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Date: 19990122

Dossier: 97-1150-IT-I

ENTRE :

NATHALIE PLANTE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 22 avril 1998 à Montréal (Québec) par l’honorable juge Alain Tardif

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Tardif, C.C.I.

[1] Il s'agit de l'appel d'une cotisation pour l'année d'imposition 1993. Le litige est relatif à un don de charité fait au Sanctuaire Notre-Dame-de-Lourdes en retour de quoi un reçu au montant de 3 400 $ fut émis.

[2] Propriétaire, depuis l'automne 1986, d'un tableau du peintre Albert Rousseau, l'appelante l'aurait payé 1 800 $. La façon dont il a été payé est demeurée assez confuse et ambiguë.

[3] En 1993, l'appelante voulait investir dans un RÉER. Sa capacité de payer ne le lui permettant pas, elle aurait alors projeté de vendre le tableau précédemment décrit dans le but de réaliser son projet d'acquisition d'un RÉER.

[4] À la suite de démarches auprès de diverses galeries, dont il a été impossible de connaître les noms, l'appelante aurait réalisé qu'il y avait peu ou pas d'intérêt et, par voie de conséquence, aucune chance d'obtenir un juste prix pour son tableau.

[5] À la même période, devant les difficultés du marché et sur les conseils d'un certain Tremblay, elle a modifié son projet de vente du tableau et décidé de le donner en contrepartie d'un reçu lui permettant d'obtenir le bénéfice fiscal recherché.

[6] Le bénéficiaire ou donataire du tableau, Sanctuaire Notre-Dame-de-Lourdes, a été choisi par le Tremblay en question; l'appelante voulait originalement faire le don de son tableau à l'avantage d'une organisation oeuvrant pour la cause des femmes victimes de violence. Elle a indiqué avoir suivi les recommandations de Tremblay et ce, bien qu'elle dut renoncer à son projet premier.

[7] La donation fut récompensée par l'émission d'un reçu au montant de 3 400 $ émis par le Sanctuaire Notre-Dame-de-Lourdes. Il semble que la valeur ait été établie à partir du guide Québécois Vallée. L'évaluation préparée par la maison connue sous le nom Services d'Art, laquelle était liée à la Galerie dirigée par Tremblay, a fixé à 3 400 $ la valeur du tableau. Personne n'a témoigné pour expliquer et soutenir l'évaluation réclamée.

[8] Je ne crois pas que le Guide Vallée soit un outil-référence valable et surtout suffisant pour déterminer la valeur réelle d'un tableau. Les évaluations qui y sont indiquées sont souvent dictées et décrites par le peintre lui-même; ces derniers ont donc un intérêt à ce que les cotes y soient le plus élevées possibles. Je ne soutiens pas pour autant que le Guide Vallée fournisse des estimations tout à fait et toujours surévaluées ou arbitraires.

[9] Il est, quant à moi, essentiellement l'expression d'une opinion intéressée pouvant s'avérer une indication ou référence utile pour des fins essentiellement commerciales ou spéculatives. Il n'est pas un guide suffisant pour l'établissement de la juste valeur marchande.

[10] Une évaluation constituée essentiellement d'une référence à ce guide Vallée ne constitue pas une évaluation préparée suivant les règles de l'art et conséquemment, n'a aucune force probante quant à la valeur réelle d'un tableau.

[11] En l'espèce, l'appelante a soumis que le tableau avait une valeur de 3 400 $. Pour soutenir la plus-value de son tableau payé 1 800 $ quelques années auparavant et le bien-fondé de l'évaluation, elle a indiqué qu'un tableau prenait généralement de la valeur avec les années et, d'une façon particulière, après la mort du peintre.

[12] Elle a produit un document indiquant que la valeur du tableau était de 3 400 $. Le document décrit ne mentionne pas le nom de l'évaluateur.

[13] Ni l'évaluateur, ni aucun expert ne sont venus soutenir l’évaluation réclamée par l'appelante. Le document décrit comme étant l'évaluation portait également la mention écrite à la main “Reçu avec un numéro 3271 aussi manuscrit” le tout daté du 22 décembre 1993. Je crois important de reproduire ce document qui constitue un élément fondamental au présent litige (Pièce I-11).

Le 22 décembre 1993

ÉVALUATION POUR DON DE CHARITÉ

ÉVALUÉ POUR : Madame Nathalie Plante

705 36e Avenue #101

Lachine (Québec)

H8T 3L8

ARTISTE : Albert Rousseau

MÉDIUM : Huile sur toile

TITRE : "Vert"

DIMENSION : 12 x 16 PRIX : 3 400 $

ÉVALUATION À LA VALEUR LISTÉE DE : 3 400 $

L'évaluation ci-dessus est donnée au meilleur de ma connaissance et je n'assume aucune responsabilité envers toute action qui pourrait être prise sur le fondement de cette même évaluation.

