Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19990803

Dossier: 1999-272-CPP

ENTRE :

OIL & RUBBER SPECIALTIES INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

LOUISE RICHARD,

intervenante.

Motifs du jugement

Le juge suppléant MacLatchy, C.C.I.

[1] L'appel a été entendu à Kitchener (Ontario) le 24 juin 1999.

[2] L'appelante a porté en appel devant l'intimé la décision à l'effet que Louise Richard, la travailleuse, exerçait un emploi ouvrant droit à pension au sens du Régime de pensions du Canada (le “ Régime ”) alors qu'elle était au service de l'appelante, durant la période du 1er janvier 1991 au 28 août 1997, au motif qu'elle était employée aux termes d'un contrat de louage de services.

[3] L'intimé a confirmé que l'emploi ouvrait droit à pension pour la période en question parce qu'il existait une relation employeur-employé entre l'appelante et la travailleuse et que, par conséquent, la travailleuse était une employée aux termes d'un contrat de louage de services, mais il a informé l'appelante qu'il avait été décidé que l'emploi exercé par la travailleuse chez l'appelante n'était pas un emploi assurable au motif que l'appelante et la travailleuse avaient entre eux un lien de dépendance au sens de l'alinéa 3(2)c) de la Loi sur l'assurance-chômage et de l'alinéa 5(2)i) de la Loi sur l'assurance-emploi.

[4] L'appelante et la travailleuse ont convenu que l'appelante était une compagnie constituée en société sous le régime fédéral et enregistrée le 10 avril 1989, et que son siège social était situé au Nouveau-Brunswick. Cette compagnie était née de l'union de l'entreprise connue sous le nom de “ Custom Rubber Products ”, qui appartenait à Paul Richard (le conjoint de la travailleuse), et d'une entreprise connue sous le nom de “ Quantex Chemical ” qui appartenait à Talis Forstmanis. Custom Rubber Products fournissait des produits en caoutchouc et des services liés à ces derniers, y compris des transporteurs à courroies et le raccordement de courroies, alors que Quantex Chemical fabriquait un lubrifiant pour guide de scie à chaîne et pour chaîne vendu sous l'appellation commerciale “ Lumberol ”. Peu après la création de la société appelante, l'entreprise de Paul Richard a cessé ses activités et il est devenu chef du bureau responsable des opérations de la nouvelle entreprise commerciale au Nouveau-Brunswick. À titre de chef du bureau responsable des opérations de l'appelante au Nouveau-Brunswick, Paul Richard s'est entendu avec l'appelante pour qu'elle emploie la travailleuse à titre d'employée de bureau et qu'elle lui verse un salaire de base mensuel de 1 750 $. Durant la période allant du ler janvier 1991 au 14 décembre 1992, les tâches de la travailleuse consistaient à facturer les clients, à classer les comptes débiteurs et les comptes créditeurs, à saisir les données, à tenir les livres, à s'occuper de la paie, à faire les dépôts bancaires ainsi qu'à effectuer les tâches liées au service aux clients. À compter du 15 décembre 1992, la travailleuse a été promue gestionnaire afin de travailler en étroite collaboration avec son conjoint, Paul Richard, chef du bureau responsable des opérations de l'appelante au Nouveau-Brunswick, et d'effectuer les tâches de bureau décrites ci-dessus.

[5] À compter de 1994, la travailleuse ne s'occupait plus du classement des comptes créditeurs, de la paie ni de la saisie des données puisque ces tâches devaient être effectuées au bureau de l'appelante à Kitchener (Ontario). En juillet 1997, l'appelante a embauché un autre employé de bureau pour effectuer une grande partie des autres tâches de la travailleuse et a coupé son salaire de base mensuel de moitié. En août 1997, l'appelante a informé la travailleuse qu'elle n'avait plus besoin de ses services.

[6] L'appelante a affirmé que la travailleuse était une entrepreneuse indépendante qui avait été embauchée pour aider son conjoint, Paul Richard, à diriger les opérations de l'appelante au Nouveau-Brunswick et qu'elle n'était pas une employée.

[7] L'intimé a affirmé que, selon les hypothèses émises, la travailleuse était à l'emploi de l'appelant aux termes d'un contrat de louage de services et qu'elle était par conséquent une employée de l'appelante.

[8] La question en litige devant cette Cour consiste à déterminer si la travailleuse exerçait un emploi aux termes d'un contrat de louage de services ou d'un contrat d'entreprise (c'est-à-dire, si elle était une employée de l'appelante ou une entrepreneuse indépendante). Le droit a évolué lentement au cours des années jusqu'au jugement définitif de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553. Ce dernier jugement a déterminé la meilleure méthode à suivre pour évaluer toute la relation entre les parties en tenant compte de tous les faits pertinents. Quatre critères devaient servir à l'analyse des faits : i) le contrôle et la supervision – la travailleuse était-elle sous le contrôle du propriétaire de l'entreprise dont elle recevait les ordres et pouvait-elle être suspendue ou renvoyée?; ii) les chances de bénéfice et les risques de perte – la travailleuse pouvait-elle participer aux bénéfices de l'entreprise ou subir une perte en cas d'échec de cette dernière?; la travailleuse assumait-elle ses propres dépenses, payait-elle son propre équipement, etc.?; iii) la propriété des instruments de travail – quels outils fournissait-on à la travailleuse pour effectuer son travail, s'il en est?; iv) le critère d'organisation ou d'intégration – à qui appartenait l'entreprise, de quelle façon les parties voyaient-elles leur relation et quel était le véritable caractère de cette relation selon les faits présentés? Le critère global est concluant – toutes les preuves doivent être examinées et les critères appliqués afin de déterminer la totalité de la relation en question.

Le contrôle et la supervision

[9] Les preuves présentées devant cette Cour ont démontré de façon irréfutable que l'appelante exerçait du contrôle et de la supervision. L'appelante indiquait le travail à effectuer, comme en font foi les services rendus de fait et le fait que ces services ont été enlevés à la travailleuse selon les directives de l'appelante. Enfin, l'appelante a mis fin à l'emploi de la travailleuse quand elle l'a jugé à propos.

Les bénéfices et les pertes

[10] La travailleuse ne pouvait participer aux bénéfices de l'appelante. Qui plus est, elle ne pouvait être tenue responsable de toute perte subie par l'appelante ni en assumer une partie. Personne ne pouvait la tenir responsable d'aucune des dettes de l'appelante.

La propriété des instruments de travail

[11] La preuve présentée au procès a établi le fait que tous les instruments de travail requis ou utilisés par la travailleuse appartenaient à l'appelante. La travailleuse ne fournissait aucun outil dont elle se servait dans le cadre de son emploi.

Le critère d'organisation ou d'intégration

[12] L'entreprise appartenait uniquement à l'appelante. La travailleuse était une partie nécessaire et intégrante de l'entreprise et y remplissait une fonction nécessaire. La preuve fournie par la travailleuse appuyait sa conviction selon laquelle elle était une employée de l'appelante - en aucun temps elle n'avait cru le contraire.

[13] En considérant la véritable relation entre l'appelante et la travailleuse, telle qu'elle l'a démontré la preuve présentée devant le tribunal, il est évident pour cette Cour, et en effet c'est ce qu'elle conclut, que la relation entre les parties en était une d'employeur-employée, la travailleuse exerçant un emploi en vertu d'un contrat de louage de services et également un emploi ouvrant droit à pension.

[14] L'appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée.

Signé à Toronto (Ontario) ce 3e jour d'août 1999.

“ W.E. MacLatchy ”

J.S.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 16e jour d'octobre 2000.

Stephen Balogh, réviseur

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