Date: 19991216
Dossier: 97-1391-IT-G
ENTRE :
CHRISTOPHER DeGEER,
appelant,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
Motifs du jugement
Le juge Bell, C.C.I.
GÉNÉRALITÉS
[1] Sauf indication contraire, les dispositions législatives citées sont des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”).
POINTS EN LITIGE
[2] En l'espèce, il s'agit de savoir :
1) si l'appelant a subi dans son année d'imposition 1992 une perte en capital de 800 000 $ représentant une perte en capital déductible de 600 000 $ pouvant être reportée prospectivement sur ses années d'imposition 1993 et 1994 en diminution de gains en capital réalisés ces années-là;
2) si le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a à bon droit imposé des pénalités à l'appelant en application du paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d'imposition 1993 et 1994 de ce dernier.
[3] Bien qu'ayant déposé un avis d'appel pour ses années d'imposition 1992, 1993 et 1994, l'appelant semble avoir déposé des avis d'opposition seulement pour 1993 et 1994[1]. À l'audience, il n'a pas commenté les allégations de la réponse de l'intimée à l'avis d'appel affirmant qu'il ne contestait pas le montant de l'impôt, des intérêts ou de la pénalité fixé dans la nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1992 et qu'aucun avis de détermination d'une perte pour cette année-là n'avait été délivré. Cet acte de procédure semble indiquer à la fois que de l'impôt a été fixé pour 1992 et qu'aucun impôt n'a été fixé. Évidemment, tel ne peut être le cas. Les documents déposés auprès de la Cour n'aident guère. Comme aucune preuve du dépôt d'un avis d'opposition pour 1992 n'a été présentée, le prétendu avis d'appel pour 1992 sera annulé.
FAITS
Achat d'une ferme par l'appelant à ses parents
[4] L'appelant est avocat et membre du Barreau du Haut-Canada depuis 1987. Une convention d'achat-vente en date du 15 avril 1989 stipule que l'appelant a acheté une terre agricole de 87 acres avec bâtiments (la “ ferme ”) à son beau-père et à sa mère, soit John Alan Watson et Audrey Eileen Watson, pour 1 300 000 $. L'appelant n'a présenté aucun témoignage d'expert relativement à la valeur de la ferme à la date de cet achat[2]. Ce document stipulait que l'acompte de 25 000 $ devait être versé comptant ou par chèque certifié et qu'un billet devait être fait pour le solde. L'appelant a témoigné que, sur le prix d'achat, 950 000 $ étaient attribuables au terrain et 350 000 $ à la maison située sur ce terrain. Il a dit que ses parents ont refusé le paiement comptant de 25 000 $ et qu'il leur a fait et livré un billet de 1 275 000 $. Il a témoigné que ce billet s'est perdu et que ses parents ont signé un affidavit en date du 15 juin 1990 où il était écrit ceci : [TRADUCTION] “ [le] billet précité ne se trouve plus entre les mains des soussignés ”. L'appelant a déclaré ceci :
[TRADUCTION]
Je leur ai fait signer un affidavit pour éviter que chacune de mes soeurs arrive avec un original.
Cet affidavit se lisait en partie comme suit :
[TRADUCTION]
Le billet de 1 275 000 $ CAN a été demandé en remplacement du premier billet, dont il tient lieu plutôt que de s'y ajouter.
[5] Une copie de ce billet de remplacement a été consignée en preuve. Il y était indiqué que l'appelant promettait de payer la somme susmentionnée :
[TRADUCTION]
[...] à John Alan Watson et Audrey Eileen Watson solidairement [...]
Ce billet renferme la disposition suivante :
[TRADUCTION]
À la mort de John Alan Watson ou d'Audrey Eileen Watson, la moitié de la somme susmentionnée devra être payée au conjoint survivant, s'il en est.
Quoi qu'il en soit, le 31 décembre 1999 ou avant cette date, la somme totale ou, s'il y a lieu, le solde de la somme totale devra être payé à John Alan Watson ou à Audrey Eileen Watson ou à leur succession ou, s'il y a lieu, à la succession du conjoint survivant susmentionné.
Ce billet ne renfermait aucune disposition en matière d'intérêts. Aucune garantie de paiement n'était donnée. Aucun paiement sur ce billet n'avait été effectué à l'époque de l'audience.
[6] Les parents de l'appelant ont continué à habiter sur la ferme depuis le transfert.
[7] Ce transfert n'a pas été enregistré au bureau d'enregistrement compétent, car l'appelant ne voulait pas payer de droits de cession immobilière. Les parents de l'appelant se sont prévalus de l'exonération cumulative des gains en capital à laquelle ils avaient droit en vertu de la Loi à l'égard d'un bien agricole admissible, de sorte qu'ils n'avaient aucun impôt sur le revenu à payer au titre de cette vente. L'appelant a admis au cours du contre-interrogatoire qu'il savait que ses parents avaient droit à une exonération cumulative des gains en capital de 500 000 $. Puis l'échange suivant a eu lieu au cours du contre-interrogatoire :
[TRADUCTION]
Q. De sorte que l'exonération dont pouvaient se prévaloir vos deux parents considérés ensemble représentait en gros la valeur que vous avez attribuée au bien agricole sans la maison, n'est-ce pas?
