerai à des fins de concision une recette en revenu de ce commerce. La source du droit légal à la compensation n'est pas pertinente au deuxième problème. La méthode par laquelle la compensation a été évaluée dans le cas particulier n'aide pas à déterminer le motif pour lequel elle a été payée, elle ne constitue pas plus qu'un facteur qui peut aider à la résolution du problème de détermination. Je n'étudierai pas la jurisprudence plus à fond. Elle semble tout orientée vers la résolution de l'un ou l'autre de ces deux problèmes, qui ne sont pas toujours distingués dans les jugements. Différentes métaphores et comparaisons ont été utilisées dans ces jugements (qui conviennent sans doute aux faits particuliers de l'affaire). Mais je ne crois pas qu'aucun des précédents soit incompatible avec la règle telle que je l'ai exprimée.

[54]     La plupart des causes se situent quelque part entre ces deux extrêmes. Il faut résister à la tentation de glaner certaines expressions frappantes de la jurisprudence, car elles peuvent appuyer à peu près n'importe quelle conclusion, et on risque ce faisant de perdre de vue l'objet réel de l'exercice, qui est de déterminer si le paiement a été fait en vue de l'extinction, de la disposition ou de la stérilisation d'une immobilisation, ou s'il est un des incidents ordinaires de la vie d'une entreprise, auquel cas la recette fait véritablement partie des recettes normales du commerce.

[55]     Je ne me propose pas de me pencher sur toutes les décisions mentionnées par l'avocat. Le fait qu'un bien, tel un contrat, soit une immobilisation d'une entreprise est une conclusion de droit qui dépend des faits de l'espèce. Par exemple, dans Aallcann Wood Suppliers Inc. c. Sa Majesté la Reine, C.C.I., n ° 92-2505(IT)G, 3 mai 1994 (94 DTC 1475), il fut décidé que la vente du contrat d'un contribuable conclu avec une usine de pâte à papier était une vente d'immobilisation. Dans Prince Rupert Hotel (1957) Ltd. c. Sa Majesté la Reine, C.A.F., n ° A-350-93, 31 mars 1995 (95 DTC 5227), la Cour d'appel fédérale a confirmé la décision du tribunal de première instance à l'effet que les dommages-intérêts reçus de l'avocat du contribuable pour des erreurs dans la rédaction des contrats en vertu desquels il devait recevoir des frais de gestion étaient un revenu. Les circonstances des arrêts Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Sa Majesté la Reine, C.F., 1re inst. n ° T-98-85, 8 juin 1988 (88 DTC 6340) et Pe Ben Industries Company Limited c. Sa Majesté la Reine, C.F. 1re inst., n ° T-1583-82, 8 juin 1988 (88 DTC 6347) étaient assez semblables : un paiement pour l'annulation d'un contrat de transport. Dans le premier cas, il fut décidé qu'aucun élément d'actif permanent, qui soit une entreprise distincte ou un contrat à long terme, n'a été détruit, alors que dans le second cas il fut jugé qu'une partie distincte de la structure d'affaires de l'appelante avait été détruite. Par conséquent, dans la cause Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, le paiement était un revenu, et dans la cause Pe Ben, il s'agissait d'une immobilisation. Dans Westfair Foods Limited c. Sa Majesté la Reine, C.F. 1re inst., n ° T-1972-89, 19 décembre 1990 (91 DTC 5073), il fut jugé que les montants reçus pour la résiliation de deux baux étaient une immobilisation.

