Date: 19991230
Dossiers: 98-2080-IT-I; 98-2251-IT-I
ENTRE :
YVON BRUNETTE, JULIA BRUNETTE,
appelants,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée,
Motifs du jugement
La juge Lamarre, C.C.I.
[1] Il s'agit de deux appels entendus sur preuve commune selon la procédure informelle de cotisations établies par le ministre du Revenu national (“ Ministre ”) en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (“ Loi ”) pour l'année d'imposition 1994.
[2] Les faits sont admis par les parties et peuvent se résumer ainsi. Par avis de cotisation datés du 16 mars 1995, le Ministre a établi des cotisations initiales à l'égard des déclarations de revenus des appelants pour l'année d'imposition 1994. Le Ministre a par la suite établi des nouvelles cotisations en date du 16 mars 1998 à l'égard des déclarations de revenus des appelants pour l'année d'imposition 1994.
[3] Le seul point en litige consiste à déterminer si les nouvelles cotisations établies par le Ministre en date du 16 mars 1998 ont été établies dans les délais prescrits par la Loi.
[4] Le paragraphe 152(4) de la Loi donne le pouvoir de cotiser au Ministre en ces termes :
4152(4)3
(4) Cotisation et nouvelle cotisation. Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou donner avis par écrit qu'aucun impôt n'est payable pour l'année à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition. Pareille cotisation ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année que dans les cas suivants: [ces cas ne sont pas applicables en l'espèce.]
[5] “ La période normale de nouvelle cotisation ” est définie au paragraphe 152(3.1) de la Loi comme suit :
4152(3.1)3
(3.1) Période normale de nouvelle cotisation. Pour l'application des paragraphes (4), (4.01), (4.2), (4.3) et (5), la période normale de nouvelle cotisation applicable à un contribuable pour une année d'imposition s'étend sur les périodes suivantes :
a) quatre ans suivant soit le jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation en vertu de la présente partie le concernant pour l'année, soit, s'il est antérieur, le jour de mise à la poste d'une première notification portant qu'aucun impôt n'est payable par lui pour l'année, si, à la fin de l'année, le contribuable est une fiducie de fonds commun de placement ou une société autre qu'une société privée sous contrôle canadien;
b) trois ans suivant le premier en date de ces jours, dans les autres cas. [Je souligne.]
Historique : Le paragraphe 152(3.1) a été modifié par L.C. 1998, ch. 19, par. 181(3), applicable à compter du 28 avril 1989. Ce paragraphe se lisait antérieurement comme suit :
“ (3.1) Pour l'application des paragraphes (4), (4.2), (4.3) et (5), la période normale de nouvelle cotisation applicable à un contribuable pour une année d'imposition s'étend sur les périodes suivantes :
a) quatre ans suivant le jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation en vertu de la présente partie le concernant pour l'année ou d'une notification portant qu'aucun impôt n'est payable par lui pour l'année, si, à la fin de l'année, le contribuable est une fiducie de fonds commun de placement ou une société autre qu'une société privée sous contrôle canadien;
b) trois ans suivant ce jour, dans les autres cas. ” [Je souligne.]
[6] Tel que l'on peut le constater, un amendement a été apporté au paragraphe 152(3.1) en 1998, rétroactivement au 28 avril 1989, pour préciser que le délai de trois ou quatre ans, selon le cas, était calculé suivant le premier en date, soit du jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation, soit, s'il est antérieur, du jour de la mise à la poste d'une première notification portant qu'aucun impôt n'est payable. Les notes explicatives du mois de décembre 1997 accompagnant les modifications apportées à ce paragraphe 152(3.1) se lisent comme suit :
Notes explicatives : Le délai dont le ministre du Revenu national dispose, en règle générale, pour établir une nouvelle cotisation est communément appelé la “ période normale de nouvelle cotisation ” (voir la définition au paragraphe 152(3.1) de la Loi). Cette période est la période de trois ou quatre ans qui commence après le jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation pour une année d'imposition ou d'un avis portant qu'aucun impôt n'est payable pour l'année. Le paragraphe 152(3.1) est modifié de sorte que la définition de “ période normale de nouvelle cotisation ” s'applique dans le cadre du nouveau paragraphe 152(4.01). Cette disposition limite les questions relativement auxquelles le Ministre peut établir une nouvelle cotisation, dans le cas où une nouvelle cotisation à laquelle s'appliquent les alinéas 152(4)a) ou b) est établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable à un contribuable pour une année d'imposition. Une restriction semblable figurait auparavant aux paragraphes 152(4) et (5). Une autre modification apportée au paragraphe 152(3.1) a pour objet de préciser que la période normale de nouvelle cotisation commence à courir à partir du premier en date du jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation et du jour de mise à la poste d'un avis portant qu'aucun impôt n'est payable. Ces modifications s'appliquent après le 27 avril 1989. [Je souligne.]