R. Oui, mais tout à fait par hasard.
[8] Après un contre-interrogatoire approfondi au sujet de la valeur du billet, l'échange suivant a eu lieu :
[TRADUCTION]
R. Mes parents m'ont accordé des modalités favorables au motif que j'étais leur fils, des modalités favorables sous la forme d'un billet, mais pas pour ce qui est du prix.
Q. Cela peut être une explication parfaitement satisfaisante relativement au motif. Toutefois, ne convenez-vous pas qu'il y a une différence, une grande différence du point de vue de la valeur, entre une somme de 1,3 million de dollars comptant et un billet de 1,3 million de dollars à rembourser dans un délai de dix ans, sans intérêts? N'en convenez-vous pas?
R. Oui.
[9] L'appelant a ensuite échangé des propos avec l'avocat de l'intimée sur la question de l'évaluation, échange qui s'est terminé par ce qui suit :
[TRADUCTION]
Q. Oui, de sorte que ce que vous avez donné à vos parents et ce que vous considérez comme étant la juste valeur intégrale de cette ferme, c'est moins de 1,3 million de dollars, n'est-ce pas?
R. Non.
[10] Au cours du contre-interrogatoire, l'appelant a dit que la ventilation du prix d'achat, soit 950 000 $ pour le terrain et 350 000 $ pour la maison, ne figurait pas dans la convention d'achat-vente.
[11] L'appelant et John Alan Watson avaient signé un contrat de société de personnes en date du 6 mai 1989 pour la conduite de l'entreprise agricole sur la ferme. L'appelant a, pour des années d'imposition ultérieures, déduit des pertes agricoles restreintes en se fondant sur l'existence d'une telle société. Cette société de personnes a été enregistrée auprès du ministère de la Consommation et du Commerce le 28 juin 1989.
[12] L'appelant et ses parents avaient signé une convention, apparemment conclue le 11 août 1990, stipulant que la ferme continuerait d'être enregistrée au nom de John Alan Watson et au nom d'Audrey Eileen Watson, qui détiendraient toutefois le bien-fonds pour le compte de l'appelant. Cette convention de personnes interposées précisait qu'aucune modification, aucune renonciation ou aucun supplément y relatif ne serait exécutoire s'il n'était pas établi par écrit et signé par toutes les parties. Cette convention n'a jamais été modifiée ni annulée.
[13] L'appelant a déclaré que la région de Bracebridge (Ontario), où était située la ferme, était un “ [TRADUCTION] lieu d'intense activité de mise en valeur ”. Il a déclaré que le transfert avait l'avantage d'immobiliser une certaine valeur et qu'il entendait mettre ce terrain en valeur en dix ans à peu près. Il a dit expressément ceci :
[TRADUCTION]
J'estimais que le terrain serait mis en valeur en dix ans, ce pourquoi le billet n'était exigible qu'à la fin de 1999. On se disait qu'il y aurait alors des rentrées d'argent grâce à la vente de lots.
[14] En décembre 1989, l'appelant avait écrit au ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation une lettre l'avisant qu'il était le nouveau propriétaire de la ferme. Par une lettre en date du 15 février 1990, il avait avisé le commissaire régional à l'évaluation qu'il était le propriétaire de la ferme et qu'il avait décliné l'offre de faire enregistrer l'acte, affirmant n'avoir aucune préoccupation relativement à l'enregistrement d'un acte frauduleux puisque le titre en common law était au nom de ses parents. Il indiquait en outre dans cette lettre qu'il n'était guère disposé à payer environ 20 000 $ de droits de cession immobilière pour se protéger contre un événement peu probable. Il avait écrit une lettre en date du 23 janvier 1991 à la Société canadienne des postes pour lui communiquer une adresse postale. Il a dit qu'il avait mis son nom sur la boîte aux lettres à la ferme.
[15] L'appelant a témoigné assez longuement sur l'idée qu'il avait eue de transférer la ferme à ses parents pour se mettre à l'abri de tout créancier, parce qu'il s'attendait à devenir associé d'un cabinet d'avocats de Toronto et ne voulait pas que ses actifs soient assujettis à la responsabilité solidaire des associés. Il a dit que les membres de ce cabinet d'avocats “ [TRADUCTION] étaient des avocats très fonceurs qui prenaient de gros risques dans leurs pratiques ”. Il a en outre parlé de discussions qu'il avait eues avec un associé principal de ce cabinet d'avocats sur la question de se mettre à l'abri de tout créancier. Il a dit qu'il avait contacté ses parents à ce sujet; il a déclaré ceci :
[TRADUCTION]
[...] Je me départissais de tous mes biens, et ils savaient que c'était parce qu'on m'avait demandé... euh... parce qu'on m'avait dit qu'on allait me demander d'être associé de Meighen & Demers; j'étais donc allé voir mes parents et leur avais dit que je me défaisais de tous mes biens, que je voulais leur donner la ferme et que les autres biens seraient donnés à Dina, ma femme.
