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Date: 20000925

Dossier: 2000-1953-GST-I

ENTRE :

EDWINA ARSENAULT,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bell, C.C.I.

GÉNÉRALITÉS :

[1] Le présent appel a été interjeté à l’encontre d’une décision du ministre en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (la “ Loi ”), concernant la taxe sur les produits et services (la “ TPS ”).

POINT EN LITIGE :

[2] La question est de savoir si, dans la détermination d’une exception aux “ fournitures exonérées ” d’un immeuble en application de la Loi[1], le ministre avait à bon droit interprété les mots suivants :

la parcelle a été subdivisée ou séparée en deux parties[2]

afin de tenir compte de parties d’une parcelle de fonds de terre (le “ boisé ”) subdivisée entre 1966 et 1978[3].

FAITS :

[3] John Angus Chisholm (“ M. Chisholm ”) a acquis le boisé en 1966. Au cours des douze années suivantes, il a vendu des lots de ce fonds de terre, le dernier lot ayant été subdivisé en 1978.

[4] M. Chisholm est décédé intestat le 4 juillet 1994, laissant 17 personnes qui avaient un droit sur sa succession. La Cour a conclu que le boisé ne pouvait être équitablement divisé et a ordonné qu’il soit vendu. L’appelante l’a acheté pour un montant de 60 000 $. L’administratrice de la succession de M. Chisholm, une certaine Mme Asselstine, a perçu 9 000 $ (taxe de vente harmonisée (“ TVH ”))[4] et a remis ce montant au receveur général du Canada.

[5] L’appelante a demandé à Revenu Canada de rendre une décision au sujet de cette opération. Dans cette décision, rendue le 17 décembre 1997, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) était d’avis que la vente était visée par une modification apportée en 1997 à l’alinéa 9(2)c) de la partie I de l’annexe V de la Loi. Cette disposition excluait de l’exemption des ventes non commerciales d’immeubles vacants le fonds de terre qui avait précédemment été subdivisé ou séparé. Pour parvenir à cette conclusion, le ministre a tenu compte de la subdivision des fonds de terre entre 1966 et 1978.

ARGUMENTS DE L’APPELANTE :

[6] L’avocat de l’appelante a soutenu que l’interprétation du ministre a entraîné une imposition rétroactive inopportune. L’avocat a également prétendu que le boisé avait directement été dévolu aux héritiers et que, par conséquent, il n’était pas visé par la modification[5]. Il a soutenu que la modification apportée à la Loi en 1990 n’exigeait pas la perception de la TPS par une personne qui ne se livrait pas au commerce de terrains. Il a affirmé que la modification de 1997 portant sur l’exception de l’exemption de la TPS relative à la subdivision constituait, telle qu’elle a été appliquée par le ministre, une application rétroactive du droit, qui ne pouvait être admise que si le législateur l’avait ordonnée en des termes clairs et non ambigus.

[7] L’avocat a mentionné l’affaire Gustavson Drilling (1964) Limited c. Canada (ministre du Revenu national), [1977] 1 R.C.S. 271, dans laquelle le juge Dickson a déclaré, à la page 279 :

[...] Selon la règle générale, les lois ne doivent pas être interprétées comme ayant une portée rétroactive à moins que le texte de la Loi ne le décrète expressément ou n'exige implicitement une telle interprétation. Une disposition modificatrice peut prévoir qu'elle est censée être entrée en vigueur à une date antérieure à son adoption, ou qu'elle porte uniquement sur les transactions conclues avant son adoption. Dans ces deux cas, elle a un effet rétroactif. [...]

[8] L’avocat a également renvoyé la Cour à l’ouvrage de Driedger, Construction of Statutes, à la page 513, où la rétroactivité est décrite de la manière suivante :

[TRADUCTION]

Une loi ou une disposition rétroactive en est une qui s’applique aux faits qui existaient déjà dans le passé au moment où la loi est entrée en vigueur. Elle modifie le droit applicable au comportement ou aux événements passés. Dans le fond, elle considère que le droit était différent de ce qu’il était réellement.

