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Abstract: Motif de Jugement

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 Giroux c. Yellowknife Housing Authority, 2014 CSTN-0 42
Date: 2014 06 11
Dossier: S 1 CV 2013 000193

COUR SUPRÊME DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST

EN L’AFFAIRE DE la Loi sur la location des locaux d’habitation,
L.R.T.N.-O. 1988, ch. R-5,

ET EN L’AFFAIRE des décisions de Régisseur des Loyers, No. 10-13783
Et No. 10-13783B rendues le 10e jour de décembre 2013:

ENTRE:

ANNE MARIE GIROUX
Requérante

- et -


YELLOWKNIFE HOUSING AUTHORITY
Intimé

	

Appel d’une décision du régisseur en vertu de la Loi sur la location des locaux d’habitation.

Entendu à Yellowknife, T.N.-O.:   le 2 avril 2014.

Motifs déposés:     le 11 juin 2014


MOTIFS DE JUGEMENT DE
L’HONORABLE JUGE L.A. CHARBONNEAU

La Requérante s'est représentée elle-même	
Teresa Haykowsky and Michelle Thériault, procureurs de l'Intimée


Giroux c. Yellowknife Housing Authority, 2014 CSTN-0 42
Date: 2014 06 11
Dossier: S 1 CV 2013 000193

COUR SUPRÊME DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST

EN L’AFFAIRE DE la Loi sur la location des locaux d’habitation,
L.R.T.N.-O. 1988, ch. R-5,

ET EN L’AFFAIRE des décisions de Régisseur des Loyers, No. 10-13783
Et No. 10-13783B rendues le 10e jour de décembre 2013:

ENTRE:

