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Date: 19981028

Dossier: 96-2542-IT-G

ENTRE :

ROBERT McNEILL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1] Cet appel interjeté sous le régime de la procédure générale a été entendu à Vancouver (Colombie-Britannique) le 8 octobre 1998.

[2] Les paragraphes 1 à 3 et 5 à 15 inclusivement de l'avis d'appel ont été admis dans la réponse à l'avis d'appel. Le paragraphe 16 de l'avis d'appel énonce le point en litige. Ces paragraphes se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

1. L'appelant, soit Robert McNeill, comptable agréé, habite à l'adresse suivante : site 41, R.R. 2, île Gabriola (Colombie-Britannique) V0R 1X0.

2. En 1988, l'appelant a passé un contrat en vertu duquel il vendait le cabinet d'expertise comptable qu'il avait établi dans la région de North Vancouver à un autre cabinet d'expertise comptable appelé Roe & Company (qui a subséquemment pris le nom de Roe, McNeill & Co.).

3. On a également convenu au moment de la vente que l'appelant fournirait des services comme comptable agréé et consultant au cabinet Roe McNeill & Co. et aux clients de celui-ci pendant une période de trois ans, en contrepartie d'honoraires minimums garantis de 225 000 $ sur cette période de trois ans.

[...]

5. Le 3 juillet 1991 ou vers cette date, le cabinet Roe McNeill & Co. a résilié le contrat de gestion, alléguant que l'appelant n'avait pas fourni les services prévus au contrat et qu'il avait enfreint la clause restrictive en fournissant des services comptables professionnels indépendamment du cabinet Roe McNeill & Co. à des personnes de North Vancouver, de West Vancouver, de Burnaby et de Vancouver.

6. Se fondant sur les allégations susmentionnées, le cabinet Roe McNeill & Co. a engagé contre l'appelant des poursuites judiciaires en dommages-intérêts, soit l'action no C917351 intentée devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. L'appelant a introduit une opposition à ces poursuites pour le motif que ses activités étaient conformes au contrat de gestion et que ses activités productives de revenus ne contrevenaient pas à la clause restrictive.

7. Le 30 mai 1994, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a statué que l'appelant avait manqué à ses obligations et qu'il était responsable envers le cabinet Roe McNeill & Co. de dommages-intérêts d'un montant de 376 619 $, plus les dépens, soit en tout 465 908,46 $.

8. Par suite de la décision de la Cour, l'appelant a fait une cession en faillite le 29 septembre 1994. La cession a été présentée au séquestre officiel à la même date. La Barnes & Kissak, Inc. a été nommée syndic de faillite.

9. Le 6 décembre 1994, la Barnes & Kissak Inc. a produit une déclaration de revenus au nom de l'appelant pour la période allant du 1er janvier au 29 septembre 1994. La déclaration de revenus n'indiquait aucune déduction à l'égard des dommages-intérêts et des dépens que l'appelant était tenu de payer en vertu de la décision de la cour.

10. Le 3 avril 1995, la Barnes & Kissak a écrit à Revenu Canada pour l'aviser que, entre autres choses, elle avait fait erreur en omettant d'indiquer une dépense d'entreprise de 465 908,46 $ correspondant aux dommages-intérêts et aux dépens devant être payés en vertu du jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique.

11. Le 8 juin 1995, le ministre a délivré un avis de cotisation acceptant la déclaration de revenus à peu près telle qu'elle avait été produite, sans aucune mention de la dépense d'entreprise.

12. Le 2 octobre 1995, le ministre a répondu à la lettre du 3 avril 1995 de la Barnes & Kissak pour faire savoir qu'il rejetait la demande visant à faire modifier la déclaration de revenus et à faire admettre la dépense d'entreprise.

13. Le 10 novembre 1995, par voie d'ordonnance de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, le cabinet Roe Hoops & Wong (anciennement appelé Roe McNeill & Co.) a été autorisé comme créancier dans la faillite à faire appel de la cotisation au nom de l'appelant.

14. Le 21 septembre 1995, la Barnes & Kissak Inc. a déposé un avis d'opposition à l'égard de la cotisation.

15. Par voie d'avis de décision en date du 10 avril 1996, le ministre a rejeté l'avis d'opposition de l'appelant.

B. QUESTION À TRANCHER

16. Il s'agit de savoir si les dommages-intérêts et dépens de 465 908,46 $ adjugés à l'encontre de l'appelant dans l'action no C917351 intentée devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique représentent une dépense déductible dans le calcul du revenu de l'appelant pour l'année d'imposition 1994 se terminant le 29 septembre 1994.

[3] Aucun témoin n'a été appelé. Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS

Aux fins de la présente espèce, les parties, par l'intermédiaire de leurs avocats, conviennent des faits suivants. Chacune des parties est libre de produire des éléments de preuve supplémentaires non incompatibles avec ces faits. Les parties se fondent en outre sur les actes de procédure qu'elles ont déposés.

