Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c AC, 2024 TSS 758
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision
Partie appelante : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Représentant : | Joshua Toews |
Partie intimée : | A. C. |
Décision portée en appel : | Décision de la division générale datée du 15 décembre 2023 (GE-23-2033) |
Membre du Tribunal : | Pierre Lafontaine |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 28 mai 2024 |
Personnes présentes à l’audience : | Représentant de l’appelante |
Date de la décision : | Le 2 juillet 2024 |
Numéro de dossier : | AD-24-53 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est accueilli. Le trop-payé de l’intimée (prestataire) est de 7 500 $. Elle a déjà remboursé 5 000 $. Le solde de sa dette est de 2 500 $.
Aperçu
[2] La prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi d’urgence (PUAE). L’appelante (Commission) lui a versé 24 semaines de PUAE. Au total, la prestataire a reçu 12 000 $ de PUAE. La Commission soutient que la prestataire a reçu 7 500 $ de trop. Elle a reçu 12 000 $, mais aurait dû recevoir seulement 4 500 $. La Commission fait valoir que la prestataire a déjà remboursé 5 000 $ donc le montant du trop-payé est de 2 500 $.
[3] La division générale a déterminé que la prestataire a reçu 24 semaines de PUAE, mais qu’elle avait droit à 11 semaines. Elle a conclu que la prestataire doit rembourser le trop-payé de 1 500 $ reçu, et non 2 500 $.
[4] La Commission a obtenu la permission d’en appeler de la décision de la division générale. Elle soutient que la division générale a commis une erreur de droit.
[5] Je dois décider si la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).
[6] J’accueille l’appel de la Commission.
Question en litige
[7] Est-ce que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE?
Analyse
Mandat de la division d’appel
[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas de page 1
[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.
[10] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.
Est-ce que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE?
[11] L’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE se lit comme suit :
153.9(4) Dans le cas où le total des revenus provenant d’un emploi que le prestataire exerce ou d’un travail qu’il exécute pour son compte est de mille dollars ou moins pour une période de quatre semaines qui se succèdent dans l’ordre chronologique sans nécessairement être consécutives et à l’égard desquelles la prestation d’assurance-emploi d’urgence est versée, le prestataire est réputé satisfaire aux exigences des sous-alinéas (1)a)(iv) et (v), de l’alinéa (1)b) ou du sous-alinéa (1)c)(iv), selon le cas.
[12] En vertu de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE, une personne est admissible à recevoir des prestations pendant quatre semaines si elle gagne moins de 1 000 $ sur une période de quatre semaines. Comment établir la période de quatre semaines fait l’objet d’une interprétation contradictoire par le Tribunal.
[13] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit en ne suivant pas le raisonnement de la division d’appel dans l’affaire Commission de l'assurance-emploi du Canada c HM, 2023 TSS 831.
[14] La division générale a considéré que la demande de la prestataire a été établie le 12 avril 2020. Elle a considéré cette semaine comme la semaine de départ. La division générale a déterminé que la loi lui permettait de choisir n’importe quel période de quatre semaines mais avec certaines restrictions. La première étant que les quatre semaines doivent être consécutives. Une autre restriction est que l’individu doit avoir été payé des prestations pour cette semaine.
[15] La division générale a regardé la période du 12 avril au 9 mai 2020. Elle a considéré que cette période de quatre semaines rencontre la définition. Elle a par la suite regardé la période du 19 avril 2020 et se terminant le 16 mai 2020. Et ainsi de suite.
[16] La division générale estime qu’il s’agit de la seule façon d’analyser l’admissibilité. Elle est d’avis que si nous ne regardons pas de cette façon, il y a un risque que certaines semaines ne comptent pas pour l’analyse de 153.9(4). Ce serait le cas lorsque le nombre total de semaines payé n’est pas un facteur de quatre.
[17] La division d’appel dans HM a procédé à une analyse du texte, contexte, et de l’objet de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE. Elle a déterminé que trois méthodes de comptage sont conformes au texte de la disposition, même si elles proposent chacune un point de départ différent. Cependant, après analyse, elle a retenu la troisième méthode de comptage.
[18] La division d’appel a décidé qu’une partie prestataire est rétrospectivement admissible à la PUAE au titre de l’article 153.9(4) (comme solution de rechange à l’article 153.9(1)) si elle gagne au plus 1 000 $ sur la période de quatre semaines précédant la période de demande de deux semaines pour laquelle l’admissibilité est déterminée, en ignorant les semaines pour lesquelles la PUAE n’a pas été versée.
[19] À mon avis, la division d’appel dans HM a rejeté à bon droit l’utilisation de blocs distincts de quatre semaines à partir du début de la période de prestations.
[20] Selon la loi, la PUAE devait être demandée par périodes de deux semaines, et la Commission devait décider si la prestation était payable pour les mêmes périodes de deux semaines.
[21] De plus, l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE ne précise pas qu’une partie prestataire qui gagne au plus 1 000 $ sur une période de quatre semaines est admissible à la PUAE. L’article 153.9(4) considère plutôt que la partie prestataire a satisfait à l’exigence prévue à l’article 153.9(1) de n’avoir aucun revenu pendant au moins sept jours consécutifs au cours d’une période de demande de deux semaines (et non de quatre semaines).
[22] Je suis d’accord avec HM que les périodes distinctes de quatre semaines à partir du début de la période de prestations n’ont rien à voir avec les semaines pour lesquelles l’exception prévue à l’article 153.9(4) est demandée. Il est beaucoup moins arbitraire, lorsqu’on examine l’admissibilité rétrospective, de rattacher la période de quatre semaines aux semaines pour lesquelles l’exception est demandée.
[23] De plus, l’utilisation de blocs distincts de quatre semaines à partir du début de la période de prestations laisserait de nombreuses parties prestataires sans la possibilité de bénéficier de l’exception vers la fin de leur période de prestations. Les parties prestataires auraient seulement la première option pour être admissible au titre de l’article 153.9(1).
[24] Quant au risque que certaines semaines ne soient pas comptées par la méthode rétroactive de comptage, il est sans fondement. On peut suivre l’interprétation de HM tout en comptant chaque semaine nécessaire dans l’analyse des quatre semaines. Une période de quatre semaines sous 153.9(4) inclut la période de deux semaines pour laquelle on vérifie l’admissibilité.
[25] Pour ces raisons, je suis d’avis que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 153.9(4) de la Loi sur l’AE.
[26] Je suis donc justifié d’intervenir.
Réparation
[27] Considérant que les parties ont eu l'opportunité de présenter leur cause devant la division générale, je rendrai la décision qui aurait dû être rendue par la division générale.
[28] Lorsqu’on suit HM, on constate que le trop-payé de la prestataire est de 7 500 $. Elle a reçu la PUAE pour 24 semaines, pour un total de 12 000 $ en PUAE. Cependant, elle n’avait droit qu’à neuf semaines de PUAE, ou un total de 4 500 $. La prestataire a déjà remboursé 5 000 $. Il reste 2 500 $ à payer.
Conclusion
[29] L’appel de la Commission est accueilli. Le trop-payé de la prestataire est de 7 500 $. Elle a déjà remboursé 5 000 $. Le solde de sa dette est de 2 500 $.