ANNE MARIE GIROUX
Requérante

- et -


YELLOWKNIFE HOUSING AUTHORITY
Intimé


	MOTIFS DE JUGEMENT

A)     INTRODUCTION ET MISE EN CONTEXTE

1.     Circonstances donnant lieu à l’appel

[1]	La Requérante est, depuis plusieurs années, locataire de la Yellowknife Housing Authority (YHA).  Le 27 novembre 2013, suite à une plainte portée contre elle auprès du régisseur par la YHA, le régisseur a ordonné la résiliation de son bail et son expulsion de son logement.  La Requérante interjette appel de cette décision en vertu de l'article 87 de la Loi sur la location des locaux d'habitation, L.R.T.N.-O. 1988, ch. R-5 (la LLLH).
[2]	La YHA est une corporation qui gère 292 logements sociaux locatifs dans la ville de Yellowknife.  Le YHA est propriétaire de certains des édifices qui abritent ces logements, et loue aussi des espaces dans des édifices dont elle n'est pas propriétaire, pour ensuite les sous-louer.  L'accessibilité aux logement sociaux de la YHA dépend du revenu des locataires éventuels.  D’autre part, le montant du loyer varie selon les revenus du locataire.
[3]	La YHA a une politique qui interdit aux locataires d’avoir des animaux de compagnie dans leur logement.  Conformément à cette politique, le bail de la Requérante inclut une clause lui interdisant d’avoir des animaux de compagnie.
[4]	En janvier 2011, la YHA a présenté au régisseur une demande de résiliation du bail et d'expulsion de la Requérante, alléguant qu'elle avait violé les conditions de son bail en gardant des chats dans son logement.   Le régisseur a tenu une audition concernant cette plainte.  Il a conclu que la Requérante avait effectivement contrevenu à son bail, mais que puisqu'elle s'était départie de ses chats depuis l'incident, il n'y avait pas lieu de résilier le bail.  Il lui a ordonné, dorénavant, de se conformer aux conditions de son bail.
[5]	En septembre 2013,  la YHA a découvert que la Requérante avait un chat dans son logement et a porté plainte à nouveau auprès du régisseur.  Lors de l'audition devant le régisseur, la Requérante n'a pas nié qu'elle avait des chats dans son logement, mais a plaidé que la clause de son bail qui lui interdit d’en avoir est illégale, parce que discriminatoire, et aussi parce que cette condition contrevient à la LLLH.
[6]	Le régisseur a conclu que la clause du bail interdisant les animaux de compagnie était une clause raisonnable qui n'est ni discriminatoire ni contraire à la LLLH.  Il a ordonné la résiliation du bail et l'expulsion de la Requérante de son logement.
2.	Le dossier du régisseur et la preuve déposée dans le cadre de l’appel
[7]	Conformément aux exigences des Règles de la Cour Suprême des Territoires du Nord-Ouest, une fois l'appel déposé, le régisseur a déposé au tribunal son dossier.   Ce dossier inclut notamment les transcriptions des auditions, les motifs du régisseur, et les ordonnances qu'il a accordées à la YHA.
[8]	L'article 87 de la LLLH prévoit que les parties peuvent présenter de la preuve dans le cadre d’un appel. Ici, la Requérante a déposé un affidavit qui explique ses circonstances personnelles, l'importance pour elle et ses enfants de pouvoir avoir des animaux de compagnie, et les raisons pour lesquelles elle estime que la politique de la YHA d'interdire les animaux de compagnie est discriminatoire.
[9]	L'Intimée a pour sa part déposé un affidavit assermenté par Robert Bies, le directeur de la YHA.  Mr. Bies y explique la structure de l'organisme, son rapport avec le gouvernement, et le fonctionnement général du programme qu’il administre.  Il fait également état de la politique de la YHA concernant les animaux de compagnie.  Il explique que:
(a) 	la politique existe depuis longtemps et est non-écrite;
(b) 	les objectifs de la politique sont de fournir un environnement sécuritaire et propre aux locataires, d'éviter les coûts résultant de dommages qui pourraient être causés par les animaux de compagnie, d’éviter les inconvénients pour les autres locataires, et de maximiser l’utilisation des ressources limitées de la YHA;
(c) 	la politique n’est pas absolue; un locataire peut présenter une demande d’accommodement si, en raison d’une invalidité, il ou elle a besoin d’un animal de compagnie au quotidien.  Cinq locataires de la YHA ont présentement la permission d’avoir un animal de compagnie dans leur logement pour cette raison.
[10]	Mr. Bies fait aussi état  de renseignements qu’il a obtenus auprès de certains autres locateurs dans la ville de Yellowknife concernant leur politique au sujet des animaux de compagnie.  Certains de ces locateurs interdisent complètement les animaux de compagnie.  D’autres ne les permettent que dans certains de leurs logements, ou ne permettent que certaines sortes d’animaux.
[11]	Lors de l'audition de l'appel, la Requérante a, dans ses représentations, fait état de certains fait qui n'ont été discutés ni à l'audition devant le régisseur, ni dans les affidavits qu'elle a déposés.