[9] Il a ensuite renvoyé la Cour à Côté, qui, dans son ouvrage intitulé L’interprétation des lois au Canada, déclare, aux pages 158 à 160 :

La Loi a un effet rétroactif lorsqu’elle prétend agir dans le passé (retro agere). Roubier définit la loi rétroactive comme celle qui “ prétend s’appliquer à des faits accomplis ” et la rétroactivité comme “ le report de l’application de la loi à une date antérieure à sa promulgation, ou, comme on l’a dit, une fiction de la préexistence de la loi ”.

Les tribunaux canadiens font parfois référence aux lois rétroactives sous le vocable de lois ex post facto, lois “ après le fait ”. Les définitions jurisprudentielles de la rétroactivité n’abondent pas [...]

On peut définir ainsi l’effet rétroactif : il y a effet rétroactif lorsqu’une loi nouvelle s’applique de façon à prescrire le régime juridique de faits entièrement accomplis avant son entrée en vigueur.

[10] L’avocat a ensuite affirmé que Côté établissait une distinction entre trois types de faits juridiques qui peuvent être touchés par la loi :

[TRADUCTION]

les faits “ momentanés ” ou “ éphémères ”, qui sont survenus entièrement à un moment distinct et repérable dans le passé, dont les conséquences juridiques sont déterminées à ce moment-là; et les faits juridiques “ continus ” ou “ successifs ”, qui ne sont pas entièrement survenus dans le passé, mais qui continuent de se produire au moment où la loi est adoptée ou modifiée. C’est lorsqu’une telle loi entend viser la première catégorie de faits “ momentanés ”, en leur attachant de nouvelles conséquences juridiques, qu’il est possible de dire qu’elle a un effet rétroactif.

[11] L’avocat a ensuite renvoyé la Cour à l’alinéa 9(2)c) de l’annexe V, partie I, de la Loi, qui est rédigé en partie comme suit :

(2) La fourniture par vente d’un immeuble, effectuée par un particulier ou une fiducie personnelle, à l’exclusion des fournitures suivantes :

[...]

c) la fourniture d’une partie de parcelle de fonds de terre, laquelle parcelle a été subdivisée ou séparée en parties par le particulier, la fiducie ou l’auteur de la fiducie, sauf si, selon le cas :

la parcelle a été subdivisée ou séparée en deux parties et n’est pas issue d’une subdivision effectuée par le particulier, la fiducie ou l’auteur ou n’a pas été séparée d’une autre parcelle de fonds de terre par l’un d’eux,

[...]

[12] L’avocat a soutenu que M. Chisholm avait, en 1970, subdivisé le boisé pour la deuxième fois. Il a déclaré que le processus de conversion du lot était distinct et définitif et ne constituait en aucune manière un fait continu. Il a affirmé que le fait n’avait alors aucune conséquence fiscale et que M. Chisholm était libre de subdiviser et de transférer le fonds de terre sans aucune obligation légale de percevoir de taxe auprès de l’acheteur. Il a ajouté que M. Chisholm avait effectué six autres transferts du boisé au cours des années suivantes, chacun étant distinct et définitif ou, selon les mots de Côté, “ éphémère ”, et aucun n’ayant de conséquence sur la taxe de vente. Il a ensuite mentionné le fait que le législateur avait modifié le droit environ vingt ans plus tard, ce qui a selon l’intimée occasionné un retour en arrière et modifié l’importance juridique de cette deuxième subdivision en transformant ce fait en l’événement qui a fait disparaître l’exonération à l’égard de la TVH.