1. Entre le milieu des années 70 et l'année 1988, l'appelant a exploité avec succès un gros cabinet d'expertise comptable, à partir de bureaux situés à West Vancouver (Colombie-Britannique). Il fournissait principalement des services à des clients de North Vancouver et de West Vancouver. En outre, il avait des clients à Vancouver et à Burnaby (Colombie-Britannique). Durant la période pertinente, son cabinet était exploité comme entreprise individuelle.

2. Le 6 septembre 1988 ou vers cette date, l'appelant a passé un contrat d'achat (le “ Contrat ”) avec le cabinet Roe & Company, pour vendre son cabinet comme entreprise en exploitation. Une copie du Contrat figure à la pièce 1.

3. Le bien vendu comprenait l'équipement, les biens meubles, le mobilier, les améliorations locatives, les dossiers de clients, les logiciels, les travaux en cours et le fonds commercial (voir le paragraphe 1 du Contrat).

4. La date de clôture effective était le 1er septembre 1988 (voir le paragraphe 6 du Contrat). Le cabinet Roe & Company a pris le nom de Roe, McNeill and Company.

5. Le prix d'achat était de 150 000 $, réparti comme suit : fonds commercial 100 000 $; équipement 10 000 $; améliorations locatives 15 000 $; dossiers de données électroniques et tableurs électroniques 25 000 $. Une prime était en outre payable si les factures établies à l'égard de clients de l'appelant dans les trois années suivant la date de clôture dépassaient 1 200 000 $ (voir le paragraphe 2 et la section 7.5 du Contrat).

6. Une compagnie appelée Lions Gate Management Ltd. (“ Lions Gate ”) était également partie au Contrat. Il s'agissait d'une compagnie contrôlée par l'appelant et son épouse, Christine. La Lions Gate était propriétaire de certains des actifs utilisés par l'appelant dans son cabinet, lesquels actifs ont été vendus au cabinet Roe and Company (voir l'énoncé C du Contrat).

7. On avait également convenu que l'appelant fournirait des services de consultation et d'expertise comptable pendant une période de trois ans à partir de la date de l'achat. Les paiements prévus à la section 7 consistaient en ce qui suit :

a) un montant de 150 000 $ payable par tranches de 50 000 $ devant être versées à la date de clôture, le 1er juillet 1989 et le 1er juin 1990 (section 7.3c) du Contrat);

b) un montant de 75 $ l'heure pour le temps facturé par l'appelant au profit de Roe & Company, soit un minimum de 1 000 heures facturables chaque année (section 7.3d) du Contrat).

8. Le contrat d'achat stipulait que les services de consultation seraient fournis par l'entremise de la Lions Gate, mais les services devaient être fournis personnellement par l'appelant et, si l'appelant ne fournissait pas les services de consultation, il serait personnellement responsable comme s'il s'était personnellement engagé par contrat envers Roe & Company à fournir les services (section 7.3a) du Contrat).

9. L'appelant avait en outre convenu de ce qui suit :

a) au cours de la période allant du 1er septembre 1988 au 31 octobre 1991, il agirait en toute bonne foi de manière à présenter à des clients de son cabinet des représentants de Roe & Company et de manière à promouvoir Roe & Company afin d'assurer le passage harmonieux de l'entreprise à Roe & Company (section 7.4a) du Contrat);

b) pendant une période de cinq ans après la période de consultation (soit du 1er septembre 1991 au 31 août 1996), il ne fournirait pas de services comptables professionnels au public à North Vancouver, à West Vancouver, à Burnaby et à Vancouver (section 7.7a) du Contrat).

10. Les deux premières années de la période de consultation prévue au Contrat se sont passées sans incident, sauf que l'appelant n'a pas adopté de processus officiel pour la présentation de clients à Roe, McNeill and Company et aux représentants de ce cabinet et qu'il ne leur a présenté que quelques clients (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 6 1.19 à p. 7 1.5, pièce 2).

11. Après deux ans et demi suivant la conclusion de l'arrangement en matière de consultation, l'appelant n'avait pris aucune mesure pour assurer activement la présentation de clients. Le 21 février 1991, l'appelant a fait savoir à Douglas Roe qu'il serait en droit en vertu du Contrat d'emmener des clients de son ancien cabinet à un nouveau cabinet qu'il se proposait d'ouvrir à la fin de la période de consultation de trois ans dans l'île Gabriola (soit hors de la région visée par la clause restrictive) (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 10 1.13 - p. 11 1.9).

12. Le cabinet Roe, McNeill & Company a donné des instructions à l'appelant quant à savoir comment passer le reste de la période de consultation, lui enjoignant notamment de dire à des clients que le cabinet Roe, McNeill & Company avait acheté le fonds commercial, mais l'appelant a refusé de suivre ces instructions, les considérant comme une résiliation du Contrat de la part de Roe, McNeill & Company (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 14 11.7-10 et p. 13 1.27 à p. 14 1.6).

