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Date: 20020704

Dossier: 2000-3681-IT-G, 1999-3011-IT-G

ENTRE :

CLAUDE BOULANGER,

PIERRE DUFOUR,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

Intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Lamarre, C.C.I.

[1]            L'appelant Claude Boulanger se porte en appel de cotisations établies par le ministre du Revenu national ( « Ministre » ) en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu ( « Loi » ), par lesquelles le Ministre a refusé, pour l'année d'imposition 1996, de considérer une perte en capital au montant de 140 143,83 $ comme une perte au titre d'un placement d'entreprise et a refusé pour cette même année, la déduction d'une perte d'entreprise minière au montant de 7 447 $ et d'une perte locative au montant de 17 320 $. Par ailleurs, le Ministre a également refusé la déduction d'une perte locative au montant de 31 783 $ pour l'année d'imposition 1995.

[2]            L'intimée ne conteste plus la déduction de la perte d'entreprise minière et des pertes locatives, de sorte que le litige ne porte maintenant que sur la question de la déductibilité ou non de la perte en capital comme une perte au titre d'un placement d'entreprise pour l'année d'imposition 1996.

[3]            Quant à l'appelant Pierre Dufour, il se porte en appel de cotisations établies par le Ministre en vertu de la Loi par lesquelles on a refusé de traiter comme une perte au titre de placement d'entreprise une perte en capital au montant de 63 233,33 $ qui a été subie par sa conjointe Valérie Dufour, laquelle lui a été attribuée pour l'année d'imposition 1996. Par ailleurs, l'appelant avait déjà pu déduire une perte au titre d'un placement d'entreprise au montant de 35 331 $ en 1996. Il s'agit donc de déterminer si le 3/4 de la perte en capital de 63 233,33 $ (soit 47 425 $) qui lui est attribuée peut s'ajouter à la perte de 35 331 $ comme une perte au titre d'un placement d'entreprise pour 1996 et être reportée en 1997. Dans l'affirmative, le calcul du solde des pertes autres que des pertes en capital disponibles pour l'année d'imposition 1997 devra tenir compte de cette perte au titre de placement d'entreprise additionnelle, le tout selon les dispositions de la Loi.

[4]            Les parties ont produit une entente partielle sur les faits reprenant les montants qui sont encore en litige. Cette entente partielle sur les faits est reproduite ci-après :

1.        Claude Boulanger a subi une perte en capital de 140 143,83 $ au cours de l'année d'imposition 1996.

2.        Il s'agit de déterminer si Claude Boulanger peut déduire les 3/4 de la somme de 140 143,83 $, soit 105 107,87 $, à titre de perte déductible au titre d'un placement d'entreprise ( « PDTPE » ) dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1996.

3.        Valérie Dufour a subi une perte en capital de 63 233,33 $ dans l'année d'imposition 1996. Cette perte doit être attribuée à Pierre Dufour pour son année d'imposition 1996 et peut être reportée sur les années suivantes au besoin selon les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu.

4.        Il s'agit de déterminer si Pierre Dufour peut déduire les 3/4 de la somme de 63 233,33 $, soit 47 425,00 $, à titre de PDTPE dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1996.

5.        Dans la mesure où le montant de 47 425,00 $ est déductible à titre de PDTPE dans le calcul du revenu de Pierre Dufour pour l'année d'imposition 1996, ce montant se rajoute à la somme de 35 331 $ déjà accordée par le Ministre du revenu national pour 1996.

6.        Dans la mesure où le montant de 47 425,00 $ est déductible à titre de PDTPE dans le calcul du revenu de Pierre Dufour pour l'année d'imposition 1996, le calcul du solde des pertes autres que des pertes en capital disponibles pour l'année d'imposition 1997 de Pierre Dufour devra tenir compte de cette PDTPE additionnelle et il suivra les calculs dictés par la Loi de l'impôt sur le revenu pour 1997 et les années suivantes au besoin.

Point en litige

[5]            La seule question en litige est donc de déterminer si la perte en capital au montant de 63 233,33 $ subie par Pierre Dufour et de 140 143,83 $ subie par Claude Boulanger, résultant de la disposition de leurs parts respectives d'une créance hypothécaire grevant un terrain appartenant à la Société 170663 Canada Inc. ( « Société » ) peut être considérée comme une perte dont le 3/4 serait déductible comme une perte au titre d'un placement d'entreprise ( « PTPE » ) au sens de l'alinéa 39(1)c) de la Loi.

