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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

97-1267(IT)I

ENTRE :

V. G. BOOTSMAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 9 janvier 1998 à Vancouver (Colombie-Britannique), par

l'honorable juge David Beaubier

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                          Me Elizabeth Junkin

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1994 est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de janvier 1998.

« David Beaubier »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 19970116

Dossier: 97-1267(IT)I

ENTRE :

V. G. BOOTSMAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge BEAUBIER, C.C.I.

[1]      L'appel en l'espèce, interjeté sous le régime de la procédure informelle, a été entendu à Vancouver, en Colombie-Britannique, le 9 janvier 1998. L'appelant a été la seule personne à témoigner.

[2]      Dans sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1994, l'appelant a demandé deux déductions concernant un déménagement dans le cadre duquel il a quitté Edmonton pour Surrey (C.-B.) où il avait obtenu un emploi au sein d'une petite entreprise. Les frais de déménagement demandés, qui s'élevaient à 17 365 $, ont été admis. Quant à l'autre demande visant à déduire la somme de 4 634 $ au titre de l' « indemnité pour variation des prix résidentiels » , elle a été rejetée. L'appelant porte cette décision en appel.

[3]      La somme de 4 634 $ représente, comme il l'a souligné :   

[TRADUCTION]

L'écart des prix résidentiels entre ceux qui étaient en vigueur à Edmonton, en Alberta, et ceux qui étaient en vigueur à Surrey, en Colombie-Britannique, était de 65 000 $. Il reste encore à déduire la somme de 60 366 $ des revenus de l'année d'imposition 1995.

[4]      L'appelant a présenté deux arguments juridiques pour appuyer sa requête.

[5]      Le premier argument s'appuyait sur les articles 2 et 6 de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte » ). Ils sont ainsi formulés :

Article 2    Libertés fondamentales

2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :

a)       liberté de conscience et de religion;

b)       liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;

c)       liberté de réunion pacifique;

d)       liberté d'association.

Article 6    Liberté de circulation et d'établissement

6.(1) Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer et d'en sortir.

(2) Tout citoyen canadien et toute personne ayant le statut de résident permanent au Canada ont le droit :

a) de se déplacer dans tout le pays et d'établir leur résidence dans toute province;

            b) de gagner leur vie dans toute province.

(3) Les droits mentionnés au paragraphe (2) sont subordonnés :

a) aux lois et usages d'application générale en vigueur dans une province donnée, s'ils n'établissent entre les personnes aucune distinction fondée principalement sur la province de résidence antérieure ou actuelle;

b) aux lois prévoyant de justes conditions de résidence en vue de l'obtention des services sociaux publics.

(4) Les paragraphes (2) et (3) n'ont pas pour objet d'interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer, dans une province, la situation d'individus défavorisés socialement ou économiquement, si le taux d'emploi dans la province est inférieur à la moyenne nationale.

[6]      De l'avis de la Cour, l'article 2 ne s'applique pas à la demande de l'appelant. En effet, l'omission de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) d'accorder une certaine somme d'argent pour le déménagement de l'appelant ne restreint pas sa liberté d'association. Le paragraphe 6(2) accorde à l'appelant le droit de s'établir et de gagner sa vie dans n'importe quelle province. À cet égard, il serait tout d'abord important de souligner que la déduction accordée à l'appelant à l'égard de ses frais de déménagement qui s'élevaient à 17 365 $ est, en vertu de l'article 62 de la Loi, un privilège accordé à l'appelant par la Loi; il ne s'agit pas d'un droit. Il a le droit de déménager, mais il n'a pas le droit de faire payer les autres citoyens canadiens pour ce déménagement ou une nouvelle résidence qu'il habitera. Il ne peut obtenir une déduction que si la Loi la lui accorde. En vertu de la Loi, il ne subsiste aucune ambiguïté concernant la somme de 4 634 $ dont l'appelant a demandé la déduction. Elle ne fait mention d'aucun droit à cette déduction. Par conséquent, il n'est pas nécessaire d'examiner l'article 6 de la Charte. Comme l'a mentionné le juge Iacobucci dans l'arrêt Elizabeth C. Symes c. La Reine, 4 R.C.S. 695 (94 DTC 6001) à la page 6020 :