13. Le 3 juillet 1991 ou vers cette date, le cabinet Roe, McNeill & Company a résilié le Contrat pour le motif que l'appelant n'avait pas fourni les services prévus au Contrat (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 14 11.7-10).

14. L'appelant a ouvert un cabinet d'expertise comptable après la cessation de ses services auprès du cabinet Roe et a fourni des services d'expertise comptable, notamment, à des clients de la région visée par la clause restrictive prévue au Contrat.

15. Se fondant sur le fait que les activités susmentionnées violaient le Contrat, le cabinet Roe, McNeill & Company a engagé des poursuites judiciaires en dommages-intérêts contre l'appelant, soit l'action no C917351 intentée devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. L'appelant a introduit une opposition à ces poursuites pour le motif que ses activités étaient conformes au Contrat et que ses activités productives de revenus ne contrevenaient pas à la clause restrictive.

16. Après un procès de 12 jours tenu en 1994, Mme le juge Boyd, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, a conclu que l'appelant avait enfreint comme suit le Contrat :

(i) l'appelant a enfreint l'obligation qu'il avait en vertu du Contrat d'agir en toute bonne foi de manière à présenter ses clients au cabinet Roe, McNeill & Company (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 32, lignes 10-12);

(ii) la clause restrictive était exécutable, et le fait de fournir des services à des personnes de la région visée par la clause restrictive, à partir d'un endroit situé hors de cette région, contrevenait au Contrat (jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, p. 19 1.29 - p. 20 1.3 et p. 20 1.10-22);

(iii) en raison des manquements au Contrat, l'appelant devait payer au cabinet Roe, McNeill & Company la somme de 465 908 $, calculée comme suit :

perte de bénéfices jusqu'au procès 241 372 $

créances irrécouvrables extraordinaires 1 247 $

travaux en cours impossibles à facturer 15 000 $

perte de survaleur 119 000 $

intérêts et frais 89 289 $

465 908 $

17. Par suite de la décision de la Cour, l'appelant a fait une cession en faillite le 29 septembre 1994. La cession a été présentée au séquestre officiel à la même date. La Barnes & Kissak Inc. a été nommée syndic de faillite.

18. Le 6 décembre 1994, la Barnes & Kissak Inc. a produit une déclaration de revenus au nom de l'appelant pour la période allant du 1er janvier au 29 septembre 1994. La déclaration de revenus n'indiquait aucune déduction à l'égard du montant payable par l'appelant par suite de la décision de la cour. Une copie de la déclaration de revenus figure à la pièce 3.

19. Le 3 avril 1995, la Barnes & Kissak Inc. a écrit à Revenu Canada pour l'aviser que, entre autres choses, elle avait à tort omis d'indiquer les dépenses d'entreprise de 465 908,46 $ correspondant au jugement de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Une copie de la lettre figure à la pièce 4.

20. Le 3 juin 1995, le ministre a délivré un avis de cotisation acceptant la déclaration de revenus à peu près telle qu'elle avait été produite, sans admettre de déductions à l'égard du montant adjugé par la cour. Une copie de l'avis de cotisation figure à la pièce 5.

21. Le 21 septembre 1995, la Barnes & Kissak Inc. a déposé un avis d'opposition à l'égard de la cotisation. Une copie de l'avis d'opposition figure à la pièce 6.

22. Le 2 octobre 1995, le ministre a répondu à la Barnes & Kissak Inc. pour faire savoir qu'il rejetait la demande qu'elle avait présentée pour faire modifier la déclaration de revenus et pour permettre la déduction du montant adjugé par la cour comme une dépense d'entreprise. Une copie de la lettre figure à la pièce 7.

23. Le 10 novembre 1995, par voie d'ordonnance de la Cour suprême, le cabinet Roe & Company (qui a pris le nom de Roe, McNeill & Company, puis de Roe Hoops & Wong) a été autorisé comme créancier dans la faillite à faire appel de la cotisation au nom de l'appelant. Une copie de l'ordonnance figure à la pièce 8.

24. Par voie de notification de ratification en date du 12 avril 1996, le ministre a rejeté l'avis d'opposition de l'appelant. Une copie de la notification de ratification et du rapport du vérificateur figure à la pièce 9.

25. Le 12 février 1998, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a maintenu la conclusion de rupture de contrat rendue en première instance et a en outre décidé que l'appelant était assujetti à une obligation de représentant indépendant et qu'il avait violé cette obligation qu'il avait envers le cabinet Roe, McNeill & Company. La Cour d'appel a maintenu l'adjudication de dommages-intérêts. Une copie de ce jugement figure à la pièce 10.

DATÉ à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 8e jour d'octobre 1998.