Faits

[6]            Selon le témoignage des appelants, ils ont élaboré en 1989 un projet par lequel ils désiraient regrouper dans un même endroit les services complets rattachés aux automobiles, tels la vente par différents concessionnaires, le service après-vente, les services de débosselage et de peinture ou de teinture de vitres, les services administratifs et autres. Ce plan a été conçu dans le but de regrouper les différents commerces reliés au secteur de l'automobile et de répartir les frais d'opération.

[7]            Les appelants, tous deux avocats, n'étaient pas seuls dans ce projet. Ils étaient appuyés par un dénommé Roch Potvin, propriétaire d'une concession automobile (Normandie Jeep Eagle) et Rock Dompierre, agent d'immeubles qui, tout comme les appelants, avait des clients dans le domaine automobile.

[8]            Selon les appelants, il s'agissait d'un nouveau concept par lequel ils comptaient faire un profit en revendant éventuellement leurs parts dans ce projet. Ainsi, un terrain formé de trois lots fut acquis par la Société créée à cette fin pour être exploitée sous le nom de « Carrefour de l'automobile » et dont les actions avaient été émises aux sociétés de gestion appartenant à chacun des quatre investisseurs. Ce terrain était situé sur le boulevard St-Joseph à l'extrémité de la ville de Hull, dans la partie où se retrouvaient déjà plusieurs commerces rattachés aux automobiles.

[9]            Les investisseurs ont rencontré à ce moment (en 1989) un ingénieur pour s'assurer que le terrain n'était pas pollué et un architecte, monsieur Pierre Cayer, pour développer le concept. Un plan d'ensemble fut alors conçu.

[10]          La construction d'un édifice à trois étages fut prévue afin de regrouper les services administratifs et un croquis fut dessiné pour l'implantation du projet sur les trois terrains regroupés, selon des plans préliminaires effectués par l'architecte Cayer. Ce dernier aurait été rémunéré par l'appelant Boulanger, au nom de la Société. Un plan d'aménagement extérieur indiquant les différents niveaux de terrains a été effectué de même que des sondages pour s'assurer de la solidité du sol, le tout afin de vérifier que le projet pourrait être réalisé dans son ensemble. Un rapport d'étapes pour la construction du projet fut préparé par un entrepreneur général (pièce A-2, onglet P-8), mais aucune entente ne fut signée.

[11]          Par la suite, les investisseurs ont sollicité un prêt auprès de la Caisse Populaire, qui détenait déjà une hypothèque sur les terrains acquis par la Société (voir pièce A-2, onglet P-3), pour financer la construction d'une première phase du projet. Ce prêt a été refusé par la Caisse Populaire puisque les garanties additionnelles qu'elle avait réclamées ne lui ont pas été données. Selon le rapport d'évaluation exigé par la Caisse Populaire, il est probable que le prêt aurait été refusé autour du mois de juin 1990 (pièce I-1, onglet 6). Les investisseurs ont alors tenté de trouver un autre partenaire. Entre temps, soit le 11 juillet 1990, Rock Dompierre, qui connaissait de graves difficultés financières, a revendu aux sociétés de gestion des appelants les actions que sa société de gestion détenait dans la Société de même que la créance de 54 375 $ qu'il détenait sur cette Société par suite des avances qu'il avait faites, le tout pour la valeur de la créance (voir pièce I-2). Il a fait faillite quelques temps après.

[12]          Finalement, la compagnie de construction Taillefer Développement Inc. ( « Taillefer » ) a acheté, pour la somme d'environ 900 000 $ selon les appelants, une partie du terrain (130 000 p.c.) au cours du mois de décembre 1990 (la date correspond à l'acte de transport de créance en faveur de la Caisse Populaire sur le solde de prix de vente donné par Taillefer à la Société, pièce A-2, onglet P-3).

[13]          Taillefer a ensuite financé la construction d'un immeuble de 13 000 pieds carrés selon les plans de construction élaborés par un autre architecte (lesquels plans de construction reprenaient en partie les plans préliminaires de l'architecte Cayer) et pour lequel un permis de construction avait déjà été octroyé. Selon l'architecte Cayer, c'est la portion de son plan préliminaire qui prévoyait l'installation d'une concession automobile qui a été construite. Taillefer en a profité pour continuer les services d'égoût et d'aqueduc sur la partie du terrain appartenant toujours à la Société (82 000 p.c.) en prévision de l'achèvement de tout le projet. Une fois l'immeuble complété, Taillefer, voulant s'assurer de tirer des revenus de sa bâtisse, a loué une superficie de 8 000 pieds carrés à la société de gestion de Roch Potvin pour l'exploitation de sa concession automobile. Les appelants ont dû garantir la location du reste de la superficie. Il semble que les appelants aient convaincu le concessionnaire Lada ( « Lada » ) de venir s'installer sur les lieux et lui sous-louer la superficie non occupée par le commerce de Roch Potvin. Lada aurait ainsi payé un loyer de 63 000 $ dans une année, lequel loyer était garanti par les appelants. Selon les appelants, c'était le début de la réalisation de leur projet initial. Malheureusement, tout ceci fut de courte durée puisque dans un premier temps, la ville de Hull a procédé à un changement de zonage et, dans un deuxième temps, Lada a connu des déboires financiers, puis Roch Potvin a fait faillite en juillet 1996 entraînant ainsi Taillefer, dans la même foulée, en faillite.