[12]	La Requérante s'est représentée elle-même dans cet appel. Il est compréhensible qu'elle ne maîtrise pas toutes les règles de droit et les règles procédurales qui régissent un appel comme celui-ci.  Mais comme je lui ai expliqué lors de l'audition,  il y a une distinction entre ce qui est en preuve et ce qui est dit pendant les représentations des parties lors de l'audition d’un appel.  La décision du tribunal doit tenir compte des faits qui font partie du dossier du régisseur (notamment les témoignages présentés lors de l’audition) ou qui sont établis par la preuve qui a été présentée dans le cadre de l’appel.  Le tribunal ne peut pas tenir compte de faits qui sont allégués durant les représentations des parties mais qui ne sont pas en preuve.  J'ai respecté ces principes au cours de mes délibérations et dans mon analyse des questions soulevées par cet appel.
B) 	ANALYSE
1. 	Principes généraux concernant la norme de contrôle
[13]	En matière d’appel ou de contrôle judiciaire, il y a deux normes de contrôle:  la norme de la décision correcte, et celle de la décision raisonnable.  Dans tout appel ou contrôle judiciaire concernant la décision d'un tribunal administratif, le tribunal doit dans un premier temps décider quelle norme de contrôle s'applique.    Le niveau de déférence que le tribunal est tenu d'accorder à la décision du tribunal administratif dépend de cette norme de contrôle.
[14]	Pour décider quelle norme de contrôle s'applique, il faut tenir compte d'un certain nombre de facteurs:
Les éléments suivants permettent de conclure qu’il y a lieu de déférer à la décision et d’appliquer la norme de la raisonnabilité:
	Une clause privative: elle traduit la volonté du législateur que la décision fasse l’objet de déférence.
	Un régime administratif distinct et particulier dans le cadre duquel le décideur possède une expertise spéciale (par ex., les relations de travail).
	La nature de la question de droit. Celle qui revêt “une importance capitale pour le système juridique [et qui est] étrangère au domaine d’expertise” du décideur administratif appelle toujours la norme de la décision correcte. (citation omise) Par contre, la question de droit qui n’a pas cette importance peut justifier l’application de la norme de la raisonnabilité lorsque sont réunis les deux éléments précédents.
Dans le cas où, ensemble, ces facteurs militent en faveur de la norme de raisonnabilité, il convient de déférer à la décision en faisant preuve à son endroit du respect mentionné précédemment.  Il n’y a rien d’incohérent dans le fait de trancher certaines questions de droit au regard du caractère raisonnable.  Il s’agit simplement de confirmer ou non la décision en manifestant la déférence voulue à l’égard de l’arbitre, compte tenu des éléments indiqués.
	Dunsmuir c. New Brunswick, 2008 CSC 9, paragraphes 55 et 56.
[15]	Le facteur concernant la nature de la question soulevée par l'appel ou le contrôle judiciaire est parfois déterminant.  Par exemple, il est clairement établi que la norme de la décision correcte s'applique aux questions constitutionnelles.  Cette norme s'applique aussi en ce qui concerne les décisions du tribunal administratif qui portent sur l'étendue même de sa juridiction, notamment lorsqu’il s’agit de décider des compétences respectives de tribunaux spécialisés concurrents.  Il est aussi relativement clair que la norme de la décision raisonnable s'applique aux questions touchant les faits, à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire, ou à l'interprétation de la loi habilitante et autres domaines qui relèvent de l'expertise du tribunal administratif.  Smith c. Alliance Pipeline Ltd, 2011, CSC 7, paragraphe 26.
[16]	Finalement, si l'analyse concernant la norme de contrôle applicable a déjà été effectuée par le tribunal dans une autre affaire, le tribunal peut s'en remettre à cette analyse.
[17]	C’est à la lumière de ces principes généraux que la norme de contrôle applicable aux questions soulevées dans cet appel doit être établie.  Évidemment, lorsque plusieurs questions sont soulevées, la norme de contrôle n’est pas nécessairement la même pour toutes les questions.  C’est le cas ici : certaines questions soulevées dans cet appel sont sujettes à la norme de la décision correcte, et d’autres à la norme de la décision raisonnable.
2. 	Les normes de contrôle qui s’appliquent en l’espèce
	a) 	La décision du régisseur concernant l'argument de la Requérante 			fondé sur l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés (la 		Charte)
[18]	La Requérante affirme que le régisseur a fait une erreur en décidant que la politique de la YHA concernant les animaux de compagnie ne contrevient pas à l’article 15 de la Charte, qui garantit à toute personne le droit à l’égalité devant la loi et la protection contre la discrimination.
[19]	Comme le reconnaissent les deux parties, la norme de contrôle qui s'applique à cette question est celle de la décision correcte, puisqu'il s'agit d'une question de droit constitutionnel.
	b) 	La décision du régisseur concernant l'argument de la Requérante 			fondé sur la Loi sur les droits de la personne, L.T.N.-O. 2002, c. 18
[20]	La Loi sur les droits de la personne énumère un certain nombre de motifs pour lesquels il est interdit de faire de la discrimination dans les Territoires du Nord-Ouest.   L’article 12 de cette même loi interdit la discrimination en matière de baux:
