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Abstract: Motif de Décision (Dépens)

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  Association des Parents ayants droit de Yellowknife et al c. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest et al, 2014 CSTN-O 25
Date:   2014 03 28
Dossier:  S 1 CV 2005 000108
Dossier:  S 1 CV 2008 000133

COUR SUPRÊME DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST

ENTRE:

ASSOCIATION DES PARENTS AYANT DROIT DE YELLOWKNIFE, LA GARDERIE PLEIN SOLEIL, YVONNE CAREEN, CLAUDE ST-PIERRE et FÉDÉRATION FRANCO-TÉNOISE
Demandeurs
- et -

PROCUREUR GÉNÉRAL DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST et COMMISSAIRE DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
Défendeurs
ENTRE:
											
COMMISSION SCOLAIRE FRANCOPHONE, TERRITOIRES DU NORD-OUEST, CATHERINE BOULANGER et CHRISTIAN GIRARD
Demandeurs
- et -

PROCUREUR GÉNÉRAL DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST et COMMISSAIRE DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
Défendeurs
- et -

FÉDÉRATION NATIONALE DES CONSEILS SCOLAIRES FRANCOPHONES DU CANADA
Intervenante

MOTIFS DE DÉCISION (DÉPENS)


I) 	INTRODUCTION
[1]	Le 1er juin 2012, ce tribunal a rendu des décisions dans deux litiges concernant la portée des obligations du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO) dans la mise en oeuvre de  l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).  Association des parents ayants droit de Yellowknife et al. c. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest et al., 2012 CSTN-O 43cor.1 ("le dossier de Yellowknife"); Commission scolaire francophone Territoires du Nord-Ouest et al. c. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest et al., 2012 CSTN-O 44 ("le dossier de Hay River").  Dans ces décisions, les Demandeurs ont obtenu une ordonnance leur accordant leurs dépens entre avocat et client.  Ces décisions ont été portées en appel par les Défendeurs.  Les Défendeurs ont aussi déposé une requête demandant un sursis d’exécution des deux décisions.
[2]	En août 2012, les Demandeurs ont envoyé aux Défendeurs une facture pour chacun des dossiers, détaillant les honoraires et débours qu’ils réclament en guise de dépens.  En octobre 2012, les Défendeurs ont communiqué aux Demandeurs qu’ils contestaient certains aspects de ces factures.  Le 5 décembre 2012, les Demandeurs ont déposé une requête demandant au tribunal de fixer le montant des dépens.
[3]	En février 2013, Les Demandeurs ont communiqué avec le Greffe du tribunal pour obtenir une date d'audition pour cette requête.  Les Défendeurs ont communiqué au Greffe que selon eux, il était prématuré de fixer une date d’audition, puisque la décision octroyant les dépens faisait l’objet d’un appel et était visée par la requête en sursis d’exécution.
[4]	Pour les motifs énoncés dans une Note aux Parties datée du 14 février 2013, j'ai refusé de fixer une date d'audition tant que la Cour d'appel ne se serait pas prononcée au sujet de la demande de sursis d’exécution.
[5]	La 3 juillet 2013, la Cour d'appel des Territoires du Nord-Ouest a accordé un sursis d'exécution pour tous les aspects des décisions, sauf pour l'ordonnance concernant les¬¬¬ dépens. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest v. Association des Parents ayant droit de Yellowknife, 2013 CATN-O 03.  Une fois cette décision rendue, j'ai fixé une date d'audition pour la requête.
[6]	L'audition a eu lieu le 18 novembre 2013.  L’audition a duré une pleine journée et mis en évidence les points de vue très divergents des parties quant à la nature même de la requête, le cadre juridique qui la régit, le caractère raisonnable ou non des honoraires réclamés, et l'admissibilité de certains débours.
[7]	Les Demandeurs ont déposé, pour chacun des deux dossiers, un affidavit détaillé de Nadia Benjelloun, une assistante juridique de leur cabinet.  Ces affidavits incluent de nombreuses pièces justificatives pour expliquer le détail des honoraires et débours que les Demandeurs réclament.  Les Demandeurs ont aussi déposé quelques autres affidavits, dont celui assermenté par Nicole Garner le 12 novembre 2013, et certains documents pour apporter des précisions, et dans certains cas des corrections, aux informations contenues dans les affidavits de Mme Benjelloun.
[8]	Les Défendeurs ont eux aussi déposé certains documents, notamment des copies de lettres qu'ils ont fait parvenir aux Demandeurs, expliquant leurs objections à divers aspects des factures.
[9]	Sur la base des ajustements expliqués dans l'affidavit de Mme Garner (l'ajout de la facture #195180, qui avait été oubliée dans la facturation préparée par Mme Benjelloun, et le retranchement de la facture #190721, que les Demandeurs acceptent de retirer), les Demandeurs réclament 557,992.28$ en dépens pour le dossier de Yellowknife.  Quant au dossier de Hay River, Mme Garner apporte également des ajustements au montant initialement réclamé.  Elle affirme qu'un montant de 12,000.00$ doit être retranché pour tenir compte d'une requête interlocutoire pour laquelle une ordonnance de dépens a été prononcée contre les Demandeurs.  En outre, elle affirme qu'un montant de 175.00$ doit être retranché car il a été facturé par erreur.  Le total réclamé pour le dossier de Hay River s'élève donc à 730,728.71$.   Le total des dépens réclamés pour les deux dossiers est donc de  1,288,720,99$.
[10]	Les Défendeurs ont, le 1er octobre 2013, fait aux Demandeurs un paiement de 800,000.00$.  Ils plaident que cette somme représente un montant plus que raisonnable pour couvrir les honoraires, débours et intérêts dans les deux dossiers.
[11]	Les parties demandent toutes deux au tribunal décider du montant global qui inclurait l'ensemble des dépens, débours, et intérêts, et inclurait également les dépens de la présente requête s'il y a lieu.
II) 	OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES
[12]	Les représentations des parties soulèvent diverses questions de droit concernant les dépens.  Avant d'aborder ces questions, quelques observations d'ordre général s'imposent.
1.	Considérations procédurales
[13]	Normalement, la taxation des dépens n'est pas faite par le tribunal.  Les Règles de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest, R-010-96 (Les Règles de la Cour) prévoient que la taxation des dépens est du ressort d'un officier taxateur (Règles 668-669).  Le tribunal n'est impliqué dans le processus que si l'officier taxateur décide de demander au tribunal de se prononcer sur une question relative à la taxation (Règle 673), ou si une partie décide d'en appeler de la décision de l'officier taxateur (Règle 693).
[14]	En l'espèce, les Demandeurs ont déposé la requête pour demander au tribunal de fixer les dépens lorsque les Défendeurs se sont objectés aux factures qui leur avaient été transmises.  Les Demandeurs affirment que les Défendeurs ont refusé de payer les dépens.  Ils leur reprochent en outre d'avoir négligé de prendre des mesures pour en demander la taxation.
[15]	Les Défendeurs, de leur côté, affirment qu'ils avaient une responsabilité de vérifier que les dépens réclamés étaient appropriés et justifiés, surtout considérant que ces dépens doivent être payés à même les fonds publics.  Ils soulignent que face aux questions qu’ils ont soulevées, les Demandeurs n'ont répondu ni à leurs objections, ni à leurs offres de règlement, et ont plutôt choisi de saisir immédiatement le tribunal de la question.
[16]	Indépendamment des reproches que se font les parties au sujet de qui aurait dû faire quoi quand, ni l’une ni l’autre ne s'objecte à ce que le tribunal fixe maintenant le montant des dépens. Les Défendeurs n'ont jamais, à ma connaissance, insisté pour que la question soit soumise à un officier taxateur avant que le tribunal n’entende la présente requête.
[17]	La différence entre les factures soumises et ce que les Défendeurs jugent raisonnable est considérable. Certaines des objections des Défendeurs quant aux factures soulèvent des questions de droit.  Sur l’ensemble, la question du montant des dépens est très litigieuse, comme l'ont été l'ensemble des procédures dans ces deux dossiers.  Si une taxation avait été faite par un officier taxateur, il est probable qu'elle aurait donné lieu à un appel, peu importe le résultat.