[4] L'argumentation de l'intimée est résumée aux alinéas 4d) à h) inclusivement (les hypothèses) et au paragraphe 5 de la réponse à l'avis d'appel, qui se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

4. Dans cette cotisation établie à l'égard de l'appelant, le ministre se fondait notamment sur les hypothèses suivantes :

[...]

d) le Contrat exigeait en outre que l'appelant agisse en toute bonne foi de manière à promouvoir les intérêts du cabinet Roe, ce que l'appelant n'a pas fait et ce qui a été expressément considéré par la Cour suprême de la Colombie-Britannique comme une rupture de cette clause du Contrat;

e) la responsabilité de l'appelant à l'égard des dommages-intérêts ordonnés par la Cour suprême de la Colombie-Britannique le 30 mai 1994 était le résultat direct des actes de l'appelant et non d'un événement qui s'inscrivait dans le cadre de l'entreprise comptable ordinaire de l'appelant ou qui y était accessoire;

f) cette responsabilité de l'appelant ne découle pas d'un événement indépendant de la volonté de l'appelant et, si ce dernier s'était conformé aux modalités du Contrat, il n'aurait pas été tenu pour responsable des dommages-intérêts et des dépens;

g) l'appelant n'a pas engagé ces dépenses en vue de tirer un revenu d'une entreprise;

h) la responsabilité relative aux dommages-intérêts et aux dépens ne représente pas des dépenses engagées pour acquérir, protéger ou conserver une immobilisation ou pour assurer un avantage durable à l'entreprise de l'appelant.

B. QUESTION À TRANCHER

5. Il s'agit de savoir si les dommages-intérêts, dépens et intérêts représentent des dépenses déductibles pour l'année d'imposition 1994.

[5] L'alinéa 18(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu se lit comme suit :

18(1) Dans le calcul du revenu du contribuable tiré d'une entreprise ou d'un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles :

a) les dépenses, sauf dans la mesure où elles ont été engagées ou effectuées par le contribuable en vue de tirer un revenu de l'entreprise ou du bien;

Donc, la déduction doit se rapporter à des dépenses “ engagées ou effectuées par le contribuable ” en vue de tirer un revenu d'une entreprise.

[6] Dans l'affaire Imperial Oil Limited v. M.N.R., 3 DTC 1090, à la page 1100, le président Thorson a conclu comme suit qu'une dépense était déductible :

[TRADUCTION]

[...] Lorsque la nature des opérations est telle que le risque de négligence de la part des membres du personnel du contribuable dans l'exercice de leurs fonctions ou de leur emploi est réellement accessoire à de telles opérations, comme c'était le cas dans la présente espèce, avec ce que cela a comporté comme responsabilité à l'égard du paiement de dommages-intérêts et de dépens, le montant de tels dommages-intérêts et dépens est à bon droit inclus comme élément du coût total de telles opérations. On peut donc dire à juste titre qu'il s'agit d'une dépense engagée nécessairement et exclusivement en vue de gagner le revenu provenant de telles opérations. On ne peut dire dans les circonstances que le paiement de tels dommages-intérêts et dépens est prélevé sur des bénéfices. Ce n'est pas le cas. Comme le montant est un élément du coût total des opérations, il doit être déduit, avec les autres éléments du coût, avant la détermination du montant des bénéfices provenant des opérations.

[7] Les alinéas 11a) à g) inclusivement, j) et m) à o) inclusivement du jugement unanime de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique décrivent la conduite de M. McNeill concernant le contrat. Ces alinéas se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

[11] Le savant juge de première instance a décrit les événements qui ont eu lieu après la passation de ce contrat :

a) Les deux premières années de la période de consultation se sont passées sans incident. Contrairement au plan initial, les 200 premières heures facturables de M. McNeill n'ont pas été affectées à la présentation de clients. Mis à part quelques présentations sommaires de clients de M. McNeill faites dans les couloirs du cabinet et les entretiens occasionnels avec un client à la pause de midi, aucun processus officiel de présentation de clients n'a été adopté. Bien qu'aucun des deux frères Roe n'ait été complètement satisfait de cette situation, ni l'un ni l'autre n'a soulevé d'objections. Ils reconnaissaient que la présentation d'un nouveau conseiller professionnel était un processus délicat qui ne pouvait être imposé à un client. À leur avis, la question était essentiellement entre les mains de M. McNeill, et ce dernier était le mieux placé pour décider de la forme du processus de transition et pour déterminer le moment opportun pour l'entamer.

b) Au début, la liste de nouveaux clients a été passée en revue par les frères Roe, qui se sont répartis ces clients de manière à établir une répartition égale de factures potentielles entre chacun de leurs centres de profit de référence correspondant aux clients. Bien que chacun des deux frères ait par la suite géré sa propre liste de clients et ait veillé à ce que son travail soit effectué efficacement et facturé de manière appropriée, dans la plupart des cas, M. McNeill a continué d'être à l'avant-scène — il accueillait les clients, prenait des instructions, déléguait des travaux et recommandait des facturations appropriées. À quelques exceptions près, ces recommandations étaient suivies. Un certain nombre de clients de M. McNeill ont témoigné au procès. Sauf de très rares exceptions, durant la période pertinente, la plupart d'entre eux ne savaient absolument pas que le cabinet de M. McNeill avait été vendu ou qu'ils étaient alors, du moins sur papier, des clients des frères Roe. En ce qui les concernait, mis à part le fait que les locaux avaient été rénovés et agrandis et qu'il y avait eu des changements dans le personnel de soutien, qui était plus nombreux, M. McNeill demeurait toujours leur comptable.

