Motifs de la demande

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DOSSIER : SCT-7007-11

TRADUCTION OFFICIELLE

RÉFÉRENCE : 2014 TRPC 4

DATE : 20140625

TRIBUNAL DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES

SPECIFIC CLAIMS TRIBUNAL

ENTRE :

 

 

PREMIÈRE NATION DE DOIG RIVER

Revendicatrice (Défenderesse)

 

Allisun Rana, pour la revendicatrice (défenderesse)

– et –

 

 

PREMIÈRES NATIONS DE BLUEBERRY RIVER

Revendicatrice (Défenderesse)

 

 

James Tate et Ava Murphy, pour la revendicatrice (défenderesse)

– et –

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

Représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien

Intimée (Demanderesse)

 

Brett C. Marleau, pour l’intimée (demanderesse)

 

 

DEMANDE INSTRUITE À L’AIDE D’OBSERVATIONS ÉCRITES

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’honorable Patrick Smith


I. L’aperçu

[1] Les 29 et 30 mai 2013, une audience de deux jours a été tenue au centre communautaire de la Première Nation de Doig River.

[2] L’audience, qui faisait suite à une demande qualifiée de requête en radiation, portait sur deux questions : (1) à savoir si la Couronne avait été libérée de sa responsabilité à l’égard de la revendication relative aux droits miniers des revendicatrices par suite de l’entente de décharge et d’indemnisation conclue à la suite de l’arrêt Bande indienne de la rivière Blueberry c Canada (Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1995] 4 RCS 344, concernant la cession de la RI 172; et (2) à savoir si la revendication relative aux droits miniers était irrecevable par application du principe de la chose jugée.

[3] La décision du Tribunal a été publiée le 20 février 2014. Les Premières Nations ont obtenu gain de cause sur les deux questions.

[4] Le Tribunal a demandé des observations sur les dépens et il les a reçues et examinées.

II. les faits

[5] Les faits de la présente revendication sont exposés en détail dans la décision du Tribunal; il n’est donc pas nécessaire de les répéter ici.

III. les règles applicables en ce qui concerne les dépens

[6] Le paragraphe 110(2) des Règles de procédure du Tribunal des revendications particulières, DORS/2011-119 [Règles], confère au Tribunal le pouvoir discrétionnaire de rendre une ordonnance quant aux dépens après l’audition sur le fond.

[7] Les paragraphes 111(1) et (2) des Règles énoncent les facteurs que le Tribunal doit prendre en considération lorsqu’il décide s’il adjugera des dépens.

[8] L’alinéa 111(2)a) des Règles dispose que, quand les dépens sont réclamés par les Premières Nations, le Tribunal doit se demander si les frais « ont été raisonnablement engagés mais ils sont disproportionnés par rapport à l’indemnité qui sera accordée ».

[9] L’alinéa 111(2)b) des Règles oblige le Tribunal à prendre en considération la complexité et l’importance des questions soulevées.

[10] La liste des facteurs énoncés à l’article 111 des Règles n’est pas exhaustive. L’article 5 des Règles permet au Tribunal de se référer aux Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, pour compléter « toute question de procédure » non prévue dans ses propres règles d’attribution des dépens.

[11] Le paragraphe 400(3) des Règles des Cours fédérales énonce les facteurs à considérer dans l’adjudication des dépens, notamment le résultat de l’instance, l’importance et la complexité des questions en litige et toute autre question que la Cour juge pertinente.

IV. Les principes généraux de l’aDjudication des dépens

[12] En matière civile, la règle générale veut que les dépens suivent l’issue de la cause. Comme il est énoncé dans l’ouvrage intitulé The Law of Costs :

[Traduction] En général, on peut dire que, lorsqu’une requête est régulièrement formée, les dépens devraient être accordés à la partie requérante, si elle obtient gain de cause, et dans le cas contraire, ils devraient être accordés à la partie intimée, toujours sous réserve du pouvoir discrétionnaire du juge ou de l’officier de justice. [Mark Orkin, The Law of Costs, feuilles mobiles, (Aurora, Ont : Canada Law Book, 1987), art 402, p. 4 1]

[13] Voici les trois objectifs fondamentaux des règles modernes en matière de dépens :

  • indemniser la partie qui a gain de cause des coûts occasionnés par le litige;

  • favoriser les règlements extrajudiciaires;

  • décourager et sanctionner les comportements inacceptables.

V. Les décisions antérieures du tribunal sur les dépens

[14] En 2012, le Tribunal a rendu sa première décision en matière de dépens dans l’affaire Première Nation (Bande indienne) de Big Grassy (Mishkosiimiiniiziibing) c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2012 TRPC 6 [Big Grassy].