12	(1)	Il est interdit, en se fondant sur un motif de discrimination illicite et en 			l’absence d’une justification véritable et raisonnable:
	a)	de refuser à un particulier ou à une catégorie de particuliers l’occupation, à titre de locataire, d’un local commercial ou d’une unité d’habitation autonome annoncé ou autrement présenté comme libre et pouvant être occupé par un locataire;
	b)	de faire preuve de discrimination à l’égard d’une catégorie de particuliers quant aux modalités ou conditions d’occupation d’un local commercial ou d’une unité d’habitation autonome.
	(2)	Les actes visés au paragraphe (1) reposent sur une justification véritable 			et raisonnable s’il est démontré que les mesures destinées à répondre aux 		besoins d’un particulier ou d’une catégorie de particuliers touchés 			constituent une contrainte excessive pour la personne qui doit les 			prendre.
	(3)	Ne constitue pas une infraction au paragraphe (1) le fait pour le 				propriétaire d’un local commercial ou d’une unité d’habitation autonome 		d’accorder, sur la base de son appartenance familiale, une préférence à 			un membre de sa famille quant à l’occupation de ce local commercial ou 			de cette unité d’habitation autonome ou quant aux modalités ou 				conditions de cette occupation.
	Loi sur les droits de la personne, supra, article 12.
[21]	L’article 12 ne fait pas partie de la loi habilitante du régisseur.  L’Intimée prétend que la norme de contrôle qui s’applique à cette question est néanmoins celle de la décision raisonnable.  L'Intimée affirme que cette norme de contrôle est justifiée parce l’article 5 porte spécifiquement sur la location, et est donc étroitement lié au champ d’expertise du régisseur, même si la disposition elle-même ne fait pas partie de la LLLH.  L’Intimée  affirme également que la décision ne relève pas d’une question de droit pure, mais plutôt d’une situation où il s'agit pour le régisseur d'appliquer le droit à certains faits.  Elle souligne aussi que la décision du régisseur ne porte pas sur une question qui a une importance suffisante au système légal dans son ensemble pour donner lieu à l’application de la norme de la décision correcte.
[22]	L’article 5 s'applique effectivement au domaine de la location, et le régisseur a une expertise incontestable dans ce domaine.  Mais selon moi, l’article 5 porte d’abord et avant tout sur la discrimination.  Or, le régisseur n’est pas appelé à analyser ce concept sur une base régulière. Ce n'est pas un sujet qui est au coeur de son expertise.
[23]	Ce tribunal a déjà décidé que la norme de contrôle de la décision  raisonnable s'applique à une décision rendue par un adjudicateur dans le cadre du mécanisme prévu par la Loi sur les droits de la personne pour traiter des plaintes alléguant la discrimination.  WCB v. Mercer et al., 2012 NWTSC 57 (décision confirmée en appel, 2014 NWTCA 01).  Mais cette décision est fondée, justement, sur l'expertise des adjudicateurs nommés en vertu de cette loi, et reconnaît par le fait même la spécificité de ce domaine.  La même norme de contrôle n'est pas nécessairement appropriée pour la décision d'un tribunal administratif qui n’est pas appelé à interpréter la Loi sur les droits de la personne sur une base régulière.
[24]	La Loi sur les droits de la personne, et la protection qu’elle confère aux citoyens, sont d’une grande importance pour système juridique des Territoires du Nord-Ouest dans son ensemble.  Comme toute législation portant sur les droits de la personne, cette loi a un caractère quasi-constitutionnel.  Il y a un intérêt public considérable à ce que le concept de la discrimination reçoive une interprétation cohérente et uniforme dans tous les contextes où il est soulevé.
[25]	Je conclus donc que la norme de contrôle qui s’applique à cette question, comme celle qui s'applique à la question portant sur la Charte, est celle de la décision correcte.
	c) 	La décision du régisseur concernant la conformité de la clause 				interdisant les animaux de compagnie avec l'esprit de la LLLH et  			l'interprétation qu'il a faite de l'article 14.1 de cette même loi
[26]	Cette question se rapporte clairement à l'interprétation par le régisseur de sa loi habilitante.  Ce tribunal a plusieurs fois statué que dans la mesure où le régisseur n'excède pas sa juridiction, la norme de contrôle qui s'applique à ce type de décision est celle de la décision raisonnable.  Inuvik Housing Authority v. Kendi, 2005 NWTSC 46, aux paragraphes 15-28; Yeadon v. Northwest Territories Housing Corporation, 2008 NWTSC 39, aux paragraphes 24-31; Friesen v. Catholique, 2009 NWTSC 37, aux paragraphes 5-7; Vander Ploeg v. Stewart, 2012 NWTSC cor.1, au paragraphe 19; UNW v. Kathryn Carriere et al, 2013 NWTSC 5, au paragraphe 45; Jeske v. Yellowknife Housing Authority, 2013 NWTSC 17, aux paragraphes 22-23.