Rétrocession de la ferme aux parents
[16] Un “ acte translatif de bien-fonds ”, daté du 15 août 1992 et signé par l'appelant comme auteur du transfert et par son épouse, Dina DeGeer (“ Dina ”), comme conjointe consentante, stipulait que la ferme était transférée aux parents de l'appelant comme tenants conjoints en considération de l'amour et de l'affection que l'appelant leur portait et moyennant la somme de 1 $. Tout comme dans le cas du document précédent, cet acte n'a pas été enregistré. Il n'y a eu aucune réduction de la somme de 1 300 000 $ que l'appelant devait à ses parents. L'appelant a témoigné que, peu après, son épouse était devenue très en colère parce que, s'il mourait, elle n'aurait pas droit à ce bien. Il a également témoigné qu'il était allé voir sa mère à la ferme et lui avait dit que sa relation conjugale se détériorait parce que sa femme était en colère en raison du transfert de la ferme à ses parents. Il a ensuite déclaré ce qui suit :
[TRADUCTION]
À un moment donné, cette semaine-là ou la semaine suivante, ma mère m'a téléphoné à Toronto et m'a dit que c'était un très beau geste, mais qu'elle en avait parlé à Al, mon beau-père, que ce n'était pas si important pour lui d'être propriétaire du bien-fonds et qu'elle serait heureuse de le rendre si cela devait faire le bonheur de Dina. J'étais bien soulagé d'entendre cette offre. Je lui ai répondu que je présenterais la proposition à Dina, ce que j'ai fait. Ce soir-là, j'ai simplement dit à Dina : “ Écoute, ma mère dit que, si ce que tu veux, c'est ravoir la ferme, Al et elle sont d'accord ”. Elle m'a simplement dit : “ Eh bien, qu'il en soit ainsi ”. J'ai donc ensuite rédigé un autre acte translatif de bien-fonds... et lorsque je suis retourné à la ferme, la fin de semaine après avoir dactylographié le document, mes parents l'ont signé... Cela s'est fait exactement cinq semaines après que j'eus disposé de ce bien en leur faveur. J'ai rapporté l'acte à la maison, je l'ai montré à ma femme, et elle était satisfaite.
[17] Une convention de modification de la société de personnes signée par John Alan Watson et l'appelant en date du 22 août 1992 stipulait que la ferme serait mise gratuitement à la disposition de la société de personnes.
[18] L'appelant a témoigné que, en avril 1991, son épouse et lui avaient acheté un terrain vague donnant sur un lac à Muskoka et qu'ils avaient entrepris la construction d'“ [TRADUCTION] une maison, comme chalet ”. Il a également déclaré qu'ils avaient acheté une maison à Etobicoke en septembre 1991.
[19] Au cours du contre-interrogatoire, l'appelant a reconnu qu'il n'avait pas encore exécuté de travaux de mise en valeur sur la ferme, même à la date du procès, et qu'il n'avait pas fait d'offres aux autorités municipales concernant le zonage, etc.
[20] Dans sa déclaration de revenu de 1992, l'appelant avait indiqué à l'égard du transfert de la ferme à ses parents une perte en capital de 800 000 $ représentant une perte en capital déductible de 600 000 $.
Transfert de la ferme par les parents à l'appelant
[21] Trente-cinq jours après le transfert de la ferme aux parents de l'appelant, un autre “ acte translatif de bien-fonds ”, portant la date du 19 septembre 1992, stipulait que les parents de l'appelant cédaient la ferme à l'appelant en considération de l'amour et de l'affection qu'ils lui portaient et moyennant la somme de 1 $. Ce document n'a pas été enregistré. Une convention de modification de la société de personnes, non datée, stipulait que le contrat de société se lirait tel qu'il avait été initialement signé.
[22] L'appelant a décrit sa tentative pour obtenir d'une agente immobilière une évaluation de la maison d'Etobicoke. Il a déclaré que l'agente avait été très mécontente d'apprendre qu'il ne mettait pas la maison en vente et qu'il cherchait simplement à obtenir une évaluation. Il n'a pas témoigné qu'il avait retenu les services d'un évaluateur qualifié ni qu'il avait cherché à le faire.
[23] L'appelant a témoigné que, en octobre 1992, on l'avait avisé qu'il ne serait pas nommé associé, de sorte qu'il n'avait pas continué à disposer de ses biens, ce qui n'était plus nécessaire, car il avait décidé d'exercer à titre individuel.
[24] L'appelant a dit que, après l'hiver 1992-1993 :
[TRADUCTION]
[...] Je crois que, pour ce qui est des préoccupations ou de la conduite de ma femme, ma mère m'avait contacté à un moment donné au cours de l'hiver, et j'avais... J'ai dit au cours d'interrogatoires préalables que cet échange ne relevait pas du secret professionnel et qu'il s'agissait plutôt simplement d'une mère interrogeant son fils ou d'une créancière interrogeant son débiteur, car la Couronne semblait très déterminée à savoir comment ce document[3]... avait vu le jour. Ma mère était venue me voir et m'avait demandé ce qui arriverait si je mourais, tout comme cela avait préoccupé ma femme. Elle m'avait demandé comment le billet leur serait remboursé si je mourais. Je lui avais répondu que ma succession leur serait redevable du montant du billet, et elle m'avait demandé comment on les paierait. Je lui avais expliqué que tout le patrimoine successoral serait liquidé et que les dettes seraient ainsi remboursées, dans la mesure du possible. Ma mère m'avait demandé qui s'occuperait de cela. Je lui avais répondu que ce serait mon exécuteur testamentaire. Elle m'avait demandé qui serait mon exécuteur testamentaire. Je lui avais répondu que ce serait probablement Dina.
