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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

2001-3265(IT)I

 

ENTRE :

 

GERRY McCANN,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

Appels entendus le 8 mai 2002 à Vancouver (Colombie‑Britannique) par

 

l'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

 

Comparutions

Pour l'appelante :                      L'appelante elle-même

Avocate de l’intimée :                Me Nadine Taylor

 

JUGEMENT

 

          Il est ordonné que les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1997 et 1998 soient admis et que les cotisations soient déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations aux fins d’accorder la déduction, dans le calcul du revenu tiré par l’appelante de sa charge ou de son emploi, de montants de 5 083 $ et de 5 142 $, respectivement, en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

          L’appelante a droit à ses dépens, s’il en est.


Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2002.

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e jour de mai 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Date: 20020611

Dossier: 2001-3265(IT)I

 

ENTRE :

 

GERRY McCANN,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge en chef adjoint Bowman

 

[1]     Les présents appels ont été interjetés à l’encontre de cotisations établies à l’égard de l’appelante pour les années d’imposition 1997 et 1998. La question à trancher concerne le droit de l’appelante de déduire, dans le calcul de son revenu, des sommes de 6 190,43 $ et de 7 474,68 $ à titre de dépenses afférentes à un emploi en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[2]     En 1997 et en 1998, l’appelante travaillait comme agente de bord pour les Lignes aériennes Canadien International (ci‑après, « CI »). Elle était en outre la présidente, désignée par le syndicat, du comité de santé et de sécurité au travail de la section 4010 du SCFP, Division du transport aérien. Elle consacrait jusqu’à 60 % de son temps de travail à ses fonctions de présidente du comité.

 

[3]     La partie II du Code canadien du travail contient des dispositions détaillées concernant la sécurité et la santé des personnes qui occupent un emploi dans le cadre d’une entreprise fédérale. L’article 135 a trait à la mise sur pied et aux activités de comités de sécurité et de santé semblables à celui présidé par l’appelante. Voici le libellé du paragraphe 135(1) :

 

            Sous réserve des autres dispositions du présent article, l'employeur constitue, pour chaque lieu de travail placé sous son entière autorité et occupant habituellement au moins vingt employés, un comité de sécurité et de santé d'au moins deux personnes. La moitié des membres doivent être des employés qui, à la fois :

 

a)         n'exercent pas des fonctions de direction;

 

b)         sous réserve des règlements d'application du paragraphe (11), ont été choisis par le syndicat représentant les employés et par les employés non représentés par un syndicat.

 

[4]     Le paragraphe 135(6) énonce en détail les pouvoirs étendus de ces comités :

 

Le comité de sécurité et de santé :

 

a)         reçoit, étudie et tranche rapidement les plaintes relatives à la sécurité et à la santé des employés qu'il représente;

 

b)         tient les registres de ses décisions sur ces plaintes;

 

c)         collabore avec les services de santé qui desservent le lieu de travail;

 

d)                  peut mettre sur pied et promouvoir des programmes de sécurité et de santé en vue de l'éducation dans ce domaine des employés qu'il représente;

 

e)         participe à toutes les enquêtes en matière de sécurité et de santé au travail et fait appel, en cas de besoin, au concours de personnes professionnellement ou techniquement qualifiées pour le conseiller;

 

f)          peut élaborer et mettre en œuvre des programmes, des mesures et des procédures en vue de la protection des employés ou de l'amélioration de leurs conditions de sécurité et de santé;

 

g)         assure le suivi des programmes, mesures et procédures se rapportant à la sécurité et à la santé des employés;

 

h)         veille à ce que soient tenus des registres appropriés des accidents du travail et des risques pour la santé, et vérifie régulièrement les données qui s'y rapportent;

 

i)          collabore avec les agents de sécurité;

 

j)          peut demander à l'employeur les renseignements qu'il juge nécessaires afin de recenser les risques réels ou potentiels que peuvent présenter dans le lieu de travail les matériaux, les méthodes de travail ou l'équipement;

 

k)         a accès sans restriction aux rapports de l'État et de l'employeur sur la sécurité et la santé des employés qu'il représente, l'accès aux dossiers médicaux étant toutefois subordonné au consentement de l'intéressé.

