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Date: 19981110

Dossier: 97-467-IT-G

ENTRE :

GEORGE MAATOUK, (AUSSI CONNU SOUS LE NOM DE GEORGE MAATOUR),

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Rip, C.C.I.

[1] L'appelant, George Maatouk, porte en appel les cotisations fiscales établies par le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”) pour les années 1990, 1991 et 1992 et par lesquelles le ministre a établi de nouvelles cotisations suivant la valeur nette de l'appelant en vertu du paragraphe 152(7) de la Loi et a imposé des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

[2] La principale question que je suis appelé à trancher est celle de savoir si les changements de la valeur nette de M. Maatouk étaient attribuables à des revenus non déclarés ou à des sommes d'argent qui lui avaient été envoyées du Liban. Si ces changements résultaient du transfert de fonds du Canada au Liban, le revenu de l'appelant sera réduit et les pénalités imposées seront supprimées.

[3] La preuve était constituée des témoignages de M. Maatouk, de son fils George Maatouk fils et de M. Yori Ayoub, ainsi que d'un recueil de documents produit par l'avocat de l'appelant du consentement de l'avocat de l'intimée. Ce recueil renferme notamment une copie d'une convention d'achat portant sur un terrain situé au Liban (une traduction anglaise de la convention ayant été annexée), des fiches de client faisant état de traites bancaires tirées sur Canada Trust et d'une lettre de M. Maatouk à l'intention du ministre, datée du 10 juin 1996. L'intimée n'a ni produit d'éléments de preuve ni convoqué de témoins. On a eu recours à des services d'interprétation anglaise et arabe pour la traduction du témoignage de M. Maatouk.

[4] M. Maatouk a quitté le Liban et a commencé à résider au Canada le 6 juin 1990. En 1990, 1991 et 1992, il exploitait à Halifax (Nouvelle-Écosse) un dépanneur dont il était propriétaire et qui avait auparavant appartenu à son beau-fils.

[5] La conjointe de M. Maatouk, Marie Maatouk, a ouvert un compte bancaire au Canada Trust le 13 juin 1990 et y a déposé la somme de 500 $. Au cours de cette même année ainsi que des années 1991 et 1992, d'autres sommes d'argent en monnaie canadienne ont été déposées dans le compte, en petites coupures. Le solde du compte, au 31 décembre de chacune des années 1990, 1991 et 1992, s'établissait respectivement à 162 568 $, 229 742 $ et 226 696 $.

[6] Ce compte bancaire a rapporté des intérêts de 5 008,35 $, de 16 163,80 $ et de 12 374,81 $ respectivement pour chacune de ces trois années. Les déclarations de revenus de l'appelant et de sa conjointe ne faisaient aucunement état des intérêts gagnés. Lors du procès, M. Maatouk a admis avoir omis d'indiquer les intérêts dans ses déclarations de revenus; il a déclaré ignorer qu'il était tenu de le faire.

[7] Pour établir les cotisations à l'égard de M. Maatouk, le ministre a présumé que les soldes du compte bancaire du Canada Trust représentaient le revenu tiré de l'exploitation du dépanneur de l'appelant ainsi que les intérêts. Dans les années visées par le présent appel, M. Maatouk n'a indiqué au titre des revenus que les montants suivants :

1990                                     5 490 $

1991                                     8 938 $

1992                                     3 476 $

Le ministre a par conséquent établi les nouvelles cotisations relatives à M. Maatouk en présumant que le revenu de chacune des années s'établissait comme suit :

1990                                     173 142 $

1991                                     81 093 $

1992                                     41 275 $[1]

[8] Le ministre a en outre imposé des pénalités à M. Maatouk, au motif que ce dernier avait, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la Loi, fait un faux énoncé ou une omission dans ses déclarations de revenus des années 1990, 1991 et 1992, ou y avait participé, consenti ou acquiescé, de sorte que l'impôt qu'il aurait eu à payer aux termes des cotisations d'impôt qui auraient été établies d'après les renseignements fournis dans les déclarations de revenus produites à l'égard de ces années était inférieur à l'impôt qui était de fait payable, la différence étant de 62 677 $, 29 356 $ et 13 683 $ respectivement pour chacune des années. Les pénalités imposées ont été établies comme suit :

1990                                     24 758,56 $

1991                                     10 754,60 $

1992                                     3 518,80 $

[9] L'appelant s'opposait essentiellement aux cotisations parce qu'il avait vendu en juin 1989 un des deux terrains lui appartenant situés près de Kfar Yachite, au Liban, pour la somme de 88 millions de lires (livres libanaises), soit l'équivalent d'environ 840 000 $ CAN selon le témoignage de l'appelant, et que le produit de la vente lui avait été envoyé au Canada au cours des années visées par l'appel. (Selon M. Maatouk, un dollar canadien valait, en 1989, de 600 à 700 lires.)

[10] M. Maatouk a déclaré qu'après avoir reçu les 88 millions de lires, il ne les avait ni investis ni déposés dans une banque, mais les avait conservés à son domicile au Liban. En contre-interrogatoire, M. Maatouk a admis qu'il y avait des banques internationales à Tripoli, mais il a déclaré qu'il préférait conserver l'argent à la maison parce qu'il avait des doutes quant à la stabilité des banques libanaises et des banques en général.