[18]	Dans les circonstances, je suis d'avis qu'il est approprié que le tribunal décide de la requête même s'il n'y a pas eu au préalable une taxation par un officier taxateur.  Je tiens néanmoins à souligner que la procédure suivie en l’espèce est très inhabituelle, et que dans la grande majorité des cas, le tribunal serait peu enclin à permettre aux parties de contourner la procédure normale pour la taxation de dépens.
2. 	Le cadre juridique qui régit la requête
[19]	Les Demandeurs affirment que les principes généraux en matière de dépens ne s'appliquent pas en l'espèce.  Ils estiment que le tribunal ne devrait pas aborder cette requête comme étant une taxation.  Ils prétendent plutôt que parce que les dépens ont été accordés en tant que mesure réparatrice en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte, le tribunal n'est lié ni par les Règles de la Cour ni par la jurisprudence portant sur les règles générales en matière de dépens.  Les Demandeurs affirment  que le tribunal a une discrétion quasi illimitée dans la fixation des dépens lorsque ceux-ci sont accordés en vertu de la Charte.  Ils affirment que le tribunal pourrait même attribuer un caractère punitif aux dépens en fixant un montant qui serait en sus des frais effectivement engagés par les Demandeurs dans ce litige.
[20]	Au soutien de cette prétention, les Demandeurs se fondent notamment sur La Commission Scolaire Francophone du Yukon No.23 c. Procureure Générale du Territoire du Yukon, 2011 YKSC 80.  Depuis l’audition de la requête, cette décision a été renversée par la  Cour d’appel du Yukon. Commission scolaire francophone du Yukon no.23 c. Yukon (Procureure générale) 2014 YKCA 4.  De toute façon, je ne considère pas cette décision particulièrement pertinente parce que dans cette affaire-là, les dépens entre avocat et client ont été ordonnés dans un contexte spécifique, incluant la conclusion par le juge du procès que la partie défenderesse avait, à plusieurs égards, fait preuve de mauvaise foi. Ce n’est pas le cas en l’espèce.
[21]	Je suis d’accord avec les Demandeurs quand ils affirment que la Charte confère au tribunal des pouvoirs hors de l'ordinaire concernant les dépens.  Normalement, des dépens entre avocat et client ne peuvent être accordés que si le tribunal estime qu'une partie a fait preuve de mauvaise foi ou a eu une conduite répréhensible au cours du litige.
[22]	Dans les litiges concernant la Charte, cependant, la jurisprudence reconnaît que les dépens entre avocat et client peuvent être accordés, en vertu du paragraphe 24(1), comme mesure réparatrice suite à la violation d'un droit constitutionnel et ce, même en l'absence de mauvaise foi de l'autre partie.
[23]	Je ne reviendrai pas ici sur les motifs pour lesquels j'ai accordé les dépens entre avocat et client, puisque ces motifs sont expliqués dans les jugements rendus dans les deux affaires.  Association des parents ayants droit de Yellowknife et al. c. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest et al., supra, paragraphes 807 à 819; Commission scolaire francophone Territoires du Nord-Ouest et al. c. Procureur Général des Territoires du Nord-Ouest et al., supra, paragraphes 849-857.  Je me contenterai de rappeler que c'est principalement comme mesure réparatrice que j'ai accordé aux Demandeurs leurs dépens entre avocat et client, sauf que dans le dossier de Hay River, j'ai également estimé que la conduite des Défendeurs concernant l'adoption de la directive ministérielle devait être sanctionnée.
[24]	Il ne fait donc aucun doute que la Charte confère au tribunal des pouvoirs exceptionnel en matière de dépens.  Elle confère au tribunal une discrétion beaucoup plus large que d’ordinaire d’accorder des dépens entre avocat et client.  Une fois qu’ils le sont, cependant, ces dépens demeurent selon moi sujets aux règles d'application générale.  La mesure de redressement que permet la Charte, c'est l'octroi de dépens entre avocat et client dans des circonstances où ils ne pourraient pas être accordés selon les règles habituelles.  Mais le montant de ces dépens demeure sujet aux principes élaborés dans les Règles de la Cour et dans la jurisprudence.
[25]	Par conséquent, j’estime que le fait que les dépens aient été accordés en vertu du Paragraphe 24(1) de la Charte n’a pas d’incidence sur leur montant.  Ce fait ne change en rien la nature et la portée de la présente requête, ni le cadre juridique qui régit le processus de fixation du montant.  Les principes généraux en matière de dépens s'appliquent tout autant que si les dépens avaient été ordonnés dans un litige ne concernant pas la Charte.
III) 	ANALYSE
1.	Principes généraux en matière de dépens
[26]	Les Règles de la Cour établissent le cadre juridique qui régit les dépens dans les Territoires du Nord-Ouest.  Certaines Règles établissent les principes généraux et les barèmes (Règles 641 à 652); d'autres visent des situations particulières, comme les conséquences d'une offre de règlement (Règles 201 à 203), les ententes de résultat (Règles 657 à 663), ou le cautionnement pour dépens (Règles 630 à 640).
[27]	D'autres principes sont issus de la jurisprudence. Évidemment la jurisprudence venant des autres juridictions doit être abordée avec une certaine prudence, puisque les règles applicables varient parfois d'une juridiction à l'autre.  Mais il reste que certains principes sont d'application générale.
[28]	Traditionnellement, les dépens avaient pour seul objet l'indemnisation, totale ou partielle, de la partie ayant eu gain de cause dans un litige.  Mais les tribunaux reconnaissent de plus en plus que l'indemnisation n'est plus leur seul objectif.  D'autres facteurs, notamment l'accessibilité à la justice, doivent également être pris en considération. Colombie-Britannique (Ministre des Forêts) c. Bande indienne Okanagan [2003] 3 S.C.R. 371, pages 389-391.
[29]	Un autre principe important est que l'indemnisation qu'une partie peut obtenir dans le cadre d'une ordonnance de dépens n'est pas sans limite: même armée d’une ordonnance pour dépens entre avocat et client, une partie ne peut généralement recouvrer que les coûts qui ont été raisonnablement engagés dans le cadre du litige.  Les tribunaux contraindront très rarement une partie à indemniser l'autre pour des dépenses jugées inutiles, frivoles ou exagérées, même si elles ont été encourues en lien avec le litige.
[30]	D'ailleurs, la Règle 641 des Règles de la Cour incorpore cette exigence concernant le caractère raisonnable des dépens dans sa définition. Dans cette Règle les dépens sont décrits comme comprenant "les dépenses acceptables et raisonnables qu'une partie a payé ou s'est vue obligée de payer afin de poursuivre une instance".
[31]	Il s'ensuit qu'une partie, même si elle a obtenu une ordonnance de dépens entre avocat et client, ne récupère pas toujours tous les frais qu'elle a encourus :
The commonly accepted view is that solicitor-and-client costs as between party and party are intended to be complete indemnification for all costs (fees and disbursements) reasonable necessary for the proper presentation of the case.  If the client instructs the solicitor to take certain steps which are not necessary for the case itself then the client is responsible for payment, not the opposite party.  Hence, solicitor-and-client costs may approach complete indemnification for what the client actually pays but it does not necessarily do so.
Camillus Eng. Consultants Ltd. v. Village of Fort Simpson, 2005 NWTSC 25, au paragraphe 41.
[32]	L'examen du caractère raisonnable des dépens peut comporter divers volets: il peut se rapporter au taux horaire facturé par l'avocat, aux démarches et procédures entreprises dans le cadre du litige, au nombre d'heures consacrées à certaines tâches, ou à la répartition du travail entre les divers avocats et autres professionnels qui ont travaillé sur le dossier.  Envoy Relocation Services Inc. v. Canada (Attorney General), 2013 ONSC 2622, paragraphes 142 à 152.
[33]	C'est à la lumière de ces principes directeurs que j'aborde maintenant les questions précises que les parties ont soulevées.  Celles-ci concernent d'une part, le montant des honoraires réclamés et d'autre part, certains aspects des débours.
2.	Le montant des honoraires
[34]	Les Défendeurs demandent une réduction considérable du montant des honoraires réclamés par les Demandeurs.  Ils plaident que certains de ces honoraires ne sont carrément pas exigibles comme dépens, et que certains autres montants devraient être retranchés parce que ce qui est réclamé n'est pas raisonnable.
	a)	Les  "factures finales"