[27]	Dans  ses représentations écrites supplémentaires, la Requérante affirme que parce que l’interdiction d’avoir des animaux de compagnie découle d’une politique de la YHA qui est non écrite, la norme de contrôle qui s'applique à cette question devrait être celle de la décision correcte, et non celle de la décision raisonnable.  Je ne suis pas d'accord.  Le fait que la politique soit écrite ou non ne change pas la nature fondamentale de la décision qui doit être examinée.  La décision contestée porte sur l'interprétation par le régisseur de sa loi habilitante, et l'application de cette loi aux faits de l'espèce.    Conformément à la jurisprudence antérieure de ce tribunal, la norme de contrôle qui s'applique est celle de la décision raisonnable.
	d) 	La décision du régisseur de résilier le bail et d'ordonner l'expulsion de 		la Requérante
[28]	Comme pour la question précédente, et pour les mêmes raisons, la norme de contrôle qui s'applique à cette décision est celle de la décision raisonnable: c'est une décision qui va au coeur même des fonctions du régisseur dans le cadre de la LLLH.
3.	Examen des décisions du régisseur à la lumière des normes de contrôles 	applicables
	a) 	La décision du régisseur portant sur l'argument de la Requérante 			fondé sur l'article 15 de la Charte
[29]	La Requérante prétend que la politique de la YHA qui interdit les animaux de compagnie contrevient à l'article 15 de la Charte, qui stipule que tous sont égaux devant la loi et ont le droit de ne pas être victimes de discrimination.
[30]	  Lors de l'audition devant le régisseur, la Requérante a invoqué le droit à l'égalité protégé par l'article 15 de la Charte. Cependant, la Requérante a présenté très peu de preuve et peu d'arguments qui auraient pu permettre au régisseur d'examiner la question adéquatement, compte tenu du cadre juridique applicable.
[31]	D'abord, lorsque la Charte est invoquée à l'égard d'un organisme qui n'est pas le gouvernement lui-même, la première question qui se pose est à savoir si la Charte s'applique à cet organisme.  La partie qui invoque un droit doit, dans un premier temps, établir que ce droit existe.
[32]	D'autre part, même en présumant que la Charte s'applique à la YHA, l'argument présenté au régisseur par la Requérante souffrait d'une lacune fondamentale: elle n'a pas établi, ni même clairement identifié, sur quel motif de discrimination elle se fondait.  Elle ne l'a pas identifié non plus dans son avis d'appel ou dans des représentations écrites.  C’est seulement lors de l’audition de l’appel que dans ses représentations orales, elle a plaidé que le motif de discrimination allégué était le fait d'être locataire dans un logement social.
[33]	Il est clair que la Requérante  ne se fonde sur aucun des motifs énumérés à l'article 15 (la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, les déficiences mentales ou physiques).  Sa requête doit donc nécessairement être fondée sur un motif analogue.  Il lui incombait d'identifier ce motif et de convaincre le régisseur que ce motif était bel et bien un motif analogue qui rencontre les critères élaborés par la jurisprudence. Corbière c. Canada (Ministère des affaires indiennes et du nord canadien), (1999) 2 R.C.S. 203, au paragraphe 13.   Elle n'a pas fait cela devant le régisseur.   Elle ne l'a d'ailleurs pas fait non plus dans le cadre de l'appel.
[34]	Un tribunal saisi d'un appel ou d'une demande de contrôle judiciaire ne peut examiner que les questions qui ont été adéquatement soulevées devant le tribunal administratif.  Alberta (Information and Privacy Commissioner) v. Alberta Teachers Association, 2011 SCC 61.   Jeske c. Yellowknife Housing Authority, auquel j’ai fait référence au paragraphe 26, illustre ce principe.   Dans cette affaire, la requérante, en appel, reprochait au régisseur de ne pas avoir tenu compte du fait qu’elle avait une incapacité au sens de la Loi sur les droits de la personne. Or, elle n'avait pas soulevé cette question du tout lors de l'audition devant le régisseur, et n'avait présenté aucune preuve concernant son incapacité.  Le tribunal a donc refusé d'examiner la question dans le cadre de l'appel.
[35]	Ici, la situation est quelque peu différente parce que la Requérante a soulevé l'article 15 de la Charte lors de l’audition devant le régisseur.  Par contre, comme je l'ai déjà mentionné, elle n'a pas présenté de preuve, ni fait de représentations, traitant de l'applicabilité de la Charte à la YHA, ni identifié sur quel motif de discrimination elle se fondait.   Par conséquent, le régisseur n'a pas été appelé à se prononcer sur ces questions.    Un argument qui n’a pas été étayé devant le tribunal administratif ne peut pas être soulevé en appel ou en contrôle judiciaire.  Cette approche est essentielle pour respecter l’intention de la Législature de confier aux tribunaux administratifs le rôle de décideur principal dans certains domaines. Alberta (Information and Privacy Commissioner) v. Alberta Teachers Association, supra, au paragraphe 24.
[36]	Un autre principe fondamental est qu'un tribunal ne devrait se prononcer sur une question constitutionnelle que si un fondement factuel adéquat a été établi pour analyser la question juridique :
