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Date: 20001110

Dossier: 2000-1732-GST-I

ENTRE :

SYLVIE LESSARD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Tardif, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel d'un avis de cotisation en date du 2 juin 1997.

[2]            Pour soutenir et justifier l'avis de cotisation, le ministre du Revenu national (le " Ministre ") a pris pour acquis les faits suivants :

a)              par contrat notarié, en date du 25 février 1997, l'appelante a fait l'acquisition d'un immeuble de deux étages portant les numéros civiques 522 et 524 rue Conseil, Sherbrooke (Québec), pour le prix de 46 000 $;

b)             la propriété et la possession de l'immeuble ont été transférées à l'appelante dès la signature du contrat notarié;

c)              lors de l'achat de l'immeuble, celui-ci n'était pas utilisé principalement à titre de résidence en ce que :

i)               il comprenait une partie occupée à titre commercial, soit le rez-de-chaussée, et une autre partie occupée à titre résidentiel, soit le deuxième étage;

ii)              la partie utilisée à des fins commerciales représentait 50% de l'immeuble;

d)             la TPS payable en rapport avec la partie commerciale de l'immeuble s'établissait à 1 610 $, soit 7% calculé sur 50% du prix de vente de l'immeuble;

e)              la TPS au montant de 1 610 $ a été perçue de l'appelante par le vendeur pour le compte du ministre;

f)              l'appelante n'a pas droit au remboursement de la TPS payée;

[3]            Seule l'appelante a témoigné au soutien de son appel. Elle a expliqué avoir fait l'acquisition de l'immeuble comprenant un logement résidentiel et un local commercial dans le but de le convertir pour en faire un seul et unique logement.

[4]            L'appelante a indiqué avoir relié les deux étages au moyen d'un escalier intérieur et a affirmé qu'il s'agissait désormais de son propre logement privé. L'appelante a d'ailleurs produit, au soutien de ses explications, une copie de la demande de permis de construction en date du 12 mars 1997 (pièce A-2). Pour soutenir ses prétentions, l'appelante s'en est remise à un écrit qui accompagnait son avis d'appel.

[5]            Il y a lieu de reproduire le contenu de cet écrit :

FAITS

                1. L'acheteuse a fait l'acquisition d'une maison à deux étages comprenant le rez-de-chaussée, occupé par un commerce de détail, et l'étage, par un logement résidentiel. La vendeuse n'habitait pas son immeuble. Prix : 46 000 $

                2. Par l'intermédiaire de sa notaire, la vendeuse a considéré que le statut fiscal de l'immeuble devait être basé sur l'utilisation faite par la propriétaire actuelle (vendeuse) ; comme celle-ci ne l'utilisait pas " principalement à titre de résidence ", il ne pouvait donc se qualifier comme " immeuble d'habitation (...) dans sa totalité (...) " tel que prévu à l'alinéa c) de la définition d' " immeuble d'habitation " au paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d'accise (LTA). Il s'agissait donc de la fourniture de deux biens distincts, dont l'un était exonéré et l'autre taxable. La notaire a évalué le bien taxable à 50% du prix de vente.

                TPS acquittée :      23 000 $ x 7%          =               1 610,00 $

                TVQ acquittée :     24 610 $ x 6,5%       =               1 599,65

                                                                                                                                3 209,65 $

3. La vendeuse seule est inscrite à la TPS/TVQ.

4. Cet immeuble est utilisé par l'acquéreure " principalement à titre de résidence " : elle habite l'étage et une partie du rez-de-chaussée; l'autre partie du rez-de-chaussée sert à des fins commerciales : garderie pour animaux domestiques (chiens, chats).

POSITION DE L'ACQUÉREURE

                L'immeuble acheté est un immeuble d'habitation dans sa totalité en vertu de l'alinéa c) parce que l'acheteure est le particulier à qui il a été fourni par vente et qu'elle l'utilise principalement comme résidence.

                La fourniture est exonérée en vertu de la partie 1 de l'annexe V de la Loi sur la taxe d'accise.

                ARGUMENTATION

                1. Étant donné l'harmonisation de la TVQ et de la TPS, mon raisonnement s'appuiera seulement sur les dispositions d'une seule loi, mais sera valable pour les deux.