[25] L'appelant avait continué à discuter de cette question avec sa mère et, au bout du compte, celle-ci avait demandé une charge additionnelle, d'où le document intitulé “ Charge / hypothèque immobilière ”, soit un document en date du mois de mai 1993 qui stipulait ceci :
[TRADUCTION]
La présente charge est accordée comme garantie additionnelle à l'égard d'un billet en date du 15 juin 1989, soit un billet fait par le constituant de la charge aux titulaires de la charge.
Les titulaires de la charge étaient les parents de l'appelant.
[26] Voici un échange qui a eu lieu au cours du contre-interrogatoire au sujet de la perte en capital :
[TRADUCTION]
Q. Mon opinion est que les deux opérations de 1992 ont été conçues pour cristalliser une perte entre vos mains, de manière que vous puissiez la déduire. C'est ce qui s'est passé, n'est-ce pas, monsieur DeGeer?
R. Je savais que le transfert donnerait lieu à la cristallisation d'une perte.
Gains en capital à l'égard desquels l'appelant a utilisé la perte en capital déductible au titre de la vente de la ferme aux parents
[27] Dina exerçait un emploi pour Trimark Financial Corporation (“ Trimark ”). Avant la première offre publique de vente d'actions de Trimark, Dina, en tant qu'employée de grade supérieur, avait eu le droit d'acheter certaines actions de la compagnie. Pour détenir les actions à parts égales avec l'appelant sans les enregistrer au nom de ce dernier, Dina avait signé la déclaration de fiducie no 1 précisant que 35 000 actions ordinaires de Trimark enregistrées à son nom étaient détenues en fiducie pour l'appelant. Ce document, non daté, indique qu'elle détenait 35 000 actions ordinaires pour l'appelant depuis le 31 mars 1992. Dina ne voulait pas que le nom de l'appelant figure dans le registre des actionnaires, parce qu'elle croyait que son employeur n'aurait pas aimé cela, selon les dires de l'appelant.
[28] Un autre document non daté, soit la déclaration de fiducie no 2, indique que Dina détient une option d'achat de 50 000 actions de Trimark pour l'appelant depuis le 9 avril 1992. Une modification de convention de fiducie en date du 21 avril 1993 stipulait que Dina, comme fiduciaire, accordait à l'appelant un droit de veto à l'égard de tout projet d'exercice, par elle, des droits qu'elle avait comme propriétaire en common law de cette option d'achat. Ce document est accompagné d'une déclaration apparemment faite sous serment devant l'appelant, soit une déclaration en date du 21 décembre 1992 dans laquelle Franco Balestra (frère de Dina) déclarait :
[TRADUCTION]
[...] ma soeur, Dina DeGeer, a déclaré devant moi qu'elle détenait certaines de ses actions de Trimark Financial Corporation en fiducie pour son époux, Chistopher DeGeer.
Elle m'a demandé de me souvenir de sa déclaration, dont je ne me rappelle toutefois plus la date exacte.
Je fais la présente déclaration pour témoigner de l'intention de ma soeur de constituer une fiducie, autant que je m'en souvienne actuellement, et pour aucune fin autre ou illégitime.
[29] Au cours du contre-interrogatoire, l'appelant a dit que le document de fiducie no 1 aurait été établi à l'hiver 1992. Il a dit qu'il n'y avait de date sur aucun des deux documents, puis l'échange suivant a eu lieu :
[TRADUCTION]
Q. Savez-vous si ces deux documents ont été établis à la même date ou à des dates différentes?
R. Non, je ne m'en souviens pas.
[30] Une “ convention de vente en fiducie ” apparemment conclue le 12 mai 1993 stipulait que l'appelant vendait à Dina 99 p. 100 du droit qu'il avait aux termes de la déclaration de fiducie no 2. La contrepartie était déterminée selon une formule complexe.
[31] L'appelant a admis que les actions de Trimark étaient détenues pour lui au 31 mars 1992. Il a en outre reconnu qu'il n'avait pris aucune mesure à l'égard de ces actions pour les mettre à l'abri de créanciers.
[32] En ce qui a trait à la convention de fiducie et au fait que le beau-frère de l'appelant se souvenait d'une déclaration de fiducie verbale, l'échange qui suit a eu lieu au cours du contre-interrogatoire :
[TRADUCTION]
Q. Vous avez utilisé le mot “ important ” dans votre témoignage, monsieur DeGeer, n'est-ce pas?
R. Je pense qu'il est important, quand on allègue qu'il existe une fiducie, de pouvoir le prouver.
Q. Monsieur DeGeer, il y a un point que je trouve intéressant, et vous pourriez peut-être dire à M. le juge pourquoi il en a été ainsi : vous êtes enclin à accompagner la plupart de vos opérations de documents, mais vous ne l'avez pas fait pour cette opération-là et avez quand même demandé à un témoin de s'en souvenir?
R. C'est que, à cette date–là – je crois l'avoir expliqué hier –, Dina était au courant de la juste valeur marchande des actions visées par la fiducie. Nous avons donc conclu l'opération à cette date. Toutefois, je n'avais pas... je crois que je n'avais pas fait établir les documents à cette date-là et qu'ils ont été établis plus tard. Il s'agit des documents non datés sur lesquels vous reveniez sans cesse hier.