[...]

c) En septembre 1990, il ne restait qu'un an sur les trois années de la période de consultation, et Douglas Roe a contacté M. McNeill pour lui demander s'il entendait renouveler ou prolonger le contrat de consultation. Dans son esprit, la réponse de M. McNeill dicterait la manière dont la période restante en vertu du contrat devrait être utilisée. Si M. McNeill entendait partir, il faudrait immédiatement faire des efforts pour assurer une transition concernant la clientèle, notamment pour la période de l'impôt qui s'en venait, période durant laquelle la majorité des clients se présenteraient au bureau. On pourrait redoubler d'effort pour la présentation de clients et les réunions durant la période de l'impôt. Si M. McNeill entendait rester, la question de la transition était moins urgente.

d) M. McNeill a rassuré M. Roe en lui disant qu'il ne prévoyait aucun problème dans la prolongation éventuelle de la période de consultation. Toutefois, il préférait s'occuper de la question après la période de grande activité qu'est la période de l'impôt. M. Roe ne voulait pas que la question soit différée et a continué de faire pression sur M. McNeill jusqu'à la fin de 1990 et le début de 1991. Des discussions ont été entamées au début de 1991. Il est devenu clair que M. McNeill entendait vendre sa maison de West Vancouver et déménager dans l'île Gabriola, où il avait déjà acheté un terrain et construit une maison. Il désirait y établir une espèce de bureau satellite Roe, McNeill et avait présenté diverses propositions pour racheter 150 000 $ de factures de sa clientèle initiale et prolonger de trois à cinq ans la période de consultation.

[...]

e) Les choses sont arrivées au point critique le 21 février 1991, lors d'une conversation téléphonique au cours de laquelle M. Roe et M. McNeill ont de nouveau discuté des intentions de M. McNeill. À un moment donné, M. Roe a dit qu'il ne céderait pas de clients à M. McNeill, ce à quoi M. McNeill a répondu quelque chose comme : “ Qui a parlé de vente? Gary Wong (avocat de M. McNeill) dit que je peux les avoir (prendre) pour rien de toute façon ”. Au procès, M. McNeill a cherché à se rétracter, disant qu'il avait en fait plutôt déclaré quelque chose du genre : “ Gary Wong m'a dit que, pourvu que je ne sollicite pas de clients, les clients étaient libres de me suivre, et j'étais libre de les accepter ”. Je rejette le témoignage de M. McNeill sur cette question et accepte le témoignage de Douglas Roe concernant les termes employés durant cette conversation téléphonique critique. Quoi qu'il en soit, je fais remarquer que la version de cette déclaration donnée par Douglas Roe est celle que M. McNeill a adoptée comme véridique lors de l'interrogatoire préalable, puis, au procès, lors du contre-interrogatoire.

f) M. McNeill était prêt à admettre bien ouvertement au procès que, en février 1991, il estimait n'avoir aucune obligation juridique d'indemniser le cabinet Roe, McNeill à l'égard de la perte de clients. Il a dit que, tout au plus, il estimait avoir une “ obligation morale ” de le faire. “ Mais, pour l'essentiel, a-t-il témoigné, je voulais les dossiers. Je voulais acheter la paix. ”

g) Douglas Roe était stupéfait de la déclaration de M. McNeill et enragé. Cette déclaration a été un point critique dans sa relation avec M. McNeill. Par la suite, M. Roe ne faisait aucunement confiance à M. McNeill, soit un fait que, au procès, M. McNeill acceptait comme bien compréhensible. De l'avis de M. Roe, M. McNeill agissait de façon non professionnelle et de manière contraire aux modalités du Contrat. D'après lui, les implications de la déclaration de M. McNeill et la menace évidente que cela représentait par rapport à la clientèle ne pouvaient être passées sous silence.

[...]

[...]

[...]

j) Douglas Roe ne savait pas que, vers le 5 mai 1991, M. McNeill avait demandé un certificat et avait demandé une assurance responsabilité professionnelle pour exercer sa profession à partir d'un nouveau cabinet, dans l'île Gabriola. Les deux demandes décrivaient le cabinet comme ayant été établi le 1er mai 1991. Néanmoins, durant cette période, des négociations s'étaient poursuivies, et M. McNeill avait continué de rencontrer des clients et de communiquer avec des clients.

