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Date: 20010611

Dossier: 98-535-IT-I

ENTRE :

PASQUALE TANSELLA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge suppléant Taylor, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel interjeté à l'encontre d'une nouvelle cotisation établie par l'intimée en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1995, dont l'avis, daté du 8 septembre 1997, se termine avec la ligne « solde dû débité : 10 352,05 $ » . Le calcul afférent, concernant seulement l'année 1995, a donné lieu à un crédit en faveur de l'appelant de 1 293,31 $. Ce montant avait été modifié, pour le montant débité ci-dessus, par l'ajout, dans l'avis de cotisation, d'une ligne précisant simplement « solde antérieur débité : 11 645,36 $ » . La question a été portée devant la Cour pour la première fois le 9 juin 1999, et la transcription de l'audience indique que le juge présidant connaissait très bien les limites législatives et judiciaires imposées à cette cour, prévoyant qu'elle ne pouvait examiner qu'un appel d'une année d'imposition particulière, en l'espèce 1995. Je cite les passages suivants de la transcription : « n'oubliez pas qu'il s'agit d'un appel d'une cotisation d'impôt. Ce n'est pas un appel d'un calcul de ce est dû » , « j'ai de la difficulté à comprendre comment vous pouvez soulever la question de l'impôt dû pour 1990 en vous reportant à un appel de la cotisation pour une année subséquente » et « si j'ai compétence pour connaître de quelque chose qui vous dérange dans cet appel de 1995, d'accord, mais je ne le crois pas » .

[2]            Le juge était également très conscient du dilemme auquel semblait être confronté l'appelant. Le représentant de l'appelant a posé le problème de la manière suivante :

Ce qui est malheureux, votre honneur, c'est que l'avis de nouvelle cotisation arrive accompagné d'intérêts en souffrance, d'intérêts sur remboursement et, outre le solde de cette nouvelle cotisation, d'un solde du compte antérieur, et il exige un paiement, et des demandes de saisie-arrêt de son salaire ont été adressées à son employeur pour cette somme, ce contre quoi il n'avait aucun recours. Il ne pouvait rien faire à ce sujet.

[3]            L'avocate de l'intimée a plus tard fait remarquer ceci à la Cour :

Votre honneur, Revenu a fourni à M. Trentadue, et j'ai moi-même passé plusieurs heures à essayer de rapprocher le solde du compte antérieur avec lui, et, à notre avis, de l'avis de Revenu, il n'y a aucune somme qui n'est pas comptabilisée dans le solde du compte précédent, mais ce qui lui a été fourni ce matin c'était, et il était prévu que nous devions nous rencontrer plus tôt, mais ce qui lui a été présenté ce matin c'était un relevé de 18 pages des écritures inscrites au compte qui - et Revenu a examiné tout ça avec M. Trentadue en lui indiquant le solde pour chaque année et le détail des opérations et, à notre avis, nous avons essayé de régler cette affaire.

[...]

Chaque année il y a eu une cotisation, puis une nouvelle cotisation a été établie et puis il y a eu une opposition et un appel.

                Nous nous sommes donc retrouvés avec une sorte de solde du compte antérieur fluctuant au fur et à mesure que les sommes contestées entraient et sortaient, ce qui a causé certains des problèmes en ce qui a trait au solde du compte antérieur, mais le document tel que fourni, qui est une copie certifiée conforme des enregistrements machine que Revenu possède de toutes les écritures passées au compte, indique quels montants ont été contestés et quels montants n'ont pas été contestés. À notre avis, tout est là, et nous avons essayé de le lui expliquer.

Ce à quoi le juge a répondu ceci :

Peut-être avez-vous raison; peut-être pas.

[4]            Étant d'avis qu'il n'avait entendu aucune preuve et qu'il n'était donc pas saisi de l'affaire, le juge a conclu en déclarant ceci : « je vais juste laisser cet appel ouvert en vue d'une audience à une date ultérieure pour être sûr que je n'exclus pas le redressement qui pourrait être disponible--. --ça vous donne une chance de tenir d'autres pourparlers avec Revenu et peut-être essayer de résoudre l'affaire » .