[33] Le contre-interrogatoire a également établi que Dina avait disposé de l'option en faveur de l'appelant pour la même valeur que celle pour laquelle elle l'avait acquise. Un échange concernant le gain en capital a suivi :
[TRADUCTION]
Q. D'accord, mais elle n'a payé aucun impôt là-dessus, et vous vouliez déclencher la réalisation d'un gain entre vos mains, pour reprendre les termes que vous utilisiez hier. N'est-ce pas?
R. Déclencher?
Q. Oui.
R. Non.
Q. Eh bien, ce sont les termes que vous avez employés, monsieur DeGeer.
R. Déclencher la réalisation d'un gain?
Q. L'enregistrement montrera que ce sont exactement les termes que vous avez utilisés. Vous vouliez déclencher la réalisation d'un gain. Et la raison en était que vous pourriez vous servir des pertes en cause en l'espèce, n'est-ce pas, monsieur DeGeer?
R. Non, non, non. Ce n'est pas tout à fait exact. On déclenche une disposition de biens parce qu'on veut l'argent. Cette disposition peut ou non s'accompagner de gains. Dans ce cas-ci, je savais qu'il y avait des gains.
Q. C'est pourquoi j'ai trouvé intéressant que vous utilisiez ces termes hier, “ déclencher la réalisation du gain ”, car cela montre bien à mon avis, monsieur DeGeer, que vous reconnaissez, planifiez, étudiez et prévoyez les aspects fiscaux de vos opérations commerciales, n'est-ce pas?
R. C'est exact. J'essaie de tout prendre en considération.
Q. Et un des points que vous preniez en considération quand vous avez conclu cette opération, soit le 12 mai 1993, tenait au fait que vous espériez que le ministère du Revenu national admettrait une perte en capital relative à l'année précédente, n'est-ce pas? Vous aviez l'occasion d'utiliser cette perte en diminution du gain dont vous déclenchiez la réalisation le 12 mai 1993, n'est-ce pas?
R. Je savais que j'avais une perte en capital à cette date et que, si je comptabilisais des gains ou si je déclenchais la réalisation de gains, comme vous dites, les deux seraient liés dans ma déclaration de revenu, oui.
Q. Oui. Vous prévoyiez donc d'accéder par ce mécanisme à la valeur inhérente aux actions ou à la fiducie?
R. Oui.
Q. Et de ne pas payer d'impôt là-dessus, non plus que votre épouse, n'est-ce pas?
R. Pas par ce mécanisme, non. Ce mécanisme était le moyen par lequel Dina disposerait des actions.
[34] Au cours du contre-interrogatoire, il a ultérieurement été démontré que, lors de l'interrogatoire préalable, l'appelant n'avait nullement mentionné, comme raison pour transférer la ferme à ses parents, qu'il cherchait à se mettre à l'abri des créanciers.
[35] De plus, quand l'avocat de l'intimée lui a demandé si son épouse était présente durant les discussions au cours desquelles l'idée de rendre la ferme à ses parents avait été soulevée, il a répondu :
[TRADUCTION]
Je ne m'en souviens pas.
[36] Puis il a dit qu'il était possible qu'elle ait été présente, car elle était souvent dans le Nord avec lui.
[37] Au cours du contre-interrogatoire, l'appelant a également déclaré qu'il n'avait pas immédiatement fait rédiger un acte de rétrocession du bien-fonds en sa faveur. Puis l'échange suivant a eu lieu :
[TRADUCTION]
Q. Et si vous aviez agi et que vous eussiez obtenu une rétrocession de vos parents immédiatement après qu'ils eurent convenu de rétrocéder le bien, nous ne serions pas ici aujourd'hui, n'est-ce pas, monsieur DeGeer?
R. Je ne sais pas.
Q. Nous ne serions pas ici aujourd'hui, monsieur DeGeer, car vous savez bien que les règles en matière de perte apparente se seraient appliquées à vous et que la perte en capital que vous auriez souhaité déduire aurait été ramenée à zéro du fait de l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous le saviez, n'est-ce pas, monsieur DeGeer?
R. Je le sais maintenant.
Q. Vous le saviez à l'époque, n'est-ce pas, monsieur DeGeer?
R. Non.
Q. Voyons!
R. Non, je ne le savais pas.
Q. Donc, monsieur DeGeer, la rétrocession, trente-cinq jours après le transfert initial, soit le premier samedi suivant la période de trente jours prévue par les règles en matière de perte apparente, soit bien après que votre mère eut convenu de faire rétrocéder le bien, était une pure coïncidence, et vous n'étiez pas au courant et n'aviez aucune intention précise en ce qui a trait à la Loi de l'impôt sur le revenu? C'était une pure coïncidence; est-ce exact, monsieur DeGeer?
R. Tout d'abord, que je sache, ce n'était pas “ bien après ”. C'était probablement à la première occasion que j'avais eue de monter là-bas.
Q. Ce n'était pas quand vous...
R. C'était à la première occasion que j'avais eue de monter là-bas, sinon je m'en serais occupé immédiatement. Malheureusement, maître, c'est la question de la proximité par rapport à la période de trente jours prévue par la règle qui est la raison pour laquelle nous sommes ici, comme l'indiquent les observations que M. Vantil[4] m'a faites le 2 janvier 1997.
Q. En passant...
R. Vous autres, vous tiquez sur une telle proximité; et je suis désolé que ce soit ce premier samedi que je suis monté là-bas avec cet acte.