 

[5]     Voici le libellé des paragraphes 135(7), (8) et (9) :

 

(7)        Le comité de sécurité et de santé tient un registre précis des questions dont il est saisi aux termes du paragraphe (6) ainsi que le procès-verbal de ses réunions et, sur demande, les met à la disposition de l'agent de sécurité.

 

(8)        Le comité de sécurité et de santé tient au minimum une réunion par mois pendant les heures ouvrables. Il se réunit aussi en cas d'urgence ou de situation exceptionnelle, même en dehors des heures ouvrables.

 

(9)        Les membres du comité de sécurité et de santé peuvent s'absenter de leur travail pour exercer leurs fonctions au comité, notamment pour assister aux réunions; les heures qu'ils y consacrent sont assimilées, pour le calcul du salaire qui leur est dû, à des heures de travail.

 

[6]     Il ressort de la preuve que les problèmes éprouvés par les agents de bord au chapitre de la santé et de la sécurité étaient très fréquents. Le comité était très actif et jouait un rôle important. Toutefois, là n’est pas la question. Nous devons déterminer si l'appelante peut déduire les dépenses déclarées, dépenses qui sont énumérées à l’annexe A de la réponse à l’avis d’appel.

 

                   [TRADUCTION]

GERRY McCANN

ANNÉES D’IMPOSITION 1997 ET 1998

DÉPENSES DÉCLARÉES ET REJETÉES

 

                                                                        1997                1998

Frais de véhicule à moteur                              84,10 $             28,80 $

Stationnement                                                30,00 $             36,00 $

Fournitures                                                  120,00 $           120,00 $

Téléphone                                                   330,00 $                  1 260,00 $

Déduction pour amortissement                     787,50 $                   1 344,60 $

Local de travail à domicile                        4 838,83 $                   4 685,28 $

 

Dépenses déclarées                          6  190,43 $        7 474,68 $

 

Dépenses rejetées                             6 190,43 $         7 474,68 $

 

Dépenses admises                                          $                      $

 

 

Frais de local de travail à domicile déclarés

Chauffage                                                                                     3 250,00 $

Électricité                                         1 000,00 $

Entretien                                                                              800,00 $

Impôts fonciers                                                                             1 148,22 $

Loyer                                             32 400,00 $ 24 750,00 $

Câble                                                          438,00 $          876,00 $

Total                                              33 838,00 $ 30 824,22 $

Usage à des fins personnelles déclaré  28 999,17 $     26 138,94 $

Montant déclaré                                 4 838,83 $ 4 685,28 $

 

[7]     L’appelante a déclaré ces montants en se fondant sur le paragraphe 8(1) de la Loi, dont voici un extrait :

 

8(1)      Sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

 

[…]

 

h.1)      dans le cas où le contribuable, au cours de l'année, a été habituellement tenu d'accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur ou à différents endroits et a été tenu, aux termes de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur qu'il a engagés dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, les sommes qu'il a dépensées au cours de l'année au titre des frais afférents à un véhicule à moteur pour se déplacer dans l'exercice des fonctions de son emploi, sauf s'il a, selon le cas:

 

(i)         reçu une allocation pour frais afférents à un véhicule à moteur qui, par l'effet de l'alinéa 6(1)b), n'est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l'année,

 

(ii)        demandé une déduction pour l'année en application de l'alinéa f)

 

[…]

 

i)          les sommes payées par le contribuable au cours de l'année au titre :

 

(i)         des cotisations annuelles de membre d'association professionnelle dont le paiement était nécessaire pour la conservation d'un statut professionnel reconnu par la loi,

 

(ii)        du loyer de bureau ou du salaire d'un adjoint ou remplaçant que le contrat d'emploi du cadre ou de l'employé l'obligeait à payer,

 

(iii)       du coût des fournitures qui ont été consommées directement dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi et que le contrat d'emploi du cadre ou de l'employé l'obligeait à fournir et à payer,

 

[…]

 

[8]     L’avocate de l’intimée invoque pour sa part le paragraphe 8(2) :

 

Seuls les montants prévus au présent article sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi.

 

[9]     Le droit de déduire des dépenses afférentes à un emploi doit être énoncé à l’article 8. Dans le cas contraire, la déduction doit être rejetée.