[7] L'appelant soutient que selon cet amendement le délai pour établir une nouvelle cotisation commence à courir le jour où le premier avis de cotisation a été établi, soit le 16 mars 1995 dans le cas actuel. Il soutient également que le délai expire le dernier jour de la période de trois ans suivant la date de départ du délai, soit le 15 mars 1998.
[8] Je ne souscris pas à cet argument. Les dispositions relatives au calcul des délais, prévues dans la Loi d'interprétation, S.R., ch. I-23, art. 27, se lisent comme suit :
27. (1) Si le délai est exprimé en jours francs ou en un nombre minimal de jours entre deux événements, les jours où les événements surviennent ne comptent pas.
(2) Si le délai est exprimé en jours entre deux événements, sans qu'il soit précisé qu'il s'agit de jours francs, seul compte le jour où survient le second événement.
(3) Si le délai doit commencer ou se terminer un jour déterminé ou courir jusqu'à un jour déterminé, ce jour compte.
(4) Si le délai suit un jour déterminé, ce jour ne compte pas.
(5) Lorsqu'un acte doit être accompli dans un délai qui suit ou précède un jour déterminé, ce jour ne compte pas. S.R., ch. I-23, art. 25.
[9] L'appelant s'appuie sur le paragraphe 27(3) pour soutenir que le délai commence à courir le jour où l'avis de cotisation a été établi. Toutefois, à la lecture du paragraphe 152(3.1) de la Loi et des notes explicatives, je suis d'avis que ce sont les paragraphes 27(4) et (5) de la Loi d'interprétation qui doivent s'appliquer de sorte que le jour où l'avis de cotisation a été établi ne doit pas compter dans la computation du délai. En effet, il est clair à la lecture des notes explicatives que la période normale de nouvelle cotisation commence après le jour de la mise à la poste de l'avis de première cotisation ou d'un avis portant qu'aucun impôt n'est payable pour l'année. La dernière phrase de ces notes explicatives, et sur laquelle les appelants se fondent, disant “ qu'une autre modification apportée au paragraphe 152(3.1) a pour objet de préciser que la période normale de nouvelle cotisation commence à courir à partir du premier en date du jour de mise à la poste d'un avis de première cotisation et du jour de mise à la poste d'un avis portant qu'aucun impôt n'est payable ” sert à mon avis à clarifier quel est le jour effectif (entre le jour de la mise à la poste d'un avis de première cotisation et le jour de la mise à la poste d'un avis portant qu'aucun impôt n'est payable) qui doit servir de point de départ. Mais une fois ce point de départ clarifié, le texte de loi et les notes explicatives sont clairs pour dire que la période normale de nouvelle cotisation commence après ce jour de départ. Ces notes explicatives, même si elles ne lient pas la Cour, peuvent toutefois constituer un important facteur dans l'interprétation des lois (voir Canada c. Succession Ast, [1997] 3 C.F.).
[10] Ainsi, je suis d'avis que le délai pour calculer la période de nouvelle cotisation devait se calculer à compter du jour suivant l'avis de première cotisation (lequel était le 16 mars 1995), soit le 17 mars 1995. Selon le paragraphe 27(3) de la Loi d'interprétation, ce délai devrait expirer le 16 mars 1998 à minuit puisque le dernier jour du délai doit compter.
[11] Ainsi, les cotisations établies en date du 16 mars 1998 sont valides puisqu'elles ont été établies à l'intérieur de la période de nouvelle cotisation prévue au paragraphe 152(3.1) de la Loi.
[12] Pour ces raisons, les appels sont rejetés.
Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de décembre 1999.
“ Lucie Lamarre ”
J.C.C.I.