[14] L'évaluation fut suivie d'une facture au montant de 170 $ (Pièce 8) sur laquelle n'apparaît aucune signature; la facture indique cependant les coordonnées et la vocation de la maison ayant préparé l'évaluation et fourni le reçu du même montant soit 3 400 $.

[15] De son côté, l'intimée a fait plusieurs démarches pour connaître la valeur véritable du tableau ayant fait l'objet de la donation. L'enquête du ministère n'a cependant pas permis de découvrir le montant obtenu lors de la vente à l'encan ultérieure à la donation.

[16] En effet, l'intimée a identifié plusieurs tableaux ayant fait l'objet de donations et vendus lors d'encans à des prix correspondant à une petite fraction des valeurs indiquées sur les reçus émis pour fins de déduction fiscale.

[17] Chose certaine, les données consignées par l'intimée relatives au prix payé pour les toiles vendues, dont certaines étaient l'oeuvre du même peintre Albert Rousseau, ont permis de conclure de manière non-équivoque que le tableau, propriété de l'appelante, avait été, de toute évidence, surévalué; sa valeur se situait probablement quelque part entre 600 $ et 1 200 $. Cette conclusion découle de comparaisons pertinentes, valables et surtout raisonnables.

[18] À la lumière de la preuve incomplète et déficiente, dont la responsabilité incombait à l'appelante, j'établis la valeur à partir des seuls éléments de la preuve indirecte soumise par l'intimée qui contredisent les prétentions de l'appelante quant à la valeur du tableau. J'arbitre donc la valeur du tableau au centre du présent litige à 900 $.

[19] Bien que cette évaluation soit arbitraire, elle est néanmoins la seule avenue possible puisque l'appelante n'a strictement rien soumis qui soit de nature à guider, conseiller ou orienter le tribunal quant à la valeur du tableau. Cette valeur de 900 $ est attribuée à partir des données comparables fournies par la preuve de l'intimée.

[20] Le législateur a prévu un mécanisme et surtout des paramètres précis en matière d'évaluation d'un tableau, justement pour éviter l'arbitraire ou l'exagération pouvant conduire à des abus.

[21] L'appelante a été imprudente en s'en remettant à quelqu'un qui avait manifestement un intérêt. Il n'offrait certainement pas la garantie d'objectivité requise en matière d'évaluation; il était en quelque sorte juge et partie de la transaction, d'autant plus qu'il était aussi l'émetteur du reçu utilisé pour fins fiscales.

[22] La preuve est à l'effet que l'appelante a cédé au Sanctuaire un tableau dont la valeur était de 900 $; cette cession rencontre-t-elle les exigences pour bénéficier des avantages fiscaux? L’évaluation du tableau cédé a-t-elle été déterminée par un expert compétent et qualifié?

[23] L'appelante n'a pas fait de preuve quant à la qualité de l'évaluateur; elle a simplement déposé le document préparé par Services d'Art (Pièce I-11) sur lequel n'apparaît aucune signature ni le nom de la personne ayant établi l'évaluation. La preuve a aussi démontré que l'évaluateur était directement associé au processus à l'origine de la cession, minant ainsi la qualité et l'objectivité de l'évaluation.

[24] Je conclus qu'il ne s'agissait aucunement d'une évaluation préparée par un expert. Il s'agissait essentiellement d'une appréciation intéressée n'ayant aucune valeur objective.

[25] Après avoir soutenu que le tableau avait été payé comptant, l'appelante et sa représentante ont révisé leur témoignage pour prétendre que le tableau avait été payé au moyen d'un chèque. Bien que la confusion ait été aussi présente au niveau de la date d'acquisition, je crois cependant que la prépondérance de la preuve est à l'effet que l'appelante était propriétaire du tableau et cela, depuis quelques années au moment de la donation. Quant aux contradictions, elles peuvent possiblement s'expliquer par la nervosité et les problèmes de santé de l'appelante.

[26] Certains faits utiles et pertinents à la solution du litige sont clairs et ne prêtent à aucune interprétation. Ils se résument comme suit :

- La donation d'un tableau d'Albert Rousseau, décrit comme étant une huile sur toile de dimension 12" x 16" portant le nom de VERS, au Sanctuaire Notre-Dame-de-Lourdes en retour de quoi un reçu au montant de 3 400 $ a été émis.