[15] La Première Nation de Big Grassy avait demandé que le Canada soit condamné aux dépens en vertu du paragraphe 110(1) des Règles, après avoir obtenu le rejet de la demande du Canada, présentée en vertu de l’article 29 des Règles, sur la question de savoir à quelle partie il incombait d’établir un point de droit et de fait.

[16] Dans Big Grassy, le Tribunal a décidé de ne pas accorder de dépens et d’adopter une approche fondée sur la présomption qu’« aucuns dépens » ne seront adjugés dans le cadre des demandes provisoires.

[17] Aux paragraphes 26 à 31 et 39 à 44 du jugement Big Grassy, le Tribunal explique cette décision. Celle-ci repose essentiellement sur l’idée que, si le Tribunal devait adopter le principe selon lequel « les dépens suivent l’issue de la cause », cela pourrait entraver l’accès à la justice en plaçant les Premières Nations, qui sont pauvres et qui manquent de ressources financières, devant un obstacle financier important, en plus d’empêcher l’affaire d’être instruite sur le fond.

VI. les positions des parties

[18] Les revendicatrices prétendent que, bien que la demande ait été qualifiée de requête en radiation, l’audience portait, dans les faits, sur la question complexe de savoir si la revendication était bien fondée en droit, plutôt que sur une demande provisoire, puisqu’elle portait sur deux éléments clés de la réponse du Canada à la revendication.

[19] Selon le Canada, il s’agissait de l’audition d’une demande provisoire et que rien ne justifie le Tribunal de s’écarter de la présomption selon laquelle aucuns dépens ne sont adjugés, surtout qu’il n’y a pas eu d’inconduite ou d’abus de procédure.

VII. la décision

[20] Pour les motifs qui suivent, les dépens sont adjugés aux revendicatrices sur une base d’indemnisation partielle conformément à la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, et ne doivent pas dépasser le montant du financement reçu du gouvernement fédéral pour les frais et dépenses engagés dans la présente instance.

[21] L’audience faisait suite à une demande qualifiée de requête en radiation, mais je souscris aux observations des revendicatrices selon lesquelles il s’agissait en réalité d’une audience sur le bien-fondé de deux des principaux moyens de défense soulevés en réponse à la revendication et que, pour cette raison, il ne s’agissait pas d’une audience sur une demande provisoire, et l’approche fondée sur la présomption selon laquelle aucuns dépens ne sont adjugés, retenue dans l’affaire Big Grassy, ne devrait donc pas s’appliquer.

[22] Le Tribunal a examiné une quantité volumineuse d’éléments de preuve et a entendu bon nombre d’arguments juridiques complexes qui touchaient à l’essence même de la revendication.

[23] L’adjudication des dépens est conforme aux objectifs et à la philosophie du Tribunal ainsi qu’au paragraphe 111(2) des Règles et à l’alinéa 400c) des Règles des Cours fédérales.

[24] L’adjudication des dépens est aussi dans l’intérêt du public puisqu’elle encourage les Premières Nations à saisir le Tribunal de leurs revendications particulières, ce qui a pour effet de favoriser le règlement des différends de longue date et de promouvoir le principe général de conciliation des intérêts des Autochtones et des non-Autochtones.

[25] Dans le cas où les parties seraient incapables de s’entendre sur le montant des dépens, elles devront présenter d’autres observations ou demander des instructions au Tribunal.

PATRICK SMITH

L’honorable Patrick Smith

Traduction certifiée conforme

Mylène Borduas


TRIBUNAL DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES

SPECIFIC CLAIMS TRIBUNAL

Date : 20140625

Dossier : SCT-7007-11

OTTAWA (ONTARIO), le 25 juin 2014

En présence de l’honorable Patrick Smith

ENTRE :

PREMIÈRE NATION DE DOIG RIVER

Revendicatrice (Défenderesse)

et

PREMIÈRES NATIONS DE BLUEBERRY RIVER

Revendicatrice (Défenderesse)

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien

Intimée (Demanderesse)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

À :

 

Avocate de la revendicatrice (défenderesse) la PREMIÈRE NATION DE DOIG RIVER

Représentée par Allisun Rana

Rana Law, avocate

ET AUX :

Avocats de la revendicatrice (défenderesse) les PREMIÈRES NATIONS DE BLUEBERRY RIVER

Représentée par James Tate et Ava Murphy

Ratcliff & Company LLP

ET À :

Avocat de l’intimée (demanderesse)

Représentée par Brett C. Marleau

Ministère de la Justice

 

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