Les affaires relatives à la Charte porteront fréquemment sur des concepts et des principes d'une importance fondamentale pour la société canadienne. Par exemple, les tribunaux seront appelés à examiner des questions relatives à la liberté de religion, à la liberté d'expression et au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne. Les décisions sur ces questions doivent être soigneusement pesées car elles auront des incidences profondes sur la vie des Canadiens et de tous les résidents du Canada. Compte tenu de l'importance et des répercussions que ces décisions peuvent avoir à l'avenir, les tribunaux sont tout à fait en droit de s'attendre et même d'exiger que l'on prépare et présente soigneusement un fondement factuel dans la plupart des affaires relatives à la Charte. Les faits pertinents présentés peuvent toucher une grande variété de domaines et traiter d'aspects scientifiques, sociaux, économiques et politiques. Il est souvent très utile pour les tribunaux de connaître l'opinion d'experts sur les répercussions futures de la loi contestée et le résultat des décisions possibles la concernant.
McKay c. Manitoba [1989] 2 R.C.S. 357, au paragraphe 8.
[37]	Ce principe a été réitéré maintes fois par la Cour suprême du Canada, et appliqué par les tribunaux à travers le pays.  Voir par exemple Colombie-Britannique (Procureur général) c. Christie  [2007] 1 R.C.S. 873, au paragraphe 28;  Cunningham v. Alberta (Minister of Aboriginal Affairs and Northern Development), 2009 ABCA 239, au paragraphe 72.
[38]	Ici, un tel fondement factuel n'a été établi ni devant le régisseur ni dans la preuve présentée par la Requérante dans le cadre de l'appel.  Dans les circonstances, compte tenu de l'importance des questions juridiques en cause, il n'est pas souhaitable que le tribunal les examine en l'absence d'un dossier factuel complet et adéquat.
[39]	 Je m'empresse d'ajouter que les commentaires qui précèdent ne se veulent pas un reproche ou une critique envers la Requérante.  Je comprends qu’elle s'est représentée elle-même devant le régisseur, ainsi que dans le cadre de cet appel, et a y a mis beaucoup de temps et d’effort.  Mais le tribunal est lié par les mêmes principes, que les parties se représentent elles-mêmes ou non.
[40]	Dans les circonstances, ce motif d’appel doit échouer.
b) 	La décision du régisseur portant sur l'argument de la Requérante fondé sur la Loi sur les droits de la personne
[41]	Le paragraphe 5(1) de la Loi sur les droits de la personne énumère les motifs de discrimination illicite pour les fins de son application. Ces motifs incluent la condition sociale.  Loi sur les droits de la personne, supra, article 5.
[42]	Le terme « condition sociale » est défini à l’article 1:
"condition sociale"  Condition d’un individu résultant de son inclusion, autrement que de façon temporaire, au sein d’un groupe social identifiable et socialement ou économiquement défavorisé pour des causes liées à la pauvreté, à la source de revenu, à l’analphabétisme, au niveau d’instruction ou à d’autres circonstances similaires.
	Loi sur les droits de la personne, supra, article 1.
[43]	L’article 12, cité plus haut au paragraphe 20, interdit de se fonder sur un motif illicite pour faire preuve de discrimination à l’égard d’un groupe particulier quant aux modalités d’un bail.  La Requérante affirme que la politique de la YHA  fait preuve de discrimination envers ses locataires sur la base de leur condition sociale, et est donc contraire à l’article 12.
[44]	La Requérante affirme que l’interdiction d’avoir des animaux de compagnie sous-tend une présomption que les personnes à faible revenu ne seront pas des propriétaires d’animaux responsables.   Elle plaide qu’il est discriminatoire de les astreindre à une interdiction complète d’avoir des animaux de compagnie en raison de leur condition sociale.
[45]	J’accepte d’emblée que le fait de ne pas pouvoir avoir des animaux de compagnie est, pour les personnes qui désirent en avoir, un sérieux désavantage. Je ne sous-estime pas l’impact que cela peut avoir, comme en fait foi l’affidavit de la Requérante et son témoignage lors de l’audition devant le régisseur.  Cependant, selon moi, la preuve n’établit pas qu’il s’agit d’un désavantage qui est imposé de façon discriminatoire.
[46]	La pauvreté et le niveau de revenu sont clairement des éléments visés par la notion de condition sociale, compte tenu de la façon dont ce terme est défini dans la Loi sur les droits de la personne.   Cependant, la Requérante n’a présenté aucune preuve précise au sujet de son propre revenu, ni au sujet du revenu de d'autres locataires de la YHA.  La seule preuve qui porte sur le sujet des revenus des locataires de la YHA est celle qui ressort de l’affidavit de Mr. Bies.  Cette preuve établit que le programme de logement social géré par la YHA peut être accessible à des familles ayant un revenu annuel allant jusqu’à $102,996.00.
[47]	 Mr Bies reconnaît que certains des locataires du YHA sont des personnes et familles à faible revenu, mais affirme que d'autres sont des personnes et familles à revenu moyen.  Cette preuve n'est pas contredite.   L'affirmation de Mr. Bies semble raisonnable, si un ménage ayant un revenu annuel de $102,996.00 peut avoir accès au programme.  On ne saurait qualifier ce niveau de revenu comme étant "faible".