                2. Législation applicable : alinéa (c) de " immeuble d'habitation " au paragraphe 123 (1) de la LTA; les deux versions sont citées :

                (a) the whole of a building described in paragraph (a), or the whole of a premises described in subparagraph (b)(i), that is owned by or has been supplied by way of sale to an individual and that is used primarily as a place of residence of the individual, an individual or a former spouse of the individual, together with (...)

                (b) la totalité du bâtiment visé à l'alinéa a) ou du local visé au sous-alinéa b)(i), qui est la propriété d'un particulier, ou qui lui a été fourni par vente, et qui sert principalement de résidence au particulier, à son ex-conjoint ou à un particulier lié à ce particulier, y compris : (...)

                3. L'alinéa c) de la définition d' " immeuble d'habitation " contient deux conditions pour que la totalité d'un immeuble jouisse du statut d'immeuble d'habitation :

                a)             il doit être la propriété d'un particulier ou lui avoir été fourni par vente, et

                b)            il doit servir principalement de résidence au particulier.

                4. Le législateur a prévu deux possibilités à la condition a) : le " particulier " en question est, soit le propriétaire de l'immeuble [le vendeur], soit celui qui l'a reçu par vente [l'acheteur]; bien que le texte français fût clair, la version anglaise me semble encore plus claire.

                5. La condition b) ne spécifie pas lequel des deux particuliers visés en a) doit réussir le test de " résidence "; encore ici, le texte anglais est plus clair, à mon avis.

                6. L'application de cette définition, par la fournisseure (mandataire du ministre), a été restrictive dans la mesure où elle a ignoré l'une des deux possibilités offerte par la loi.

[6]            En substance, l'appelante soutient que la vocation de l'immeuble qu'elle a acquis devait être définie et appréciée non en fonction de la vocation réelle au moment de l'acquisition, mais plutôt à partir de l'usage qu'elle comptait en faire postérieurement à l'acquisition, le tout ayant été confirmé par une demande de permis de construction et corroboré par l'exécution des travaux ultérieurement.

[7]            Il y a lieu de reproduire les paragraphes 168(1) et 168 (5) de la Loi sur la taxe d'accise (la "Loi ")qui se lisent comme suit :

168(1) Règle générale - La taxe à la présente section est payable par l'acquéreur au premier en date du jour où la contrepartie de la fourniture taxable est payée et du jour où cette contrepartie devient due.

...

                (5) Vente d'un immeuble - Par dérogation aux paragraphes (1) et (2), la taxe prévue à la présente section relativement à la fourniture taxable d'un immeuble par vente est payable :

                a) s'il s'agit de la fourniture d'un logement en copropriété dont la possession est transféré à l'acquéreur, après 1990 et avant l'enregistrement de l'immeuble d'habitation en copropriété dans lequel le logement est situé, aux termes de la convention relative à la fourniture, au premier en date du jour où la propriété du logement est transférée à l'acquéreur et du soixantième jour après le jour d'enregistrement;

                b) dans les autres cas, au premier en date du jour du transfert à l'acquéreur de la propriété du bien et du jour du transfert à celui-ci de la possession du bien aux termes de la convention portant sur la fourniture.

...

[8]            Il s'agit là d'une interprétation que l'article 168, paragraphe 5 de la Loi ne permet pas, puisqu'il y est clairement prévu que la TPS est payable le premier en date du jour du transfert à l'acquéreur de la propriété de l'immeuble ou du jour du transfert à celui-ci de la possession du bien aux termes de la convention portant sur la fourniture.

[9]            Or, en vertu du contrat notarié, l'appelante est devenue propriétaire de l'immeuble le 25 février 1997, avec possession et occupation immédiate.

[10]          L'appelante n'a donc pas droit au remboursement de la TPS payée relativement à la partie commerciale de l'immeuble, même si la dite surface commerciale a été transformée en résidence privée puisque l'appréciation de la vocation doit être faite le jour de l'acquisition et non pas en fonction d'un projet anticipé ou même réalisé après l'acquisition.

[11]          Pour ces motifs, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de novembre 2000.

" Alain Tardif "

J.C.C.I.

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