- La cession a été réalisée sur les conseils intéressés d'un certain Tremblay.

- Le tableau n'a pas fait l'objet d'une évaluation objective, valable et sérieuse respectant les règles de l'art pour en établir la valeur réelle.

[27] S'agissait-il d'un don véritable? L'honorable juge Pierre Dussault de cette Cour a déjà traité de la question d'un don dans les termes suivants :

L'intention libérale ou animus donandi a traditionnellement été reconnu, tant par la jurisprudence que par la doctrine, comme l'un des éléments essentiels pour qu'il y ait une véritable donation.

[28] Pour pouvoir bénéficier du crédit d'impôt pour don dans le calcul de son impôt, l'appelante devait aussi respecter plusieurs conditions prévues par la Loi.

[29] La première condition : que le transfert du tableau représente un “don” au sens des paragraphes 118.1(1) et (3) de la Loi. Cet article édicte :

(1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

total des dons” --- “total des dons”. S’agissant du total des dons d’un particulier pour une année d’imposition, total :

a) du moins élevé du total des dons de charité du particulier pour l’année et du cinquième du revenu du particulier pour l’année;

b) du total des dons à l’État du particulier pour l’année;

c) du total des dons de biens culturels du particulier pour l’année.

[...]

(3) Crédits d’impôt pour dons. Un particulier peut déduire dans le calcul de son impôt payable en vertu de la présente partie pour une année d’imposition un montant qui ne dépasse pas le montant calculé selon la formule suivante :

(A x B) + [C x (D - B)]

A représente le taux de base pour l’année;

B le moins élevé de 250 $ ou du total des dons du particulier pour l’année;

C le taux le plus élevé, mentionné au paragraphe 117(2), applicable au calcul de l’impôt qui pourrait être payable en vertu de la présente partie pour l’année;

D le total des dons du particulier pour l’année.

[30] Le ministre a établi la cotisation en tenant pour acquis que le transfert du tableau aux bénéficiaires ne constituait pas un don pour les fins de l’article 118.1 de la Loi. Comme la Loi ne définit pas cette expression, il faut s’en remettre au sens usuel.

[31] L'article 755 du Code Civil du Bas Canada donnait la définition suivante :

755 -- La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille à titre gratuit de la propriété d’une chose, en faveur du donataire dont l’acceptation est requise et rend le contrat parfait. Cette acceptation la rend irrévocable, sauf les cas prévus par la loi, ou une condition résolutoire valable.

[32] Aujourd'hui, le Code Civil du Québec à l'article 1806 définit la donation comme suit :

La donation est le contrat par lequel une personne, le donateur transfère la propriété d'un bien à titre gratuit à une autre personne le donataire, le transfert peut aussi porter sur un démembrement du droit de propriété ou sur tout autre droit dont on est titulaire. La donation peut être faite entre vifs ou à cause de mort.

[33] Ainsi pour qu'il y ait donation, il doit y avoir l'intention libérale; cette intention libérale s'exprime par la gratuité, par l'appauvrissement des donateurs en faveur du donataire.

[34] En l'espèce, l'intimée a soutenu que l'appelante avait posé un geste, exécuté un acte intéressé puisque le bénéfice fiscal constituait la seule motivation de son geste. Je ne crois pas que les faits soutiennent une telle conclusion puisque l'appelante possédait le tableau depuis plusieurs années. D'autre part, il était légitime pour cette dernière de croire que ledit tableau avait acquis une plus-value importante d'autant plus que le peintre était décédé, ce qui généralement a un impact positif sur la valeur des oeuvres.

[35] D'ailleurs, la jurisprudence à l'appui des prétentions de l'intimée m'apparaît plus ou moins pertinente puisque les contribuables concernés par les affaires citées étaient en quelque sorte complices d'un système dont un des buts était l'avantage fiscal.

[36] Dans le présent dossier, je suis d'avis que l'appelante a été foncièrement de bonne foi; elle a peut-être été imprudente mais certainement pas partie à un système. Elle a plutôt été victime d'un profiteur.

[37] À cet égard, je souscris en outre à l'appréciation de notre collègue l'honorable juge Pierre Archambault, qui dans l'affaire Gaétan Paradis et Sa Majesté la Reine, 96-905(IT)I et 95-2390 (IT)I, page 14, s'exprimait comme suit :

À mon sens, cet avantage fiscal ne doit pas être pris en compte pour déterminer si M. Paradis s’est appauvri.

