Date: 19990819
Dossier: 98-1809-IT-I
ENTRE :
RAOUL DUBORD,
appelant,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
Motifs du jugement
Le juge P.R. Dussault, C.C.I.
[1] Il s'agit d'un appel d'une cotisation pour l'année d'imposition 1996 de l'appelant. Par cette cotisation le ministre du Revenu national (le “ Ministre ”) a ajouté au revenu de l'appelant une somme de 54 590,00 $ à titre de revenu provenant d'un Régime enregistré d'épargne-retraite (“ RÉER ”).
[2] Aux fins d'établir cette cotisation, le Ministre a tenu pour acquis les faits énoncés aux alinéas a) à f) du paragraphe 4. de la Réponse à l'avis d'appel. Ces alinéas se lisent :
a) le 23 août 1996, l'appelant a contracté un emprunt de 98 000 $ auprès de la Caisse Populaire Desjardins Domaine Saint-Sulpice (ci-après, la “caisse”);
b) à l'encontre de l'emprunt, l'appelant a fait à l'égard de la caisse une mise en garantie d'épargne de 85 380,25 $;
c) le montant donné en garantie était une hypothèque mobilière sur des sommes accumulées dans un REER et était un certificat de dépôt de 85 380,25 $ portant le numéro 0016793;
d) à un moment donné dans l'année d'imposition en litige, la fiducie régie par le REER a permis l'utilisation à titre de garantie d'un bien de la fiducie;
e) conséquemment le ministre a considéré que la juste valeur marchande du bien utilisé à titre de garantie, au moment où il a commencé à être ainsi utilisé, à savoir 85 380,25 $ devait être incluse dans le calcul du revenu pour l'année de l'appelant;
f) l'appelant ayant déclaré un montant de 30 769,23 $, le ministre a ajouté à l'appelant un montant de 54 590 $ dans l'année d'imposition en litige à titre de revenu provenant d'un RÉER.
[3] L'appelant ne conteste pas les faits énoncés aux alinéas a) à d) mais soutient que le Ministre n'était pas fondé d'inclure le montant supplémentaire de 54 590,00 $ dans son revenu puisqu'un nouveau prêt a été contracté le 4 décembre 1996 dans le but de rembourser celui contracté le 23 août 1996 et que ce nouveau prêt a été consenti sans garantie.
[4] Jusqu'en août 1996, l'appelant bénéficiait d'une marge de crédit de 50 000,00 $ à la Caisse Populaire Desjardins Domaine St-Sulpice (la “ Caisse ”). Dans le but de rembourser une somme de 38 462,07 $ due sur cette marge de crédit et de rembourser et payer certaines sommes dues aux gouvernements provincial et fédéral, l'appelant emprunta le 23 août 1996 une somme de 98 000,00 $ en vertu d'un contrat de prêt d'argent à un taux d'intérêt annuel de 9 % (pièce A-1, document 1). Comme l'appelant empruntait une somme additionnelle de 48 000,00 $ par rapport à sa marge de crédit antérieure, la Caisse exigea la mise en garantie d'un dépôt à terme de 85 380,25 $ accumulé dans le RÉER de l'appelant. Celui-ci a également consenti une hypothèque mobilière sur ces sommes (pièces I-1 et I-2). Le RÉER de l'appelant était administré par la Fiducie Desjardins inc. (la “ Fiducie ”).
[5] En date du 4 décembre 1996, le solde dû sur le prêt était de 91 429,83 $. Le même jour l'appelant a signé un contrat de prêt d'argent à taux variable pour un montant correspondant au solde dû sur le prêt du 23 août 1996. Ce contrat a été traité par la Caisse comme étant une modification du prêt antérieur (pièce A-1, document 3). En date du 4 décembre 1996, le relevé de prêt n'indique pas le remboursement du prêt antérieur mais simplement le solde après un paiement d'une somme de 20 000,00 $ (pièce A-1, document 4). En réalité, cette somme provient d'un retrait par l'appelant d'un montant de 30 769,23 $ de son RÉER le même jour. L'impôt provincial retenu étant de 6 153,84 $ et l'impôt fédéral retenu de 4 615,38 $, le solde de 20 000,00 $ a servi à diminuer le solde du prêt.
[6] L'appelant soutient que l'entente qu'il avait avec la Caisse était que ce paiement de 20 000,00 $ sur les sommes accumulées dans son RÉER emportait que la Caisse n'exigerait pas de garantie à l'égard du nouveau prêt.
