Date: 19991220
Dossier: 98-559-IT-G
ENTRE :
DOUGLAS W. DOHERTY,
appelant,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
Motifs du jugement
Le juge Bell, C.C.I.
QUESTION EN LITIGE
[1] Il s'agit de déterminer si, en sa qualité d'actionnaire, l'appelant a reçu de New World Marble Products Limited (la “ société ”) un avantage de 27 771 $ dans l'année d'imposition 1992.
FAITS
[2] L'appelant était l'actionnaire principal et le gérant de la société.
[3] Il a témoigné que la première activité de la société était la fabrication de viviers en fibre de verre. En 1998, d'après le témoin, la société était à la recherche de nouveaux produits à fabriquer et à vendre. Elle avait effectué des recherches sur les petites embarcations, dont une étude des prix de revient et une étude de marché.
[4] Le témoin a mentionné que, de 1989 à 1991, il avait été en contact avec un fournisseur de matières plastiques brutes et avait discuté du type de produits qui pourraient être fabriqués en collaboration avec ce fournisseur. Il a décrit les colonnes et les bordures de plastique que la compagnie fabriquait et qui entraient dans la construction d'immeubles. Il a témoigné également qu'il avait réalisé avec succès un projet relativement à un centre commercial et qu'il s'était rendu à Fredericton, où il avait fait du mesurage, avait eu des discussions et avait présenté une offre dans l'espoir d'obtenir un contrat de rénovation extérieure d'un centre commercial.
[5] Le témoin a mentionné qu'il avait commencé à s'intéresser à la fabrication de bateaux et que, avant de s'engager dans cette voie, il avait passé beaucoup de temps, au début de l'hiver 1991, à analyser les porte-skis en fibre de verre[1]. Il s'était rendu aux États-Unis pour examiner la disponibilité des coffres de skis, il avait fait des recherches sur les automobiles utilisées dans les stations de ski, etc. Il avait également visité la côte pour voir comment le prix des coques de bateau était établi. Il a déclaré qu'il y avait au Maine un site de reprise de possession où il avait vu un bateau pour lequel il avait présenté une offre. Il projetait de copier la coque puis de vendre le bateau. Il est revenu à la maison après avoir fait l'offre, mais, lorsque celle-ci a été acceptée, il est retourné aux États-Unis pour acheter le bateau. Il a indiqué que celui-ci avait été livré chez lui quelque huit semaines plus tard. Il a ensuite mentionné que la compagnie lui avait attribué une prime de 15 000 $, qui avait été incluse dans son feuillet T4 de 1992, et qu'il avait laissé ce montant d'argent dans le compte de la compagnie dans un but commercial quelconque.
[6] Au printemps, l'appelant a effectué des réparations au bateau, puis l'a essayé. Il a déclaré que la personne avec qui il avait établi le contact et qui devait l'aider à concevoir la coque de plastique était blessée et était incapable de travailler. Puis il a témoigné que l'idée du bateau avait été mise en veilleuse et que le bateau avait été retiré de l'eau. Le témoin a déclaré également qu'il avait placé le bateau dans un bassin commandité au nom de la compagnie et que, ainsi, il avait pu connaître d'autres propriétaires de bateau. Il a indiqué que plus de 200 heures avaient été consacrées au bateau depuis 1992. Il a dit avoir utilisé le bateau au début pour décider ce qu'il pouvait en faire. Il a précisé également que l'on pouvait vivre sur le bateau car il était pourvu de couchettes, de toilettes, de douches et d'autres installations.
[7] Le témoin a déclaré également que, pendant son séjour aux États-Unis, il avait considéré divers produits susceptibles d'être fabriqués, mais qu'il avait passé beaucoup de temps dans différentes boutiques de ski, où il avait examiné un grand nombre de porte-skis.
[8] Lors du contre-interrogatoire, le témoin a déclaré que le bateau figurait dans l'inventaire de la compagnie. Il a mentionné que le bateau avait été acheté à son nom, qu'il était assuré à son nom et que la compagnie ne payait pas les primes d'assurance.