[38] Dans sa déclaration de revenu de 1993, l'appelant a indiqué des gains en capital imposables de 238 357,47 $. Cette somme représente 75 p. 100 du montant total de 317 809 $, soit 127 500 $ provenant de la vente du droit au capital de la fiducie susmentionnée et 190 309,97 $ de gains en capital provenant de la vente d'actions de Trimark. L'appelant a demandé un report prospectif de la perte en capital relative à son année d'imposition 1992, soit un report de 238 357,47 $, de manière à ramener à zéro son gain en capital imposable de 1993.
[39] Pour son année d'imposition 1994, l'appelant a indiqué des gains en capital imposables de 466 350,99 $. Cela représente 75 p. 100 du montant total de 621 801 $, soit 235 000 $ de gains en capital provenant de la vente du droit au capital de la fiducie, 291 699 $ de gains en capital provenant de la disposition de 10 000 actions de Trimark et 95 102,33 $ de gain en capital visé par un choix. L'appelant a réclamé une déduction pour gains en capital de 71 326,75 $ et un report prospectif de la perte en capital relative à son année d'imposition 1992, soit un report de 386 092,28 $.
[40] Le ministre a établi à l'égard de l'appelant de nouvelles cotisations refusant la perte en capital déductible qui avait été indiquée pour 1992, 1993 et 1994 et il a imposé des pénalités relativement à la perte ainsi indiquée.
ARGUMENTS DE L'APPELANT
[41] Les arguments que l'appelant a présentés étaient presque entièrement destinés à établir que ses opérations n'étaient pas assujetties à l'article 245, soit la règle générale anti-évitement. Comme j'ai déterminé que le présumé transfert de la ferme était nul et sans effet, l'article 245 n'a pas à être pris en considération.
[42] Quant à savoir s'il y a eu “ disposition ” de la ferme en faveur des parents de l'appelant en août 1992, ce dernier a déclaré que l'opération était une disposition immobilière valable du fait de la signature et de la livraison de la formule I prescrite par la Loi portant réforme de l'enregistrement immobilier (Ontario). Il a déclaré que l'acte portait cession du “ fief simple ”, ce qui, aux termes de la Loi sur les actes translatifs de propriété et le droit des biens (Ontario), vise notamment la cession de tous les intérêts de l'auteur du transfert dans le bien-fonds en cause. Il a déclaré en outre que l'enregistrement d'un acte n'était pas requis par le régime d'enregistrement des actes pour donner effet à un transfert. Il a fait référence à une loi modifiant la Loi sur les droits de cession immobilière[5]. Cette loi précisait qu'une aliénation d'un intérêt à titre bénéficiaire dans un bien-fonds incluait la vente ou cession, de quelque façon que ce soit, d'une partie d'un intérêt bénéficiaire dans un bien-fonds. Le paragraphe 2a(2) se lit comme suit :
[TRADUCTION]
En cas d'aliénation d'un intérêt à titre bénéficiaire dans un bien-fonds, des droits au taux normalement fixé aux termes de l'article 2 sont payables au trésorier le trentième jour suivant la date de l'aliénation comme si celle-ci était une cession d'un bien-fonds présentée à l'enregistrement.
ANALYSE ET CONCLUSION
[43] Manifestement, en faisant référence à ces formulaires et à ces dispositions législatives, l'appelant visait à convaincre la Cour que les transferts de 1992 avaient été effectués en conformité avec les exigences législatives et n'avaient pas à être enregistrés.
[44] En soi, la signature de formulaires de cession ne donne pas lieu à la disposition d'un bien. Le présumé transfert fait par l'appelant à ses parents le 15 août 1992 ne correspondait pas à la “ disposition ” d'un bien au sens de l'alinéa 40(1)b), qui décrit :
la perte d'un contribuable résultant, pour une année d'imposition, de la disposition d'un bien [...]
[45] La description de “ disposition de biens ” figurant à l'alinéa 54c) n'est pas une définition. Elle inclut certaines opérations particulières et n'est donc pas utile dans la situation qui nous occupe. De toute évidence, disposer d'un bien, c'est se départir, inconditionnellement, de la propriété bénéficiaire de ce bien. La preuve ne permet pas de conclure que l'appelant s'est inconditionnellement départi de la propriété bénéficiaire de la ferme en faveur de ses parents le 15 août 1992. Les faits me convainquent que l'appelant a élaboré le présumé transfert pour “ déclencher ” la réalisation d'une perte en capital. Cela a été suivi, trente-cinq jours plus tard, par un présumé transfert que l'appelant a fait à ses parents avec l'intention de demeurer propriétaire de la ferme, qu'il a acquise de nouveau après le délai de trente jours dans lequel une telle nouvelle acquisition, si elle avait été valable, aurait fait que la perte en capital de l'appelant aurait été réputée nulle en tant que “ perte apparente ”[6].