[14]          Un ou deux ans auparavant, les appelants auraient essayé de vendre leur terrain sans succès. En décembre 1996, les appelants se sont finalement résignés à céder pour 100 $ leurs créances et les actions que leurs sociétés de gestion détenaient dans la Société à un dénommé Jean-Pierre Lacasse, une personne avec laquelle ils n'avaient aucun lien de dépendance. Ce dernier avait déjà racheté en 1994 une partie de la créance que l'appelant Dufour avait transférée à sa conjointe. Monsieur Lacasse désirait continuer seul dans cette aventure. Par cette transaction, il a assumé en totalité les dettes de la Société. Les appelants ont dès lors subi une perte qu'ils réclament maintenant comme une PTPE, laquelle est l'objet du présent litige.

[15]          Selon les états financiers de la Société au 31 octobre 1992, les seuls actifs de la Société étaient la partie du terrain non vendue et le solde du prix de vente dû par Taillefer à la Société. Les seuls revenus de la Société au cours de cette même période sont des revenus de loyer provenant de la sous-location de la bâtisse construite sur ce terrain et des revenus d'intérêt provenant du solde de prix de vente accordé à Taillefer lors de la vente de l'autre partie du terrain. Les dépenses de loyer représentent le montant de loyer pour lequel la Société s'était portée garante auprès de Taillefer, relativement à la superficie non-louée à Roch Potvin.

[16]          Selon les états financiers au 31 octobre 1993, la Société détenait les mêmes actifs et elle n'a tiré que des revenus de loyer durant cette période. Selon les états financiers produits par la Société pour ses exercices financiers se terminant les 31 octobre 1994, 1995 et 1996 (pièce I-1, onglet 5), la Société n'aurait tiré aucun revenu au cours des années 1994 et 1995 et un revenu non identifié de 20 000 $ en 1996. Les actifs pour ces mêmes années sont également constitués de la partie non vendue du terrain et de la créance à recevoir de Taillefer lors de la vente de l'autre partie du terrain de même que d'un compte-client, pour lequel aucune explication n'a été donnée à l'audition.

[17]          L'architecte Cayer a témoigné. Il a repris en gros les témoignages des appelants en ce qui concerne la conceptualisation du projet. Son rôle a pris fin après qu'il ait eu réalisé les premiers plans préliminaires. Il a dit qu'il avait considéré prendre des parts dans ce projet, mais il n'a finalement pas investi puisque selon lui le projet risquait de prendre un certain temps avant de démarrer activement.

Arguments des parties

[18]          Les appelants soutiennent que la Société constituait une entreprise admissible leur donnant droit à une PTPE selon les conditions requises par l'alinéa 39(1)c) de la Loi, lequel se lit comme suit :

ARTICLE 39: Sens de gain en capital et de perte en capital.

              (1) Pour l'application de la présente loi :

[...]

c) une perte au titre d'un placement d'entreprise subie par un contribuable, pour une année d'imposition, résultant de la disposition d'un bien quelconque s'entend de l'excédent éventuel de la perte en capital que le contribuable a subie pour l'année résultant d'une disposition, après 1977 :

(i) soit à laquelle le paragraphe 50(1) s'applique,

(ii) soit en faveur d'une personne avec laquelle il n'avait aucun lien de dépendance,

d'un bien qui est :

(iii) soit une action du capital-actions d'une société exploitant une petite entreprise,

(iv) soit une créance du contribuable sur une société privée sous contrôle canadien (sauf une créance, si le contribuable est une société, sur une société avec laquelle il a un lien de dépendance) qui est:

(A) une société exploitant une petite entreprise.

[19]          Le seul point en litige est de déterminer si la Société était, dans l'année de la perte, une société exploitant une petite entreprise, tel que requis à la disposition 39(1)c)(iv)(A) de la Loi.