[56]     Dans Cie T. Eaton c. Canada (C.A.), [1999] 3 C.F. 123 (99 DTC 5179), la Cour d'appel fédérale a jugé que le paiement pour l'annulation d'une clause de participation dans un bail était une recette en capital. Le juge Robertson, aux motifs duquel se sont rangés les juges Strayer et Linden, affirme, à la page 5185 :

[35] En l'espèce, le rachat de la clause de participation n'a eu aucun effet sur les opérations commerciales normales de la contribuable. Il n'a pas non plus affecté le droit de la contribuable de rester en possession des locaux en vertu du bail. Sa fin n'a pas, par exemple, « paralysé » l'entreprise rentable de la contribuable au centre commercial d'Oshawa. Ainsi, je concède aisément que l'exception établie par l'arrêt Fleming ne s'applique pas au cas présent. Mais cette concession ne met pas fin à l'affaire, parce que je suis également d'avis que l'analogie faite au contrat commercial n'est pas appropriée.

[36] À mon humble avis, la clause de participation ne fait pas seulement partie intégrante du bail en question, mais elle influe aussi considérablement sur la valeur d'un bien immobilisé, à savoir une propriété à bail. Comme il est mentionné dans London and Thames Haven, la rentabilité d'un bien est un élément à prendre en considération pour déterminer sa valeur en capital. À cet égard, la clause de participation est intimement liée à un bien immobilisé et à sa valeur. Ce que le ministre a omis d'apprécier, c'est que le bail d'un locataire n'est pas seulement une obligation, comme il a été affirmé au cours de la plaidoirie. Un droit foncier représente également un bien immobilisé, dont la valeur dépend à la fois des modalités du bail et des conditions du marché. Par exemple, le locataire dont le loyer à verser équivaut à la moitié du taux du marché possède un bien de grande valeur qui peut être vendu par transfert, sous réserve de toute restriction protégeant les droits du locateur. De même, le bail qui contient une clause de participation est encore d'une plus grande valeur, tout particulièrement si le centre commercial devient rentable, comme dans le cas présent. Sinon, le locateur n'aurait pas été disposé à racheter la clause pour la somme de 9,25 millions de dollars.

[37] À mon humble avis, le rachat de la clause de participation a eu pour effet évident de réduire la valeur du bien immobilisé de la contribuable de 9,25 millions de dollars. C'est ce que la clause valait tant pour le locateur que pour la contribuable. Je ne vois pas pourquoi la Cour ne devrait pas admettre que l'indemnité payée pour la diminution de la valeur d'une propriété à bail est imputable au capital. L'annulation de la clause de participation a eu autant d'effets sur la valeur du droit foncier qu'en aurait eu un incendie qui aurait détruit partiellement les locaux. Puisque l'indemnité relative à une telle perte serait imputable au capital, ce devrait également être vrai dans le cas d'une perte volontaire découlant de l'annulation d'un droit contractuel qui fait partie intégrante d'un bien immobilisé.

[38] En fin de compte, il y a deux façons de voir pour établir si l'indemnité pour la perte de profits futurs découlant de l'annulation d'une clause de participation est imputable au revenu ou au capital. Si on recourt à celle du ministre, le rachat de la clause de participation remplace une source de revenu et elle est donc une rentrée de fonds. Selon celle de la contribuable, le rachat fait baisser la valeur d'un bien immobilisé pour lequel l'indemnité doit être considérée comme une rentrée de capital. N'eût été du fait que la clause de participation en question fait partie intégrante du bail, la façon de voir du ministre aurait été la seule acceptable.

(Les italiques sont de moi.)

[57]     Après avoir appliqué les principes énoncés dans les causes susmentionnées, ainsi que dans les nombreuses autres causes citées par l'avocat, je résumerai brièvement ma conclusion.

a)        Les contrats de fournitures de gaz naturel à long terme que l'appelante avait conclus avec A & S étaient des immobilisations de l'appelante. Ils formaient une partie importante de la structure de son entreprise. L'affectation des biens-fonds contenant les réserves au contrat ne fait rien de plus que corroborer cette conclusion. Par analogie à la portion de la cause T. Eaton en italiques ci-dessus, l'affectation des réserves des biens-fonds a une incidence sur la valeur du contrat et, réciproquement, l'affectation du contrat a une incidence sur la valeur des biens-fonds, lesquels sont sans conteste des immobilisations. En termes plus simples, les biens-fonds sont une partie intégrante des contrats.