[13] L’avocat a de nouveau fait référence à l’affaire Gustavson, dans laquelle le juge Dickson décrivait ce qui constituait un effet rétroactif. Le juge déclarait ce qui suit à la page 279 :

[...] modifie des droits acquis, [...] [s’immisce] dans le passé et [...] prétend [...] signifier qu’à une date antérieure, il faille considérer que le droit ou les droits des parties étaient ce qu’ils n’étaient pas alors.

[14] L’avocat a ensuite affirmé que l’interprétation du ministre – s’immiscer dans le passé – le faisait présumer qu’une subdivision ayant eu lieu avant l’entrée en vigueur de la TPS avait pour effet de soustraire une fourniture survenue en 1997 à l’exemption prévue à l’annexe V.

[15] Encore une fois, se référant à l’affaire Gustavson, où il était question d’une loi du Parlement ayant modifié les conséquences fiscales futures de certaines actions du passé, l’avocat a soutenu que la société Gustavson n’avait pas effectué de déductions relatives au forage et à l’exploration et avait ainsi pris le risque que le droit puisse être modifié, ce qui est arrivé.

[16] L’avocat a ensuite déclaré qu’un effet semblable s’était produit dans les affaires Venne c. Québec (Commission de la protection du territoire agricole), [1989] 1 R.C.S. 880, et P.G. (Qué.) c. Tribunal de l’expropriation, [1986] 1 R.C.S. 271. Il a affirmé que, dans l’affaire Venne, l’appelant avait conclu ce qui équivalait à un contrat de vente d’un fonds de terre, contrat aux termes duquel il n’obtenait le titre qu’à l’expiration du calendrier des paiements. Avant que ces paiements aient tous pu être effectués, la province a adopté une loi ayant pour but de protéger le territoire agricole, ayant ainsi une incidence sur les plans de l’appelant. Dans l’affaire P.G. (Qué.), une modification législative en matière d’expropriation imposant de nouvelles conditions applicables au désistement d’une procédure, et la province cherchait à se soustraire à ces conditions relativement à une expropriation entreprise avant l’entrée en vigueur de la modification. L’avocat a affirmé que, dans les deux affaires, la Cour avait décidé que la loi contestée n’était pas rétroactive. Dans l’affaire portant sur l’expropriation, la modification avait simplement un effet immédiat sur une instance en cours, et le fait que l’introduction de cette instance ait précédé la modification n’était pas pertinent. Dans l’affaire Venne, la Cour a également décidé que la nouvelle loi pouvait légitimement avoir un effet immédiat sur une situation en cours, par opposition à un fait accompli.

[17] L’avocat a conclu son analyse de ces affaires en déclarant que, dans chacune d’elles, la loi touchait des situations de fait qui étaient en instance, et qu’il ne s’agissait pas d’un fait entièrement survenu. Il a soutenu qu’il ne s’agissait donc pas de lois appartenant à la catégorie des lois qui, selon les mots du juge Dickson, “ modifie des droits acquis ” ou “ [s’immisce] dans le passé ”.

[18] L’avocat a ensuite présenté des arguments portant sur la nécessité pour le législateur de déclarer expressément qu’une loi est rétroactive. Il a renvoyé la Cour à l’affaire MacKenzie v. B.C., 1992 D.L.R. (4th) 532, dans laquelle le juge d’appel Wood a déclaré, à la page 537 :

[TRADUCTION]

[...] en l’absence de mots exprès au contraire ou d’une conséquence nécessaire et distincte découlant de l’interprétation de la loi dans son ensemble, une modification est présumée ne pas avoir un effet rétroactif. Il s’agit d’une présomption légale, et il revient à l’appelant [en l’espèce, l’appelant faisait valoir que la loi en cause était rétroactive] de démontrer qu’il est probable que le législateur ait souhaité que la modification ait un tel effet.