[7] De plus, l'appelant prétend que le prêt du 4 décembre 1996 est un nouveau prêt et que la garantie donnée à l'égard du prêt du 23 août 1996 constituée du dépôt de 85 380,25 $ dans son RÉER n'a pas été donnée à l'égard du nouveau prêt. Ainsi, seule la somme de 30 769,23 $ représentant le retrait de son RÉER en date du 4 décembre 1996 devrait être incluse dans son revenu.
[8] Je suis en désaccord avec l'appelant et j'estime qu'il n'a pas démontré par prépondérance des probabilités que le solde des sommes accumulées dans son RÉER après le retrait du 4 décembre 1996 n'a pas été donné en garantie du prêt contracté le même jour. À mon avis, les documents qu'il a lui-même soumis en preuve indiquent le contraire de ses prétentions.
[9] Dans une lettre qu'il écrivait à monsieur Guy Lussier, directeur général de la Caisse, en date du 1er mai 1997, l'appelant fait état de son entente avec la Caisse dans les termes suivants:
De plus, il était convenu avec la Caisse Populaire du Domaine St-Sulpice qu'au début décembre 1996 je retirerais $20,000.00 plus les redevances aux deux paliers gouvernementaux, de mon régime enregistré d'épargne-retraite afin d'appliquer cedit montant en remboursement sur le prêt : chose qui a été faite; et ceci dans le but de retirer la garantie pour ne par perdre l'enregistrement du REER.
Aujourd'hui mon REER n'est plus enregistré dû à une erreur d'un de vos adjoints. Par conséquent, je vous demande de replacer mon régime enregistré d'épargne-retraite de façon à ce qu'il soit toujours enregistré. A défaut d'acquiescer à ma demande, je tiendrai entièrement responsable la Caisse Populaire du Domaine St-Sulpice de tous les inconvénients que cela pourra me causer.[1]
[10] Dans la réponse qu'il faisait parvenir à l'appelant le 21 mai 1997, monsieur Guy Lussier fait notamment état de ce qui suit :
Il n'en reste pas moins qu'en début de décembre, je vous ai personnellement fait un rappel vous soulignant que le prêt additionnel de $ 48,000 devait être totalement remboursé afin de pouvoir libérer votre REER ce qui n'a été fait qu'en partie avec le $ 20,000 de vos REER.[2]
[11] Par ailleurs, dans le contrat de prêt d'argent à taux variable du 4 décembre 1996 (pièce A-1, document 3) le paragraphe 7. indique que :
L'emprunteur donne à la caisse, en reconnaissance ou en garantie de son obligation, l'objet ou le document suivant :
DAT folio #21483
[12] Il est difficile de conclure que le dépôt à terme indiqué au folio correspondant à celui de l'appelant n'a pas été donné en garantie. Les états de compte du RÉER de l'appelant émis par la Fiducie en date du 31 octobre 1997 et du 31 octobre 1998 confirment qu'il s'agit bien du solde du dépôt à terme accumulé dans le compte de l'appelant avec le même numéro de folio (pièce A-1, documents 13 et 14).
[13] Je signale également que le document de mise en garantie d'épargne qui réfère au certificat de dépôt donné en garantie lors du prêt du 23 août 1996 (pièce I-1) indique ce qui suit au paragraphe 1. in fine :
La caisse pourra retenir les sommes indiquées ci-dessus, ainsi que les intérêts provenant des certificats de dépôt le cas échéant, tant que la totalité des sommes dues en vertu du ou des contrats de crédit n'auront pas été entièrement remboursées et ...
[14] Enfin, les relevés T4RSP émis par la Fiducie pour l'année 1996 portent également à conclure que le solde des sommes accumulées par l'appelant dans son RÉER après le retrait du 4 décembre 1996 étaient toujours en garantie du prêt consenti par la Caisse en vertu du contrat du 23 août 1996 tel que modifié par celui du 4 décembre 1996 (pièce A-1, document 5).
[15] Compte tenu de l'ensemble de la preuve soumise, j'estime que le Ministre était justifié d'inclure la somme de 54 590,00 $ dans le revenu de l'appelant pour l'année d'imposition 1996 en application du paragraphe 146(10) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”). J'ajouterai simplement que dans la mesure où le prêt a été remboursé dans les années subséquentes, l'appelant peut se prévaloir de la déduction du paragraphe 146(7) de la Loi pour ces années.
[16] En conséquence de ce qui précède, l'appel est rejeté.
Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour d'août 1999.
“ P.R. Dussault ”
J.C.C.I.