[35]	Les honoraires réclamés par les Demandeurs incluent notamment deux "factures finales". Ces factures découlent d'une entente qui est intervenue entre les Demandeurs et leurs procureurs en cours d'instance.  L'entente a été déposée en preuve, comme pièce à l'affidavit assermenté par Nicole Garner le 12 novembre 2013.
[36]	Dans leurs représentations écrites et orales, les Demandeurs ont apporté des précisions quant aux circonstances qui ont mené à cette entente, et aussi au sujet de d'autres ententes conclues entre les Demandeurs et leurs avocats tout au long des procédures.  Les affidavits de Mme Benjelloun y font aussi référence dans une certaine mesure.  Mais l’entente de services juridiques initiale conclue entre les Demandeurs et leurs procureurs n’a pas été déposée en preuve.
[37]	Le procureur des Demandeurs a expliqué qu'en vertu de l'entente initiale, le taux horaire à être facturé était de 200.00$/heure.  Ces honoraires, ainsi que les débours, devaient être facturés à tous les mois, payables dans les 30 jours de la facturation.
[38]	Les Demandeurs ont bénéficié de financement par l'entremise de programmes fédéraux visant à aider les parties cherchant à faire valoir leurs droits devant les tribunaux.  Pour une période de temps, une partie des honoraires (150.00$/l'heure) était payée par le biais de cette subvention.  La CSFTN-O était facturée pour la différence entre la subvention et le taux horaire convenu.  Quant à l'Association de parents ayants droit de Yellowknife (APADY), elle n'était pas en mesure de payer la différence entre le taux horaire et la subvention. Les procureurs ont apparemment accepté de ne facturer la différence qu’à la conclusion du procès.
[39]	Vers le milieu du procès, en novembre 2010, les procureurs des Demandeurs ont été convoqués par leurs clients.  La CSFTN-O les a alors avisés qu'elle n'avait plus d'argent pour les payer.  C'est alors que la nouvelle entente a été conclue.  Le document a été signé en février 2011 mais selon les représentations du procureur des Demandeurs, ce document formalise une entente qui a en fait été conclue en cours de procès.  Par contre, au paragraphe 7 de son affidavit déposé dans le dossier de Yellowknife, Mme Benjelloun dit que la méthode de facturation a changé en juin 2011 parce que la CSFTN-O a avisé le cabinet de son incapacité de payer.  Dans son affidavit pour le dossier de Hay River, au paragraphe 3, elle dit que le changement dans la méthode de facturation a eu lieu en décembre 2011.  Le moins que l'on puisse dire, c'est que la preuve concernant le moment où la nouvelle entente a été conclue est loin d'être claire.
[40]	D’autres aspects de la preuve concernant les diverses ententes intervenues à différents moments entre les Demandeurs et leurs avocats laissent à désirer.  Les affidavits de Mme Benjelloun n’exposent pas les détails de l’entente initiale, tel le taux horaire et la fréquence de facturation.  Dans une affaire où les dépens sont contestés, il aurait été préférable que toute l'information concernant les diverses ententes entre les Demandeurs et leurs avocats soit en preuve, et non simplement transmise au tribunal par l'entremise de représentations des avocats.
[41]	Pour en revenir à l’entente signée en février 2011, il est clair qu’elle changeait la fréquence de facturation.  Les procureurs s'engageaient à ne rendre la prochaine facture pour les honoraires que plusieurs mois plus tard, en juillet 2011. Ceci était pour permettre à la CSFTN-O, si j'ai bien compris les explications fournies lors des représentations, de n'être facturée qu'après avoir reçu les fonds pour son budget d'opération pour l'année suivante.  La CSFTN-O s'engageait à payer un minimum de 100,000.00$ de cette facture dans les 30 jours de la facturation, et le reste en priorité si elle avait les fonds pour le faire.  La facture suivante devait être rendue le 1er juillet 2012.  L'entente prévoyait en outre que les débours allaient continuer à être facturés à tous les mois et être payables dans les 30 jours.  Ces aspects de la nouvelle entente ne sont pas controversés.
[42]	Ce qui est controversé, c’est l’aspect de l’entente qui varie le taux horaire à être facturé et ce, de façon rétroactive. Les clauses pertinentes se lisent comme suit:
Factures finales
4.	Une fois que les deux dossiers seront menés à terme, y inclus tout appel, et tenant compte de la complexité des dossiers, de la durée des dossiers, de la grande période de temps que les avocats ont dû passer à l'extérieur de leur bureau à Regina, de l'impacte [sic] sur leur pratique de droit régulière et du risque que prend en charge Miller Thompson s.r.l., il est entendu que Miller Thompson s.r.l. soumettra deux factures finales. Les factures finales seront rendues pour inclure les montants suivants:
a) pour [le dossier de Hay River], Miller Thompson s.r.l. rendra une facture finale à un taux horaire de 50$/heure plus élevé que le tarif régulier pour toutes les heures passées sur le dossier depuis le tout début, y inclus tous les appels; et
b) pour [le dossier de Yellowknife], Miller Thompson s.r.l. rendra une facture finale à un taux horaire de 50$/heure plus élevé que le tarif régulier pour toutes les heures passées sur le dossier de l'APADY depuis le début, y inclus tous les appels. De plus, puisque l'APADY n'avait pas les fonds pour payer plus que le 150$/heure alloué par le Programme de contestation judiciaire du Canada à ce moment et que Miller Thompson s.r.l. a accepté d'attendre la fin du procès avant de rendre sa facture finale au plein tarif, Miller Thompson réclamera dans cette facture la différence entre le montant de 150$/heureet le tarif régulier plus 50$/heure.
5.	Les deux factures finales ne seront rendues à la CSF TNO et à l'APADY que si la cour accorde les dépens. Il est entendu que ces deux factures finales seront payées en priorité à partir des dépens ordonnés payable en faveur de la CSF TNO et de l'APADY.
6. 	Dans l'éventualité où la CSF TNO n'a pas gain de cause pour faire agrandir les deux écoles dans les deux dossiers ci-haut mentionnés et ne reçoit pas de dépens, Miller Thompson s.r.l. accepte de ne pas facturer pour 50 000$ de temps d'avocats versé aux dossiers.
7.	Dans l'éventualité où la CSF TNO ne reçoit pas suffisamment de dépens dans les deux dossiers pour payer au complet les deux factures finales mentionnés [sic] au paragraphe 4 de la présente entente, Miller Thompson s.r.l. accepte de réduire le montant des deux factures finales au montant équivalent aux dépens ordonnés payable [sic] à la CSF TNO et l'APADY par le GTNO.
[43]	Cet aspect de l'entente est entièrement lié au résultat du procès, tant pour le montant dû que pour son exigibilité.  Le paragraphe 5 prévoit que la majoration ne sera facturée que si le tribunal accorde les dépens aux Demandeurs.  Le paragraphe 7 prévoit qu’ils ne seront exigibles que jusqu'à concurrence du montant de dépens accordés.
[44]	Les Défendeurs soulèvent plusieurs objections à l’inclusion des factures finales dans le montant des dépens.
[45]	Premièrement, ils affirment que ces factures constituent une prime fondée sur le risque, et que la jurisprudence n'en permet pas l'inclusion dans les dépens payable par l'autre partie.  Deuxièmement, ils affirment que l’inclusion de ces factures dans les dépens serait contraire au principe d’indemnisation puisqu’en vertu de l’entente, la CSFTN-O n’aura jamais à les payer.  Par ailleurs, les Défendeurs prétendent qu’à la lumière même du texte de l'entente, les fondements sur lesquels repose la prime ne sont pas des choses pour lesquelles un avocat peut, en vertu des Règles de la Cour, recevoir de compensation.
[46]	Les Demandeurs répondent que la CSFTNO était libre de conclure cette entente avec ses avocats, et qu'il était légitime pour les parties de décider d'augmenter les honoraires des procureurs pour tenir compte non seulement du risque assumé par leur cabinet mais aussi la complexité du dossier et les autres facteurs énoncés à l'entente.  Ils affirment que le tribunal devrait donner effet à cette entente et inclure la majoration du taux horaire en fixant le montant des dépens.
[47]	Les Demandeurs ont cité de la jurisprudence qui traite de la validité des ententes de résultats et de primes fondées sur le risque dans le contexte de l’exigibilité d’une telle prime entre l’avocat et son propre client.  La question ici, cependant, n’est pas de savoir si une telle entente est valide entre l’avocat et son client.  La question est plutôt de savoir si la prime qui en résulte peut être incluse dans le montant exigible de l’autre partie dans le cadre d’une ordonnance de dépens.
