Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date : 20001011

Dossier : 1999-3838-IT-I

ENTRE :

JOHN MACGOWAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

(Rendus oralement à l'audience à Regina (Saskatchewan), le 5 octobre 2000.)

Le juge Hershfield, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel interjeté par John MacGowan à l'encontre d'une cotisation établie à l'égard de sa déclaration de revenus de 1997. La cotisation porte sur la déclaration de revenus de 1997 de l'appelant telle qu'elle a été produite. L'avis d'appel indique que les motifs de l'appel sont ceux qui sont déclarés dans l'avis d'opposition, lequel cite l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte » ), et affirme, entre autres choses, que la Loi de l'impôt sur le revenu est administrée de manière inégale par le truchement des politiques et des procédures du Ministère et que la Loi de l'impôt sur le revenu reflète un régime fiscal inéquitable niant à la plupart des Canadiens et des Canadiennes, sauf pour ce qui est des riches et d'autres groupes d'intérêts, leurs droits constitutionnels garantis par les articles 7, 12 et 15 de la Charte.

[2]            L'avis affirme que lui, l'appelant, est victime de discrimination fondée sur la race, l'origine ethnique et la couleur. De plus, son avis d'appel fait référence au fait qu'il est atteint d'incapacités mentale et physique. Il ne précise pas quel article de la Loi de l'impôt sur le revenu ni quelle inclusion ou déduction effectuée dans la déclaration qu'il a lui-même produite contrevient à la Charte.

[3]            Bien qu'ils n'aient pas été déposés en preuve, les documents faisant partie de l'avis d'appel et produits devant la Cour confirment que l'appelant avait été informé, dans le cadre d'une cotisation antérieure, d'un appel et d'une contestation de cette cotisation fondée sur la Charte et introduite devant la présente cour, du fait qu'en vertu de l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale, cette contestation devait faire l'objet d'un avis signifié dans le délai prescrit au procureur général du Canada et à ceux des provinces. Aucun avis n'avait été signifié pour l'appel précédent et aucun avis n'a été signifié pour celui en l'espèce en ce qui concerne l'année d'imposition 1997 de l'appelant.

[4]            Il est à remarquer que, en l'espèce, l'allégation selon laquelle il y a violation de la Charte a besoin de précision. Une généralisation portant que la Loi de l'impôt sur le revenu viole des droits et ne précisant pas de quelle manière ces droits font l'objet de discrimination peut ne pas constituer un avis suffisant de la prétendue discrimination en vertu de la Charte, même si l'allégation, dans sa forme présentée dans l'avis d'appel, avait effectivement respecté les conditions de l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale. Comme l'avis d'appel n'indique aucun fondement autre qu'une allégation discutable, du moins telle qu'elle est formulée dans l'avis, de la violation de droits garantis par la Charte et comme l'objet de la cotisation est la déclaration de revenus de l'appelant pour l'année 1997 telle qu'elle a été produite, je rejette l'appel sans dépens.

[5]            Je continuerai en faisant remarquer que l'appelant a soulevé dans l'avis d'appel une question portant sur la décision antérieure de la présente cour concernant ses années d'imposition 1994, 1995 et 1996. Il laisse entendre que cette décision aurait pu sensiblement reposer sur le témoignage oral sous serment d'un employé de Revenu Canada qui, selon l'appelant, a menti sous serment en ce qui concerne les déclarations faites par sa conjointe. Une telle affirmation est soutenue par une déclaration sous serment de la conjointe de l'appelant qui est incluse dans l'appel de celui-ci concernant sa cotisation de 1997.

[6]            L'appelant soutient que le prétendu faux témoignage de l'employé de Revenu Canada dans l'appel précédent qui a faussement attribué des déclarations à sa conjointe a eu une incidence appréciable sur le résultat de cette affaire, sans doute parce qu'il avait contredit les propres affirmations factuelles de l'appelant dans cette affaire.