 

[10]    Les deux parties ont invoqué le paragraphe 8(13), dont voici le libellé :

 

            Malgré les alinéas (1)f) et i):

 

a)         un montant n'est déductible dans le calcul du revenu d'un particulier pour une année d'imposition tiré d'une charge ou d'un emploi pour la partie d'un établissement domestique autonome où le particulier réside que si cette partie, selon le cas:

 

(i)         est le lieu où le particulier accomplit principalement les fonctions de la charge ou de l'emploi,

 

(ii)        est utilisée exclusivement, au cours de la période à laquelle le montant se rapporte, aux fins de tirer un revenu de la charge ou de l'emploi et est utilisée pour rencontrer des clients ou d'autres personnes de façon régulière et continue dans le cours normal de l'exécution des fonctions de la charge ou de l'emploi.

 

b)         si une partie de l'établissement domestique autonome du particulier répond à l'une des conditions énoncées aux sous-alinéas a)(i) ou (ii), le montant déductible pour cette partie d'établissement dans le calcul du revenu du particulier pour l'année tiré de la charge ou de l'emploi ne peut dépasser son revenu ainsi tiré pour l'année, calculé compte non tenu d'une déduction pour cette partie d'établissement;

 

c)                  tout montant qui, par le seul effet de l'alinéa b), n'est pas déductible pour une partie d'établissement domestique autonome dans le calcul du revenu du particulier pour l'année d'imposition précédente tiré de la charge ou de l'emploi est réputé être un montant qui est par ailleurs déductible au titre de la partie de l'établissement dans le calcul du revenu du particulier pour l'année tiré de la charge ou de l'emploi et qui est, sous réserve de l'alinéa b), déductible dans le calcul de ce revenu.

 

[11]    L’avocate de l’intimée ne conteste pas le fait que l’appelante ait engagé les dépenses déclarées. La position de l’intimée est exposée aux paragraphes 10 et 11 de la réponse :

 

          [TRADUCTION]

 

10.       Il soutient respectueusement que, d’une part, l’appelante ne peut déclarer les dépenses en cause en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi puisqu’elle n’était pas tenue, par les conditions de son emploi ou aux fins de tirer un revenu de son emploi, d’engager ou d’acquitter ces dépenses et que, de ce fait, aux termes du paragraphe 8(2) de la Loi, elle ne peut les déduire, et que, d’autre part, elle ne peut déclarer de frais de local de travail à domicile en application du paragraphe 8(13) de la Loi.

 

11.       Il soutient en outre que l’appelante ne peut déclarer de déduction pour amortissement ni déduire d’intérêts hypothécaires, étant donné que l’article 8 de la Loi n’autorise pas la déduction de dépenses engagées par un employé au titre d’immobilisations.

 

[12]    En ce qui touche le paragraphe 11, mentionnons que l’appelante a renoncé à se prévaloir de la déduction pour amortissement et qu’elle n’a pas déduit d’intérêts hypothécaires.

 

[13]    La position énoncée dans la réponse diffère quelque peu de celle exposée dans une lettre aux comptables de l’appelante, Grieves & Associates, par la Division des appels de l’ADRC. Nous reproduisons cette lettre ci‑après :

 

[TRADUCTION]

 

Objet   Gerry McCann

            Avis d’opposition datés du 4 avril 2000

            concernant les années d’imposition 1997 et 1998               

 

Nous avons examiné les oppositions en question.

 

Nous avons discuté avec les Lignes aériennes Canadien International et avons précisé certains points; on nous a notamment indiqué que les postes reliés à la sécurité et à la santé constituent un travail bénévole et ne sont assortis d’aucun contrat de travail.

 

En outre, toutes les dépenses engagées par les titulaires sont remboursées par le syndicat.

 

Vous observerez que les dépenses afférentes à un emploi ne peuvent être déduites que par des employés gagnant un salaire ou un revenu de commissions. Dans le cas d’un travail bénévole qui n’est visé par aucun contrat de travail, les dépenses connexes ne peuvent être déduites (même dans le cas de dépenses non remboursées) car elles ne sont pas réputées avoir été engagées en vue de gagner un revenu d’emploi.

 

Pour ces raisons, nous proposons la ratification de la nouvelle cotisation établie précédemment; nous conserverons le dossier jusqu’au 30 novembre 2000 afin que vous puissiez nous faire parvenir vos commentaires ou nous fournir le contrat de travail pertinent. Si nous n’avons pas reçu de réponse dans ce délai, nous vous enverrons un avis de ratification. 