[48]	Les Défendeurs, se fondant sur l’arrêt Walker v. Ritchie, (2006) 2 S.C.R. 428, affirment premièrement que la majoration des honoraires ne peut être incluse dans le montant des dépens parce que c’est une prime fondée uniquement sur le risque.  Je ne suis pas convaincue que la majoration du taux horaire constitue une prime fondée exclusivement sur le risque qui contreviendrait aux principes énoncés dans Walker.  Dans son ouvrage The Law of Costs, l’auteur Mark Orkin souligne que si l’arrêt Walker a rejeté l'inclusion dans les dépens d'une prime fondée sur le risque, il n’a pas éliminé complètement la possibilité d’inclure une prime dans le calcul de dépens:
Although as a result of the Supreme Court's decision in Walker v. Ritchie the concept of a risk-based premium appears to be dead, a broader-based premium lives on.
M. Orkin, The Law of Costs, 2nd edition, page 2.330.5
[49]	Ici, l’entente fait allusion au risque assumé par le cabinet des procureurs, mais aussi à la complexité du dossier et à l’impécuniosité des Demandeurs.  Dans son ouvrage, Orkin fait état des facteurs qui ont porté les tribunaux à accepter de tenir compte de primes dans le calcul de dépens. Ces facteurs incluent la reconnaissance qu'il est dans l'intérêt public que les causes légitimes soient poursuivies nonobstant le fait que les plaignants n'ont pas les moyens de les financer. Cette considération fait partie des raisons qui ont mené les tribunaux à accepter que des primes soient incluses dans les dépens.  La complexité du dossier, la responsabilité que l'avocat prend en charge, la qualité et l'expertise des services juridiques rendus font également partie des facteurs dont les tribunaux ont tenu compte.  The Law of Costs, supra, pages 3-329 à 330.5.
[50]	Un autre facteur qui distingue la situation en l’espèce de celle qui a donné lieu à l’arrêt Walker est que dans Walker, les Demandeurs ne s'étaient pas fait accorder des dépens d' "indemnisation substantielle" pour l'ensemble du dossier.  L'ordonnance de dépens qu'ils avaient reçue était mixte: elle incluait des dépens sur la base d'une indemnisation partielle (l'équivalent des dépens calculés, dans les Territoires du Nord-Ouest, selon les barèmes de l'Annexe "A" des Règles de la Cour) pour une partie du dossier, et des dépens sur la base d'une "indemnisation substantielle"  (l'équivalent des dépens entre avocat et client dans la terminologie utilisée dans les Territoires du Nord-Ouest) pour une autre partie du dossier.
[51]	Orkin souligne la distinction entre les deux types de dépens en ce qui a trait à la possibilité d'y inclure une prime:
A premium may be awarded when the court has ordered substantial indemnity costs, but not when the award is on the partial indemnity scale.
The Law of Costs, supra, page 2-330.1.
[52]	La seconde objection des Défendeurs est que les factures finales ne peuvent pas être incluses dans les dépens parce que l'entente prévoit que les factures ne seront émises que si les dépens sont accordés, et ne seront exigibles que si le montant des dépens est suffisant pour les couvrir.  Autrement dit, ce sont des factures que la CSFTN-O n'aura jamais elle-même à payer. Par conséquent les Défendeurs affirment que les inclure dans les dépens contreviendrait au principe de base de l'indemnisation.
[53]	Il ne fait aucun doute que le principe de l'indemnisation est un principe important dans le domaine des dépens.  Mais comme je l'évoquais plus haut au Paragraphe 49, l'indemnisation n'est pas le seul facteur à considérer.  L'accès à la justice, et l’importance de permettre aux parties à revenus modeste de faire valoir leurs droits, sont des considérations importantes.
[54]	Un objectif important qui sous-tend le principe d’indemnisation est d'éviter que les dépens ne servent à enrichir la partie qui les obtient.  Ici, l’entente ne vise pas  à enrichir la CSFTN-O.  Elle vise plutôt à faire en sorte que les avocats de la CSFTN-O reçoivent une rémunération qui reflète le fait qu’ils ont continué à représenter leurs clients même si ceux-ci n’avaient plus les moyens de continuer à les payer régulièrement.
[55]	Pratiquement parlant, une fois informés que la CSFTN-O n'avait plus les moyens de continuer à les payer, les procureurs des Demandeurs se voyaient confrontés à une situation difficile sur le plan professionnel et éthique.  Ils pouvaient difficilement se retirer du dossier en plein procès et causer un tort irréparable à leur client  -  sans compter la position dans laquelle ils auraient laissé le tribunal.
[56]	De plus, si le système de facturation n'avait pas été modifié, les intérêts se seraient accumulés sur les factures mensuelles impayées.  On peut comprendre que les parties aient voulu éviter cela.
[57]	L'entente en l'espèce ne visait pas à faire en sorte que la CSFTN-O s'enrichisse indûment aux dépends des Défendeurs: elle visait plutôt à trouver une solution qui permettrait aux procureurs des Demandeurs de continuer leur travail dans le dossier toute en ayant la possibilité d'être rémunérés de façon équitable, compte tenu de l'ensemble des circonstances, y compris la complexité de la cause, et le fait qu'ils ne seraient pas payés dans les mêmes délais qu'auparavant.  Il me semble qu'une telle entente était nécessaire pour assurer aux Demandeurs un accès continu à la justice et une réelle chance de continuer à faire valoir leurs droits.
[58]	Une approche trop rigide et technique dans ce genre de situation risquerait fort de faire en sorte que les personnes et organismes moins fortunés ne puissent pas faire valoir leurs droits de façon efficace.  Par exemple, dans les causes impliquant les droits constitutionnels, les clients peu fortunés risqueraient fort de ne pas pouvoir faire valoir leurs droits face aux gouvernements, qui ont des ressources considérables à leur disposition.  Le tribunal ne peut ignorer ces facteurs en exerçant sa discrétion en matière de dépens.
[59]	Je ne suis donc pas convaincue que les principes généraux en matière de dépens sont un obstacle à la mise en oeuvre de l’entente signée le 11 février 2011.  Par contre, selon moi, l’inclusion de ces factures finales dans les dépens payables maintenant se heurte à un obstacle incontournable, soit le texte même de l’entente.
[60]	Le paragraphe 4 de l'entente prévoit que les factures finales seront rendues lorsque les dossiers seront menés à terme, incluant tout appel.  Or, les appels ne sont pas complétés.
[61]	Les Demandeurs me demandent de donner effet à l’entente et d’inclure les montants dans les dépens exigibles maintenant.  Mais la façon dont l’entente est rédigée est sans équivoque.  Je vois mal sur quelle base les factures reflétant la majoration du taux horaire pourraient être émises, et encore moins comment le tribunal pourrait les inclure dans le montant total des dépens à ce stade-ci.  Les Demandeurs et leurs procureurs ont choisi de préciser à quelle moment des procédures la majoration serait facturée.  Ils ne peuvent pas maintenant demander au tribunal de donner effet à une partie de l’entente tout en ignorant une autre partie de celle-ci.  Il ne s’agit pas ici d’interpréter une clause qui serait ambigüe.  Le Paragraphe 4 ne comporte aucune ambiguïté.
[62]	Pour ces motifs, je ne crois pas que la majoration de 50.00$/heure prévue à l'entente signée le 11 février 2011 puisse être ajoutée aux honoraires réclamables, à ce stade-ci, à titre de dépens.  Selon moi, cette majoration pourra être réclamée, le cas échéant, « lorsque les deux dossiers seront menés à terme, y inclus tout appel », comme le prévoit l’entente.
[63]	Quant au montant qui correspond, dans le dossier de Yellowknife, à la différence entre le montant couvert par la subvention fédérale et le taux horaire qui avait été convenu à l’origine, il peut selon moi être inclus dans des dépens payables maintenant.  Même si les parties ont convenu d’inclure ce montant dans la facture finale, il me semblerait injuste de le retrancher, puisqu’il correspond à du travail effectué au taux horaire convenu à l’origine, et qui devait être exigible à l’issue du procès.  J’estime approprié d’inclure ce montant dans les dépens exigibles à ce stade-ci.
[64]	Je retrancherai donc du montant des honoraires le montant qui correspond à la majoration rétroactive de 50$/heure mentionnée au paragraphe 4 de l’entente signée en février 2011.  Dans le dossier de Yellowknife, ceci correspond à un montant de 78,322.50$ et dans le dossier de Hay River, à un montant de  97,197.50$.