[46] La connaissance que l'appelant avait des dispositions et rouages de la Loi concernant les opérations qu'il a conclues avec ses parents et avec Dina était, malgré ses protestations, approfondie.
a) L'appelant a admis qu'il savait que chacun de ses parents pourrait se prévaloir d'une exonération de gains en capital de 500 000 $ à la disposition du bien agricole. Il a reconnu que l'acquisition de 1989, tout en profitant à ses parents et tout en donnant lieu à un gel successoral, lui donnait relativement à ce bien un coût pour fins d'impôt égal au prix de vente pour ses parents.
b) L'appelant savait au début de 1992 que son épouse avait des actions pouvant donner lieu à un gain en capital important et il avait établi des documents aux termes desquels elle détenait des actions et options à son nom à lui pour qu'il en dispose et pour qu'il utilise la présumée perte en capital provenant des opérations relatives à la ferme et son exonération de gains en capital afin de réduire ces gains aux fins de l'impôt.
c) L'appelant utilisait le sigle ECGE pour désigner l'exonération cumulative des gains en capital, ce qui est un exemple du fait qu'il connaît bien la Loi et qu'il en tient bien compte dans sa planification.
d) L'appelant savait parfaitement que, pour ce qui est du document de fiducie no 2, le prix de base pour Dina serait égal au produit de disposition qu'elle recevrait.
e) L'appelant a reconnu que le fait de “ déclencher ” la réalisation d'un gain en capital serait compensé par la présumée perte en capital.
f) L'appelant avait rempli un formulaire faisant état d'un choix en matière de transfert libre d'impôt, soit un formulaire qu'il a appelé spontanément dans son témoignage un T2059, ce qui montre à quel point il s'y connaît en fiscalité.
g) L'appelant savait que la conclusion d'un contrat de société avec son beau-père lui permettrait de déduire des pertes agricoles restreintes, ce qu'il avait d'ailleurs fait.
[47] L'appelant a décrit la période épouvantable qu'il avait vécue avec Dina après avoir transféré la ferme à ses parents, le 15 août 1992. Il a été dit que ces difficultés familiales avaient commencé très peu de temps après la signature du document de transfert; pourtant, ce document contenait un consentement au transfert signé par Dina. Il est à noter que Dina n'a pas été appelée à témoigner. Il est également à noter que, bien que la mère de l'appelant ait témoigné brièvement, le beau-père de l'appelant n'a pas été appelé à témoigner. Dans l'affaire O'Brien v. Her Majesty the Queen, [1988] 4 CTC 2772, le juge Christie disait, à la page 2775 :
En ce qui concerne le montant de 10 000 $, il n'y a encore là aucune preuve convaincante qui établisse quelle partie de ce montant, le cas échéant, devrait être admise. Aucun document n'a été produit à ce sujet, et l'épouse de l'appelant n'a pas été appelée à témoigner, une omission qui est restée sans explication. Si l'épouse de l'appelant avait témoigné, l'avocate de l'intimée aurait pu la contre-interroger en vue de déterminer précisément quels services elle avait rendus en qualité, a-t-on affirmé, d'entrepreneur autonome, en contrepartie du montant de 10 000 $. Dans l'affaire Enns v. The Minister of National Revenue, 87 DTC 208, il était question de l'omission d'appeler des témoins dont les témoignages, de l'avis du juge de première instance, le juge Sarchuk, auraient été d'une grande utilité à la Cour. À cet égard, le juge a dit ceci à la page 210 :
Dans l'ouvrage de Sopinka et Lederman, The Law of Evidence in Civil Cases, les auteurs font remarquer ce qui suit au sujet des conséquences de l'omission de faire comparaître un témoin, je cite :
[TRADUCTION]
Dans l'affaire Blatch v. Archer, (1774), 1 Cowp. 63, p. 65, Lord Mansfield a déclaré :
Il existe certainement un principe voulant que tous les faits soient appréciés à la lumière de la preuve que l'une des parties était en mesure de produire et que l'autre partie était en mesure de réfuter.
L'application de ce principe a conduit à établir une règle bien connue selon laquelle l'omission d'une partie ou d'un témoin de produire une preuve que la partie ou le témoin était en mesure de produire et qui aurait peut-être permis d'élucider les faits, fonde la Cour à déduire que la preuve de la partie ou du témoin en question aurait été défavorable à la partie à laquelle l'omission a été attribuée.
Dans le cas d'un demandeur auquel il incombe d'établir un point, l'effet de cette déduction peut être que la preuve produite sera insuffisante pour s'acquitter du fardeau de la preuve. (Levesque et al. c. Comeau et al. [1970] R.C.S. 1010, (1971), 16 D.L.R. (3e) 425.) (Souligné dans l'original.)
Voir aussi les jugements Markakis v. M.N.R., 86 DTC 1237 (C.C.I.), Sedelnick Estate v. M.N.R., 86 DTC 1563 (C.C.I.), et Christensen v. The Queen, 98 DTC 1893.
[48] On se demande évidemment pourquoi l'appelant n'a pas fait témoigner ces deux personnes, notamment Dina, aucune explication n'ayant été présentée à cet égard. Logiquement, on peut conclure que ces personnes ne désiraient pas témoigner ou que l'appelant ne voulait pas qu'elles soient soumises à un contre-interrogatoire.