 

[14]    L’avocate de l’intimée a présenté les arguments suivants :

 

a)       L’appelante remplissait ses fonctions de présidente du comité à titre de bénévole, non d’employée des Lignes aériennes Canadien International.

 

b)      Elle n’était pas tenue par son contrat de travail d’engager les dépenses en cause.

 

c)       Elle pouvait être défrayée de toutes ses dépenses par l’employeur ou par le syndicat.

 

d)      Elle pouvait disposer d’un local de travail et d’un ordinateur à l’aéroport.

 

e)       Elle n’avait pas à utiliser son automobile.

 

f)       Le local de travail situé à son domicile n’est pas le lieu où elle accomplissait principalement les fonctions de sa charge ou de son emploi, ce qui rend les dépenses non déductibles aux termes du paragraphe 8(13).

 

[15]    Ces arguments sont fort éloquents. La solution la plus simple serait de les accepter, en totalité ou en partie, et de rejeter les appels. Par contre, ceux‑ci ont des mérites indéniables, et j’estime que notre cour doit à l’appelante d’envisager avec une certaine circonspection les arguments de la Couronne. Dans une importante proportion des causes entendues par notre cour, en particulier sous le régime de la procédure informelle, les appelants ne sont pas représentés. La ligne de moindre résistance consiste pour la Cour à rejeter l’appel, étant donné que les arguments de la Couronne peuvent généralement sembler plausibles, et le juge de première instance, s’il les agrée et rejette l’appel, peut au moins se dire que l’appelant non représenté est peu susceptible d’en appeler à la Cour d’appel fédérale. La responsabilité de notre cour, en tant que tribunal de première instance ayant compétence exclusive pour entendre les appels interjetés en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu et d’autres lois fédérales, ne saurait se borner à souscrire à des arguments en apparence plausibles.

 

[16]    Dans la présente affaire, une employée de CI est nommée par son syndicat présidente d’un comité important dont la création est requise aux termes d’une loi fédérale, le Code canadien du travail, qui énumère de façon détaillée les pouvoirs et fonctions dudit comité. C’est à l’employeur, c’est‑à‑dire CI, qu’il incombe de mettre sur pied un tel comité, non au syndicat. La Couronne semble avancer un argument voulant que l’appelante, lorsqu’elle remplissait les fonctions associées au comité, n’ait pas agi à titre d’employée de CI, mais qu’elle ait plutôt effectué un travail bénévole pour le compte de son syndicat. Le fait que le syndicat puisse nommer quelqu’un au sein du comité ne signifie pas que l’appelante y siégeait pour le compte du syndicat, indépendamment de son contrat de travail avec CI. Je crois que l’appelante, lorsqu’elle remplissait la fonction de présidente du comité, accomplissait cette tâche à titre d’employée de CI conformément à son contrat de travail. On pourrait vérifier le bien‑fondé de cette conclusion en déterminant si, dans l’hypothèse où les employés de l’employeur n'étaient pas syndiqués, l’appelante cesserait d’être l’employée des Lignes aériennes Canadien International durant les périodes où elle accomplit ses tâches relatives au comité. Selon moi, la réponse va de soi. Cette conclusion a pour effet de lever l’un des principaux éléments pouvant faire obstacle à l’accueil de l’appel.

 

[17]    Dès lors que je conclus que l’employée accomplissait ses fonctions au sein du comité dans le cadre de son contrat de travail avec CI, la question suivante est de savoir si les dépenses qu’elle a engagées étaient requises de sa part aux termes de son contrat de travail. Pour y répondre, il faut examiner au préalable plusieurs autres affirmations de l’intimée.

 

[18]    La Couronne a appelé à témoigner M. Stephen Knowles, qui travaille actuellement pour Air Canada à titre de directeur des  opérations de sécurité et des produits servis dans les avions. Lors des années en cause, M. Knowles était directeur des agents de bord de CI de Vancouver, Calgary et Edmonton. Il a déclaré que l’employeur fournissait des locaux de travail et du matériel, par exemple un ordinateur, pour l’accomplissement des tâches reliées au comité. Il a ajouté que toutes les dépenses engagées étaient en principe remboursées [TRADUCTION] « soit par la société, soit par le syndicat ».