	b)	Le montant correspondant aux subventions accordées par le biais de 			programmes de contestation judiciaire
[65]	Les Demandeurs ont bénéficié de subventions accordées dans le cadre de programmes fédéraux, soit le Programme de contestation judiciaire et, plus tard, le Programme d'appui aux droits linguistiques (PADL).
[66]	Les Défendeurs se fondent sur le principe de l'indemnisation pour affirmer que les dépens ne devraient pas inclure ces subventions, puisque les Demandeurs n'ont pas eu à défrayer ces montants.
[67]	Je ne suis pas d'accord.  Dans les ententes qu’elle a signées avec les responsables de ces programmes, la CSFTN-O s’engage à rembourser le PADL si elle obtient une ordonnance de dépens.  Je tiens pour acquis que la CSFTN-O se conformera à cet engagement.
[68]	Comme je l'ai évoqué précédemment, le principe de l'indemnisation, bien qu'important en matière de dépens, n'est pas le seul facteur à considérer:
The principle of indemnification, while paramount, is not the only consideration when the court is called on to make an order of costs; indeed, the principle has been called "outdated" since other functions may be served by a costs order, for example to encourage settlement, to prevent frivolous or vexatious litigation and to discourage unnecessary steps.  More recently, the Ontario Court of Appeal has added access to justice as a fifth consideration.  As well, it has been said, costs can be an instrument of policy. For example, making Charter litigation accessible to ordinary citizens has been recognized as a legitimate and important policy objective which can be advanced by an order of costs made payable forthwith.  The Supreme Court of Canada underlined the function of costs as an instrument of public policy when it wrote that 'it has become a routine matter for courts to employ the power to order costs as a tool in the furtherance of the efficient and orderly administration of justice'
The Law of Costs, supra, pages 2-58.1-58.2.
[69]	Pour moi, l’inclusion dans les dépens du montant d’une subvention, qui retournera ainsi dans les coffres du programme en question, n'est pas contraire aux principes généraux qui régissent l'octroi de dépens.  Dans la mesure où un programme comme le PADL aide aux parties à faire valoir leurs droits linguistiques devant les tribunaux, alors que ces parties n'auraient autrement pas les moyens financiers de le faire, il est tout à fait approprié que le remboursement des subventions accordées soit rendu possible par l'entremise d'une ordonnance de dépens.
[70]	Selon moi, le montant des dépens doit donc inclure les honoraires qui ont été couverts par ces programmes de subventions.
	c) 	Les motions interlocutoires
[71]	Il y a eu plusieurs motions interlocutoires dans ces dossiers.  Les Défendeurs affirment que les honoraires se rapportant à certaines de ces motions devraient être retranchés des dépens payables aux Demandeurs.
[72]	Les Demandeurs reconnaissent maintenant qu’ils n’ont pas droit aux dépens de leur requête en modification d’Ordonnance qui a été rejetée, parce pour cette requête-là, les dépens ont été accordés aux Défendeurs.  Commission Scolaire Francophone, Territoires du Nord-Ouest et al c. Procureur Général des Territoires du Nord Ouest (No.5), 2009 CSTNO 43 et Commission Scolaire Francophone, Territoires du Nord-Ouest et al c. Procureur Général des Territoires du Nord Ouest (No.6), 2009 CSTNO 53.  Dans son affidavit Mme Garner indique que le montant qui devrait être retranché est 12,000.00$.  Les Défendeurs affirment dans leur mémoire que le montant d’honoraires qui devrait être retranché par rapport à cette requête est beaucoup plus élevé, soit d’au moins  29,100.00$.
[73]	J’ai examiné les factures pertinentes (#189872, #190470, #190960, #191525, #192078).  Les descriptions qui correspondent à chaque montant facturé font parfois état de travail qui se rapport à plus qu’une chose.  Il n’est pas simple d’isoler et identifier les heures et montants précis qui ne se rapportent qu’à la requête et non à d’autres aspects du dossier.  Comme en font foi la décision concernant la requête et celle portant sur les dépens, les circonstances qui ont mené au dépôt de la requête étaient inhabituelles, et ont évolué considérablement par la suite.  Tenant compte de tout cela, selon moi, le montant proposé dans l’affidavit de Mme Garner est un montant raisonnable à retrancher des honoraires concernant cette requête interlocutoire.
[74]	Pour toutes les autres motions interlocutoires sauf une, les dépens ont été laissés à la discrétion du juge du procès.  Commission Scolaire Francophone, Territoires du Nord-Ouest et al c. Procureur Général des Territoires du Nord Ouest (No.4), 2008 CSTNO 76.  Ayant, à l’issue du procès, accordé aux Demandeurs leurs dépens entre avocat et client, je ne vois pas de raison d’en exclure les dépens pour les motions interlocutoires, même celles où les Demandeurs n’ont pas eu gain de cause.  Sur les sujets qui étaient au coeur des motions interlocutoires (agrandissement des deux écoles et directive ministérielle), ils ont ultimement eu gain de cause au procès.  Selon moi, il est juste de traiter les dépens des motions interlocutoires de la même façon que les dépens de l’instance.
[75]	La dernière requête interlocutoire que je dois examiner du point de vue des dépens est la la toute première qui a été présentée dans le dossier de Hay River, et qui a été entendue le 24 juin 2008.  Les Demandeurs avaient déposé une requête en injonction interlocutoire. Ils avaient déposé, à l’appui de cette requête, un certain nombre d’affidavits.  Les Défendeurs voulaient contre-interroger les affiants avant l’audition de la requête.  Les Demandeurs ont cherché à empêcher les Défendeurs de procéder à ces contre-interrogatoires, plaidant l’urgence de la situation.  Dans une décision rendue oralement, j’ai refusé d’empêcher le contre-interrogatoire.  Rien n’a été dit dans cette décision au sujet des dépens.  Commission scolaire francophone c. Procureur général des Territoires du Nord-Ouest, 2008 CSTN-O 47.
[76]	Le droit de contre-interroger sur un affidavit est fondamental et est prévu aux Règles de la Cour.  Pour empêcher les Défendeurs d’exercer ce droit fondamental, les Demandeurs ont plaidé l'urgence.  Mais cette urgence était au moins en partie le résultat du moment où ils ont choisi d’entreprendre les procédures.  Dans les circonstances, j’estime que la requête pour empêcher le contre-interrogatoire n’aurait pas dû être présentée, et que les dépens s’y rapportant doivent être retranchés.  Les Défendeurs prétendent que le montant qui se rapporte à cette requête est de 18,000.00$.  Selon moi, ce montant est trop élevé.  Le travail facturé avant l’audition de cette requête ne se rapportait pas exclusivement à la tentative d’empêcher le contre-interrogatoire.  Ayant examiné la facture pertinente (#185459), je considère plus raisonnable de retrancher un montant d’honoraires de 8,000.00$ relativement à cette requête.
	d)	La réduction des honoraires pour tenir compte des questions où les 			Demandeurs n'ont 	pas eu gain de cause
[77]	Les Défendeurs demandent une réduction globale de 10% des honoraires réclamés pour tenir compte, disent-ils, d'aspects du litige où les Demandeurs n'ont pas eu gain de cause.  Je ne suis pas d'accord avec cet argument.  Dans ma décision d'accorder les dépens entre avocat et client en guise de mesure réparatrice, j'ai tenu compte de l'ensemble des questions soulevées dans ces litiges, et du résultat final.  Les Demandeurs ont eu gain de cause pour l'essentiel.  Bien qu'ils n'aient pas eu gain de cause sur certaines questions, aucune de ces questions n'était frivole ou vexatoire.  Je ne considère pas qu’une réduction globale des honoraires soit justifiée dans les circonstances.
	e) 	Caractère raisonnable ou non de certains honoraires
[78]	Les Défendeurs demandent au tribunal de prendre une mesure de recul par rapport aux factures présentées par les Demandeurs, et d'en évaluer le caractère raisonnable, compte tenu des circonstances.  Ils affirment qu'à plusieurs égards, les honoraires facturés ne sont pas raisonnables.
[79]	Les Défendeurs soulèvent notamment le fait que les procureurs des Demandeurs ont tous deux participé à la préparation de la plupart des témoins; que certaines tâches auraient pu et dû être déléguées; que certains aspects des honoraires ont été encourus pour discuter de question de gestion interne de la CSFTN-O plutôt que d'avoir été encourus pour le litige.
[80]	Il est vrai que dans la détermination du montant des dépens, le tribunal se doit de prendre une mesure de recul et examiner le caractère raisonnable ou non des honoraires facturés.  Envoy Relocation Services v. Canada (Attorney General), supra.  D’un autre côté, il ne s'agit pas non plus pour cet exercice de recul de devenir une dissection microscopique du travail des avocats.
[81]	Tout d’abord, il faut souligner qu'un de procureurs des Demandeurs, Me Lepage, a accepté de travailler à un taux horaire de beaucoup inférieur à son taux horaire habituel. (Voir par exemple, Kilrich Industries Ltd. c. Halotier, 2008 CAYK 4).