[5]            L'affaire a été portée au rôle d'audience pour la deuxième fois devant moi le 20 octobre 1999 et a débuté par la déclaration suivante de l'avocate de l'intimée :

                                [TRADUCTION]

Votre Honneur, l'intimée souhaite déposer une requête pour faire rejeter le présent appel au motif que la Cour -- l'honorable Cour canadienne de l'impôt -- il ne s'agit pas d'une question qui devrait être entendue par l'honorable Cour canadienne de l'impôt. Il s'agit d'une question pour laquelle la Cour canadienne de l'impôt n'a pas compétence. En outre, le litige ne porte pas sur une cotisation fiscale, et la mesure de redressement demandée se situe également en dehors de la compétence de la Cour canadienne de l'impôt. En particulier, parce que l'on souhaite obtenir une déclaration, qui est une mesure de redressement qui n'est pas prévue par la Loi de l'impôt sur le revenu.

L'avocate a fourni à la Cour des précédents au soutien de cette requête.

[6]            En réponse, le représentant de l'appelant a avancé ce qui suit :

                                [TRADUCTION]

                Ainsi, nous sommes confrontés au fait d'avoir interjeté appel à l'encontre d'un avis de nouvelle cotisation, et la seule cotisation d'où provient ce montant est celle de l'année 1995. C'est pourquoi nous sommes ici. Autrement, si nous avions su qu'il s'agissait d'une nouvelle cotisation de 1990, nous aurions pu nous présenter avec une nouvelle cotisation, et cette question aurait été réglée parce qu'elle est très simple.

                Encore plus fondamental, toutefois, est le fait que le ministre souhaite que mon client paie un montant pour lequel il n'a établi ni cotisation ni nouvelle cotisation et dont il ne peut prouver la provenance autrement que par cet avis de nouvelle cotisation.

[7]            Après de plus amples discussions avec les parties, qui sont essentiellement revenues sur les mêmes motifs examinés pendant la première audience, je suis tout aussi réticent que le juge ayant présidé à cette audience à rejeter l'appel, bien qu'il ne semble pas y avoir un autre résultat final possible. Toutefois, d'autres renseignements avaient été fournis, particulièrement certains selon lesquels il y avait probablement d'autres cotisations et nouvelles cotisations, établies après le 8 septembre 1997, et selon lesquels elles avaient pu entraîner des changements quant à l'avis de nouvelle cotisation de base portant cette date, maintenant déposé devant la Cour. L'audience s'est terminée ainsi :

                                [TRADUCTION]

[...] Je reviendrai à cette question lorsqu'il y aura une autre cotisation à jour qui tiendra compte des différentes questions que Me Rashid a commentées.

                Je suis convaincu qu'il s'agissait d'une situation tout aussi gênante pour elle que pour vous, mis à part celle où vous deviez de l'argent, ce qui est quelque peu différent.

                Ainsi, je veux que la question soit mise à jour. Je veux que vous constatiez ce qu'est la position du ministre maintenant. Cela peut entraîner la possibilité d'une discussion avec Revenu Canada et ouvrir certaines portes.

                En ce moment, M. Trentadue, mes options sont très limitées. Je vous en ai fait part : il s'agit de rejeter ou d'accueillir la requête du ministre. Je ne rendrai de décision sur cette requête que s'il y a un nouveau - - et j'utilise le mot « relevé de compte » parce que je ne sais pas quelle forme le ministre lui donnera ou une autre cotisation à jour, qui porte sur des éléments jusqu'en 1995.

[8]            La question a encore une fois été portée à mon attention après avoir été portée au rôle d'audience une fois de plus devant un troisième juge le 4 décembre 2000. Ce juge a rapidement décidé que le « relevé de compte » demandé au cours de la deuxième audience (ci-dessus) avait été fourni à l'appelant ainsi qu'à la Cour par lettre datée du 1er août 2000. Le juge a ensuite à juste titre décidé d'ajourner cette audience et de me communiquer l'état des choses. En conséquence, le juge en chef de la Cour canadienne de l'impôt m'a attribué le rôle de décider de la question.