[11] M. Maatouk a déclaré avoir vendu le terrain parce qu'il s'apprêtait, en 1989, à immigrer au Canada. Son fils aîné, Ghassan, devait rester au Liban, mais comme le poste qu'il y occupait l'obligeait à se déplacer constamment un peu partout au pays, M. Maatouk en était arrivé à la conclusion qu'il n'y aurait personne pour s'occuper du terrain.

[12] M. Maatouk a également déclaré que, peu après avoir reçu les 88 millions de lires, il les avait convertis en dollars américains, en raison de la piètre situation de l'économie libanaise. Il a fait état de l'importante fluctuation de la lire et de l'inflation sévissant au Liban. En contre-interrogatoire, M. Maatouk a prétendu qu'il voulait de la monnaie américaine parce que celle-ci représentait la monnaie la plus stable. Il ne pouvait toutefois pas se souvenir du taux de change du dollar américain au moment où il a converti ses lires en dollars américains.

[13] M. Maatouk a déclaré qu'après avoir effectué cette conversion, il avait converti d'autres lires ainsi que tous ses fonds américains en monnaie canadienne. Il a en outre déclaré avoir effectué ces conversions de façon sporadique par l'intermédiaire d'agents de change faisant affaire dans les rues de Tripoli, qui est située à une demi-heure de route de son village.

[14] M. Maatouk a déclaré qu'à son arrivée au Canada, il avait avec lui 80 000 $ CAN. En contre-interrogatoire, il a déclaré qu'il avait, outre ces 80 000 $, d'autres fonds en espèces qu'il comptait utiliser à titre de frais de déplacement; dans une lettre datée du 10 juin 1996 qu'il avait fait parvenir au ministre, l'appelant indiquait que ces autres fonds s'élevaient à environ 200 ou 300 $. À son arrivée au Canada, il a rempli une “ fiche d'établissement ” qu'il a déposée auprès d'Emploi et Immigration Canada et a attesté n'avoir que 800 $ en sa possession. Il n'a pu expliquer cet écart. Au cours de son témoignage, il a d'abord déclaré qu'on ne lui avait pas posé de questions au sujet de l'argent qu'il possédait, puis a déclaré qu'il ne pouvait se rappeler où et quand la fiche avait été remplie ni qui l'avait remplie.

[15] Au Canada, M. Maatouk a d'abord résidé pendant quelque temps avec sa fille au 95, promenade Circassion, à Dartmouth (Nouvelle-Écosse). Cette résidence était située au-dessus d'un dépanneur qui avait auparavant été exploité par le beau-fils et la fille de l'appelant et que ce dernier avait acquis par la suite. Après avoir quitté le domicile de sa fille, M. Maatouk s'est installé ailleurs à Dartmouth, mais il est retourné vivre avec sa fille au moment où il a commencé à exploiter le dépanneur.

[16] M. Maatouk a déclaré qu'il avait gardé les 80 000 $ à son domicile jusqu'à ce que sa conjointe réussisse à le convaincre de déposer les fonds dans une banque, par mesure de précaution. Il a déclaré avoir demandé à sa conjointe d'ouvrir un compte bancaire à cette fin; le 13 juin 1990 ou vers cette date, celle-ci a donc ouvert un compte au Canada Trust. Il a déclaré que le compte bancaire avait été ouvert au nom de sa conjointe, et non conjointement au nom des époux, parce que l'argent appartenait aux deux et parce qu'il aimait sa conjointe.

[17] Quoi qu'il en soit, des montants totalisant 80 000 $, ainsi que d'autres montants, ont été déposés comme suit dans le compte du Canada Trust[2] :

1991

1992

DATE

MONTANT

DATE

MONTANT

13 juin

   500 $

5 janvier

9 050 $

15 juin

5 000

14 mars

15 000

16 juin

8 000

19 mars

7 020

19 juin

6 000

8 avril

10 000

20 juin

8 000

2 mai

10 000

20 septembre

8 000

26 septembre

11 000

22 octobre

31 000

30 octobre

10 000

9 novembre

5 000

28 décembre

19 000

TOTAL :

111 500 $

TOTAL :

51 070 $

TOTAL DES DEUX ANNÉES : 162 570 $

[18] Au cours de l'interrogatoire principal, M. Maatouk a déclaré qu'il ne pouvait se rappeler précisément pendant combien de temps il avait gardé les 80 000 $ à son domicile. Il a fait mention d'un mois, peut-être un mois et demi. En contre-interrogatoire, l'avocat de l'intimée, Me Leslie, lui a posé les questions suivantes :

[TRADUCTION]

Q. 285

Me Leslie : D'accord. Mais laissez-moi vous rappeler, M. Maatouk, que vous avez dit plus tôt aujourd'hui, en réponse aux questions de Me Leahey, que vous aviez gardé l'argent à votre domicile durant un mois ou un mois et demi avant qu'il ne soit déposé dans le compte bancaire qui avait été ouvert au nom de votre épouse.

L'appelant : Oui.

