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Date: 20010802

Dossier: 2001-1954-GST-I

ENTRE :

ROBERT ALAN MORIYAMA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsde l'ordonnance

Le juge en chef adjoint Bowman

[1]            Il s'agit d'une requête de l'intimée visant à ce qu'il soit ordonné que les articles 17.1, 17.2 et 17.4 à 17.8 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt s'appliquent au présent appel.

[2]            Le ministre du Revenu national a établi à l'égard de l'appelant en tant qu'administrateur de Jetcom Communications Inc. une cotisation de 276 277,94 $ en vertu du paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d'accise. L'appelant a, en interjetant appel, opté pour la procédure informelle.

[3]            La Couronne demande que l'affaire soit entendue sous le régime de la procédure générale. La Cour n'a pas le pouvoir discrétionnaire de rejeter une telle demande lorsque celle-ci a été présentée dans les 60 jours suivant la transmission de l'avis d'appel par le greffe de la Cour au ministre du Revenu national. Il est satisfait à cette condition.

[4]            L'article 18.3002 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt se lit comme suit :

18.3002(1)               Sur demande du procureur général du Canada, la Cour doit ordonner l'application des articles 17.1, 17.2 et 17.4 à 17.8 à l'appel auquel les articles 18.3003 et 18.3007 à 18.302 s'appliqueraient par ailleurs.

                (2)            La demande doit être présentée dans les soixante jours suivant la transmission de l'avis d'appel par le greffe de la Cour au ministre du Revenu national ou après l'expiration de ce délai dans les cas suivants :

a)             la Cour est convaincue que le procureur général du Canada a pris connaissance de renseignements tels qu'il est justifié de présenter la demande après l'expiration de ce délai, ou que la demande est par ailleurs raisonnable dans les circonstances;

b)             la personne qui interjette appel y consent.

                (3)            Dans le cas d'une ordonnance rendue aux termes du paragraphe (1), la Cour doit ordonner que les frais entraînés pour la personne qui a interjeté appel soient payés par sa Majesté du chef du Canada si les conditions suivantes sont réunies :

a)             le montant en litige n'excède pas 7 000 $;

b)             le total des fournitures pour l'exercice précédent de cette personne n'excède pas 1 000 000 $.

[5]            La Couronne soutient en outre que le paragraphe (3) ne s'applique pas et que je ne devrais pas ordonner à la Couronne de payer les frais de l'appelant, car le montant en litige excède 7 000 $.

[6]            Avant de traiter de la question de savoir s'il est satisfait aux alinéas a) et b) du paragraphe (3), je ferai brièvement état de l'article 18.3007 de la Loi. Cet article confère à la Cour un certain pouvoir discrétionnaire en matière d'allocation de frais lorsque les montants en cause sont supérieurs à ceux qui sont visés au paragraphe 18.3002(3). Cet article n'a pas à être pris en compte en l'espèce, car, en vertu de cette disposition, si elle s'applique, les frais ne peuvent être alloués que lorsque l'on a statué sur l'appel.

[7]            De même, si vastes que puissent être les pouvoirs discrétionnaires de notre cour en matière d'allocation de frais en vertu de l'article 147 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), ils n'ont pas à être pris en considération à ce stade (voir l'ordonnance rendue par le juge Bowie dans l'affaire Wood c. La Reine, 96-2445(GST)I). La seule question à laquelle je doive répondre est de savoir si le paragraphe 18.3002(3) s'applique, de sorte que je devrais ordonner que les frais entraînés pour l'appelant soient payés par la Couronne.

[8]            Comme le paragraphe 18.3002(3) dit « si les conditions suivantes sont réunies » , il doit être satisfait aussi bien à l'alinéa a) qu'à l'alinéa b). Il est clair qu'il est satisfait à l'alinéa b). Le total des fournitures pour l'exercice précédent de M. Moriyama n'excède pas 1 000 000 $.

[9]            Il reste seulement à déterminer s'il est satisfait à l'alinéa a). L'avocate de l'intimée soutient que le montant en litige excède 7 000 $ et qu'il s'élève en fait à 276 277,94 $.

[10]          L'avocat de l'appelant soutient que, comme il s'agit d'un appel relatif au paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d'accise, il n'y a aucun montant en litige. Il dit que ce qui est en litige, c'est non pas « un montant » — le montant est fixé à la société —, mais plutôt le principe de la responsabilité de M. Moriyama et que cela dépend d'un certain nombre de considérations qui n'ont rien à voir avec la détermination d'un montant. Ces considérations incluent la question de savoir s'il est satisfait aux conditions énoncées au paragraphe 323(2), y compris en matière de délai, et si l'appelant a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence que l'exige le paragraphe 323(3).

[11]          Bien que l'argument ait été habilement présenté par Me Robertson, je le trouve un peu trop ténu. Il est vrai qu'il y a des questions de droit ou de fait à trancher qui ne dépendent pas du montant de la cotisation, par exemple la question de savoir s'il est satisfait aux conditions énoncées au paragraphe 323(2) ou si l'administrateur a agi avec une diligence raisonnable. Qu'il s'agisse d'une cotisation de 1 000 000 $ ou de 1 000 $, il faut répondre à ces questions. Néanmoins, tout litige fiscal — qu'il relève de la Loi sur la taxe d'accise ou de la Loi de l'impôt sur le revenu et qu'il se rapporte à une cotisation établie à l'égard du contribuable principal ou à une cotisation dérivée établie à l'égard d'un administrateur en vertu de l'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise ou de l'article 227.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu — concerne un montant, même s'il y a des questions de droit ou de fait quant à la responsabilité relative au paiement de ce montant ou d'une partie de celui-ci. Essentiellement, la question de savoir quel est le montant en litige dans une affaire pourrait être familièrement formulée comme suit : « De combien d'argent parlons-nous dans ce cas-ci? » Dans tout litige fiscal, la réponse à cette question aura invariablement trait à une somme d'argent.