[20]          Les appelants soutiennent que c'est le cas. Dans leur argumentation écrite, ils soutiennent ce qui suit aux pages 2-3 :

Nous soumettons humblement au Tribunal que la preuve apportée par les Appelants démontre au contraire que la société n'exerçait pas une entreprise de location d'immeubles mais que sa vocation et son activité consistaient à regrouper en son sein des sociétés de services touchant l'automobile en vue de permettre à ces dernières de réaliser des économies et d'augmenter leur efficacité par la mise en commun de plusieurs services (administratifs, comptables, publicité, accueil de la clientèle, etc.) et d'équipements (monte-charges, appareils de graissage et de changement d'huile, peinture, débossage, pneus, vitres, etc.). La preuve a démontré que le concessionnaire Normandie Jeep Eagle (propriété d'un des actionnaires de la société) et le concessionnaire Lada ont partagé des services et des équipements dans le sens recherché par la société.

Un travail considérable de planification et des démarches nombreuses ont été faits par les dirigeants de la société en vue de réaliser les objectifs poursuivis par la société. Sur le plan matériel, il y a eu la confection des plans de construction de la première phase du projet, de l'aménagement du terrain, etc. Sur les autres plans, il y a eu une longue planification du travail et des moyens pour mettre en oeuvre la mission de la société d'abord et pour résoudre les problèmes qui ont surgi par la suite, résultant de l'impossibilité pour le groupe d'actionnaires et dirigeants de fournir les garanties additionnelles demandées par l'institution prêteuse à cause de la crise économique qu'elle appréhendait.

Les actionnaires et les dirigeants, dont les Appelants, ont non seulement consacré beaucoup de temps et d'efforts dans la poursuite des objectifs de la société, mais ils y ont aussi investi des sommes importantes selon leurs moyens.

La société n'a pas loué d'immeubles à des tiers; elle n'en possédait aucun à louer. Elle a bien tiré quelques revenus de sous-location d'un bail qu'elle avait été obligée de prendre quand elle avait vendu la première phase du projet au groupe Taillefer. L'un de ces revenus de sous-location (environ $40,000.00) provenait de Poste Canada qui avait sous-loué le local pendant la durée d'une grève de ses employés. Ce revenu inattendu et incident ne saurait, nous le soumettons humblement, entacher la vocation de la société. Le concessionnaire Lada vint aussi à occuper ce local dont la société garantissait le loyer au propriétaire Taillefer. Les revenus tirés à cette occasion furent modestes et servirent comme les précédents à alléger un peu les obligations de la société.

De plus, tous les actifs de la société étaient utilisés dans le cadre de son entreprise. Même l'hypothèque de $310,000.00 à recevoir du groupe Taillefer comme balance du prix de vente d'une portion du terrain servait à l'entreprise et avait été donnée en garantie à l'institution financière de la société, en remplacement de la garantie hypothécaire que l'institution bancaire perdait sur la partie vendue du terrain.

Même la partie du terrain vendue au groupe Taillefer et l'immeuble que ce dernier a construit et qui constituait la première phase de la réalisation du projet ont respecté le concept initial de développement mis de l'avant par la société. Le projet global initié par la société pouvait encore se réaliser avec le groupe Taillefer, les conditions réunies.

La preuve démontre aussi que malgré la crise économique qui a durement touché la société (faillites de Rock Dompierre, de Roch Potvin et du concessionnaire Jeep Eagle, faillite de Lada, refus de financement de la Caisse Desjardins), la société a continué de chercher des partenaires dans les domaines de l'automobile et de la finance. Mais dans ces circonstances, la société a aussi décidé la mise en vente à profit de la partie restante du terrain.

La Cour suprême accorde beaucoup d'importance à l'intention du contribuable. Elle parle même de l'intention subjective. Affaire Stewart c. Canada, jugement rendu le 23 mai 2002, [...] L'intention de la société 170663 Canada Inc. et de ses actionnaires et dirigeants dans la présente affaire était clairement d'organiser un poll de biens et de services de commerces reliés à l'automobile. L'intention n'était pas du tout d'exercer l'entreprise de location immobilière.

[21]          Les appelants s'appuient également dans leur argumentation écrite sur les décisions Klein c. R. [2001], 3 C.T.C. 2200 (C.C.I.); Turner c. R. [2000], 3 C.T.C. 460 (C.F.A.), Vogel c. R., 96 DTC 1321 (C.C.I.) et Brown c. R., 96 DTC 6091 (C.F. 1ère instance), pour conclure que le fait que les objectifs de la Société n'ont pu être réalisés à cause de conditions économiques défavorables n'altère en rien la vocation première de la Société d'exploiter une entreprise rattachée au commerce de l'automobile. Selon les appelants, la Société est une société admissible au sens de l'alinéa 39(1)c) de la Loi.