[...]

m) Tout au long des mois de mai et juin 1991, M. McNeill a tenu un certain nombre de réunions avec divers clients. Comme il le disait au procès : “ J'essayais simplement de maintenir les éléments ensemble ”, ce qui était effectivement le cas. La preuve appuie de façon accablante la conclusion selon laquelle au lieu d'agir dans le plus grand intérêt du cabinet Roe, McNeill, M. McNeill faisait tout ce qu'il pouvait (à part solliciter activement les clients) pour “ maintenir ensemble ” les éléments de ce qu'il percevait comme étant son cabinet.

n) Bien que M. McNeill n'ait pas activement cherché de clients ou sollicité leur clientèle, il n'a probablement pas été étonné que bon nombre des clients aient été mécontents de ce qui se passait au cabinet Roe, McNeill lors de la période de l'impôt. Certains des clients étaient à sa recherche, et après avoir insisté sur le fait qu'ils entendaient quitter de toute façon le cabinet Roe, McNeill, il avait accepté d'agir en leur nom. D'autres anciens clients ne l'avaient jamais rejoint et n'avaient aucune idée de la situation générale au cabinet Roe, McNeill. Quoi qu'il en soit, tous ses clients ont reçu une lettre de lui à un moment donné en juin ou juillet 1991. La lettre était datée du 19 juin 1991 et était adressée à M. McNeill lui-même. Elle se lit comme suit :

“ Monsieur McNeill,

Je désire que vous continuiez d'être mon comptable. Je sais que, en septembre 1988, vous avez vendu votre cabinet d'expertise comptable de West Vancouver à Robert et Douglas Roe et que vous avez travaillé avec eux en vertu d'un arrangement contractuel.

Vous m'avez avisé que vous étiez tenu aux termes de ce contrat de ne pas fournir de services comptables professionnels au public pendant une période de cinq ans à West Vancouver, à North Vancouver, à Vancouver et à Burnaby. Je crois comprendre que vous êtes tenu d'agir de bonne foi de manière à me présenter aux frères Roe comme client et à promouvoir ce cabinet afin d'assurer le passage harmonieux de votre clientèle à ce cabinet, et vous m'avez encouragé à rester client du cabinet Roe, McNeill & Company.

Nonobstant l'avis que vous m'avez donné quant à vos obligations contractuelles envers les frères Roe et quant à votre déménagement dans l'île, je désire que vous continuiez d'être mon comptable. Je ne veux pas rester client du cabinet Roe, McNeill & Company et je quitterai ce cabinet de toute façon. Je confirme que la présente demande visant à ce que vous soyez mon comptable est faite librement et volontairement et qu'il n'y a pas eu de votre part de suggestion, commentaire, influence, incitation ou autre communication pour que notre comptabilité soit tenue par vous plutôt que par Douglas Roe.

Je désire que tous mes dossiers qui sont actuellement au cabinet Roe, McNeill & Company soient transférés au bureau que vous avez dans l'île.

Veuillez agréer, Monsieur McNeill, mes salutations distinguées. ”

o) Un certain nombre d'anciens clients de M. McNeill ont témoigné au procès. Bien qu'ils aient tous confirmé avoir reçu la lettre et qu'ils aient déclaré sous serment que le contenu de la lettre était véridique, ils ont admis qu'ils ne comprenaient guère, voire pas du tout, les modalités du Contrat en litige. Ils tenaient beaucoup à ce que M. McNeill continue d'agir en leur nom et, à mon avis, ils ont simplement été obligeants envers lui en signant et en renvoyant la lettre. La lettre est un document manifestement intéressé, conçu pour minimaliser tout risque d'encourir une responsabilité en raison des démarches en cours. À mon avis, les actes de M. McNeill constituent des manquements répétés et continuels à la clause prévoyant la plus grande bonne foi.

[8] Les paragraphes 20 à 26 du jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique décrivaient les activités continues de M. McNeill, qui ne se sont terminées qu'avec la séparation de 1991. Le paragraphe 20 résume en fait cette conclusion rendue aussi bien en première instance qu'en cour d'appel. Il se lit comme suit :

[TRADUCTION]

[20] L'échange qui a eu lieu le 21 février 1991, vu dans le contexte des deux années et demie précédentes, ne pouvait être interprété par les frères Roe que comme l'expression verbale de l'intention continue de M. McNeill de faire fi de son obligation d'“ agir en toute bonne foi ” de façon à présenter des clients aux frères Roe et à “ favoriser l'acheteur de toutes les façons possibles afin d'assurer un transfert harmonieux, sans interruption ”.

[9] De plus, la preuve dans son ensemble et les conclusions unanimes des deux cours indiquent que M. McNeill s'est engagé dans la voie qui a donné lieu aux dommages-intérêts dès le début du contrat. Il s'est conduit de la sorte dès le départ. Ce qu'il voulait, c'était recevoir la rétribution provenant du contrat tout en gardant les clients et leurs affaires. Les opérations de M. McNeill avec les frères Roe et les actes subséquents de M. McNeil représentaient une opération globale du début à la fin. M. McNeill avait choisi d'avoir le beurre et l'argent du beurre. Ce qui est étonnant, c'est que les frères Roe aient permis que cela continue aussi longtemps.