[82]	Concernant les allégations des Défendeurs concernant la duplication du travail ou sa mauvaise distribution entre les deux procureurs des Demandeurs, je tiens compte du fait que l'avocat qui a travaillé avec Me Lepage sur ces dossiers était, au moment du procès, un avocat très junior.  Il n'était pas déraisonnable, dans les circonstances, qu’ils participent tous deux à la préparation de la plupart des témoins.
[83]	En ce qui concerne la prétention des Défendeurs qu'une partie des honoraires se rapporte à du travail qui ne concernait pas le litige mais concernait plutôt des questions de gestion interne de la CSFTN-O, je ne suis pas d'accord non plus.  Dans une large mesure, les questions soulevées dans le litige étaient indissociables des questions de gestion interne.  Le meilleur exemple est celui de la politique d'admission de la CSFTN-O.  Cette politique étant au coeur du litige portant sur la validité de la directive ministérielle.  Le travail portant sur la révision de la politique, et la possibilité que cette révision règle au moins une partie du litige entre les parties, était de fait étroitement liée au litige.
[84]	Les Défendeurs ont aussi attiré l'attention du tribunal particulièrement sur le paragraphe 653(c) des Règles de la Cour, qui stipule qu'un des facteurs à considérer dans le calcul des honoraires d'un avocat est le fonds duquel l'argent nécessaire pour payer les dépens doit être tiré.  Ils affirment que puisque les dépens en l'espèce seront payés à même les fonds publics, une retenue supplémentaire s'impose dans la fixation du montant des dépens.
[85]	Je ne peux souscrire à cet argument. S'il était accepté, il offrirait aux gouvernements un bouclier qui leur permettrait de mitiger ou d'échapper en partie aux conséquences d'une ordonnance de dépens.  Les gouvernements, c'est vrai, ne doivent pas être traités comme s’ils étaient des puits sans fond, aux ressources illimitées.  Mais les gouvernements, si ils font le choix d'engager les fonds publics dans des litiges devant les tribunaux, ne peuvent s’attendre à échapper aux conséquences auxquelles fait face toute autre partie qui, à la conclusion des procédures, est condamnée aux dépens entre avocat et client.
[86]	Dans un cas comme celui-ci, où les dépens entre avocat et client ont été accordés en  guise de mesure de redressement suite à la violation d'un droit constitutionnel par le gouvernement, il serait selon moi profondément contradictoire de réduire le montant des dépens parce que ces dépens devront être payés par ce même gouvernement.
[87]	Finalement, j’ai aussi tenu compte de la preuve présentée et des concessions faites concernant certaines erreurs qui se sont glissées dans les documents déposés avec les affidavits de Mme Benjelloun, et qui nécessitent certains ajustements.
[88]	Dans le dossier de Yellowknife, en plus des ajustements déjà apportés par Mme Garner, un montant de 78,322.50$ doit être retranché des dépens.  Pour les raisons évoquées aux Paragraphes 60 à 64, ce montant, qui représente la partie de la facture finale qui correspond à la majoration rétroactive de 50.00$ du taux horaire, n'est pas exigible à ce stade-ci.
[89]	Dans le dossier de Hay River, en plus des ajustements déjà apportés par Mme Garner, les montants suivants doivent être retranchés :
1)	97,197.50$ (ce montant correspond à la majoration rétroactive de 50.00$ du taux horaire);
2)	8,000.00$ (pour la motion interlocutoire visant à empêcher le contre-interrogatoire sur affidavit);
3)	12,000.00$ (la  motion pour laquelle les dépens ont été accordés aux Défendeurs).
3.	Les débours
	a)	Commentaires généraux
[90]	Les Défendeurs contestent plusieurs montants réclamés par les Demandeurs en tant que débours.  Selon eux, certains débours sont inadmissibles et d’autres ne sont pas raisonnables.  Ils réclament une réduction de 57,978.00$ des débours dans le dossier de Hay River et une réduction de 1,618.18$ des débours dans le dossier de Yellowknife.
[91]	J’ai examiné attentivement les documents mis en preuve par l’entremise deux affidavits de Mme Benjelloun.  Selon moi, dans plusieurs cas, les objections des Défendeurs ne sont pas justifiées.
[92]	Il est vrai que dans certains cas, certaines pièces justificatives sont manquantes, comme par exemple pour certains frais d’hôtel. Certaines factures identifient simplement la CSFTN-O et n’indiquent pas le nom de la personne qui a utilisé la chambre.  Mais les procédures se sont étalées sur plusieurs mois, plusieurs témoins qui ont été appelés n’étaient pas des gens qui habitaient à Yellowknife, et il ne fait nul doute que des frais d’hôtels et de repas ont été engagés.  Ces dépenses ne sont pas à première vue déraisonnables, compte tenu des circonstances.  Il apparaît clair  que certains individus ont payé ces frais et se sont fait rembourser; dans d’autres cas, la CSFTN-O a été facturée directement. Dans d’autre cas, des individus ont pu payer les frais de chambres d’hôtel utilisées par d’autres, et se sont ensuite fait rembourser.
[93]	  Il y a un exemple clair de cela dans les débours réclamés pour le dossier de Yellowknife, qui est d'ailleurs un des items que les Défendeurs contestent. Il s'agit d'une somme de 613.38$ remboursée à Yvonne Careen pour des frais d’hôtel en janvier 2009. Les Défendeurs plaident que ce montant n'est pas admissible puisque Mme Careen habite Yellowknife.  Cependant, un autre document qui fait partie de la même pièce de l’affidavit de Mme Benjelloun démontre que ce montant se rapporte à une facture d’hôtel pour Me Lepage, qui a été payée par Mme Careen. Il y a une note écrite à la main sur la facture d’hôtel qui dit « payé par Yvonne Careen – rembourser Yvonne ».  Ce montant se rapporte donc à des frais d'hôtel pour Me Lepage, et non pour Mme Careen.
[94]	Étant donné l'ensemble des circonstances, le nombre de personnes qui ont dû séjourner à l'hôtel et prendre des repas au restaurant durant ce procès, je ne retrancherai pas ce type de débours pour la seule raison que les pièces justificatives ne démontrent pas exactement pour qui les dépenses ont été encourues.
[95]	   Par contre, dans mes calculs, j’ai retranché les frais clairement inadmissibles, comme les frais remorquage (157.50$), ou ceux qui ont été réclamés en double par erreur, comme la facture de Lynn Carrière, datée du 6 avril (478.80$).
[96]	  Je n’ai pas retranché  les frais concernant le salaire de Valérie Gamache, qui a été engagée par les Demandeurs pour faire du travail relié aux réponses aux engagements découlant des interrogatoires au préalable. Ces frais sont directement en lien avec le litige et ne peuvent être considérés comme des frais de bureau ordinaires.  Il n’est pas étonnant qu’un petit organisme qui a un personnel limité ait du engager du personnel supplémentaire pour être en mesure de faire ce genre de travail, qui déborde largement du cadre normal de ses opérations.
[97]	    J’ai aussi examiné les objections spécifiques des Défendeurs concernant l’admissibilité de certains types de débours.  Dans les paragraphes qui suivent, je fais état de mes conclusions.
  	b) les honoraires de Mr. Lavigne
[98]	Mr Lavigne était un témoin de faits, mais un témoin très important pour les Demandeurs. Il occupait le poste de directeur général de la CSFTN-O à une période cruciale pour les fins du litige.  Au moment du procès, Mr. Lavigne avait une entreprise de consultant.  Les procureurs des Demandeur ont passé beaucoup de temps avec lui pour préparer la cause. Mr. Lavigne a facturé à la CSFTN-O ses honoraires de consultant pour toutes les heures qu’il a dû investir dans ce dossier, non seulement pour son témoignage mais aussi pour le temps de préparation.  Le total de ces honoraires est de 10, 581.00$.
[99]	Je reconnais que Mr. Lavigne était un témoin important, et que les procureurs des Demandeurs avaient besoin de sa coopération pour passer en revue l’ensemble des documents et l’historique du dossier.  Ils n'auraient peut-être pas bénéficié de la même collaboration si ils n’avaient pas accepté de le dédommager pour le temps qu’il ne consacrerait pas à sa propre entreprise.  Selon moi une partie de ces frais peut être recouvrée en tant que débours.
[100]	 Cependant, le montant total me semble disproportionné, surtout lorsqu’on le compare aux débours reliés aux témoignages des témoins experts.  Je retrancherai donc 7,000.00$ du montant réclamé pour cet item.
	c)	Les honoraires du Dr. Denis
[101]	Les Défendeurs me demandent de réduire les débours relativement aux honoraires du Dr. Denis.  Ils affirment qu’ils sont manifestement déraisonnables, surtout lorsque comparés aux honoraires du Dr. Landry, le deuxième expert, dont le témoignage a duré plus longtemps.
[102]	Je ne suis pas d’accord.  Le Dr. Landry se spécialise dans les sujets qui ont fait l’objet de son témoignage d’expert.  En outre, il est clair de la documentation présentée qu’il était également impliqué dans une affaire semblable au Yukon, dans laquelle il a témoigné sur des questions similaires.
[103]	Le témoignage du Dr. Denis portait sur une question novatrice au procès, concernant le droit d’admission et la directive ministérielle.  Dans les circonstances il n’est pas surprenant, selon moi, que le total de ses frais soit supérieur à ceux facturés par le Dr. Landry.