S’il fallait en tenir compte, plusieurs dons pourraient ne pas être admissibles pour les fins du calcul du crédit d’impôt pour dons. Je ne crois pas que cette approche soit conforme à l’esprit de la Loi.

[38] L'honorable juge Archambault réfère à un passage extrait au jugement dans l'affaire Frieberg c. La Reine, (5 décembre 1991) A-65-89, [92 DTC 6031][1] où l'honorable juge Linden s'exprimait comme à la page 3 :

Par conséquent, un don est le transfert volontaire du bien d’un donateur à un donataire, en échange duquel le donateur ne reçoit pas d’avantage ni de contrepartie (voir le juge Heald dans La Reine c. Zandstra [1974] 2 C.F. 254, à la p. 261). L’avantage fiscal qui est conféré par un don n’est généralement pas considéré comme un “avantage” au sens où on l’entend dans cette définition car s’il en était ainsi, bien des donateurs seraient dans l’impossibilité de se prévaloir des déductions relatives aux dons de charité.

[39] Et de poursuivre le juge Archambault :

Le don ne constitue pas non plus un simulacre. Le Musée est devenu véritablement le propriétaire du tableau. De plus, M. Paradis n’a assujetti le don de ce tableau à aucune condition. Je ne crois pas que M. Paradis pourrait demander la rétrocession du tableau au Musée de Joliette parce qu’il n’a pas obtenu tous les avantages fiscaux qu’il avait escomptés. Il va de soi que s’il avait assujetti les dons à l’obtention d’avantages fiscaux, il en serait tout autrement.

Ici, je suis satisfait qu’à l’égard de chacun des dons pour lesquels il a réclamé un crédit d’impôt, M. Paradis désirait avantager les donataires en se privant de la valeur de ses tableaux. Les transferts de tableaux en faveur des donataires constituent des dons au sens de la Loi.

[40] Le reçu produit par l'appelante était-il conforme aux exigences de la Loi et lui donnait-il droit aux bénéfices de la Loi.

[41] Il s'agit là d'une question fort importante puisque le législateur a prévu que la déduction à la suite d'un don était assujettie à des conditions spécifiques

[42] Voici ce qu’édicte le paragraphe 118.1(2) de la Loi :

118.1(2) Aucun don ne peut être inclus dans le total des dons de charité, dans le total des dons à l’État ou dans le total des dons de biens culturels s’il n’est pas attesté par un reçu, contenant les renseignements prescrits, produit au ministre. [je souligne]

[43] L’article 3500 et les paragraphes 3501(1) et (1.1) du Règlement de l’impôt sur le revenu (Règlement) disposent ainsi :

3500. Dans la présente partie,

“autre bénéficiaire d’un don” s’entend d’une personne visée à l’un des sous-alinéas 110(1)a)(iii) à (vii) à l’alinéa 110(1)b) ou b.1) ou au sous-alinéa 110(2.2)a)(ii) de la Loi, à qui un contribuable fait un don;

.....

“reçu officiel” s’entend d’un reçu pour l’application de l’alinéa 110(1)a), b) ou b.1) ou du paragraphe 110(2.2) de la Loi, où figurent les renseignements prévus par l’article 3501 ou 3502.

.....

3501. (1) Tout reçu officiel délivré par une organisation enregistrée doit énoncer que ledit reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu et indiquer clairement, de façon qu’ils ne puissent être modifiés facilement, les détails suivants :

a) le nom et l’adresse au Canada de l’organisation ainsi qu’ils sont enregistrés auprès du Ministre;

b) le numéro d’enregistrement attribué par le Ministre à l’organisation;

c) le numéro de série du reçu;

d) le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré;

e) lorsque le don est un don en espèces, le jour ou l’année où le don a été reçu;

e.1) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces,

(i) le jour où le don a été reçu,

(ii) une brève description du bien, et

(iii) le nom et l’adresse de l’évaluateur du bien si une évaluation a été faite;

f) le jour où le reçu a été délivré, si ce jour diffère du jour visé à l’alinéa a) ou e.1);

g) le nom et l’adresse du donateur y compris, dans le cas d’un particulier, son prénom et son initiale;

h) le montant qui correspond

(i) au montant du don en espèces, ou

(ii) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces, à la juste valeur marchande du bien au moment où le don a été fait; et

i) la signature, ainsi qu’il est prévu au paragraphe (2) ou (3), d’un particulier compétent qui a été autorisé par l’organisation à accuser réception des dons.

.....