[10] Tous les rapports de M. McNeill avec Roe & Company étaient intentionnels. Le risque d'une responsabilité en raison de sa conduite par suite des jugements qui ont été consignés en preuve n'était pas simplement fortuit, il était prévisible, tout comme le risque de devoir payer les dommages-intérêts, les dépens et les intérêts. De même, M. McNeill a pris le risque (il avait conclu un contrat à cet égard) que le cabinet Roe & Company puisse acquérir l'ensemble ou le plus gros de son propre cabinet et de sa clientèle.

[11] Dans l'affaire Jean-Camille Poulin c. Canada, [1996] A.C.F. no 960, le juge Marceau, parlant pour l'ensemble du groupe de juges de la Cour d'appel fédérale, disait aux paragraphes 8 à 12 inclusivement :

[8] Sur le second point, toutefois, je me permets, avec respect, de contester la position du juge. Le caractère limitatif de l'alinéa 18(1)a) de la Loi serait, à mon sens, complètement faussé si l'on pouvait prétendre qu'il suffit que l'acte préjudiciable fautif pour lequel un individu est appelé à payer des dommages ait été commis à l'occasion de l'exercice d'un métier ou d'une profession pour que le paiement soit déductible des revenus qu'il tire de l'exercice de ce métier ou de cette profession. Pour qu'un tel paiement, qui en lui-même, bien sûr, ne vise pas à réaliser un profit, soit néanmoins considéré comme répondant à l'exigence de l'alinéa 18(1)a) de la Loi, il faut qu'il soit vu comme la conséquence malheureuse d'un risque que le contribuable devait prendre et assumer pour exercer son métier ou sa profession. Et pour que le paiement soit ainsi vu, une condition essentielle, je pense, est qu'il se rattache directement à un acte qu'impliquait l'exercice du métier ou de la profession et pouvait être éventuellement jugé avoir été accompli de façon fautive.

[9] Je reconnais sans peine qu'on ne saurait faire dépendre la question de déductibilité du paiement des dommages sur le caractère plus ou moins sérieux de la faute contractuelle qui a donné lieu à responsabilité. On ne saurait, je pense, introduire, dans l'application des règles fiscales, des préoccupations morales du genre et, d'ailleurs, il n'existe pas de barème qui permette de classifier les fautes eu égard à leur gravité, la responsabilité civile qui en découle jouant de même façon dans tous les cas. Je ne crois pas, non plus, qu'il y ait lieu de faire appel, pour fin de discernement entre les cas où la condition de l'alinéa 18(1)a) serait satisfaite et les autres, à quelque notion d'ordre public. Il me semble qu'il n'y a pas plus de place à des notions subjectives de politique sociale ou d'ordre public qu'à des préoccupations morales en matière fiscale. Enfin, je ne trouve aucune utilité, et même justification, à établir, comme on l'a suggéré, une série de facteurs comme la relation entre l'événement source de responsabilité et les opérations ordinaires, l'impossibilité d'éviter l'événement, les mesures de protection prises pour parer aux conséquences de l'événement, par exemple l'assurance, la fréquence de survenance d'événements semblables pour vérifier si on a vraiment affaire à un risque suffisamment inhérent à l'exercice du métier ou de la profession. Les conditions d'ouverture de la responsabilité civile sont devenues si larges dans le droit canadien d'aujourd'hui, aussi bien le droit du Québec que la common law des autres provinces, que personne ne peut se protéger complètement contre le risque que son activité, quelle qu'elle soit, soit jugée génératrice de responsabilité. À mon avis, le risque d'avoir à répondre des dommages pour activité professionnelle fautive au sens du droit privé est inhérent à l'exercice de n'importe quel métier et n'importe quelle profession.

[10] Mais s'il faut admettre que la commission d'une faute involontaire dans l'accomplissement d'un acte qu'implique l'exercice d'un métier ou d'une profession est inévitable et que, partant, l'obligation d'indemniser est un risque qui est inhérent à cet exercice, on ne peut étendre l'idée à la commission d'un délit au sens du droit civil, à la commission d'un acte répréhensible fait volontairement dans le but de causer un dommage. L'acte délictuel ne peut plus alors être considéré comme impliqué par l'exercice du métier ou de la profession. Il a été commis à l'occasion de l'exercice, mais en est complètement étranger. Il n'y a aucun moyen alors de prétendre que, dans ce cas, le paiement d'une condamnation en dommage satisfait à l'exigence de l'alinéa 18(1)a) de la Loi.

[Le soulignement est de moi.]