Me Leslie : Oui. Et je me reporte à l'onglet 15 du recueil de pièces [pièce A-1], M. Maatouk, plus particulièrement à la première page, qui est un sommaire des dépôts effectués en 1990, et je ne vois rien qui se rapproche un tant soit peu d'un dépôt de 80 000 $ qui aurait été effectué dans les quelques mois qui ont suivi l'ouverture de ce compte.

L'appelant : Oui. Parce qu'à ce moment-là, je n'avais pas déposé cette somme. Je l'avais toujours en ma possession.

[19] Au cours de la période allant du 13 juin au 22 octobre 1990, il y a eu neuf dépôts au compte du Canada Trust, soit en tout 82 500 $. On ne sait trop si cette somme représentait les 70 000 $ que M. Maatouk a déclaré avoir gardé en sa possession durant les deux ou trois mois qui ont suivi l'ouverture du compte ou si elle provenait d'une autre source.

[20] M. Maatouk a déclaré qu'il avait acheté, en octobre 1990, le contenu, ou les stocks, du dépanneur situé au 95, promenade Circassion, qu'on a appelé le dépanneur “ AAA ”, à M. Yori Ayoub pour la somme de 2 000 $, soit la valeur des biens à porter à l'inventaire. Ce dernier avait acheté le dépanneur au beau-fils de M. Maatouk. L'appelant a maintenu que le dépanneur était une petite entreprise qui rapportait peu. M. Maatouk a toutefois déclaré au cours du contre-interrogatoire qu'il avait versé 12 000 $ à M. Ayoub pour le dépanneur. Ce dernier a plus tard déclaré au cours de son témoignage qu'il avait reçu de 15 000 à 17 000 $ pour les stocks. (On n'a produit aucune preuve documentaire quant à la date exacte de la vente du dépanneur ni quant à la valeur des stocks censément vendus.)

[21] M. Maatouk s'est rappelé qu'après son arrivée au Canada, il avait commencé à recevoir l'argent qu'il avait confié à son fils Ghassan, au Liban. Il a déclaré avoir apporté en tout 170 000 $ au Canada, soit les 80 000 $ et un montant de 90 000 $ qu'il avait reçu du Liban en partie en espèces et en partie sous forme de chèques envoyés par la poste. Il n'y a toutefois aucun élément de preuve établissant que de tels chèques ont été déposés dans le compte du Canada Trust au cours des années visées par l'appel. En contre-interrogatoire, l'appelant a déclaré avoir laissé à son fils 100 000 $,“ peut-être un peu moins ” a-t-il dit, mais il a par la suite déclaré que Ghassan détenait plus de 60 000 $ pour lui. L'échange qui suit entre Me Leslie et M. Maatouk figure aux pages 67 à 69 de la transcription des témoignages :

[TRADUCTION]

Me Leslie : M. Maatouk, vous avez indiqué à la Cour ce matin que des sommes d'argent vous avaient également été envoyées du Liban après votre arrivée au Canada; est-ce exact?

L'appelant : C'est exact.

Me Leslie : À combien ces sommes s'élevaient-elles?

L'appelant : J'ai reçu cinquante mille à un moment donné. Je ne me rappelle pas à combien s'élevait le second montant que j'ai reçu.

Me Leslie : D'accord. On parle de cinquante mille quoi? Des dollars canadiens?

L'appelant : Oui.

Me Leslie : Quand avez-vous reçu cette somme?

L'appelant : Si je me rappelle bien, c'était autour de 1992.

Me Leslie : Quand exactement en 1992?

L'appelant : Je ne m'en souviens pas.

Me Leslie : Vous souvenez-vous de la saison? Était-ce au début du printemps, à l'été, à l'automne...

L'appelant : Je me souviens que cela s'est passé en 1992, ou peut-être un peu après 1992, mais je ne me rappelle pas exactement du mois.

Me Leslie : D'accord. Voilà pour les cinquante mille. Vous avez dit qu'on vous avait fait parvenir une autre somme d'argent, n'est-ce-pas?

L'appelant : Oui.

Me Leslie : Était-ce après les cinquante mille?

L'appelant : Oui.

Me Leslie : Avez-vous une idée du montant de cette seconde somme d'argent?

L'appelant : Je ne m'en souviens pas.

Me Leslie : D'accord. Avez-vous une idée de la date à laquelle vous avez reçu cette seconde somme?

L'appelant : Si je pouvais me rapporter au document écrit ou demander à la femme qui m'a apporté l'argent, je pourrais peut-être m'en souvenir.

Me Leslie : D'accord. Était-ce en 1993, en 1994, l'an dernier?

L'appelant : Comme je vous l'ai dit, je ne m'en souviens pas exactement, mais autant que je m'en souvienne, c'était vers la fin de 1993.

Me Leslie : D'accord. M. Maatouk, qui vous a fait parvenir ces sommes d'argent, les 50 000 $ et l'autre somme?

L'appelant : Mon fils.

Me Leslie : Quel fils?

L'appelant : Mon fils Ghassan.

Me Leslie : D'accord. M. Maatouk, À combien s'élevait le montant d'argent vous appartenant qui était en possession de votre fils Ghassan au Liban?

