Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20010611

Dossier: 2000-4622-GST-I

ENTRE :

JOHN MALLOW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

FAITS

[1]            Il s'agit d'un appel interjeté à l'encontre d'une nouvelle cotisation, établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ), dont l'avis est daté du 10 août 2000 et porte le numéro 116785285-11EU. L'appel porte sur une taxe nette qui n'aurait été déclarée qu'en partie pour la période du 1er janvier 1993 au 31 mars 1999 (ci-après appelée la « période de cotisation » ).

[2]            Au cours de la période visée par la cotisation, John Mallow était un inscrit pour l'application de la Loi et exploitait un atelier de débosselage et de peinture sous le nom de « JM Auto Body N' Paint » , au S4 C1, R.R. no 1, Crescent Valley (Colombie-Britannique) (ci-après appelée la « propriété » ). Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a tenu pour acquis que, pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1996, l'appelant avait loué un immeuble situé sur la propriété. L'immeuble locatif n'était ni un immeuble d'habitation ni une habitation, et il n'était pas utilisé comme lieu de résidence par le locataire, qui y avait son atelier de travail. Dans ses déclarations de revenu des années d'imposition 1993, 1994, 1995 et 1996, l'appelant a fait état de revenus totalisant 40 000 $ relativement à l'immeuble locatif. Or, il n'a versé aucune TPS à cet égard.

[3]            Le ministre soutient que l'appelant a effectué la fourniture d'un bien immeuble par bail, licence ou accord semblable relativement au bien locatif. Le ministre fait donc valoir que le montant de 40 000 $ inclus dans le revenu de l'appelant relativement à l'immeuble locatif englobait une TPS de 2 616,82 $, que l'appelant a omis de verser.

[4]            L'appelant soutient que la fourniture de l'immeuble locatif ne constitue pas une fourniture taxable. Il fait valoir ceci dans son avis d'appel : [TRADUCTION] « l'opération en cause était un prêt et, bien que le bénéfice réalisé lors du remboursement du prêt soit une fourniture taxable au sens de l'article 80 de la Loi de l'impôt sur le revenu, le bénéfice ne constitue pas une fourniture taxable » .

ÉLÉMENTS DE PREUVE IMPORTANTS

[5]            L'appelant maintient que son comptable a commis une erreur lorsqu'il a traité le prêt de 40 000 $ comme un revenu de location payé à l'avance au titre d'un bail de quatre ans. Il affirme qu'il s'agissait d'un prêt consenti par Dave Herr, un ami qui avait été blessé gravement dans un accident d'automobile et qui avait obtenu l'argent en question dans le cadre d'un règlement. Il a déclaré qu'il s'agissait simplement d'un engagement d'honneur, qu'il remboursait le prêt petit à petit et de façon intermittente depuis plusieurs années, et que l'utilisation par Dave Herr de l'immeuble constituait simplement un élément personnel accessoire au prêt, et non pas une activité commerciale.

[6]            Dans ses déclarations T1 de chacune des quatre années allant de 1993 à 1996 (pièces R-2, R-3, R-4, R-5 et R-6), l'appelant a indiqué, au moyen d'une note explicative jointe à ses états financiers non vérifiés, que le prêt de 40 000 $ était :

                                [TRADUCTION]

Un produit comptabilisé d'avance, qui représente le revenu de location touché à l'avance aux termes d'un contrat de location de quatre ans qui vient à échéance au mois de décembre 1996, en contrepartie de la location d'une partie de l'atelier. Le montant en question sera inclus dans le calcul du revenu sur cette période à raison de 833,34 $ par mois, TPS incluse.

L'appelant a signé au moins une déclaration de revenu (pièce R-2), attestant ainsi la véracité de son contenu. De l'étape de la nouvelle cotisation à l'étape de l'opposition, puis à celle de l'avis d'appel, l'appelant a déclaré ceci à maintes reprises :

                                [TRADUCTION]

Au mois de mars 1993, John Mallow, le propriétaire, a conclu avec Dave Herr un contrat aux termes duquel il s'est engagé, en contrepartie de la somme de 40 000 $, à construire pour M. Herr un atelier qu'il devait utiliser à titre personnel pendant une période de quatre ans, sur un bien-fonds appartenant à l'entreprise. [Pièce R-1, avis d'appel]

[7]            L'appelant n'a pas appelé Dave Herr à témoigner.

QUESTION EN LITIGE

[8]            Il s'agit de déterminer si l'appelant a omis de déclarer une TPS de 2 616,82 $ perçue à l'égard de la fourniture d'un bien immeuble.

