Date: 19991004
Dossier: 98-327-UI
ENTRE :
ERIC HUTTON,
appelant,
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,
intimé.
Motifs du jugement
Le juge suppléant Cuddihy, C.C.I.
[1] L’appel en l’instance a été entendu à St-John's (Terre-Neuve) le 2 septembre 1999.
I- L’appel
[2] Il s’agit d’un appel de la décision aux termes de laquelle le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a déterminé le 23 février 1998 que l’emploi exercé par Eric Hutton (l’“ appelant ”) pour la Newfoundland Legal Aid Commission (la “ payeuse ”) du 30 juin au 23 juillet 1997 était un emploi assurable au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi (la “ Loi ”).
[3] Le ministre a également déterminé que le montant forfaitaire versé à l’appelant au moment de sa cessation d’emploi chez la payeuse le 23 juillet 1997 prenait valeur de “ rémunération assurable ”, mais qu’il n’y avait aucune heure d’emploi assurable aux termes du paragraphe 9.1 du Règlement sur l’assurance-emploi (le “ Règlement sur l’a.-e. ”).
II- Les faits
[4] Pour rendre sa décision, le ministre s’est appuyé sur les faits et les motifs exposés dans sa réponse à l’avis d’appel, au paragraphe 6 plus particulièrement, qui est ainsi libellé :
[TRADUCTION]
a) l’appelant a été employé par la payeuse du 30 juin au 23 juillet 1997, soit pendant à peu près 3 semaines et demie;
b) l’appelant devait travailler 40 heures par semaine pour un salaire annuel d’environ 32 000 $;
c) la somme de 8 775,20 $ remise à l’appelant au moment de sa cessation d’emploi tenait lieu de préavis;
d) le relevé d’emploi délivré à l’appelant par la payeuse indiquait le nombre d’heures travaillées par l’appelant au cours de sa période d’emploi conformément aux modalités de son contrat, soit un total de 135 heures;
e) la rémunération assurable indiquée sur le relevé d’emploi pour les semaines travaillées comprenait le salaire de base dont le total s’élevait à 2 430 $ ainsi que le paiement de 8 775,20 $;
f) la rémunération assurable de l’appelant comprend le salaire payé et le montant versé à la cessation d’emploi;
g) l’appelant n’a pas exercé un emploi assurable chez la payeuse après le 23 juillet 1997, car il n’a effectué aucun travail après cette date;
h) la rémunération assurable plus élevée n’influe pas sur le nombre d’heures travaillées par l’appelant au cours de sa période d’emploi chez la payeuse.
[5] L’appelant a admis les hypothèses énoncées aux alinéas a) à f). Il a nié celles qui sont formulées aux alinéas g) et h).
III- Le droit et analyse
[6] i) Définitions tirées de la Loi sur l’assurance-emploi
“ emploi ” Le fait d’employer ou l’état d’employé.
“ emploi assurable ” S’entend au sens de l’article 5.
L’alinéa 5(1)a) de la nouvelle Loi est ainsi libellé :
5. (1) Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :
a) l’emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d’un contrat de louage de services ou d’apprentissage exprès ou tacite, écrit au verbal, que l’employé reçoive sa rémunération de l’employeur ou d’une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;
[...]
“ rémunération assurable ” Le total de la rémunération d’un assuré, déterminé conformément à la partie IV, provenant de tout emploi assurable.
[...]
“ Cotisation ouvrière ”
67. Sous réserve de l’article 70, toute personne exerçant un emploi assurable verse, par voie de retenue effectuée au titre du paragraphe 82(1), une cotisation correspondant au produit obtenu par multiplication de sa rémunération assurable par le taux fixé par la Commission.
[...]
[7] ii) Règlement sur l’assurance-emploi
9.1 Lorsque la rémunération d’une personne est versée sur une base horaire, la personne est considérée comme ayant exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures qu’elle a effectivement travaillées et pour lesquelles elle a été rétribuée.
[...]
10.(1) Lorsque la rémunération d’une personne est versée sur une base autre que l’heure et que l’employeur fournit la preuve du nombre d’heures effectivement travaillées par elle au cours de la période d’emploi et pour lesquelles elle a été rétribuée, celle-ci est réputée avoir travaillé ce nombre d’heures d’emploi assurable.
[...]