[22]          L'intimée soutient de son côté, non pas que la Société était une société de location d'immeubles, mais qu'elle n'a jamais débuté l'exploitation d'une entreprise active ou, à tout le moins qu'elle ne constituait pas une société exploitant une petite entreprise puisque la totalité ou presque de la juste valeur marchande des éléments d'actif n'était pas attribuable à des éléments utilisés principalement dans une entreprise exploitée activement, tel que requis par la définition de « société exploitant une petite entreprise » au paragraphe 248(1) de la Loi et qui se lit comme suit :

ARTICLE 248: Définitions.

              (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

« société exploitant une petite entreprise » -- « société exploitant une petite entreprise » Sous réserve du paragraphe 110.6(15), société privée sous contrôle canadien et dont la totalité, ou presque, de la juste valeur marchande des éléments d'actif est attribuable, à un moment donné, à des éléments qui sont:

a) soit utilisés principalement dans une entreprise que la société ou une société qui lui est liée exploite activement principalement au Canada;

b) soit constitués d'actions du capital-actions ou de dettes d'une ou de plusieurs sociétés exploitant une petite entreprise rattachées à la société au moment donné, au sens du paragraphe 186(4) selon l'hypothèse que les sociétés exploitant une petite entreprise sont, à ce moment, des sociétés payantes au sens de ce paragraphe;

c) soit visés aux alinéas a) et b).

Pour l'application de l'alinéa 39(1)c), est une société exploitant une petite entreprise la société qui était une telle société à un moment de la période de douze mois précédant le moment donné; par ailleurs, pour l'application de la présente définition, la juste valeur marchande d'un compte de stabilisation du revenu net est réputée nulle.

[23]          Selon l'intimée, les revenus de location générés par la Société ne constituaient qu'un revenu de bien accessoire et ne constituaient en rien un revenu d'entreprise exploitée activement. L'avocat de l'intimée soumet que le projet des appelants est toujours demeuré à l'état de projet, car la structure de l'entreprise projetée n'a jamais été mise en place. L'intimée soutient qu'après l'achat du terrain en 1990, les éléments sur lesquels le projet reposait se sont effondrés. Le prêt pour construire la bâtisse a été refusé, l'un des investisseurs a dû se retirer dès le début (en juillet 1990), la Société a dû vendre une partie substantielle du terrain à Taillefer qui a financé la construction de la bâtisse, refusant toutefois de devenir partenaire dans la Société, et la Société ne s'est retrouvée après cela qu'avec une petite partie du terrain et une créance hypothécaire donnée par Taillefer au moment de la vente de l'autre partie du terrain. Peu après, un autre investisseur a fait faillite, puis ce fut le tour de Taillefer, de sorte que le projet est resté au point mort. L'intimée soutient que toutes les démarches faites, telles l'acquisition du terrain et les plans préliminaires, n'étaient que destinées à réunir les éléments de base à la structure d'une nouvelle entreprise qui n'a jamais été concrètement mise en place. L'avocat soutient que les dépenses se rattachant à des démarches préliminaires pour établir une entreprise qui n'existe pas ne donnent pas lieu à une perte d'entreprise, si ces démarches ne dépassent pas le stade du projet (voir Samson et Frères Ltée c. Canada, [1995] A.C.I. no 1385 (Q.L.)).

[24]          Selon l'intimée, la Société n'a engagé aucune activité donnant lieu à du revenu d'entreprise. Toutes ses activités avaient pour but de mettre sur pied la structure de l'entreprise elle-même, laquelle n'a finalement jamais vu le jour. Par ailleurs, c'est Taillefer et non la Société qui a construit l'immeuble. Taillefer n'était pas partenaire dans la Société. Il est difficile dans les circonstances de soutenir que la Société avait amorcé le processus d'exploitation d'une entreprise. (Voir Goren c. Canada, [1997] A.C.I. no 391 (Q.L.).)

[25]          Finalement, l'avocat de l'intimée soutient que l'affaire récente rendue par la Cour suprême du Canada dans Stewart c. Canada, 2002 CSC 46, [2002] A.C.S. no 46 (Q.L.), n'altère en rien la question en litige ici. En effet, il s'agit plutôt dans le cas présent de déterminer si la Société avait débuté l'entreprise et si oui, si cette entreprise était exploitée activement. Selon l'avocat de l'intimée, l'affaire Stewart porte sur les critères à respecter aux fins de déterminer s'il y a existence d'une source de revenus. Ici, il n'est pas contesté qu'il existe une source de revenus. L'intimée est d'avis que la Société a tiré un revenu de biens et non un revenu d'entreprise exploitée activement, ce qui fait en sorte qu'elle ne se qualifie pas aux fins de la PTPE.