	d) 	Les frais de Sophie Call
[104]	Il n’y a aucune raison de retrancher les débours concernant le temps que Sophie Call a dû passer à Yellowknife pendant ce procès.  Le procès concernant le dossier de Hay River a eu lieu à Yellowknife du consentement des deux parties. Mme Call était la directrice de l’École Boréale, qui faisait l’objet du litige dans le dossier de Hay River.  Il est tout à fait normal qu’au-delà des jours où elle a elle-même témoigné, elle ait dû passer la durée du procès à Yellowknife, pour donner des instructions aux procureurs.  La CSFTN-O a le droit d’être compensée pour les frais qui ont été encourus pour permettre à Mme Call d’être à Yellowknife pour la durée du procès.
	e)	Les per diem pour Michael St John
[105]	Les Défendeurs contestent le per diem réclamé pour Mr. St John, notant qu’il est le seul témoin pour lequel un tel per diem est réclamé.  Mr. St John a dû se rendre à Yellowknife pour témoigner pour le procès.  Ses frais de déplacements et d’hôtels sont des débours admissibles. Les débours pourraient aussi inclure ses frais de repas.  Mais il n’y a aucune raison de le traiter différemment des autres témoins.  Les Demandeurs n’étaient pas tenus de lui rembourser ses frais sur la base d’un per diem fixe, plutôt que de le rembourser sur la base des dépenses effectivement encourues.  Je retrancherai donc le montant de 737.70$ du total de débours alloués.
	f)	Frais de traduction
[106]	Les Défendeurs contestent la réclamation se rapportant au travail de traduction fait par Kelly Renner, au motif qu’elle travaillait dans le cabinet d’avocat des Demandeurs et que la valeur de son travail est incluse dans les honoraires du cabinet.
[107]	L’affidavit de Mme Renner précise qu’elle a été engagée par le cabinet comme assistante juridique et non comme traductrice. Elle a une formation de traductrice et fait ce type de travail, à la pige, en plus de son emploi avec le cabinet d’avocats.  C’est à ce titre de traductrice à la pige qu’elle a fait le travail de traduction dans ces affaires.  Les frais de traduction peuvent donc selon moi être réclamés dans les débours.
	g)	Frais de suppléance
[108]	Les Défendeurs prétendent que les frais de suppléance qui ont été encourus par la CSFTN-O parce que plusieurs professeurs ont dû témoigner au procès devraient être retranchés des débours puisque c’est le GTN-O qui, ultimement, défraie les coûts de suppléance.  Ils affirment qu’il serait injuste que le GTN-O ait à les payer deux fois.
[109]	Cet argument ne tient pas. L’ensemble du financement de la CSFTN-O lui vient du gouvernement.  Si l’argument des Défendeurs concernant les frais de suppléance devait être retenu, il pourrait s’appliquer, essentiellement, à tous les débours encourus par la CSFTN-O.
4.	Conclusion au sujet du montant total de dépens
[110]	Pour les motifs qui précèdent, je conclus que le montant réclamé par les Demandeurs à titre de dépens entre avocat et client doit être révisé à la baisse.  Les montants mentionnés aux Paragraphes 88 et 89 (78,322.50$ pour le dossier de Yellowknife et un total de 117,197.50$ pour le dossier de Hay River) doivent être retranchés.  J'estime en outre qu'une réduction  supplémentaire de  8,374.00$ est justifiée pour des débours inadmissibles ou excessifs, tel qu'expliqué plus haut.   Le montant total à retrancher est donc  de  203,894.00$.
[111]	Le montant total de la réclamation des Demandeurs, tenant compte des ajustements expliqués dans l’affidavit de Mme Garner est de 1,288,720.00$.  Ayant soustrait de ce montant le total des montants mentionnés au Paragraphe précédent, le montant des dépens dus, pour les deux affaires, est de 1,084,826.00$.   Puisque les Défendeurs ont déjà fait un paiement de 800,000.00$, le solde dû est de 284,826.00$.
IV) 	Les intérêts
[112]	Les Demandeurs réclament en outre les intérêts calculés à un taux de 3% sur la somme due à compter du 1er juillet 2012.
[113]	  En vertu du paragraphe 56(4) de la Loi sur l'organisation judiciaire, LTN-O 1988 ch. J-1, une partie n'a pas droit aux intérêts antérieurs au jugement pour les dépens.  Cependant, l'article 56.1, qui prévoit le droit aux intérêts postérieurs au jugement, n'exclut pas les dépens de son champ d'application.  D'autre part, l'article 56.2 confère une discrétion générale au tribunal en ce qui concerne l'octroi des intérêts, qu'ils soient antérieurs ou postérieurs au jugement.  Ni le droit aux intérêts,  ni le droit à ce qu'ils soient calculés selon un taux particulier, ne sont absolus.
[114]	J'ai fait état de la chronologie des évènements plus haut aux Paragraphes 1 à 10 et je ne la répéterai pas ici.  Il s'est écoulé 1 an et 9 mois depuis que les Demandeurs se sont vus accorder les dépens entre client en avocat.  Ils n'ont reçu le paiement partiel des Défendeurs qu'en octobre 2013, plus d'un an après la décision et environ 3 mois après le refus de la Cour d’appel d’ accorder aux Défendeurs un sursis d'exécution concernant les dépens.
[115]	Je reconnais que les Défendeurs avaient la responsabilité de s'assurer que les dépens, qui allaient être payés à même les fonds publics, n’incluaient que des montants raisonnables et admissibles.  Je reconnais aussi que certains aspects des dépens réclamés soulevaient de réelles questions.  Cependant, il a toujours été clair que, mis à part les montants contestés, les Demandeurs étaient en droit de réclamer un montant considérable en dépens.  Rien n'aurait empêché les Défendeurs de faire un paiement partiel bien avant octobre 2013.
[116]	D'un autre côté, les Demandeurs semblent avoir adopté une approche plutôt rigide à la situation. Ils n'ont pas fait de contre-offre, ni fourni aux Défendeurs d'explications supplémentaires lorsque certains aspects des dépens ont été remis en question.  Ils ont simplement choisi de saisir le tribunal de la question.  Il n'était pas raisonnable de demander que la requête pour fixer le montant des dépens procède avant que la Cour d'appel ne se soit prononcée sur la demande de sursis.
[117]	Tenant compte de tout cela, j'estime que les Demandeurs ont droit à des intérêts pour la somme qui leur est due depuis juin 2012, mais je vais exercer mon pouvoir discrétionnaire en vertu de l'article 56.2 de la Loi sur l'organisation judiciaire et calculer ces intérêts à un taux légèrement inférieur au taux préférentiel.
[118]	Je calculerai donc les intérêts sur la base d'un taux de 2.5% par année. Pour la période du 1er juillet 2012 au 1er octobre 2013  (une période de 1 an et 3 mois), ce taux s'applique à la somme de 1,084,826.$. Le montant des intérêts pour cette période est donc de 33,900.81$.    Pour la période du 1er octobre 2013 au 1er avril 2014 (une période de 6 mois), il s'applique à la somme de 284,826.00$.  Les intérêts pour cette période se chiffrent donc à 3,560.33$.  Le total dû en intérêts est donc de 37,461.14$.
V) 	Les dépens de la présente requête
[119]	Dans la présente requête, le succès a été, dans une certaine mesure, partagé, puisqu'à certains égards, j'ai donné raison aux Défendeurs.  Mais sur plusieurs aspects, les Demandeurs ont eu gain de cause.  Il faut aussi tenir compte du fait que concernant les montants considérables inclus dans les factures finales, je n'ai pas donné raison aux Défendeurs: j'ai simplement conclu que ces montants n'étaient pas, en vertu de l'entente signée en février 2011, réclamables à l'heure actuelle.
[120]	Compte tenu de l'ensemble des circonstances, la façon dont la requête a été menée par les parties ne justifie pas selon moi l'octroi d'un montant de dépens qui correspondrait à une ordonnance de dépens entre avocat et client.  Par contre je n'estime pas non plus que le montant prévu dans les barèmes des Règles de la Cour serait approprié.  Je fixe donc les dépens de la présente requête à 5,000.00$ en faveur des Demandeurs.
IV)	CONCLUSION
[121]	Je conclus que les pour ces deux dossiers les Demandeurs ont droit à:
	1) 	1,084,826.00$ en dépens;
	2) 	37,461.14$ pour les intérêts jusqu'au 1er avril 2014;
	3) 	5000.00$ pour les dépens de la présente requête.
Le montant total dû aux Demandeurs est donc 1,127,287.14$.	Puisqu'un montant de 800,000.00$ leur a déjà été versé, le solde dû par les Défendeurs est de 327,287.14$.  J'ordonne que ce montant soit payé dans les 14 jours du dépôt des présents motifs.