[7]            Dans le présent appel portant sur l'année d'imposition de 1997, l'avocat de l'intimée affirme que la Cour n'a pas compétence pour revoir une décision antérieure qu'elle a rendue, étant une cour créée par la loi et chargée uniquement de rejeter, d'admettre ou de modifier une cotisation, comme le prévoit l'article 171 de la Loi de l'impôt sur le revenu. J'ajouterais que l'article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt précise que la présente cour a compétence exclusive pour entendre les renvois et les appels portant sur des questions d'impôt sur le revenu uniquement lorsque ces renvois et ces appels sont prévus par la Loi de l'impôt sur le revenu. Cet article reconnaîtrait que la Loi de l'impôt sur le revenu confère également à la présente cour la compétence exclusive quant aux renvois, et non seulement quant aux appels, comme le prévoit la Loi de l'impôt sur le revenu. Cette compétence est conférée par l'article 12 et la Loi de l'impôt sur le revenu, en ce qui concerne la détermination des questions soumises à la Cour en vertu des articles 173 et 174. Bien que les dispositions de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt confèrent à la Cour la compétence exclusive dans ces domaines particuliers, on peut également supposer qu'elle a compétence, bien que non exclusive, à l'égard d'autres questions.

[8]            Le seul exemple se rapportant à une telle compétence pourrait se trouver à l'article 172 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) (les « Règles » ), qui prévoit des circonstances dans lesquelles la Cour peut accorder une mesure de redressement en ce qui concerne une décision antérieure qu'elle a rendue. Si, par exemple, l'appelant peut établir que le prétendu parjure constitue de la fraude, alors, en vertu des Règles, cette question pourrait être introduite devant la présente cour en vue de suspendre l'application de cette décision ou d'obtenir une autre mesure de redressement. Cette règle ne s'applique sans doute qu'aux questions régies par la procédure générale, ce qui n'est pas le cas de la présente affaire. Il pourrait même être soutenu, bien que je ne sois pas réellement saisi de cette question, que cette règle outrepasse le pouvoir accordé par la loi à la Cour.

[9]            Toutefois, si on revient à la situation en l'espèce, en supposant que la présente cour ait compétence en vertu de l'article 172 des Règles, je crois que, même s'il devait être conclu que le prétendu parjure constituait de la fraude, de sorte qu'il soit expressément visé par le libellé de cet article, il devrait être démontré que la déclaration faussement attribuée à la conjointe de l'appelant dans le cadre d'un témoignage assermenté a eu une incidence importante sur le résultat de la décision.

[10]          En tout état de cause, la question soulevée dans l'avis d'appel pour l'année d'imposition 1997 ne peut constituer une requête pour l'obtention d'une mesure de redressement en vertu de l'article 172 des Règles. Il n'y a pas eu d'avis signifié à l'intimée dans le délai prescrit et portant sur la mesure de redressement prévue par l'article 172 à l'égard de l'appel relatif aux années d'imposition 1994, 1995 et 1996. Une telle requête devrait être correctement formulée, produite et signifiée.

[11]          En conséquence, je conclus que je n'ai pas compétence pour traiter plus avant la question. La présente cour ne peut alors que suggérer à l'appelant de consulter un avocat pour savoir s'il devrait aller de l'avant et de quelle manière il peut le faire. L'appelant devrait être conscient que des allégations de parjure constituant de la fraude sont très graves et peuvent entraîner un lourd fardeau et que, s'il continue sans l'avis et l'aide d'un avocat expérimenté, il pourrait être condamné à payer des dépens et des dommages-intérêts.

[12]          La Cour ne devrait pas être saisie d'allégations pouvant refléter des malentendus innocents qui auraient pu être contestés ou éclaircis dans le cadre de l'instance même où le prétendu parjure s'est produit.

[13]          En outre, la présente cour ne devrait pas être saisie d'allégations de fautes commises par des intimés, lorsque ces fautes, même si elles sont établies et corrigées, n'auraient aucune incidence sur le résultat de la question. Cela peut ou non être le cas en l'espèce.

[14]          D'autre part, le témoignage substantiel d'un témoin qui, sciemment, a prêté un faux serment dans le but d'exiger un impôt ne serait pas toléré par la présente cour ni aucun autre tribunal. Cela pourrait très bien constituer un outrage en facie et relever de nouveau de la compétence de la présente cour. Aucun fondement ne me permet de décider de quel côté l'allégation penche.

[15]          Je n'ordonne pas à l'avocat de l'intimée de procéder à d'autres enquêtes en l'espèce ou de promettre de le faire. Toutefois, si cette allégation n'est pas considérée par la Couronne comme frivole ou si elle est considérée comme pouvant avoir des conséquences importantes, alors je crois que la Couronne devrait donner suite à la question.

« J. E. Hershfield »

      J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 6e jour de juillet 2001.

Isabelle Chénard, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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