L'appelant : Comme je l'ai déjà dit, je ne m'en souviens pas exactement, mais je dirais plus de soixante mille. Certaines personnes me devaient de l'argent. Mon fils a reçu cet argent et me l'a envoyé.

[22] Le témoignage de M. Maatouk sur cette question ne coïncide pas avec les reçus de dépôt relatifs au compte bancaire du Canada Trust. L'appelant a déclaré avoir reçu 50 000 $ en 1992 et un montant indéterminé par la suite. Toutefois, les reçus de dépôt en question indiquent que 16 dépôts bancaires ont été effectués en espèces entre le 13 juin 1990 et le 2 mai 1991, pour un total de 167 570 $. Aucun dépôt en espèces n'a été effectué après le 2 mai 1991. Si M. Maatouk a reçu 50 000 $ d'une personne qu'il a appelée Branka Amiouni, ainsi qu'un montant inconnu de personnes inconnues en 1992 et au cours des années suivantes, ces montants n'ont été déposés dans aucun de ses comptes bancaires, ni dans ceux de sa conjointe, et ils n'ont pas été inclus dans la calcul de sa valeur nette. J'ai également des doutes au sujet de la quantité d'argent que M. Maatouk prétend avoir reçu du Liban ainsi que des périodes où il déclare avoir reçu cet argent.

[23] M. Maatouk et M. Ayoub ont déclaré que la famille de ce dernier vivait près du domicile de l'appelant au Liban et que le père de M. Ayoub et M. Maatouk étaient “ de bons amis ”. M. Ayoub a déclaré qu'il avait exploité le dépanneur durant neuf mois avant de le vendre à M. Maatouk, en octobre 1990. Il a admis que le dépanneur n'était pas très rentable. Il a déclaré que le dépanneur avait “ peut-être ” rapporté de 6 000 à 7 000 $ en neuf mois. M. Ayoub a admis avoir vendu le dépanneur pour la valeur des stocks, étant donné que le dépanneur générait peu de revenus. Il n'a pu dire de quelle façon M. Maatouk l'avait payé ni où il était lorsque ce dernier lui a remis l'argent comptant. Il a déclaré qu'après avoir vendu le dépanneur à l'appelant, il avait acheté un autre dépanneur “ AAA ”.

[24] George Maatouk fils a témoigné pour le compte de son père. Son père étant incapable de parler ou même de comprendre l'anglais, c'était lui qui avait servi d'interprète lorsque son père avait constitué un avocat. Né au Liban en 1972, le témoin a immigré au Canada en février 1990. Il a confirmé que son père détenait deux lopins de terre au Liban et qu'il en avait vendu un avant d'arriver au Canada. Il a également déclaré que son père, après avoir vendu le terrain, avait converti le produit de la vente en monnaie américaine. Il a déclaré qu'il avait vu une grande quantité d'argent canadien lorsque son père était arrivé à Halifax. Il a déclaré que son père gardait l'argent à la maison, dans un “ petit meuble ”, comme il avait l'habitude de faire au Liban. Il a ajouté que sa mère gardait de l'argent dans son sac à main. Le témoin a déclaré qu'il accompagnait occasionnellement sa mère lorsqu'elle allait déposer de l'argent à la succursale du Canada Trust.

[25] M. Maatouk fils a admis que son père n'avait pas déposé immédiatement tout l'argent qu'il avait emporté du Liban parce qu'il se méfiait des banques. Sa mère avait dû convaincre son père de déposer de l'argent à la banque. Le témoin a également admis que son père avait reçu des fonds additionnels d'amis du Liban qui étaient venus au Canada au cours des années visées par l'appel; Ghassan avait envoyé de l'argent à ces personnes pour qu'elles le remettent à son père. Il a déclaré que son père essayait d'investir au Canada.

[26] M. Maatouk fils a déclaré qu'il aidait son père à exploiter le dépanneur. Comme ce dernier ne parlait pas l'anglais, le fils travaillait à l'avant du dépanneur et s'occupait des clients. Selon ses dires, le revenu net tiré de l'exploitation du dépanneur s'élevait à environ 25 000 $ par année. Le témoin a déclaré que son père ne lui versait aucun salaire pour son travail. S'il avait besoin d'argent, il en prenait dans le tiroir-caisse. Les retraits du tiroir-caisse n'étaient pas consignés dans les livres de l'entreprise. Le témoin a confirmé qu'on ne tenait pas de registre quotidien des activités du dépanneur. Il a également reconnu qu'il avait étudié la tenue de livres au Liban. Enfin, il a admis qu'il n'avait pour sa part aucune idée du montant d'argent que son père avait apporté au Canada.

[27] M. Maatouk fils a confirmé le fait que son père avait en fin de compte renvoyé l'argent à Ghassan au Liban pour que ce dernier achète des terrains.