[9] Lorsqu'on lui a demandé si le bateau avait permis à la société de tirer un revenu d'entreprise, il a répondu par l'affirmative, précisant que la décision de le placer dans un bassin avait été judicieuse sur le plan des relations publiques. Lorsqu'on lui a demandé s'il avait utilisé le bateau personnellement, il a déclaré que, 90 p. 100 du temps, il se familiarisait avec le bateau, il y prenait plaisir et en évaluait les avantages.
[10] Il a déclaré également, en contre-interrogatoire, que la société n'avait pas fabriqué de modèle parce qu'elle avait changé d'orientation. Il a déclaré qu'elle avait pris de l'expansion dans le domaine de la vente au détail. Il a indiqué également qu'il avait été déçu de ne pas obtenir d'importants contrats pour lesquels il avait fait des offres. Il a réitéré qu'il avait été attristé par la perte de l'associé potentiel qui aurait été en mesure de produire des coques en fibre de verre. Il a dit que le comptable de la société lui avait demandé une liste des matériaux en stock et qu'il lui avait remis une liste sur laquelle le bateau ne figurait pas. Il a déclaré qu'il avait perdu ses registres lorsqu'un ordinateur avait été volé lors d'une introduction par effraction dans les locaux de la société. Il a mentionné que les autres employés de la société n'utilisaient pas le bateau, sauf lorsqu'ils l'accompagnaient.
[11] Un certain Ron Duykers, vérificateur pour l'Agence des douanes et du revenu du Canada[2], a témoigné que le bateau avait coûté au total 27 771 $. Il avait fait parvenir à l'appelant une lettre dans laquelle il expliquait comment il était arrivé à ce chiffre : la valeur d'inventaire du bateau était de 23 361 $; le voyage aux États-Unis avait coûté 2 012 $ et les frais d'automobile de 2 398 $ que l'appelant avait cherchés à déduire avaient été ajoutés au coût du bateau. D'où le total de 27 771 $.
ANALYSE ET CONCLUSION
[12] J'ai eu l'impression, en écoutant le témoignage de l'appelant, que, à l'instar de son comptable, il était un peu dans le noir pour ce qui est de la propriété du bateau et des écritures comptables à faire et des mesures juridiques à prendre pour déterminer qui était le véritable propriétaire du bateau.
[13] Malheureusement, toute la preuve indique que l'appelant était personnellement propriétaire, et il n'y a pour ainsi dire aucun élément de preuve qui appuie une conclusion différente.
[14] Cependant, j'accepte le témoignage de l'appelant relativement aux dépenses faites pour aller à Fredericton ainsi qu'aux États-Unis en vue d'y faire une recherche sur les porte-skis et les coques de bateau aux fins des activités commerciales de la société. Je rejette la proposition de l'avocat de l'intimée selon laquelle l'appelant était allé aux États-Unis pour y faire du ski.
[15] Le paragraphe 15(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”) dit ceci :
Lorsque, au cours d'une année d'imposition, [...] un avantage a été accordé à un actionnaire par une corporation [...]
autrement que dans les circonstances énumérées au paragraphe, lesquelles ne s'appliquent pas dans la présente affaire :
le montant ou la valeur de celles-ci [...] est à inclure dans le calcul du revenu de l'actionnaire pour l'année.
[16] La société ayant fourni les fonds pour le bateau, dont l'enregistrement, les plaques d'immatriculation et l'assurance étaient au nom de l'appelant, ce dernier a reçu un avantage de la société et son appel est rejeté pour ce qui est du montant de 23 361 $. Cependant, j'accepte le témoignage de l'appelant concernant l'objet de ses déplacements et je conclus que les frais de déplacement de 4 410 $ ont été légitimement engagés aux fins des activités commerciales de la société. Ce montant ne sera pas inclus dans l'avantage conféré à l'appelant en application de la disposition citée précédemment.
Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 1999.
“ R. D. Bell ”
J.C.C.I.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
Traduction certifiée conforme ce 8e jour de septembre 2000.
Philippe Ducharme, réviseur