ÉVALUATION DE LA PREUVE

[9]            Lorsque, pendant plusieurs années, dans plusieurs documents, y compris dans au moins quatre formulaires T-1, dont il atteste la véracité, un appelant fait certaines assertions au ministre et que, après les étapes de la nouvelle cotisation, de l'opposition et de l'appel, il maintient ces assertions, puis qu'il change sa version des faits lors du procès, le moins que l'on puisse dire, c'est que la charge de la preuve qui lui incombe est lourde. Le témoignage de l'appelant au procès n'était pas convaincant et, selon la prépondérance des probabilités, il n'a pas réfuté les hypothèses du ministre. Je ne peux non plus conclure que les montants d'argent payés de façon irrégulière à Dave Herr étaient, d'après la preuve, suffisamment reliés au prêt.

[10]          Plus particulièrement, les tribunaux ont reconnu que la théorie de la fin de non-recevoir s'appliquait lorsqu'un contribuable fait une assertion au ministre qui amène ce dernier à agir d'une certaine façon, et qu'il en résulte une action ou une omission du ministre. Dans l'affaire Le procureur général duCanada c. Jencan Ltd., [1998] 1 C.F. 187, notamment, la Cour d'appel fédérale a déclaré ceci à la page 212 :

Je suis d'avis que, lorsque les conditions applicables sont réunies, le ministre peut invoquer la théorie de la fin de non-recevoir fondée sur une assertion lorsqu'un prestataire amène le ministre à se fier à un état de fait qui n'existe plus et à rendre ainsi une décision fondée sur des renseignements inexacts.

[11]          Dans le présent appel, la cotisation est fondée sur l'assertion de l'appelant. Si ce dernier n'avait pas fait cette assertion, la cotisation établie par le ministre aurait été différente. À mon avis, le ministre subit un préjudice du fait qu'il a agi conformément à l'assertion en question. L'appelant ne peut donc invoquer un tout nouvel ensemble de faits.

ANALYSE

[12]          Il s'agit de déterminer si l'appelant a omis de déclarer une TPS de 2 616,82 $ perçue à l'égard de la fourniture d'un bien immeuble.

[13]          Aux termes de l'article 221 de la Loi, la personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en application de la section II. Le paragraphe 123(1) de la Loi définit la « fourniture taxable » comme une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale. En outre, aux termes du paragraphe 123(1), l'activité commerciale est :

[...] c) la réalisation de fournitures, sauf des fournitures exonérées, d'immeubles appartenant à la personne, y compris les actes qu'elle accomplit dans le cadre ou à l'occasion des fournitures.

[14]          Dans le présent appel, on a soutenu par voie d'hypothèse que l'immeuble locatif n'était pas un immeuble d'habitation ni une habitation et qu'il n'était pas utilisé comme lieu de résidence par le locataire. Il s'ensuit que, dans la mesure où la fourniture par l'appelant du bien locatif était une fourniture d'un bien immeuble au sens du paragraphe 123(1), la fourniture était taxable. Lorsqu'il s'agit de déterminer si la fourniture effectuée par l'appelant dans la présente affaire était la fourniture d'un immeuble, le paragraphe 136(1) est aussi pertinent. Il se lit comme suit :

136. (1) Pour l'application de la présente partie, la fourniture, par bail, licence ou accord semblable, de l'utilisation ou du droit d'utilisation d'un immeuble ou d'un bien meuble corporel est réputée être une fourniture d'un tel bien. [Je souligne.]

[15]          L'appelant a fourni au locataire le droit d'utiliser l'immeuble locatif. Il a donc effectué la fourniture d'un immeuble au sens du paragraphe 136(1), ce qui constitue une fourniture taxable.

[16]          L'appelant n'a pas réellement touché de loyer, mais il a loué l'immeuble en contrepartie du règlement d'un prêt, et il a néanmoins effectué la fourniture d'un droit d'utiliser le bien immeuble par bail, licence ou accord semblable au sens du paragraphe 136(1). En conséquence, il a effectué une fourniture taxable et il était tenu de percevoir et de verser la TPS relativement à cette fourniture.

CONCLUSION

[17]          Pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1996, l'appelant a loué un immeuble sur sa propriété. L'immeuble n'était ni un immeuble d'habitation ni une habitation, et il n'était pas utilisé comme lieu de résidence. Le locataire, Dave Herr, utilisait l'immeuble comme atelier. L'appelant a effectué la fourniture taxable d'un bien immeuble par bail, licence ou accord semblable. Lorsqu'il a produit ses déclarations de TPS, l'appelant a omis de déclarer une TPS de 2 616,82 $ à l'égard de la fourniture du bien immeuble.

DÉCISION

[18]          L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« D. Hamlyn »

     J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 26e jour de mars 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Philippe Ducharme, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-4622(GST)I

ENTRE :

JOHN MALLOW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 31 mai 2001 à Castlegar (Colombie-Britannique) par

l'honorable juge D. Hamlyn

Comparutions

Représentant de l'appelant :                  Mark McPhail

Avocate de l'intimée :                           Me Johanna Russell

JUGEMENT

          L'appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 10 août 2000 et porte le numéro 116785285-11EU, est rejeté selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de mars 2002.

Philippe Ducharme, réviseur


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.