[48]	  Il ressort de cette preuve que la Requérante n’a pas établi que les personnes visées par la discrimination qu’elle allègue font partie d'un groupe identifiable du point de vue de la condition sociale.  On ne peut pas affirmer que les membres du groupe soi-disant visé (les locataires de la YHA) ont tous nécessairement tous la même condition sociale et sont un groupe identifiable qui puisse faire l'objet de discrimination illicite.
[49]	Il faut souligner que parce que la politique de la YHA s’applique à tous les locataires,  quel que soit leur revenu, la situation en l’espèce est fort différente de celle dans l’affaire Campbell et al.  v. Yukon Housing Corporation, October 5, 2005, Yukon Human Rights Commission, citée par la Requérante. Dans cette affaire-là, le même locateur appliquait aux locataires en logement social des règles différentes de celles qu’il appliquait au reste de sa clientèle.  Ce n’est pas le cas ici.
[50]	Une autre lacune dans la position de la Requérante découle du fait que plusieurs locataires de Yellowknife qui n'ont pas recours au programme de la YHA sont également sujets à une interdiction d’avoir des animaux de compagnie dans leur logement.  La restriction que la YHA impose est une restriction qui est imposée par plusieurs autres locateurs.   Ce n’est donc pas un désavantage qui est imposé exclusivement aux locataires de la YHA; il est également imposé à plusieurs locataires dans le marché privé.
[51]	La Requérante plaide que l'élément discriminatoire découle du fait que les gens qui ont recours au programme de logement social n'ont pas le choix de chercher un logement ailleurs, alors que les gens qui louent dans le marché privé, eux, ont l'option de se trouver un locataire qui accepte que ses locateurs gardent des animaux de compagnie.  Mais selon moi, ce fait ne rend pas la politique de la YHA discriminatoire, compte tenu que tous les locataires de la YHA sont traités de la même façon en que la restriction qui leur est imposée est également imposée à plusieurs locataires dans la ville de Yellowknife.
[52]	Pour ces motifs, selon moi, la conclusion du régisseur que la politique de la YHA n’est pas contraire à la Loi sur les droits de la personne est correcte.
	c) 	La décision du régisseur concernant la conformité de la clause 				interdisant les animaux de compagnie avec l'esprit de la LLLH et son 			interprétation de l'article 14.1 de cette même loi
[53]	La Requérante reconnaît qu’elle a signé un bail qui comporte une clause lui interdisant d’avoir des animaux de compagnie, mais elle affirme qu’elle n’avait pas à s’y conformer parce qu’une telle condition est déraisonnable, incompatible avec l’esprit de la LLLH, et est, par conséquent, nulle et sans effet.
[54]	La Requérante affirme notamment que la clause en question entre en conflit direct avec l’article 14.1 de la LLLH, qui traite de ce que peuvent exiger les locateurs en guise de dépôt pour les animaux de compagnie.  L’article 14.1 se lit comme suit:
14.1	(1)	Le locateur ne peut exiger ou recevoir du locataire à titre de dépôt 			pour animal de compagnie un montant supérieur:
a)	à 50% du loyer d’une semaine, dans le cas d’une location à la semaine;
b)	à 50% du loyer d’un mois, dans les autres cas.
	(2)	Le locateur d’un logement public subventionné et celui qui est un 			employeur offrant un logement locatif à son personnel pour un 			loyer 	subventionné peuvent demander un dépôt pour animal de 			compagnie dont le montant est établi d’après la valeur du logement 		locatif sur le marché.
	(3)	Le locateur ne peut exiger ou recevoir de dépôt pour animal de 			compagnie dans les cas suivant:
a)	le locataire ne garde pas et n’entend pas garder d’animal de 	compagnie dans le logement locatif;
b)	l’animal est un animal d’assistance auquel a recours une 	personne atteinte d’une incapacité pour éviter certains 	dangers ou pallier cette incapacité.
	(4)	Le locateur ne peut exiger ou recevoir du locataire plus d’un dépôt 		pour animal de compagnie à l’égard du logement locatif, 				indépendamment du nombre d’animaux qu’il a autorisé le locataire 		à garder dans le logement.
	(5)	Le locateur ne peut exiger or recevoir de dépôt pour animal de 			compagnie du locataire qui occupe le logement locatif sans 			interruption depuis une période commençant avant le 1er septembre 		2010 si ce locataire avait été autorisé à avoir un animal de 				compagnie aux termes du bail en vigueur immédiatement avant 			cette date.
[55]	La Requérante affirme que cet article doit être interprété comme interdisant aux locateurs d’inclure dans un bail une clause qui empêche aux locataires d’avoir des animaux de compagnie.  Elle affirme aussi qu'une interdiction complète d'avoir des animaux de compagnie est contraire à l'esprit de la LLLH.
[56]	Dans sa décision, le régisseur a fait référence aux articles 10 et 45 de la LLLH.   Tous deux sont pertinents à l’analyse qu’il était appelé à faire: l’article 10 stipule que tout bail est réputé inclure les clauses du bail-type prévu par les règlements, et que toute clause incompatible avec les clauses du bail-type sont nulles;  l’article 45 établit l’obligation d’un locataire de se conformer à toutes les conditions d’un bail qui sont raisonnables.