Analyse

Les cotisations d'impôt :

[28] Mon collègue le juge Bonner, de cette cour, a décrit de la façon qui suit la cotisation suivant la valeur nette[3] :

La cotisation suivant la valeur nette présuppose la mesure indirecte du revenu gagné au cours d'une période déterminée. La valeur nette d'un particulier, c'est-à-dire l'excédent de son actif sur son passif, est calculée au début et à la fin d'une période. La cotisation repose sur l'hypothèse que la totalité d'une augmentation quelconque de la valeur nette durant la période en question (dans la mesure où cette augmentation n'est pas attribuable à des sources non imposables, telles qu'un don ou un héritage), plus les dépenses faites au cours de cette période à des fins personnelles, constituent le montant du revenu de la personne pour la période en question. [...]

[...] Dans un appel d'une cotisation d'impôt sur le revenu, il appartient au contribuable d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que la cotisation est trop élevée en regard du droit applicable et des faits pertinents. Il ne suffit pas que le contribuable démontre qu'il est concevable que la cotisation soit trop élevée. Il lui faut produire des preuves dignes de foi établissant qu'une évaluation appropriée et complète de sa valeur nette montre que son revenu est inférieur à celui que le ministre a déterminé. Lorsque le contribuable s'est mis dans une situation qui ne permet aucunement de mesurer son revenu de façon directe avec exactitude, il ne peut guère se plaindre, dans un appel portant sur une évaluation de sa valeur nette, des inexactitudes propres à cette méthode. [...]

[29] En l'espèce, l'appelant n'a pas contesté le calcul de son actif et de son passif, ni le calcul de ses frais de subsistance, établis par l'intimée, si ce n'est à l'égard d'un montant de 20 000 $ qui avait été ajouté à son revenu de l'année 1992. L'avocat ignorait que ce montant était une traite bancaire tirée sur Canada Trust et payable à M. Ayoub.[4]

[30] L'appelant demande à la Cour d'augmenter sa valeur nette avant le 6 juin 1990, puisqu'une majoration entraînerait une diminution du revenu imposable. En d'autres termes, l'appelant me demande de conclure que les montants déposés dans le compte du Canada Trust représentaient des sommes d'argent qu'il avait gagnées ou épargnées avant le 6 juin 1990 et que, par conséquent, ces montants ne sont pas imposables sous le régime de la Loi.

[31] L'intimée n'a produit aucun élément de preuve au procès. Sa position est que l'argent comptant qui avait été déposé dans le compte bancaire du Canada Trust ne représentait ni l'argent épargné par l'appelant ni le produit de la vente du terrain situé au Liban. Le manque de corroboration, le manque apparent de crédibilité de l'appelant et le fait que sa version des faits ne corresponde pas aux éléments de preuve produits par son propre avocat me portent à croire que la source de l'argent comptant n'est pas celle que l'appelant voudrait me faire croire. Toutefois, l'appelant a réussi à démontrer qu'il est peu probable que tout l'argent de 1990 provenait de son exploitation du dépanneur “ AAA ” au cours des périodes en cause.

[32] L'appelant, par son témoignage ainsi que par ceux de M. Ayoub et de George Maatouk fils, a réussi à établir que les fonds déposés dans le compte du Canada Trust ne pouvaient pas entièrement provenir de l'exploitation du dépanneur, contrairement à ce que le ministre avait présumé pour établir les cotisations. Je ne puis imaginer, par exemple, que le dépanneur ait pu engendrer des recettes brutes, encore moins des recettes nettes, de 162 568 $ durant les trois mois où M. Maatouk a été propriétaire du dépanneur en 1990 ni, d'ailleurs, durant toute l'année.

[33] Dans l'arrêt Pollock v. Her Majesty the Queen, 94 DTC 6050, le juge Hugessen de la Cour d'appel fédérale statuait, à la page 6053, que le fait que certaines des hypothèses de fait sur lesquelles le ministre s'était fondé étaient erronées ou imprécises n'avait pas pour effet d'obliger ce dernier à prouver les autres hypothèses. Il revenait à la cour de déterminer, d'après les autres hypothèses non contestées, si la cotisation établie par le ministre était valide.

[34] Même si je conclus que le ministre a surestimé le revenu que l'appelant aurait tiré du dépanneur en 1990, les faits confirment la plus grande partie des montants qu'il a inclus dans le revenu de ce dernier. Toutefois, la preuve ne me permet pas de déterminer précisément le montant surestimé. Il peut être raisonnable de conclure que la somme de 27 500 $ qui avait été déposée en juin 1990 provenait des capitaux que M. Maatouk détenait personnellement avant son arrivée au Canada. (Je souligne que le tableau établi par le ministre indique que M. Maatouk avait 25 000 $ en espèces au début de l'année 1990, et que ce dernier possédait peut-être les 27 500 $ en sus de ces 25 000 $.) M. Maatouk a déclaré que sa conjointe l'avait persuadé de déposer son argent dans une banque. Le premier dépôt en espèces qui ait été effectué dans le compte du Canada Trust après le mois de juin 1990 est celui du 20 septembre 1990. Le montant des intérêts produits par ce compte n'est pas contesté, ni les soldes des autres comptes ou de l'argent détenu en espèces. Les évaluations des frais personnels de l'appelant ne sont pas contestées non plus.