L.A. Charbonneau
											J.C.S.
Fait à Yellowknife ce 28e jour de mars 2014
			
Procureurs des Demandeurs:  	Me Roger J.F. Lepage
					Me Francis Poulin

Procureurs des Défendeurs:	Me Guy Régimbald

Dossier:  S 1 CV 2005 000108
Dossier:  S 1 CV 2008 000133


COUR SUPRÊME DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST

ENTRE:
ASSOCIATION DES PARENTS AYANTS DROIT DE YELLOWKNIFE, LA GARDERIE PLEIN SOLEIL, YVONNE CAREEN, CLAUDE ST-PIERRE et FÉDÉRATION FRANCO-TÉNOISE
Demandeurs
- et -

PROCUREUR GÉNÉRAL DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST et COMMISSAIRE DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
Défendeurs
ENTRE:						
COMMISSION SCOLAIRE FRANCOPHONE, TERRITOIRES DU NORD-OUEST, CATHERINE BOULANGER et CHRISTIAN GIRARD
Demandeurs
- et -

PROCUREUR GÉNÉRAL DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST et COMMISSAIRE DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
Défendeurs
- et -

FÉDÉRATION NATIONALE DES CONSEILS SCOLAIRES FRANCOPHONES DU CANADA
Intervenante


MOTIFS DE DÉCISION (DÉPENS)
L’ HONORABLE JUGE L.A. CHARBONNEAU



   
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