[19] L’avocat a ensuite fait référence à l’affaire Kent v. The King, [1924] R.C.S. 388, dans laquelle la Cour suprême du Canada a énoncé le principe de l’interprétation restrictive de la loi rétroactive de la manière suivante, à la page 397, sous la plume du juge Duff :

[TRADUCTION]

[...] lorsqu’une loi, sans conteste rétroactive, est exprimée en des termes qui permettent de douter de sa portée et que, selon une interprétation, elle impose pour le passé une nouvelle responsabilité, alors que, selon au moins une autre interprétation, tout aussi admissible, elle n’impose pas un tel fardeau, la dernière interprétation est celle qui doit prévaloir.

[20] L’avocat a ensuite soutenu que rien dans l’article en cause ne faisait référence à la période à laquelle la subdivision a eu lieu. Il a affirmé que la loi utilisait le verbe “ a été ”, mais que c’était indubitablement parce que la disposition introductive de l’alinéa c), en décrivant l’exemption, faisait référence à un fournisseur ayant “ subdivisé ou séparé ” le fonds de terre en parties et, en tout état de cause, qu’elle était conforme à une lecture qui ne tenait compte que des subdivisions qui avaient eu lieu depuis 1990. Il a déclaré que, si le législateur avait souhaité que des subdivisions antérieures à la TPS soient prises en considération, il l’aurait stipulé.

[21] Il a ensuite affirmé que la Loi modificative procédait expressément à des modifications rétroactives de l’article, mais seulement dans une certaine mesure. Le paragraphe 90(1) de cette Loi a fait entrer en vigueur la modification le 17 décembre 1990, sauf que :

b) l’alinéa 9(2)c) de la partie I de l’annexe V de la même loi [...] ne s’applique pas aux fournitures d’immeubles effectuées avant le 24 avril 1996.

[22] L’avocat a déclaré qu’en conséquence, les transactions immobilières effectuées de la date à laquelle la TPS était entrée en vigueur à celle où le législateur avait eu connaissance des intentions du gouvernement à cet égard n’étaient pas assujetties au nouveau régime pour ce qui est de la subdivision. Il a de plus prétendu que, à la lumière du fait que le législateur est allé jusqu’à stipuler un effet rétroactif à cet égard, l’omission d’aller plus loin et de prévoir un effet rétroactif en ce qui concerne les subdivisions antérieures à 1990 était importante.

[23] L’avocat a ensuite renvoyé la Cour à la décision rendue par les Services d’interprétation technique de Revenu Canada en réponse à la demande de l’appelante au sujet de la même chose, qui se lit en partie comme suit :

[TRADUCTION]

Les modifications apportées à l’article 9, partie I de l’annexe V de la Loi, s’appliquent aux fournitures effectuées après le 23 avril 1996. Aucune disposition de la Loi ne restreint l’application de cet article selon le moment où la subdivision ou la séparation est survenue. Selon le ministère, l’exclusion de l’exemption figurant à l’alinéa c) s’appliquera peu importe le moment où la subdivision ou la séparation est survenue. [Les caractères gras sont de l’avocat de l’appelante.]

[24] L’avocat a soutenu que cette approche comportait implicitement l’hypothèse selon laquelle, s’il voulait limiter l’effet rétroactif de la modification, le législateur aurait dû le faire expressément. Il a alors déclaré que cela était dans l’ensemble incorrect et que, si la loi visait à avoir un effet rétroactif, elle devait le mentionner expressément.

[25] L’avocat a ensuite fait référence au projet de loi C-70, consacré en grande partie à l’établissement de la nouvelle taxe de vente combinée (la “ TVH ”) dans les provinces de l’Atlantique. Il a déclaré qu’une déclaration brève mais révélatrice avait été formulée en comité par le secrétaire parlementaire, à l’intention du ministre. Il a affirmé que le député Barry Campbell avait, au cours d’une réunion du Comité des finances de la Chambre des communes, le 21 janvier 1997, fait une déclaration portant sur le contenu du projet de loi. En ce qui concerne la modification en litige, le député a déclaré ceci :

Cette loi résoudra plusieurs questions relatives à l’application de la taxe de vente à l’immobilier. Par exemple, l’exemption pour les biens immobiliers hérités sera élargie. Le projet de loi propose également de nouvelles règles pour l’autocotisation des taxes pour la construction de logements subventionnés. L’équité concurrentielle dans le secteur de l’immobilier sera favorisée en limitant la portée de l’exemption de la TPS pour les lotissements. [Les caractères gras sont de nous.]