[9]            Je crois que l'on peut dire que la Cour canadienne de l'impôt a été très généreuse de son temps et de ses efforts afin de permettre le règlement de cette question. Je suis convaincu que cela a constitué un processus frustrant et long pour l'intimée et l'appelant et peut-être plus déconcertant qu'instructif en certaines occasions. Les distinctions particulières devant être établies entre « cotisation » , « nouvelle cotisation » , « avis de cotisation » et encore une fois « relevé de compte » ou « demande de paiement » peuvent être claires pour les personnes participant quotidiennement au processus. Toutefois, ces lignes de démarcation sont certainement moins distinctes pour ceux, la grande majorité des contribuables, qui ont à s'occuper de ces éléments sur une base irrégulière ou peut-être une seule fois dans leur vie. Il nous appartient, à nous, qui sommes du côté le plus informé des discussions, de demeurer alertes en ce qui concerne la très faible maîtrise de la question que possèdent ceux qui sont directement touchés par la réalité et la légalité. En l'espèce, cela pourrait même justifier l'examen de la pratique voulant qu'un élément intitulé « solde antérieur dû » soit inclus dans un « avis de cotisation » . Il n'est pas surprenant que l'appelant n'ait pas été enchanté par le montant du solde final dû. Il y avait peu de chances qu'il soit satisfait des efforts de l'intimée visant à l'assurer que tout ce qui était raisonnable avait été accompli afin de vérifier le montant et de lui expliquer la situation.

[10]          Compte tenu des idées exprimées ci-dessus, bien que cela semble être une tâche vaine, j'ai examiné en détail tout ce qui était disponible afin de voir si cela pouvait éclaircir la plainte fondamentale de l'appelant, à savoir qu'il n'avait pas reçu de renseignements satisfaisants pour appuyer le « solde antérieur de 11 645,36 » et « qu'il ne devait pas ce montant parce que des erreurs avaient été commises dans les cotisations et les nouvelles cotisations portant sur l'année 1990 » . Cet examen a pris en considération les copies des nouvelles cotisations produites, l'avis d'appel, la réponse à l'avis d'appel, y compris le relevé de compte annexé (relevé A), la transcription des audiences de la Cour et le deuxième « relevé de compte » (relevé B), produit en même temps que la lettre de l'intimée datée du 1er août 2000. Ces « relevés de compte » couvraient en partie la même période : le relevé A, celle allant du 23 mai 1990 au 29 avril 1998 et le relevé B, celle allant du 17 mars 1994 au 1er mai 2000. L'exercice a pris du temps, et, par souci de brièveté, je ne soulignerai que certains des éléments présentant un intérêt. Pour les fins du dossier, je fais remarquer que j'ai de sérieuses réserves quant à savoir s'il revient à la Cour d'effectuer une analyse aussi détaillée d'un point apparemment simple. Toutefois, à cause des circonstances de l'espèce, il semblait approprié de faire un effort pour clore la question.

(1)            Au 15 juillet 1992, le relevé A indique un solde dû de 0 $.

(2)            Au 17 mars 1994, les deux relevés indiquent un solde dû de 4 019,83 $.

(3)            Au cours des années précédentes, les remboursements suivants ont été accordés à l'appelant :

Années d'imposition            Montant                                  Date de paiement

1989                                                         1 458,45 $                                                23 mai 1990

1990 (1re cotisation)              4 706,84 $                                                24 juillet 1991

1991                                                         853,91 $                                               15 juillet 1992

                                                7 019,20 $

(4)            Il y a certaines différences entre les montants inscrits dans les relevés A et B. Je ne les considère pas comme des divergences, puisqu'elles semblent se rapporter en grande partie à différents montants d'intérêts imposés à différents moments. Toutefois, au 27 juillet 1995, les deux relevés indiquent que le solde dû était de 10 406,07 $, et ces deux soldes sont demeurés les mêmes dans les deux relevés jusqu'au 29 septembre 1997, date où il était de 10 420,22 $.