[35] Pour ce qui est des autres dépôts en espèces, qui s'élèvent à 135 070 $ (soit la différence entre 162 570 $ et 27 500 $), je conclus que l'appelant n'a pas établi d'une façon qui m'apparaît convaincante que le solde de ces dépôts provenait de sources non imposables. Si l'appelant avait tenu des livres et des registres convenables, il aurait peut-être pu produire des éléments de preuve établissant qu'aucune partie des dépôts en espèces ne provenait des recettes du dépanneur. L'objet du témoignage de M. Ayoub était de confirmer la date à laquelle ce dernier avait vendu les stocks à l'appelant. Je ne suis toutefois pas convaincu que la vente a nécessairement eu lieu en octobre. Ni l'appelant ni M. Ayoub n'ont pu indiquer avec certitude la date de la vente, le montant payé ou reçu et l'endroit où l'entente a été conclue, alors qu'ils auraient dû se souvenir de tous ces faits sans difficultés. En outre, aucun des témoins n'a pu indiquer avec quelque certitude le revenu généré par le dépanneur. Aucun registre n'était en fait tenu et on n'avait établi aucun mécanisme de contrôle de l'encaisse. Je citerai le juge Bowman, de cette cour, qui déclarait dans l'affaire Ramey v. Her Majesty the Queen, 93 DTC 791 (CCI), à la page 793 :

[...] Un contribuable dont les registres comptables et le mode de déclaration de revenus sont dans un tel fouillis que la cotisation d'actif net s'impose est souvent l'artisan de son propre malheur.[5] [...]

[36] L'appelant n'a pu produire d'éléments de preuve suffisants pour établir que l'argent déposé dans le compte du Canada Trust provenait de son épargne personnelle ou de la vente du terrain situé au Liban. Je modifierais toutefois le tableau établi par le ministre quant à la valeur nette de l'appelant pour que ce qui suit y soit reflété : l'argent comptant détenu par l'appelant à la fin de 1989 s'élevait à 52 500 $ (soit 25 000 $ plus les 27 500 $ qui ont été déposés en juin 1990); en 1990, l'appelant a versé 15 000 $ pour le dépanneur “ AAA ”; ses frais personnels et de subsistance de 1990 s'élevaient à 9 154 $, soit 208/365 x 16 064 $ (le montant estimé par le ministre)[6]. Je dois conclure, selon la prépondérance des probabilités, que tous les autres montants figurant au tableau sont exacts.

Pénalités :

[37] Il incombe au ministre d'établir que les pénalités imposées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi sont justifiées. Cette disposition se lit en partie comme suit :

Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la présente loi ou à un règlement d'application, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse – appelé “ déclaration ” au présent article – rempli ou produit pour une année d'imposition conformément à la présente loi ou à un règlement d'application, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d'une pénalité [...]

[38] Le professeur Vern Krishna a traité du sens du terme “ sciemment ” dans l'ouvrage intitulé Fundamentals of Canadian Income Tax (5e éd., Carswell : Scarborough, 1995) :

[TRADUCTION]

Il existe trois niveaux de connaissance : 1) la connaissance réelle; 2) le fait d'éviter délibérément de se renseigner; 3) la connaissance par interprétation.

Dans le premier cas, le contribuable doit avoir une connaissance réelle de la déclaration erronée ou de l'omission faite dans la déclaration. Le deuxième cas vise la personne qui ferme délibérément les yeux sur une source de connaissance évidente – en d'autres termes, elle évite délibérément de se renseigner sur une question parce qu'elle ne tient pas à savoir ce qu'il en est. Pour ce qui est du troisième cas, ce qu'on appelle généralement la “ connaissance par interprétation ” se rapporte à ce que le contribuable “ aurait dû savoir ”.

[39] L'avocat de l'intimée a convenu que l'appelant avait délibérément joué à l'autruche en ce sens qu'il ne s'était pas renseigné sur ses obligations en matière d'impôt, adoptant l'attitude selon laquelle “ si l'on ne veut pas avoir de mauvaises nouvelles, on ne pose pas de questions ”. Inversement, l'avocat de l'appelant prétendait que son client, parce qu'il provenait d'un autre pays et comprenait difficilement l'anglais, avait commis une erreur involontaire en croyant que les intérêts gagnés au Canada sur l'épargne provenant de l'extérieur du pays n'étaient pas imposables.

[40] Dans Venne v. The Queen, 84 DTC 6247 (C.F., 1 re inst.), une cause souvent citée, le juge Strayer (tel était alors son titre) avait conclu que l'appelant n'avait pas commis une faute lourde en ne déclarant qu'une partie de son revenu d'entreprise ou en omettant de déclarer les intérêts gagnés. M. Venne, un homme âgé de 49 ans qui avait été élevé dans un foyer francophone, avait déclaré dans son témoignage que s'il parlait les deux langues et lisait dans les deux langues, il ne maîtrisait cependant guère ni l'une ni l'autre, et que son frère s'occupait de ses intérêts en affaires. Aux pages 6256 à 6258, le juge Strayer a fait des remarques dignes d'intérêt pour l'affaire qui nous occupe :