Analyse

[26]          En tout premier lieu, je suis d'accord avec l'avocat de l'intimée que l'affaire Stewart, précitée, ne peut servir la cause des appelants dans la présente instance. La Cour suprême du Canada a établi dans cette dernière affaire que « pour déterminer si une activité particulière constitue une source de revenu, le contribuable doit démontrer qu'il a l'intention d'exercer cette activité en vue de réaliser un profit, et présenter des éléments de preuve étayant cette intention. Ce critère a pour objet de distinguer les activités commerciales des activités personnelles » (voir paragraphe 5 de l'affaire Stewart).

[27]          Cette approche centrée sur l'intention du contribuable sert avant tout à déterminer si ce dernier a une source de revenu constituée soit d'une entreprise, soit d'un bien, aux fins du calcul du revenu tel que défini à l'article 9 de la Loi. Par ailleurs, la Cour suprême du Canada a également fait référence au fait que « la distinction entre le revenu tiré d'une entreprise et le revenu tiré d'un bien repose généralement sur le fait qu'une entreprise exige un niveau d'activité plus élevé de la part du contribuable » (voir paragraphe 51 de l'affaire Stewart).

[28]          Ainsi, dans le cas présent, l'intimée ne soutient pas que la Société n'avait pas de source de revenu. De fait, la Société déclarait des revenus de loyer et d'intérêts. Ce que l'intimée soutient en l'instance, c'est que la Société ne se qualifiait pas comme une société exploitant une petite entreprise au sens du paragraphe 248(1) de la Loi aux fins de transformer une perte en capital en PTPE, selon les termes utilisés par l'alinéa 39(1)c) de la Loi. Je rejette donc l'argument des appelants que la simple intention de vouloir exploiter une entreprise est suffisante pour qualifier la Société comme une société exploitant une petite entreprise aux fins de la déduction d'une PTPE.

[29]          En l'occurrence, il s'agit de déterminer si la Société exploitait ou a déjà exploité une entreprise active dans les 12 mois précédant le moment où les appelants ont disposé de la créance hypothécaire qu'ils avaient sur la Société, en décembre 1996.

[30]          A mon avis, les appelants n'ont pas réussi à démontrer que la structure commerciale d'une entreprise ait à aucun moment pris forme, comme ce fut le cas par exemple dans l'affaire M.R.N. c. M.P. Drilling Ltd., 76 DTC 6028, où le juge Urie se prononçait de façon incidente sur la question de savoir à quel moment une société commence à exploiter une entreprise.

[31]          En effet, dans l'affaire M.P. Drilling Ltd., on a jugé qu'une société constituée dans le but de commercialiser des gaz de pétrole liquéfiés, qui avait entamé des négociations visant les marchés et les approvisionnements et fait des études techniques par l'entremise de consultants, pouvait être considérée avoir commencé ses opérations d'entreprise dès ce moment. La Cour a tenu en compte le fait que la compagnie existait déjà et avait fait tout ce que toute entreprise nouvelle devait normalement faire pour commercialiser sa marchandise. La Cour a également pris en considération les efforts incessants en vue de mettre à la disposition de clients qu'elle espérait intéresser par sa campagne promotionnelle les produits qu'elle espérait obtenir de ses fournisseurs par voie de négociation. Tout ceci consistait, selon le juge Urie, en des activités commerciales se rattachant à l'existence d'une entreprise. Il faut souligner toutefois dans l'affaire M.P. Drilling Ltd. que la compagnie avait entamé des pourparlers avec plusieurs fournisseurs et clients étrangers éventuels et avait ouvert son propre bureau, engagé ses premiers employés et qu'un directeur général avait été embauché à temps complet aux fins de développer un marché et conduire les négociations avec les fournisseurs actuels où éventuels. Il y avait donc selon la Cour fédérale, une structure, un marché et des produits, et donc une entreprise. Même si l'opération n'avait pas commencé à produire des revenus, on pouvait dire que le processus d'exploitation d'une entité à but lucratif avait été amorcé (voir Goren, précitée, au paragraphe 9).