b)       Les paiements faits à l'appelante ne compensaient pas la perte d'une « source de revenu » . Ils ne sont certainement pas fondés sur le revenu que l'appelante s'attendait à recevoir des contrats. Ils faisaient plutôt partie de l'ensemble des ententes de decontracting,qui prévoyaient une restructuration majeure d'une partie importante de l'entreprise de l'appelante, dont faisait partie l'annulation des contrats à long terme. Même si les paiements étaient mesurés par la valeur courante des bénéfices que la société pouvait raisonnablement s'attendre à gagner, cela n'enlèverait pas aux paiements leur qualité de capital, car ils étaient faits en compensation de la stérilisation d'une immobilisation. Ce principe a été énoncé par le Lord président Clyde dans l'affaire The Glenboig Union Fireclay Co., Ltd. v. The CIR, 12 TC 427, aux pages 448 et 449, et à la Chambre des Lords par Lord Buckmaster aux pages 463 et 464 et par Lord Wrenbury aux pages 465 et 466.

c)        J'ai conclu que les hypothèses contenues aux alinéas 13b) et c) de la réponse modifiée à l'avis d'appel ont été démolies. Elles étaient le fondement de la cotisation, qui ne peut donc être confirmée. Les montants reçus n'étaient pas un revenu de l'entreprise de l'appelante, ni n'étaient un revenu d'une autre source. Il s'agissait de recettes imputables au capital. Il me reste donc à déterminer comment ces recettes en capital doivent être traitées en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les recettes en capital ont des conséquences variées en vertu du droit de l'impôt sur le revenu canadien. Elles sont parfois traitées comme le produit de la disposition d'une immobilisation, donnant lieu à des gains ou des pertes en capital. Elles sont parfois traitées comme le produit de la vente d'une immobilisation admissible. Parfois, elles sont tout simplement des recettes en capital non imposables. On trouve dans cette catégorie les gains à la loterie, les héritages, les cadeaux, le produit de la vente d'une résidence principale et les dommages-intérêts pour blessures corporelles.

d)       Je ne crois pas que les paiements reçus en espèces tombent dans cette dernière catégorie. Je ne vois aucune raison de ne pas être d'accord avec la désignation par l'appelante des montants reçus comme étant le produit de la disposition de contrats, lesquels, comme je l'ai dit, sont des immobilisations. Les contrats et les droits qu'ils prévoient ont été résiliés, et cela constitue selon moi une disposition. Si ma conclusion est juste, il s'ensuit que les montants représentent un gain en capital. L'appelante n'a pas tenté d'établir que les contrats avaient un prix de base rajusté qui ne soit pas nul. Si j'avais tort de conclure que les montants représentent le produit de la disposition des contrats, cela ne changerait rien à la conclusion que les recettes sont imputables au capital. Elles ne sont certainement pas des revenus.

[58]     Vu cette conclusion, je ne traiterai pas de l'argumentation subsidiaire de l'appelante voulant que les montants, s'ils sont des revenus, sont des bénéfices relatifs à des ressources.

[59]     L'appel est admis avec dépens, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que les montants reçus d'A & S et de PGT représentent le produit de la disposition d'immobilisations et sont donc des recettes imputables au capital.

Signé à Toronto, Canada, ce 16e jour d'octobre 2002.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour de septembre 2003.

Mario Lagacé, réviseur



[1]           Un exemple d'une telle divergence se trouve dans Commissioner of Inland Revenue v. Wattie and Lawrence, 72 TC 639, dans lequel le Comité judiciaire du Conseil privé a décidé de ne pas suivre la décision de la Cour Suprême du Canada dans Ikea Limited c. Canada, [1998]1 R.C.S. 196 (98 DTC 6092).

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