[12]          Me Robertson a fait valoir qu'il semble que l'on ait rédigé le paragraphe 18.3002(3) en ayant à l'esprit un appel habituel interjeté par le contribuable qui était principalement responsable quant à la taxe sur les produits et services et non un appel interjeté par une personne comme un administrateur à l'égard de qui une cotisation dérivée a été établie en vertu de l'article 323. J'incline à convenir que le libellé de l'alinéa (3)b) de l'article 18.3002 appuie dans une certaine mesure cet argument en ce que, dans la plupart des cas, il ne s'applique guère à un administrateur de société, voire pas du tout. Je dois toutefois prendre les termes de la loi tels qu'ils m'apparaissent, et le fait qu'une partie de la loi soit inappropriée à l'égard d'un genre particulier de contribuable ne doit pas priver de tout effet le sens ordinaire des termes d'une autre partie de la loi.

[13]          Même si j'acceptais l'argument de l'appelant selon lequel il n'y a aucun « montant en litige » lorsqu'une pure question de principe ou de droit est en cause, je ne pense pas qu'une telle conclusion aide l'appelant en l'espèce. L'appelant conteste des éléments de la cotisation et la cotisation dans son ensemble et il est en droit d'attaquer l'exactitude, en totalité ou en partie, de la cotisation sous-jacente établie à l'égard de la société. C'est assurément un de ses motifs d'appel au paragraphe 16 de l'avis d'appel et c'est quelque chose qu'il est en droit de faire.

[14]          Dans l'affaire Gaucher c. La Reine, C.A.F., no A-275-00, 16 novembre 2000 (2000 DTC 6678), la Cour d'appel fédérale a confirmé les jugements de notre cour comme Acton c. La Reine, C.C.I., no 93-2739(IT)I, 4 mars 1994 (95 DTC 107), et Ramey c. La Reine, C.C.I., no 91-547(IT)G, 20 avril 1993 (93 DTC 791), dans lesquels il avait été statué qu'une personne qui avait été tenue pour responsable d'une manière dérivée pouvait attaquer la cotisation établie à l'égard du contribuable principalement responsable, même si ce dernier ne l'avait pas fait. La Cour d'appel fédérale a ainsi statué que l'on avait erronément tranché une affaire comme Schafer (A.) c. La Reine, C.C.I., no 95-1730(GST)G, 16 janvier 1998 ([1998] G.S.T.C. 7), (et, indirectement, une affaire comme Papa c. R., C.C.I., no 1999-3956(GST)I, 17 août 2000 ([2000] G.S.T.C. 74), en ne suivant pas les jugements Acton et Ramey.

[15]          Je ne pense donc pas que le paragraphe 18.3002(3) s'applique. Le montant en litige excède 7 000 $. Je n'entends pas rendre une ordonnance pour les dépens en vertu du paragraphe 18.3002(3). Dans la deuxième partie de sa requête, l'intimée demandait :

[TRADUCTION]

2.              qu'il soit ordonné que, pour la poursuite de l'appel, les règles de procédure générale habituelles en matière de frais s'appliquent au présent appel et que l'intimée ne soit pas tenue de payer les frais entraînés pour la personne qui a interjeté le présent appel, quelle que soit l'issue de la cause.

[16]          Je pense qu'il est préférable que je ne rende aucune ordonnance pour les dépens qui pourrait sembler restreindre les pouvoirs discrétionnaires du juge du procès selon l'article 147 des Règles. Le juge du procès pourrait déterminer que les pouvoirs plutôt vastes qui sont prévus à l'article 147 sont de quelque manière limités par l'article 18.3002 ou l'article 18.3007. C'est une question qu'il lui appartient de trancher.

[17]          Je rendrai l'ordonnance suivante.

[18]          Il est ordonné que les articles 17.1, 17.2 et 17.4 à 17.8 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt s'appliquent au présent appel.

[19]          Il est également ordonné que la question des frais soit laissée au juge du procès.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d'août 2001.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme ce 24e jour d'avril 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2001-1954(GST)I

ENTRE :

ROBERT ALAN MORIYAMA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Requête entendue le 18 juillet 2001 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

Comparutions

Avocat de l'appelant :                 Me David D. Robertson

Avocate de l'intimée :                 Me Sherry Darvish

ORDONNANCE

Vu la requête par laquelle l'intimée demande :

[TRADUCTION]

1.          qu'il soit ordonné que les articles 17.1, 17.2 et 17.4 à 17.8 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt (les « règles de procédure générale » ) s'appliquent au présent appel;

2.          qu'il soit ordonné que, pour la poursuite de l'appel, les règles de procédure générale habituelles en matière de frais s'appliquent au présent appel et que l'intimée ne soit pas tenue de payer les frais entraînés pour la personne qui a interjeté le présent appel, quelle que soit l'issue de la cause.

          Et vu les allégations des parties;

          Il est ordonné que les articles 17.1, 17.2 et 17.4 à 17.8 de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt s'appliquent au présent appel.

          Il est également ordonné que la question des frais soit laissée au juge du procès.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d'août 2001.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 24e jour d'avril 2002.

Mario Lagacé, réviseur

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