[26] L’avocat a ensuite soutenu que la déclaration se rapportait de toute évidence au fait que, depuis l’introduction de la TPS, les personnes qui vendaient des immeubles et qui n’étaient pas visées par l’exemption parce qu’elles se livraient, par exemple, au commerce de fonds de terre, étaient désavantagées par rapport aux personnes qui ne se livraient pas à un tel commerce. Elles pouvaient subdiviser et vendre des biens immobiliers sans avoir à percevoir de taxes. Cet avantage concurrentiel, a-t-il dit, serait éliminé par la modification, qui restreindrait ces personnes à une seule subdivision (sauf celles effectuées en faveur des membres de la famille pour un usage personnel), après quoi les ventes supplémentaires entraîneraient le paiement de taxes.

[27] L’avocat a ensuite déclaré que, dans le but de parvenir à “ l’amélioration de l’équité concurrentielle ” souhaitée, il n’était pas nécessaire d’inclure les subdivisions antérieures à 1990 dans la modification de 1997. Cela se ferait par le dénombrement des subdivisions survenues après l’introduction de la TPS. Selon lui, l’inclusion des subdivisions antérieures à 1990 avait pour effet de transférer l’inéquité concurrentielle au vendeur “ non commercial ” en retirant la subdivision à laquelle il aurait autrement eu droit du fait d’une action entreprise avant l’imposition de toute taxe.

ARGUMENTS DE L’INTIMÉE :

[28] L’avocate de l’intimée, faisant référence à l’alinéa 9(2)c), a mis l’accent sur une vente effectuée par un particulier ou une fiducie personnelle. Elle a ensuite affirmé qu’une “ fiducie personnelle ” au sens du paragraphe 123(1) de la Loi visait notamment une fiducie testamentaire. La définition de cette expression, selon le paragraphe 123(1), correspond à la définition figurant au paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (“ LIR ”), qui renvoie à la définition du paragraphe 108(1) de la LIR. Ce paragraphe définit la fiducie testamentaire comme une fiducie ou une succession qui a commencé à exister au décès d’un particulier et par suite de ce décès. Elle a ensuite déclaré que, par conséquent, la “ fiducie personnelle ” visée au paragraphe 9(2) incluait la succession qui avait commencé à exister au décès de M. Chisholm. Elle a soutenu que, si le boisé était vendu par la succession du défunt, il faisait partie d’une plus grande parcelle de fonds de terre que le défunt avait subdivisée en deux parties ou plus. Elle a renvoyé la Cour à l’article 267 de la Loi, qui précise que :

[...] en cas de décès d’un particulier, la présente partie s’applique comme si la succession du particulier était le particulier et comme si celui-ci n’était pas décédé [...]

à l’exception des conditions relatives à la période de déclaration. Selon elle, si la succession avait vendu le boisé à l’appelante, c’était comme si le défunt avait vendu le boisé, la succession se trouvant dans la même situation que celle dans laquelle le défunt aurait été s’il avait vendu le boisé de son vivant.

[29] L’avocate a par la suite déclaré que le paragraphe 108(1) de la LIR, où figure une définition de “ fiducie testamentaire ”, devait être lu conjointement avec l’article 104 de la LIR. Ce dernier précise qu’une fiducie ou une succession visée par la LIR s’entend également du fiduciaire ou de l’exécuteur testamentaire, de l’administrateur successoral, de l’héritier ou de tous autres représentants légaux ayant la propriété ou le contrôle des biens de la fiducie. Elle a ajouté que, comme la “ fiducie personnelle ” comprenait une “ fiducie testamentaire ”, la “ fiducie personnelle ” mentionnée à l’alinéa 9(2)c) faisait référence à l’administrateur successoral ou aux héritiers. Puis elle a soutenu que, comme le défunt avait subdivisé le boisé en plus de deux parties de son vivant, la vente du boisé était assujettie à la TVH.