[11] Revenant aux faits de l'espèce, il appert que c'est uniquement sur le jugement de condamnation que l'appelant, qui avait le fardeau de prouver son droit à déductibilité, appuie sa prétention que la dépense était rattachée à sa profession. Or, il paraît clair, à la lecture de ce jugement de condamnation, que l'appelant a été tenu responsable pour avoir été partie à des représentations fausses et frauduleuses qui avaient été cause de dommage. Le passage récapitulatif suivant du jugement est sans équivoque à cet égard:

Pour toutes ces raisons la Cour conclut que les demandeurs n'auraient jamais signé l'offre pièce P-1 et n'auraient jamais complété la transaction le 7 décembre 1977 sans les représentations fausses et frauduleuses, affirmatives, implicites, et par voie de silence, de la part de la défenderesse Gestion (par le truchement de son président, le défendeur Lemaire) et du défendeur Poulin, notamment en ce qui concerne la solvabilité du propriétaire de l'immeuble André Gosselin, les revenus de l'immeuble, les dépenses, le nombre d'appartements vacants, etc. Les demandeurs ont donc le droit de demander une compensation pleine et entière en dommages-intérêts pour leur perte. [...]

[12] Il s'agit donc, en l'espèce, d'un paiement en satisfaction d'un jugement de condamnation en raison d'un délit, d'un fait illicite intentionnel, d'un acte volontaire commis en vue de causer un dommage. Je suis d'avis, pour les motifs que j'ai tenté d'expliquer, qu'un tel paiement ne satisfait pas à la condition de l'alinéa 18(1)a) pour que l'intimé puisse le déduire de son revenu en tant que dépense rattachée à l'exercice par lui de la profession de courtier en immeuble parce qu'il ne correspond pas à un risque qu'il était tenu d'assumer pour exercer comme courtier en immeuble.

[12] Les actes de M. McNeill n'étaient pas frauduleux. Il s'agit donc de savoir s'ils étaient répréhensibles. La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a conclu que M. McNeill avait, en droit et conformément aux termes utilisés dans son contrat, le devoir d'agir en toute bonne foi. Historiquement, ce devoir a été décrit en common law comme un devoir d'agir uberrimae fidei (avec la plus grande bonne foi). La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a conclu unanimement que M. McNeill avait manqué à ce devoir. Il s'agit donc de savoir si ce manquement représente une conduite répréhensible.

[13] Une conduite répréhensible consiste en un manquement au principe voulant que l'on se présente devant la cour “ les mains propres ” au sens dans lequel s'applique ce terme en equity. Un tel manquement doit avoir un rapport immédiat et nécessaire avec la demande de M. McNeill devant notre cour. Dans l'affaire Miller and Miller v. F. Mendel Holdings Limited and Mitchell, [1984] 2 W.W.R. 683, à la p. 696, le juge Wimmer, de la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan, a exprimé cela comme suit :

[TRADUCTION]

[...] en vertu du principe qui dit qu'il faut se présenter “ les mains propres ”, une mesure de redressement sera refusée en equity à une partie qui, relativement à sa demande, est elle-même blâmable pour fraude, fausse déclaration, illégalité ou inconvenance ayant causé à son adversaire un préjudice tel qu'il serait injuste que l'ordonnance demandée soit accordée. [...]

[14] Pour ce qui est de M. McNeill, on avait statué qu'il devait payer des dommages-intérêts pour la rupture du contrat en vertu duquel la Lions Gate a eu un revenu imposable au titre de services et qui a valu à M. McNeill le prix de la vente de son cabinet d'expertise comptable. En outre, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a assujetti M. McNeill au paiement des mêmes sommes parce qu'il n'avait pas agi avec la plus grande bonne foi.

[15] M. McNeill cherche maintenant à déduire ces dommages-intérêts de son revenu comme dépenses engagées en vue de tirer un revenu d'une entreprise. Toutefois, pour obtenir ce revenu (et peut-être ce capital), il a fait de fausses déclarations et a agi incorrectement envers les personnes avec qui il avait passé un contrat et, s'il a déclaré les fonds qu'il avait reçus conformément à ses activités, il a également fait de fausses déclarations et agi incorrectement envers Revenu Canada. Pour paraphraser le paragraphe 10 de l'arrêt du juge Marceau, on a ordonné à M. McNeill de payer des dommages-intérêts au cabinet Roe, McNeill & Company parce qu'il avait commis des actes répréhensibles délibérément en vue de causer un préjudice à ce cabinet, c'est-à-dire en ne lui transférant pas ce pour quoi il avait été payé par ce cabinet. Telle a été la conclusion de deux tribunaux de la Colombie-Britannique ayant adjugé les dommages-intérêts à l'encontre de M. McNeill, soit des sommes qu'il cherche maintenant à déduire. Les actes en question étaient étrangers à la direction d'un cabinet d'expertise comptable. Ils se rapportaient plutôt à la rupture d'un contrat visant le transfert du cabinet d'expertise comptable de M. McNeill.

[16] Pour ces motifs, l'appel est rejeté. L'intimée se voit accorder des dépens entre parties.

Signé à Kamloops (Colombie-Britannique) ce 28e jour d'octobre 1998.

“ D. W. Beaubier ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 12e jour de juillet 1999.

Mario Lagacé, réviseur

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