Le contribuable, en l'espèce, est un homme qui a fini sa cinquième année d'études; il travaille et paye des impôts dans une langue qui n'est pas sa première langue ni de culture, ni d'enseignement, un homme qui est plus à l'aise dans un garage que dans un bureau. Ces facteurs non seulement militent à l'encontre d'une conclusion selon laquelle il aurait fait sciemment les faux énoncés contenus dans ses déclarations, mais aussi tout son comportement n'est pas celui d'une personne qui avait délibérément cherché à dissimuler de grandes quantités de revenus imposables. Il tenait des dossiers qui semblaient tout à fait complets sur ses ventes commerciales, et il les remettait au teneur de livres. Pour autant que la preuve le montre, toutes les recettes de l'entreprise, ou pratiquement, ont été déposées à la banque, là où les fonds pouvaient être retracés très facilement. Il a aussi confié toutes ses créances hypothécaires, sauf une ou deux, à des banques et à des sociétés de fiducie qui tenaient des dossiers très soignés sur les revenus provenant de ces hypothèques entiercées. Il est peu probable qu'une personne qui cherche à dissimuler son revenu ait mené ses affaires de cette façon. [...]

Quant à la possibilité d'une faute lourde, j'ai conclu, après hésitation, qu'elle n'a pas non plus été établie ici. La “ faute lourde ” doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu'un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. Je ne conclus pas à l'existence d'un tel degré de négligence en rapport avec les faux énoncés de revenus commerciaux. Certes, le contribuable n'a pas fait preuve de la prudence d'un homme raisonnable et, comme je l'ai déjà fait remarquer, il aurait au moins dû réviser ses déclarations de revenus avant de les signer. Ce faisant, un homme raisonnable, eu égard aux autres renseignements dont il disposait, aurait été amené à croire que quelque chose n'allait pas et aurait cherché à en savoir plus long auprès de son teneur de livres.

[...]

Il faut se souvenir comme l'a dit le juge Cattanach dans l'affaire Udell (précitée) qu'il s'agit d'une disposition pénale et qu'elle doit être interprétée de façon restrictive. Le paragraphe ne vise évidemment pas à imposer de responsabilité stricte, mais il n'autorise les pénalités que si le contribuable a un degré élevé de faute, notamment la connaissance ou la mauvaise conduite insouciante. L'article avait été appliqué, par le passé, de façon subjective aux contribuables, c'est-à-dire que l'on tenait compte de leur intelligence, de leur instruction, de leur expérience, etc. et cela veut dire, à mon sens, le fait d'ignorer la loi, ce qui n'est pas déraisonnable dans le cas du contribuable en l'espèce, et les circonstances particulières peuvent être acceptables comme moyen de défense contre l'application de pénalités. D'après ces considérations et eu égard au fait qu'il incombe au Ministre de prouver que la pénalité devrait être appliquée, je conclus que la preuve est ambiguë et que la pénalité ne devrait donc pas être appliquée, même à l'égard du revenu d'intérêt non déclaré.

[41] Le seul point que M. Maatouk a en commun avec M. Venne est qu'il ne parle pas anglais. En outre, le fait qu'il n'ait pas, d'après ce qu'il prétend, caché l'argent sous un matelas semble cadrer avec le raisonnement du juge Strayer selon lequel de tels facteurs militent à l'encontre d'une conclusion portant que l'appelant ait commis une faute lourde. Contrairement à M. Venne toutefois, M. Maatouk n'a pas avisé son comptable de quoi que ce soit. Il n'a ni révisé ni même signé ses déclarations de revenus avant de les faire parvenir au ministre. Il a déposé ce qu'il prétend être ses fonds personnels dans un compte bancaire au nom de sa conjointe et n'a pas déclaré les intérêts gagnés sur ces fonds. Il n'a tenu aucun registre de ses activités financières.

[42] Je suis par ailleurs loin d'être convaincu que les autres revenus non déclarés provenaient de sources non imposables, autant en ce qui concerne les fonds qu'il a apportés au Canada que ceux qu'on lui a apportés par la suite. Je ne crois pas M. Maatouk lorsqu'il déclare que des gens venaient régulièrement du Liban pour le voir à Halifax et lui remettre de l'argent. Cela force le sens de ce qui pourrait à mon avis être considéré comme raisonnablement probable.

[43] L'appelant savait en fait qu'il devait payer de l'impôt sur le revenu gagné au Canada. Il savait que le compte du Canada Trust rapportait des intérêts. L'appelant a lui-même admis qu'il se renseignait sur ses obligations en matière d'impôt lorsque cela faisait son affaire mais que, dans le cas contraire, il ne posait pas de questions.