[32]          Une question semblable s'est posée également dans l'affaire Hudon c. Canada, 2001 CAF 320, [2001] A.C.F. no 1616 (Q.L.). On a jugé, bien que des terrains, immeubles et actifs hydro-électriques avaient été transférés à la société en cause en 1969, que cette société avait commencé à exploiter une entreprise seulement à partir du moment où une première étude de marché avait été commandée en 1978 afin de déterminer si elle pouvait procéder à l'aménagement d'une chute aux fins de fournir de l'électricité. Auparavant, les actionnaires de la société avaient conçu un plan d'affaires pour celle-ci, lequel comportait la vente de lots, dont certains avaient d'ailleurs été vendus. Par la suite, soit à compter de 1978, de nombreux efforts avaient été déployés pour promouvoir la mise en valeur du potentiel hydro-électrique. On a donc conclu qu'une entreprise était dès lors exploitée et ce, même si des arrangements satisfaisants n'avaient pas encore été conclus relativement aux prix de vente de l'énergie.

[33]          Dans la présente instance, les appelants avaient conçu un plan préliminaire pour tenter de développer une entreprise offrant différents services dans le domaine automobile. La Société avait été créée à cette fin et un terrain avait été acheté. Toutefois, les seules activités exécutées pour la Société ont consisté en des esquisses préliminaires, appuyées d'un rapport d'étapes de construction, mais pour lequel aucun contrat ne fut conclu. L'architecte Cayer ne fut d'ailleurs pas payé par la Société mais par l'appelant Boulanger, lequel a considéré ce paiement comme des avances à la Société. Bien qu'un permis de construction avait été obtenu par les appelants, la Société n'avait aucun employé, aucun bureau et aucune étude de marché ou de rentabilité n'avait été effectuée.

[34]          Je suis d'accord avec l'avocat de l'intimée que les éléments essentiels à la mise en oeuvre du projet se sont effondrés avant même que le projet ne voit le jour. Ainsi, la Société n'avait pas obtenu le financement nécessaire pour démarrer son projet, et aucune opération importante n'a pu être entreprise par la Société relativement au genre d'entreprise qu'elle était censée exercer. Aucune structure organisationnelle suffisante n'a été établie pouvant permettre à la Société de débuter les activités se rattachant à l'exploitation même, telles la recherche de fournisseurs, le développement de marchés pour les produits, la recherche de la main d'oeuvre nécessaire. Tout ceci n'existait tout simplement pas et il est dans ce sens difficile de concevoir, tel qu'il a été dit dans l'affaire Samson et Frères Ltée, précitée, qu'une entreprise ait débuté avant même que ces éléments essentiels se rattachant à la structure d'une telle entreprise n'aient été réunis.

[35]          Par ailleurs, c'est dès 1990 que la Société a transféré la plus grande partie de son terrain à Taillefer qui a construit un immeuble selon ses propres plans de construction aux fins d'abriter une concession automobile. Taillefer a refusé de prendre part dans la Société et les appelants ne peuvent prétendre qu'avec la construction de cette bâtisse, leur projet a vu le jour. Il ne s'agissait pas de leur projet mais bien de celui de Taillefer qui n'avait aucun intérêt dans la Société. Il est difficile de prétendre que la Société exploitait activement un centre automobile en 1996, alors que l'unique bâtisse construite sur le terrain acheté à cette fin n'appartenait même pas à la Société (voir à ce sujet l'affaire Goren, précitée). A mon avis, la Société n'était à toutes fins utiles qu'une société inactive sans le capital nécessaire pour mettre en oeuvre le projet de services reliés aux automobiles qu'elle avait l'intention d'exploiter un jour.

[36]          En ce sens, on ne peut dire que la Société exploitait une entreprise active, et dès lors qu'elle était une société exploitant une petite entreprise, au moment de la disposition par les appelants de leurs créances dans la Société en 1996. Il s'agit là d'une condition essentielle exigée par l'alinéa 39(1)c) et le paragraphe 248(1) de la Loi pour avoir droit de déduire une PTPE et cette condition n'est pas remplie dans les circonstances.

[37]          Par ailleurs, les autres décisions auxquelles font référence les appelants dans leur argumentation écrite ne leur apportent également aucun soutien. Ce sont toutes des décisions portant sur des cas d'espèce et qui se distinguent selon les faits de chaque cause.