 

[19]    Mme McCann a catégoriquement rejeté ces affirmations. Elle a indiqué que le local de travail qui aurait pu être affecté à cette fin ne convenait pas du tout aux travaux du comité et qu’aucun ordinateur n’était à sa disposition à titre de présidente du comité. Elle a également dit qu’elle n’aurait pas été défrayée par le syndicat ni par l’employeur.

 

[20]    M. Knowles a fait allusion à la convention collective. Celle‑ci n’a pas été déposée en preuve, et je ne suis pas disposé à accepter ses souvenirs concernant son contenu.

 

[21]    Lorsqu’une divergence existe entre le témoignage de M. Knowles et celui de l’appelante, je souscris à celui de l’appelante car je le juge plus fiable. M. Knowles a indiqué que CI lui avait donné comme [TRADUCTION] « directive ferme » de n’approuver aucun certificat T‑2200 concernant des locaux de travail et le paiement de dépenses. La présentation d’un certificat T‑2200 (Déclaration des conditions de travail) est une condition préalable au remboursement de dépenses afférentes à un emploi engagées par un employé. Au départ, l’appelante a présenté de tels certificats, précisant que les conditions énoncées au paragraphe 8(1) de la Loi étaient réunies. En décembre 2000, à la demande de l’ADRC, M. Knowles a produit de nouveaux formulaires T‑2200 où il indiquait qu’aucune des conditions n’était remplie.

 

[22]    Je ne pense pas que M. Knowles ait été un témoin impartial. De plus, il ne faisait pas partie du comité de santé et de sécurité au travail lors des années en cause, et son témoignage concernant le droit qu’avait ou non l’appelante de se faire rembourser ses dépenses ou de disposer d’un local de travail repose sur des conjectures, sans plus.

 

[23]    Me fondant sur la preuve, je conclus que ni CI ni le syndicat n’ont mis un local de travail ou un ordinateur à la disposition de l’appelante pour que celle‑ci puisse accomplir ses fonctions de présidente du comité. En outre, je ne suis pas persuadé qu’elle aurait eu droit au remboursement de ses dépenses. Aucun argument n’a été formulé à propos de ce dernier point, et il incombait donc à la Couronne d’en établir le bien‑fondé. Or, elle ne s’est pas acquittée de cette charge.

 

[24]    Je récapitule les conclusions auxquelles je suis arrivé jusqu’ici :

 

a)       L’appelante accomplissait ses fonctions de présidente du comité aux termes de son contrat de travail avec les Lignes aériennes Canadien International.

 

b)      On n’a pas mis à sa disposition d’installations ni de matériel, par exemple un local de travail ou un ordinateur, ce qui l’a obligée à fournir elle‑même les installations et le matériel dont elle avait besoin afin d’accomplir ses fonctions de présidente du comité.

 

c)       Elle n’avait pas droit au remboursement des dépenses ainsi engagées.

 

[25]    Est‑ce qu’il ressort de ces conclusions que le paiement des dépenses était requis aux termes du contrat de travail? Si les fonctions étaient visées par le contrat de travail de l’appelante et que cette dernière devait, pour accomplir ces fonctions, engager des dépenses, j’estime qu’elle y était tenue par son contrat de travail. L’appelante a indiqué qu’elle avait conclu un accord verbal selon lequel elle devait effectuer ces tâches dans un local de travail à son domicile. J’accepte ce témoignage, bien que je ne croie pas que cela soit absolument nécessaire. Si, à des fins d’efficacité, elle devait accomplir les fonctions liées à son emploi à sa résidence ou engager des dépenses, je considère qu’il s’agissait d’une exigence implicite du contrat de travail. Il n’est pas nécessaire de produire un contrat écrit énonçant expressément la chose.

 

[26]    Avant d’aborder l’importante question du local de travail à domicile, je vais régler les points de moindre importance. Je ne suis pas prêt à accorder la déduction des frais afférents à un véhicule automobile ni les frais de stationnement. Ces dépenses correspondent aux coûts à engager pour faire le trajet entre son lieu de travail, à l’aéroport, et sa résidence, où se trouve son local de travail. Je ne crois pas que le coût associé à ce trajet constitue l’objet de l’alinéa 8(1)h.1) de la Loi, et ce, même en tenant compte du fait que l’appelante a un local de travail à sa résidence. Une interprétation contraire serait tirée par les cheveux et, dans une certaine mesure, déraisonnable.