Je suis d'accord avec le sentiment exprimé dans ces deux citations, mais je ne réussis pas à en établir la pertinence en l'espèce. Dans les arrêts Hills et Slaight Communications, notre Cour devait examiner des dispositions législatives ambiguës. Dans chaque cas, on a examiné les valeurs de la Charte pour résoudre l'ambiguïté. Toutefois, chaque arrêt reconnaît que consulter la Charte en l'absence d'une telle ambiguïté la prive d'un objet plus important, la détermination de la constitutionnalité d'une loi. Si les dispositions législatives devaient être rendues compatibles avec la Charte même en l'absence d'ambiguïté, alors il ne serait jamais possible d'appliquer, plutôt que de simplement consulter, les valeurs de la Charte. En outre, le gouvernement ne pourrait jamais justifier une atteinte à la Charte comme une limite raisonnable en vertu de l'article premier puisque le processus d'interprétation empêcherait initialement de conclure à l'existence d'une atteinte à la Charte.

En l'absence de l'art. 63, on aurait peut-être pu soutenir que les valeurs en matière d'égalité prévues dans la Charte auraient pu servir à interpréter l'art. 9 et les al. 18(1)a) et 18(1)h) de la Loi.    Toutefois, comme je l'ai déjà précisé, l'art. 63 élimine toute ambiguïté et, ce faisant, élimine aussi en l'espèce la nécessité du recours aux valeurs de la Charte.    Mon analyse de la Loi de l'impôt sur le revenu m'amène inévitablement à conclure que la Loi n'autorise pas, dans le calcul du bénéfice visé à l'art. 9, une déduction de dépense d'entreprise relativement à la garde des enfants, mais limite plutôt la déduction des frais de garde en conformité avec l'art. 63.

[7]      Le deuxième motif sur lequel s'appuie la requête de l'appelant est la Loi en soi. La seule admissibilité à des frais de déménagement est énoncée à l'article 62. Le paragraphe 62(1) accorde le privilège de demander la déduction des frais de déménagement. Selon le contexte de ce paragraphe, les frais de déménagement correspondent aux frais engagés à cette fin, c'est-à-dire l'activité de déménager au sens verbal, ce qui couvre les frais énoncés au paragraphe 62(3). Ainsi, il est stipulé :

(1)         Frais de déménagement Pour l'application du paragraphe (1), sont compris dans les frais de déménagement toutes dépenses engagées au titre :

a)          des frais de déplacement (y compris les dépenses raisonnables pour repas et logement) engagés pour le déménagement du contribuable et des membres de sa maisonnée qui se transportent de l'ancienne résidence à la nouvelle résidence;

b)          des frais de transport et d'entreposage des meubles du contribuable qui doivent être transportés de son ancienne résidence à sa nouvelle résidence;

c)          des frais de repas et de logement, près de l'ancienne résidence ou de la nouvelle résidence, engagés par le contribuable et les membres de sa maisonnée pendant une période maximale de 15 jours;

d)          des frais de résiliation du bail en vertu duquel il était le locataire de son ancienne résidence;

e)          des frais relatifs à la vente de son ancienne résidence;

f)           lorsque le contribuable ou son conjoint vend ou a vendu son ancienne résidence par suite du déménagement, de ses frais pour les services juridiques à l'égard de l'achat de sa nouvelle résidence et pour tout impôt sur le transfert ou l'enregistrement du droit de propriété de sa nouvelle résidence;

il est toutefois entendu que le terme ne vise pas les frais (autres que les frais visés à l'alinéa f) engagés par le contribuable pour l'acquisition de sa nouvelle résidence.

Ces frais sont clairement énoncés. Ils ne comprennent pas la variation des prix résidentiels de 4 634 $ dont l'appelant a demandé la déduction.


[8]      Pour ces motifs, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de janvier 1998.

« David Beaubier »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure

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