(5)            Les cotisations et les nouvelles cotisations portant sur la plus grande part de cette période sont les suivantes :

Année d'imposition                                                              Année pour laquelle une cotisation ou une nouvelle cotisation a été établie

1990                                                                                         1991, 1993, 1994, 1996

1991                                                                                         1992

1992                                                                                         1994

1993                                                                                         1994, 1995, 1998*

1994                                                                                         1995, 1995, 1997, 1998*

1995                                                                                         1996, 1997

1996                                                                                         1997, 1997

*On suppose qu'il s'agissait de nouvelles cotisations, car aucun détail n'a été fourni.

(6)            Après le 29 septembre 1997, le relevé A se poursuit et se termine simplement ainsi :

29 avril 1998                                           solde actuel                                            1 620,53 $.

(7)            Pour le relevé B, le résultat est le suivant :

27 juillet 2000                                         solde actuel                                            2 322,73 $

[11]          Si on laisse de côté d'autres points découlant de la présente analyse, qui en eux-mêmes pourraient soulever des questions, il est juste d'affirmer que les prétentions de l'appelant concernant un manque de clarté et d'explications pourraient être justifiées dans une certaine mesure. Les nombreuses cotisations et nouvelles cotisations, même si elles découlaient dans certains cas de la production d'oppositions en son nom, pouvaient néanmoins mener à une certaine confusion et à une certaine incertitude. Toutefois, à la fin du compte, ce qui importe pour la Cour, à la suite de l'audience du 20 octobre 1999, est de trancher la question de la requête de l'intimée demandant le rejet et de rendre une décision relativement à l'appel en l'instance. Pour examiner le présent appel, j'ai pris en considération le fait que certains documents ont été présentés à la Cour par l'appelant, de concert avec l'intimée, au moment de l'audience du 20 octobre 1999. Même après l'examen approfondi de la question soulevée ci-dessus, rien ne soutient la prétention de l'appelant selon laquelle le montant de 11 645,36 $ était incorrectement indiqué comme dû par lui à la date de l'avis de nouvelle cotisation, soit le 8 septembre 1997. En effet, il est évident que d'autres rajustements liés à ce montant ont été effectués après cette date. L'intimée les a fournis, et le solde dû au 27 juillet 2000 est considérablement moindre, soit 2 322,73 $, selon le plus récent « relevé de compte » .

[12]          Finalement, toutefois, l'obligation réelle repose sur l'appelant, et, même après deux longs délais, découlant de la première et de la deuxième audiences, et après que l'intimée a fourni des renseignements détaillés et à jour, il n'a rien fait de substantiel lui-même pour appuyer ses prétentions. Je n'ai rien trouvé, quant à la présence d'erreurs ou d'irrégularités dans les cotisations directement liées à l'année 1990 ou même à des années ultérieures, qui pourrait réduire le solde dû sur l'avis de nouvelle cotisation du 8 septembre 1997. La confusion, les difficultés, les retards et l'incertitude qui ont pu se produire se sont tous manifestés pendant de nombreuses années. Toutefois, selon moi, l'un ou l'autre de ces facteurs ne peut servir à invalider les cotisations au cours de cette période. Je n'ai pas à examiner la question plus en profondeur en vue de déterminer la responsabilité exacte quant au « solde dû » à ce moment-ci. Il revient aux parties de parvenir à un règlement s'il diffère du dernier montant de 2 322,73 $. C'est le dernier montant calculé qui prévaut, sinon, il revient selon moi à l'appelant de prouver qu'il en est autrement.

[13]          L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« D. E. Taylor »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 27e jour de mars 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

98-535(IT)I

ENTRE :

PASQUALE TANSELLA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 20 octobre 1999 à Toronto (Ontario) par

l'honorable juge suppléant D. E. Taylor

Comparutions

Représentant de l'appelant :                  Joseph A. Trentadue

Avocate de l'intimée :                           Me Shaheem Rashid

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1995 est rejeté selon les motifs du jugement ci-joints.


Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« D. E. Taylor »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 27e jour de mars 2002.

Mario Lagacé, réviseur


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