 

[27]    Le coût des fournitures est visé par le sous‑alinéa 8(1)i)(iii) de la Loi et est donc déductible. Les frais de téléphone de 330 $ en 1997 et de 1 260 $ en 1998 représentent le coût de fournitures au sens du sous‑alinéa 8(1)i)(iii) de la Loi (se reporter à l’arrêt Patrick J. Fardeau c. La Reine, dossier 1999‑2399(IT)I, le 23 mai 2002). Je pense que les frais relatifs à l’année 1997 étaient reliés en partie au téléphone de sa résidence tandis que ceux engagés en 1998 avaient trait à un téléphone cellulaire dont elle avait besoin. Je ne vois aucun motif de rejeter ces frais.

 

[28]    J’étudierai maintenant les dépenses plus substantielles – 4 838,83 $ et 4 685,28 – correspondant au coût du local de travail à son domicile. L’appelante a fourni des photographies du local, et il semble clair que toute la pièce était requise pour le travail qu’elle y accomplissait. D’ailleurs, considérant l’encombrement de la pièce, l’appelante aurait sans doute pu utiliser plus d’espace encore. Je comprends pourquoi elle avait besoin d’un local de travail à son domicile. La résidence elle‑même était louée lors des deux années en cause, le loyer se chiffrant à 32 400 $ et 24 750 $. Sa répartition du coût entre l’espace utilisé à des fins personnelles et le local de travail n’a rien de déraisonnable (14,3 % en 1997 et 15,2 % en 1998) et, quoi qu’il en soit, n’est pas contestée. Par contre, je ne conçois pas que le sous‑alinéa 8(1)i)(ii) (loyer de bureau) vise les autres postes figurant sous la rubrique [TRADUCTION] « Frais de local de travail à domicile déclarés ». Les pourcentages de répartition utilisés par l’appelante, si on les applique uniquement au loyer, donnent des frais de local de travail à domicile de 4 633 $ en 1997 et de 3 762 $ en 1998. Ce résultat peut sembler quelque peu déraisonnable du fait que, si son revenu était tiré d’une entreprise, les autres frais de local de travail à domicile seraient admis; toutefois, la restriction énoncée au paragraphe 8(2) est fort précise, et le sous‑alinéa 8(1)i)(ii) ne mentionne que le loyer de bureau.

 

[29]    L’intimée indique que l’appelante ne peut déduire aucun montant au titre du loyer du bureau, étant donné que son local de travail à domicile n’est pas le lieu où elle « accomplit principalement les fonctions de [sa] charge ou de [son] emploi ».

 

[30]    Le local de travail à domicile servait uniquement à l’accomplissement des tâches reliées au comité. L’appelante a témoigné que 90 % environ de ces tâches étaient effectuées dans son local de travail, et qu’elle y consacrait jusqu’à 60 % de son temps de travail total. Ces pourcentages sont quelque peu imprécis, mais je ne dispose de rien de mieux. Si je calcule ce que représente 90 % de 60 %, j’obtiens 54 %. Ainsi que l’a mentionné le juge Dussault dans l’affaire Transport Jacques Lemieux Inc. c. M.R.N., C.C.I., no 89-2522 (IT), 25 octobre 1990, à la page 4 ([1991] C.T.C. 2612, à la page 2614) :

 

Si l'expression « principalement » semble causer peu de difficulté en ce qu'elle signifie en majeure partie, ou exprimée en pourcentage, plus de 50 %, c'est sur les facteurs utilisés pour la décrire qu'il semble y avoir des divergences.

 

[31]    Selon ce principe, le local de travail était un lieu où l’appelante accomplissait « principalement » les fonctions de sa charge ou de son emploi. Je tiens toutefois à éviter que la présente affaire se résume à un calcul mathématique. Le simple bon sens dicte que le local de travail sert exclusivement à cet aspect important du travail de l’appelante. Pour dire les choses en langage courant, c’est là qu’elle accomplit principalement son travail.

 


[32]    Les appels sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations aux fins d’accorder la déduction, dans le calcul du revenu tiré par l’appelante de sa charge ou de son emploi en 1997 et en 1998, de montants de 5 083 $ et de 5 142 $, respectivement, en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’appelante a droit à ses dépens, s’il en est.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2002.

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e jour de mai 2004.

 

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 

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