21. La rémunération assurable de l’assuré déclarée sur un relevé d’emploi est déterminée conformément aux parties III et IV de la Loi et aux règlements pris en vertu de ces parties et est répartie selon l’article 23.
[...]
23. (1) Pour l’application de l’article 14 de la Loi, la rémunération assurable est répartie de la façon suivante :
a) la rétribution, y compris la paie des jours fériés autre que la rétribution visée à l’alinéa b), qui est versée pour une période de paie et qui n’est pas versée pour les raisons visées au paragraphe 2(2) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations, est attribuée à cette période de paie;
b) la paie d’heures supplémentaires, les primes de quart de travail, les rajustements de salaire, les augmentations de salaire rétroactives, les primes, les gratifications, les crédits de congés de maladie non utilisés, les primes de rendement, l’indemnité de vie chère, l’indemnité de fin d’emploi, l’indemnité de pré-avis et toute autre rétribution, y compris la paie de vacances qui n’est pas versée à l’égard d’une période de paie ou qui n’est pas versée pour les raisons visées au paragraphe 2(2) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations, sont répartis proportionnellement sur la période de paie au cours de laquelle ils sont versés.
(1.1) Lorsque l’assuré est en congé sans solde, a quitté volontairement son emploi ou est licencié, ou dans le cas de la cessation de son emploi, la rétribution mentionnée à l’alinéa (1)b) est répartie proportionnellement sur la dernière période de paie pour laquelle un salaire, un traitement ou des commissions ont été versés sur une base régulière.
[...]
[8] iii) Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations
1. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent règlement.
“ Loi ” La Loi sur l’assurance-emploi. (Act)
“ ministre ” Le ministre du Revenu national. (Minister)
“ période de paie ” Période pour laquelle une rémunération est versée à un assuré ou touchée par celui-ci.(pay period)
[...]
2. (1) Pour l’application de la définition de “ rémunération assurable ” au paragraphe 2(1) de la Loi et pour l’application du présent règlement, le total de la rémunération d’un assuré provenant de tout emploi assurable correspond à l’ensemble des montants suivants :
a) le montant total, entièrement ou partiellement en espèces, que l’assuré reçoit ou dont il bénéficie et qui lui est versé par l’employeur à l’égard de cet emploi;
b) le montant de tout pourboire que l’assuré doit déclarer à l’employeur aux termes de la législation provinciale.
(2) Pour l’application de la présente partie, le total de la rémunération d’un assuré provenant d’un emploi assurable comprend la partie impayée de cette rémunération qui n’a pas été versée à cause de la faillite de l’employeur, de sa mise sous séquestre effective ou imminente ou d’un non-paiement de rétribution à l’égard duquel l’assuré a déposé une plainte auprès de l’organisme fédéral ou provincial de main-d’oeuvre. Est exclu du total de la rémunération tout montant impayé qui se rapporte au temps supplémentaire ou qui aurait été versé en raison de la cessation de l’emploi.
[...]
[9] Personne n'a témoigné étant donné que les parties ont appuyé leur argumentation sur les faits exposés dans la réponse. Les pièces A-1 à A-4 ont été versées au dossier de la Cour.
[10] L’appelant a travaillé pour la Newfoundland Legal Aid Commission du 2 au 28 juillet 1997. Il a été licencié au moyen d’une lettre datée du 28 juillet 1997 (pièce A-4).
[11] Il a été avisé par la payeuse qu’il recevrait trois mois de salaire tenant lieu de préavis.
[12] L’appelant a présenté une demande de prestations le 28 juillet 1997 (pièce A-3). Sur son relevé d’emploi étaient indiqués un total de 135 heures d’emploi assurable et une rémunération assurable totale de 2 430,03 $. L’employeur avait également indiqué que l’appelant recevrait un montant de 8 775,20 $. L’appelant a reçu de la payeuse un chèque au montant de 6 110,51 $ (paie nette) sur lequel les retenues habituelles avaient été faites (pièce A-2).
[13] L’appelant a été avisé par la Commission qu’il n’avait pas travaillé assez longtemps depuis le 20 juillet 1997 pour avoir droit à des prestations parce qu’il n’avait accumulé que 310 heures de travail alors qu’il lui en fallait 420 (pièce A-1).
[14] Le 10 décembre 1997, l’appelant a écrit au chef des appels de l’intimé. La lettre a été versée au dossier. La décision de l’intimé a été envoyée à l’appelant le 23 février 1998.