(1.1) Tout reçu officiel délivré par un autre bénéficiaire d’un don doit énoncer que ledit reçu est un reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu et indiquer clairement, de façon à ce qu’il ne puisse pas facilement être modifié,

a) le nom et l’adresse de l’autre bénéficiaire d’un don;

b) le numéro de série du reçu;

c) le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré;

d) lorsque le don est un don en espèces, le jour ou l’année où le don a été reçu;

e) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces,

(i) le jour où le don a été reçu,

(ii) une brève description du bien, et

(iii) le nom et l’adresse de l’évaluateur du bien si une évaluation a été faite;

f) le jour où le reçu a été délivré, si ce jour diffère du jour visé à l’alinéa d) ou e);

g) le nom et l’adresse du donateur, y compris, dans le cas d’un particulier, son prénom et son initial;

h) le montant qui correspond

(i) au montant du don en espèces, ou

(ii) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces, à la juste valeur marchande du bien au moment où le don a été fait; et

i) la signature, ainsi qu’il est prévu au paragraphe (2) ou (3.1) d’un particulier responsable qui a été autorisé par l’autre bénéficiaire d’un don à accuser réception des dons.

[je souligne]

[44] En l'espèce, il est manifeste que ni l'évaluation ni le reçu ne rencontrent les exigences très claires et explicites du règlement; bien plus, les manquements y sont importants et nombreux au point qu'il est absolument impossible de savoir qui a émis le reçu et qui en a fait l'évaluation.

[45] D'ailleurs le document (I-11) constitue, aux dires de l'appelante, l'évaluation mais aussi le reçu émis. La pièce I-11 n'indique pas le nom de l'évaluateur ni celui de l'émetteur du reçu. Le document n'est pas numéroté et ne fait aucunement mention du numéro d'enregistrement attribué par le Ministère. Ce sont là quelques-uns des manquements très sérieux qui justifient largement le rejet du document décrit comme reçu.

[46] Il ne s'agit pas là d'exigences futiles et sans importance; bien au contraire, ce sont là des renseignements tout à fait fondamentaux et absolument nécessaires pour permettre la vérification d'une part de la justesse de la valeur indiquée et d'autre part, de la réalité même du don.

[47] De telles exigences visent à éviter les abus de toute nature et constituent un minimum pour qualifier la qualité d'un don pouvant générer un crédit d'impôt à l'avantage du contribuable donateur.

[48] À défaut de rencontrer les exigences prévues quant au contenu des renseignements que doit contenir un reçu, il devra être écarté faisant ainsi perdre les bénéfices fiscaux à son détenteur. Conséquemment bien qu'un contribuable ait pu faire don d'un tableau, il ne pourra pas bénéficier du crédit potentiel si l'évaluation et le reçu émis à la suite du don ne sont pas conformes aux exigences de la Loi et de ses Règlements.

[49] En l'espèce, l'appelante n'a pas fait la preuve que le reçu rencontrait les exigences minimales prévues par l'article 3500 et les paragraphes 3501(1) et (1.1) du Règlement d'où elle ne peut avoir droit au crédit d'impôt à la suite de son don.

[50] Pour ce qui est de la pénalité, l'intimée a, à raison d'ailleurs, conclu que les faits mis en preuve par l'audition ne soutenaient pas l'imposition de la pénalité.

[51] Pour ces motifs, l'appel est accueilli en ce que l'appelante n'a pas droit au crédit d'impôt suite à son don, la documentation inhérente à la valeur et surtout à la qualité du reçu émis n'est pas conforme à la réglementation. La pénalité est cependant annulée puisque la preuve n'a pas démontré que l'appelante avait sciemment fait, participé, consenti ou acquiescé à un faux énoncé.

Signé à Ottawa, Canada, ce 22e jour de janvier 1999.

“ Alain Tardif ”

J.C.C.I.



[1][1]        Quoique dans un tout autre contexte, le juge Hugessen, dans l’affaire Loewen v. The Queen, 94 DTC 6265, a adopté une approche similaire. Il a décidé que pour déterminer si une débenture constituait une immobilisation ou un bien en inventaire, il fallait tenir compte du coût réel de ce bien et non du coût réputé pour fins fiscales. Mon collègue, le juge Dussault, dans Dutil c. La Reine, No de dossier 91-42(IT) s’est interrogé sur l’existence d’une donation lorsque “la seule et unique ” motivation du contribuable est manifestement celle de s’enrichir et non pas de s’appauvrir. Comme l’a reconnu l’avocate du ministre dans ses notes écrites, il s’agit d’un obiter. De plus, je considère la question réglée par la décision de la Cour d’appel fédéral dans Friedberg qui est postérieure à cette décision.

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