[44] L'appelant a réfuté l'hypothèse du ministre selon laquelle tous les fonds qui avaient été déposés dans le compte du Canada Trust constituaient des revenus non déclarés provenant de l'exploitation du dépanneur. Je conclus qu'il est hautement improbable que le dépanneur de Dartmouth ait pu générer de tels revenus. L'avocat de l'intimée n'a pas soutenu que le dépanneur avait en fait généré ces revenus. Il a affirmé que personne n'était vraiment arrivé à se faire une idée claire quant à la provenance de l'argent, et que l'explication de l'appelant n'était pas raisonnable. L'appelant a en maintes occasions été son pire ennemi, en ce sens que sa version des faits ne correspondait pas à la preuve produite lors du procès. Son témoignage n'était pas suffisamment crédible pour qu'il me soit permis de conclure qu'il avait vraiment en sa possession 162 568 $ en espèces avant son arrivée au Canada, soit les 80 000 $ qu'il prétend avoir apportés au Canada mais qu'il n'a pas immédiatement déposés dans une banque, plus le montant de 82 568 $ qu'il a déposé entre le 13 juin et le 22 octobre 1990. Il incombe toutefois au ministre d'établir les faits justifiant l'imposition d'une pénalité aux termes du paragraphe 163(2). En l'espèce, le ministre n'a pas réussi à établir les faits de façon à me permettre de conclure que l'appelant n'avait pas 80 000 $ lorsqu'il est entré au Canada. La Cour ne peut imposer de pénalités en se fondant sur la seule prépondérance des probabilités. Le paragraphe 163(2) est une disposition pénale qui doit être interprétée comme telle. Par conséquent, la pénalité qui a été imposée pour l'année 1990 devrait être réduite de façon à refléter le fait que M. Maatouk avait 80 000 $ en sa possession au moment de son arrivée au Canada, ainsi que la réduction au titre des frais personnels et les rajustements des frais personnels dont j'ai fait mention plus haut.

[45] Les pénalités imposées en vertu du paragraphe 163(2) pour les années 1991 et 1992 ne devraient pas être modifiées. Les explications fournies par M. Maatouk quant aux sources des autres dépôts en espèces ne m'ont pas paru satisfaisantes et il ne peut à mon avis y avoir aucun doute raisonnable quant au fait qu'il a sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde omis d'inclure ces montants dans son revenu.

Conclusion :

[46] Par conséquent, l'appel portant sur l'année 1990 sera admis et la cotisation déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en considération du fait que le revenu de l'année 1990 sera réduit de façon à refléter ce qui suit : l'encaisse de l'appelant était de 52 500 $ au début de l'année; ce dernier a versé 15 000 $ pour le dépanneur; ses frais personnels et de subsistance s'élevaient à 9 154 $. La pénalité, toutefois, sera réduite pour qu'il soit tenu compte du fait que M. Maatouk avait en portefeuille 80 000 $ au début de l'année, qu'il a versé 15 000 $ pour le dépanneur et que ses frais personnels et de subsistance s'élevaient à 9 154 $.



Les appels portant sur les années 1991 et 1992 sont rejetés.

L'intimée a droit à ses frais et dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de novembre 1998.

“ Gerald J. Rip ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 23e jour de juin 1999.

Mario Lagacé, réviseur

ANNEXE “ A ”
GEORGE MAATOUK
Tableau de la valeur nette

1989

1990

1991

1992

Actif

Encaisse

25 000,00 $

25 000,00 $

14 920,00 $

14 920,00 $

Banque Royale (compte 708-623-4)

2 217,89

7 945,32

Banque B.M.T. (compte 7050-494)

10 375,65

12 711,79

Canada Trust (compte 505761)

162 568,35

229 742,15

226 696,49

Actif non identifié

20 000,00

Paiements

3 379,00

2 366,00

Actif total :

25 000,00 $

187 568,35 $

260 634,69 $

284 639,60 $

Passif total :

    0,00 $

    0,00 $

    0,00 $

    0,00 $

Valeur nette :

25 000,00 $

187 568,35 $

260 634,69 $

284 639,60 $

Valeur nette (période antérieure) :

25 000,00

187 568,35

260 634,69

Augmentation (diminution) de la valeur nette :

162 568,35 $

73 066,34 $

24 004,91 $

Frais personnels / de subsistance :

16 064,00

16 965,00

17 270,00

Revenu total :

178 632,35 $

90 031,34 $

41 274,91 $

Revenu total / valeur nette :

178 632,35 $

90 031,34 $

41 274,91 $

Revenu total déclaré :

Contribuable :

5 490,20

8 938,00

3 476,00

Conjointe :

    Zéro

    Zéro

    Zéro

Écart par rapport à la valeur nette :

173 142,15 $

81 093,34 $

37 798,91 $



[1]       Le tableau des calculs de la valeur nette de M. Maatouk pour les années 1990, 1991 et 1992 figure à l'annexe “ A ” jointe aux présents motifs.

[2]       Le montant total déposé le 22 octobre 1990 était de 117 000 $, soit 31 000 $ en espèces, un chèque tiré sur la Banque Royale de 16 000 $ et une note de crédit de 5 000 $. D'autre part, un chèque de 25 000 $, représentant la part d'un héritage à laquelle M. Maatouk avait droit, a été déposé le 22 juin 1990.

[3]       Fletcher v. Her Majesty the Queen, 95 DTC 134, à la page 135.

[4]       Voir l'annexe “ A ” jointe aux présents motifs.

[5]       Voir aussi John Kay v. The Queen, 95 DTC 1, aux pages 2 et 3 (le juge en chef adjoint Christie, C.C.I.).

[6]       M. Maatouk est arrivé au Canada le 6 juin 1990 et y a résidé, cette année-là, durant 208 jours.

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