[15] L’appelant soutient que l’intimé a prélevé des cotisations d’assurance-emploi sur le montant reçu à titre de salaire tenant lieu de préavis. La période de trois mois que vise le salaire tenant lieu de préavis devrait être considérée comme une période d’emploi assurable pour le nombre d’heures que l’appelant aurait normalement travaillées et pour lesquelles il aurait normalement été rétribué. Les heures de travail que le salaire représente doivent être assurables vu que des cotisations ont été prélevées sur le montant versé.
Conclusion
[16] La période de paie de l’appelant est la période pour laquelle une rémunération lui a été versée ou pour laquelle il a bénéficié d’une rémunération. La période de paie de l’appelant, selon le relevé d’emploi, commence le 30 juin et se termine le 23 juillet 1997 (pièce A-3).
[17] Les seules heures travaillées par l’appelant au cours de la période de paie ont été indiquées par l’employeur sur le relevé d’emploi (pièce A-3).
[18] Aux fins de l’application de la définition de l'expression “ emploi assurable ” dans la Loi et le Règlement, le total de la rémunération de l’appelant provenant de son emploi assurable correspond au total de tous les montants qu’il a reçus ou dont il a bénéficié et qui lui ont été versés par la payeuse à l’égard de cet emploi. L’appelant a été payé pour les heures travaillées et a en outre reçu trois mois de salaire tenant lieu de préavis au moment de sa cessation d'emploi. Par conséquent, c’est en raison de son emploi et des heures travaillées que l’employeur lui a versé trois mois de salaire tenant lieu de préavis lorsqu’il a mis fin à sa période d’emploi. L’appelant n’a pas travaillé pour la payeuse après le 23 juillet 1997.
[19] Pour ce qui est des cotisations, celles-ci ont été retenues de la manière prescrite à l'article 67 de la Loi, qui porte que toute personne exerçant un emploi assurable verse, par voie de retenue, une cotisation correspondant au produit obtenu par multiplication de sa rémunération assurable par le taux fixé par la Commission. C’est obligatoire. La cotisation est fondée sur le montant total de la rémunération et non pas seulement sur la rétribution versée pour les heures travaillées.
[20] Par conséquent, l’appelant a été payé pour 135 heures de travail (pièce A-3), ce qui représentait une partie de sa rémunération au cours de sa période de paie. Pour cette même période de paie, il a reçu trois mois de salaire tenant lieu de préavis, qui constituaient la deuxième partie de sa rémunération. Ces deux montants additionnés représentaient sa rémunération assurable à partir de laquelle ont été calculées les cotisations obligatoires retenues par l’employeur. Le fait de prélever les cotisations sur la rémunération assurable de l’appelant telle qu’elle est définie dans la Loi n’a pas pour effet de rendre l’appelant admissible à un nombre supplémentaire d’heures de travail en raison du paiement des trois mois de salaire tenant lieu de préavis. Ce montant forfaitaire prend valeur de rémunération, mais il ne correspond pas à un nombre d’heures travaillées. Les seules heures effectivement travaillées sont celles qui sont précisées sur le relevé d’emploi.
[21] En d’autres termes, des prestations sont payables pour les heures effectivement travaillées. Les cotisations donnant lieu au versement de ces prestations sont calculées en fonction de la rémunération assurable, qui comprend, en l’espèce, la rétribution versée pour les heures effectivement travaillées et les trois mois de salaire tenant lieu de préavis. Étant donné qu'aucune heure n'a effectivement été travaillée pour la payeuse après le 23 juillet 1997, l'appelant ne peut pas être réputé avoir exercé un emploi assurable après cette date.
[22] La loi indique qu’une période d’emploi assurable est une période au cours de laquelle un assuré a effectivement exécuté du travail pour lequel il a été payé. Elle définit également l'expression “ rémunération assurable ” comme le montant servant au calcul de la cotisation pour un emploi assurable.
[23] La prétention valable de l’appelant ne peut pas être acceptée.
IV- Décision
[24] L’appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée.
Signé à Dorval (Québec), ce 4e jour d’octobre 1999.
“ S. Cuddihy ”
J.S.C.C.I.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
Traduction certifiée conforme ce 30e jour de juin 2000.
Isabelle Chénard, réviseure