[30] L’avocate de l’intimée a ensuite fait mention de l’affaire Gustavson Drilling, soutenant que l’élément final de la série de faits pertinents ayant déclenché l’application du paragraphe 9(2) avait été la fourniture par vente du boisé.

ANALYSE ET CONCLUSION :

[31] L’avocat de l’appelante n’a pas souscrit à l’argument de l’intimée selon lequel l’article 104 de la LIR devait être lu conjointement avec la définition de “ fiducie testamentaire ” figurant à l’article 108. Le paragraphe 104(1) est ainsi rédigé :

Dans la présente loi, fiducie ou succession (appelées “ fiducie ” à la présente sous-section), s’entend également du fiduciaire ou de l’exécuteur testamentaire, de l’administrateur successoral, de l’héritier ou de tous autres représentants légaux ayant la propriété ou le contrôle des biens de la fiducie.

Il est clairement exprimé que cette définition s’applique à la Loi de l’impôt sur le revenu, et non à une mesure législative distincte, la Loi sur la taxe d’accise.

[32] Je souscris aux arguments de l’avocat de l’appelante[6]. Si la loi avait prévu inclure des subdivisions ou des séparations de fonds de terre avant l’introduction de la TPS, elle devrait manifestement le déclarer. Il est complètement illogique, sans une quelconque sanction législative d’une telle proposition, que des opérations antérieures à la TPS puissent être prises en considération pour la détermination de l’exception à des fournitures exonérées. Il est tout à fait bizarre d’envisager le prolongement d’une telle proposition de la manière suivante : supposons que sir John A. Macdonald ait subdivisé ou séparé un fonds de terre en 1864. Supposons de plus que sa succession ne soit pas encore réglée. Le spectre d’une disposition finale du fonds de terre dans cette succession entraînant l’imposition de la TPS exagère l’erreur, si ce n’est l’absurdité, de l’inclusion des opérations antérieures à la TPS pour l’application de l’alinéa 9(2)c).

[33] L’appel est accueilli.

[34] Dans l’avis d’appel, l’appelante a choisi la procédure informelle prévue aux articles 18.1 à 18.28 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt. Cela se rapporte à des questions visées par la Loi de l’impôt sur le revenu. Toutefois, l’intention de choisir la procédure informelle était claire. En conséquence, l’appelante sera réputée avoir effectué un choix en vertu de l’article 18.3001 de la première loi. L’article 9 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt, qui ne reflète pas encore l’article 18.3009 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt dans sa forme modifiée, prévoit l’adjudication des dépens. Bien que la question des coûts n’ait pas été abordée, je suppose, d’après les renseignements dont je dispose, que le montant de la TPS en litige était inférieur à 7 000 $ et que l’ensemble des fournitures, pour l’année d’imposition antérieure, était inférieur à 1 000 000 $. En conséquence, les dépens sont adjugés, et tout droit de dépôt payé sous le régime de l’alinéa 18.15(3)b) de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt doit être remboursé.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de septembre 2000.

“ R. D. Bell ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 28e jour de mars 2001.

Philippe Ducharme, réviseur



[1]               Article 9, annexe V, partie I.

[2]               Particulièrement le sous-alinéa 9(2)c)(i).

[3]               C’est-à-dire au cours de la période précédant l’entrée en vigueur de la TPS.

[4]               Une combinaison de la taxe provinciale et de la TPS.

[5]               Il n’est pas nécessaire de traiter de cet argument.

[6]               Voir la note en bas de page no 5 relative à un argument.

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