[49] Vu les vastes connaissances fiscales dont l'appelant s'est servi pour toutes les opérations auxquelles il a participé et qu'il a orchestrées, sa déclaration portant qu'il n'était pas au courant de la règle des trente jours en matière de perte apparente n'est pas crédible. Voici d'autres facteurs qui soulignent les failles de sa demande de déduction de perte en capital :
1) L'appelant a témoigné que, lorsqu'il avait appris qu'il deviendrait associé dans un cabinet d'avocats de Toronto, son ambition était de se mettre à l'abri de tout créancier en cédant la ferme à ses parents et les autres biens à son épouse. Toutefois, au cours de l'interrogatoire préalable, quand on lui avait demandé pourquoi il avait cédé le bien-fonds à ses parents, il n'avait pas mentionné cette intention de se mettre à l'abri des créanciers. La preuve indique clairement que le bien de Muskoka, détenu en toute propriété depuis avril 1991, n'a pas été cédé à son épouse et que la résidence d'Etobicoke, détenue en toute propriété depuis septembre 1991, n'a pas non plus été transférée à son épouse. En outre, à l'époque où il semblait si préoccupé au sujet des créanciers, il était propriétaire bénéficiaire d'actions de Trimark et d'options s'y rapportant.
2) En mai 1993, l'appelant a accordé à ses parents une charge sur la ferme d'une valeur égale à la valeur du billet. Une charge de cette nature aurait pu être accordée sur le bien-fonds lors de l'achat initial de celui-ci par l'appelant à ses parents, de sorte que le bien-fonds n'aurait eu aucune valeur pour un créancier éventuel.
3) La mère de l'appelant lui avait dit qu'il pouvait faire ce qu'il voulait avec la ferme, et il en a effectivement fait ce qu'il voulait.
4) On n'a nullement réduit le montant du billet lors du présumé transfert de la ferme par l'appelant à ses parents, le 15 août 1992. Le billet est resté valable et inchangé.
5) Quoique l'appelant ait témoigné avec conviction qu'il croyait en l'opportunité de se mettre à l'abri de tout créancier, il n'avait pas mentionné cela au cours de l'interrogatoire préalable. De plus, il n'avait cédé aucun actif à Dina malgré le fait qu'une longue période s'était écoulée entre l'acquisition de ces biens et le moment où il avait appris qu'il ne deviendrait pas associé.
6) L'appelant n'a obtenu aucune évaluation de la ferme lors de l'achat initial à ses parents.
7) L'appelant n'a obtenu aucune évaluation lors du présumé transfert à ses parents, en août 1992.
8) Les deux montants déterminés à cet égard par l'appelant semblent convenir aux fins de l'appelant, mais aucune preuve n'a été présentée à la Cour au sujet de ces montants.
[50] Outre tous les facteurs précités, il y a la conduite de l'appelant durant l'audience. Le caractère opiniâtre de l'appelant s'est manifesté par une négation constante du fait que le billet à ses parents, remboursable sans intérêts dix ans après avoir été livré, avait en fait une valeur égale au montant du billet. Cette position manifestement absurde mine également sa crédibilité. Au cours du contre-interrogatoire, ses réponses à des questions qui le rendaient visiblement mal à l'aise sont devenues de plus en plus vagues et sarcastiques.
[51] Ces facteurs m'amènent à conclure que l'appelant a organisé les circonstances entourant le transfert du bien-fonds à ses parents de manière qu'il y ait une perte en capital permettant de réduire des gains en capital prévus. Le choix des dates des opérations liées à la présumée vente étaye cette conclusion. Je suis d'avis que l'appelant n'avait aucune intention de se départir inconditionnellement de l'intérêt bénéficiaire dans la ferme et qu'il n'y a donc eu aucune disposition de la ferme par l'appelant à ses parents le 15 août 1992. Par conséquent, il n'y a aucune perte en capital.
[52] Toute personne qui, sciemment, a fait un faux énoncé dans une déclaration exigée par la Loi est passible d'une pénalité en application du paragraphe 163(2), selon les calculs qui y sont prévus. L'appelant était tenu de produire une telle déclaration. Il a, sciemment, demandé à tort des déductions de perte en capital, de sorte qu'il est assujetti aux pénalités qui lui ont été imposées.
[53] Les appels interjetés par l'appelant à l'encontre des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi pour les années d'imposition 1993 et 1994 sont rejetés, et les pénalités sont confirmées en tant que pénalités ayant à bon droit été imposées.
[54] Le prétendu appel interjeté à l'encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi pour l'année d'imposition 1992 est annulé.
[55] Des dépens sont accordés à l'intimée.
Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de décembre 1999.
“ R. D. Bell ”
J.C.C.I.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
Traduction certifiée conforme ce 11e jour de septembre 2000.
Philippe Ducharme, réviseur
[1] Des avis d'opposition pour 1993 et 1994 figuraient dans le recueil de documents de l'appelant, mais aucun avis d'opposition pour 1992 n'est inclus dans ces documents.
[2] L'appelant a cherché à présenter lui-même un témoignage en matière d'évaluation, mais n'a pas été autorisé à le faire, car il n'est pas un expert dans ce domaine. Quoi qu'il en soit, les règles de procédure générale exigent le dépôt d'un rapport d'expert avant la tenue de l'audience.
[3] Il s'agit de la charge / hypothèque immobilière décrite au paragraphe suivant.
[4] Un vérificateur de Revenu Canada.
[5] Sanctionnée le 19 décembre 1989.
[6] Selon le sous-alinéa 40(2)g)(i), la perte subie par un contribuable et résultant de la disposition d'un bien, dans la mesure où elle est une perte apparente, est nulle. La définition de “ perte apparente ” à l'alinéa 54i) vise notamment la perte résultant de la disposition d'un bien lorsque le même bien a été acquis dans les trente jours suivant la disposition de ce bien.