[38]          Dans l'affaire Klein, précitée, il s'agissait de déterminer si une société avait cessé d'exploiter une entreprise. Il ne s'agissait pas de déterminer comme dans le cas présent si une entreprise avait débuté. Ainsi, la structure organisationnelle de l'entreprise était déjà en place et il fallait décider si les opérations étaient encore exploitées activement, ce qui fut démontré selon les circonstances de cette affaire. Dans l'affaire Turner, précitée, il s'agissait de déterminer s'il était raisonnable de s'attendre à la fin d'une année d'imposition à ce qu'une société soit dissoute ou liquidée et ne commencerait pas à exploiter une entreprise, aux fins de déterminer s'il y avait disposition d'une action de cette société aux termes de la disposition 50(1)b)(iii)(D) de la Loi. Ce n'est pas la même question qui se pose ici puisque l'on reconnaît qu'il y a eu disposition d'une créance au profit d'une personne sans lien de dépendance, écartant par le fait même l'application de l'article 50 de la Loi.

[39]          Dans l'affaire Vogel, précitée, la preuve avait établi que la Société en question avait commencé à exploiter une entreprise active, avec l'installation d'un bureau et l'embauche de personnel. Cette affaire entendue en procédure informelle se distingue du cas présent de par sa situation factuelle.

[40]          Finalement, dans l'affaire Brown, précitée, la question en litige était de déterminer si le contribuable avait avancé de l'argent à une société dont il était actionnaire dans le but de tirer un revenu d'entreprise ou de bien aux fins de l'application du sous-alinéa 40(2)g)(ii) de la Loi (lequel détermine si la perte subie peut être considérée nulle). Encore une fois, ce n'est pas la question que je dois me poser ici puisque la perte en capital est reconnue.

[41]          Je considère donc qu'aucune de ces affaires n'est pertinente à la solution du présent litige.

[42]          En conséquence, je suis d'avis de maintenir les cotisations établies par le Ministre pour les deux appelants eu égard au refus de considérer comme une PTPE la perte en capital que chacun d'eux a subie, soit pour monsieur Boulanger pour un montant de 140 143,83 $, et pour monsieur Dufour pour un montant de 63 233,33 $, au cours de l'année d'imposition 1996.

Décision

[43]          Les appels de monsieur Claude Boulanger sont accueillis pour les années 1995 et 1996 simplement pour lui accorder les pertes minières et locatives qui ont été concédées par l'intimée dans sa Réponse modifiée à l'avis d'appel. En tout autre aspect, les cotisations demeurent inchangées. Les appels de monsieur Pierre Dufour des cotisations établies pour les années d'imposition 1996 et 1997 sont rejetés.

[44]          L'intimée a droit à ses dépens. Toutefois, comme ces appels ont été entendus sur preuve commune, les dépens seront limités à ceux qui seraient applicables dans un seul appel.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4ième jour de juillet 2002.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.

No DES DOSSIERS DE LA COUR :    2000-3681(IT)G et 1999-3011(IT)G

INTITULÉ DES CAUSES :                   Claude Boulanger c. La Reine et

                                                                                                Pierre Dufour c. La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                    les 12 et 13 juin 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         L'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DU JUGEMENT :                      le 4 juillet 2002

COMPARUTIONS :

Pour les appelants :                              Les appelants eux-même

Pour l'intimé(e) :                                    Me Daniel Bourgeois

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimé(e) :                                    Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

1999-3011(IT)G

ENTRE :

PIERRE DUFOUR,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Claude Boulanger (2000-3681(IT)G) les 12 et 13 juin 2002 à Ottawa (Ontario) par

l'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions

Pour l'appelant :               L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :         Me Daniel Bourgeois

JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1996 et 1997 sont rejetés.

          L'intimée a droit à ses dépens. Toutefois, comme ces appels ont été entendus sur preuve commune avec les appels de Claude Boulanger (2000-3681(IT)G), les dépens seront limités à ceux qui seraient applicables dans un seul appel.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4ième jour de juillet 2002.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.


2000-3681(IT)G

ENTRE :

CLAUDE BOULANGER,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Pierre Dufour (1999-3011(IT)G) les 12 et 13 juin 2002 à Ottawa (Ontario) par

l'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions

Pour l'appelant :               L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :         Me Daniel Bourgeois

JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1995 et 1996 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations afin de lui accorder la déduction d'une perte d'entreprise minière au montant de 7 447 $ pour l'année d'imposition 1996 et la déduction de pertes locatives aux montants de 31 783 $ et 17 320 $ pour les années d'imposition 1995 et 1996 respectivement, lesquelles pertes ont été concédées par l'intimée dans la Réponse modifiée à l'avis d'appel.

En tout autre aspect, les cotisations demeurent inchangées.

          L'intimée a droit à ses dépens. Toutefois, comme ces appels ont été entendus sur preuve commune avec les appels de Pierre Dufour (1999-3011(IT)G), les dépens seront limités à ceux qui seraient applicables dans un seul appel.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4ième jour de juillet 2002.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.

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