[57]	Le régisseur a conclu qu’en soi, une clause interdisant les animaux de compagnie  n’est pas incompatible avec la LLLH.  Il a souligné qu’il avait examiné cette question à plusieurs reprises et que ce tribunal avait déjà confirmé une de ses ordonnances en pareil cas:
The written tenancy agreement between the parties clearly prohibits pets in the rental premises.  The provision is not inconsistent with the Act and has been determined to be reasonable in a number of cases before this tribunal including one termination order which was appealed and upheld by the NWT Supreme Court [Martha Porter and Yellowknife Housing Authority, S0001-CV2006000034, February 20, 2006].
Rental Officer’s Reasons for Decision, Record of the Rental Officer, Onglet 10, page 3.
[58]	Le régisseur a ensuite souligné que plusieurs locateurs incluent une telle prohibition dans leurs baux, en raison des inconvénients et des dommages qui sont parfois causés par les animaux de compagnie.  Rental Officer’s Reasons for Decision, Record of the Rental Officer, Onglet 10, page 3.
[59]	Le régisseur a ensuite expliqué pourquoi pour lui, l’article 14.1 n’affectait en rien la validité d’une telle clause:
In my opinion, the pet deposit provision does not make a “no pets” provision unreasonable.  If the pet deposit provision was intended to further limit section 45, those limitations would be specifically set out in the Act as is done in section 13 prohibiting accelerated rent.  The Ontario statute does exactly that by prohibiting any restrictions on keeping pets.
Rental Officer’s Reasons for Decision, Record of the Rental Officer, Onglet 10, page 3.
[60]	Comme je l’ai évoqué plus haut, la norme de contrôle qui s’applique à cette décision est celle de la décision raisonnable.  Il est important de rappeler ce que cette norme de contrôle veut dire.  C’est une norme de contrôle qui exige que le tribunal fasse preuve de déférence envers la décision du tribunal administratif.  Ceci a été expliqué de la façon suivante par la Cour suprême du Canada:
La norme déférente du caractère raisonnable procède du principe à l’origine des deux normes antérieures de raisonnabilité: certaines questions soumises aux tribunaux administratifs n’appellent pas une seule solution précise, mais peuvent plutôt donner lieu à un certain nombre de conclusions raisonnables.  Il est loisible au tribunal administratif d’opter pour l’une ou l’autre des différentes solutions rationnelles acceptables.  La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité.  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.
[61]	La question n’est donc pas si ce tribunal est d’accord avec la conclusion du régisseur, mais plutôt de savoir si sa décision répond à ces critères de justification, de transparence et d’intelligibilité, et appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier dans l’ensemble des circonstances.
[62]	Ici, le régisseur a expliqué les raisons qui l’ont mené à sa conclusion que la clause du bail est raisonnable et valide.  Sa décision répond aux exigences de justification, de transparence et d’intelligibilité.
[63]	Il a souligné que ce genre de clause ne sort pas de l’ordinaire, et que d'autres locateurs dans la ville de Yellowknife y ont recours.  Il a dit que selon lui ces clauses sont utilisées pour éviter que des dommages soient causés et occasionnent des dépenses pour la YHA.  Il a tenu compte de son expérience en la matière.  D’ailleurs, au cours de l’audition, il avait mentionné avoir eu à traiter de cas où des dommages substantiels avaient été causés par des animaux de compagnie.
[64]	On peut être d’accord ou non avec la décision du régisseur.  Il aurait pu conclure qu’une telle restriction applicable à tous les locataires pour tout animal de compagnie n’est pas justifiée.  Il aurait pu décider d’accorder plus de poids au fait que pour les personnes qui ont ou désirent avoir des animaux de compagnie, une telle clause est un désavantage sérieux. Il aurait pu se ranger aux arguments de la Requérante et conclure que la politique de la YHA a un effet disproportionné compte tenu des objectifs qu’elle vise.  Il ne fait nul doute que pour les gens qui, comme la Requérante et ses enfants, ont des animaux de compagnie et y sont attachés, se voir dans l’obligation de s’en départir sous peine de ne plus avoir de logement, peut être un choix très douloureux.
[65]	Mais comme je l’ai évoqué plusieurs fois, la question n’est pas de savoir si un autre décideur aurait pu arriver à une conclusion différente.  Lue dans son ensemble, la décision du régisseur, pour reprendre les termes utilisés par la Cour suprême du Canada, appartient "aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit".  C'est une décision qui est transparente parce que le régisseur a expliqué les motifs de sa décision, et le raisonnement qui l'y a mené et ce, de façon intelligible.
[66]	Je conclus donc que, compte tenu de la norme de contrôle applicable, il ne serait pas justifié pour le tribunal de renverser la décision du régisseur sur cette question.
[67]	Nonobstant cette conclusion, j’estime nécessaire de faire quelques observations supplémentaires.
[68]	La première concerne la portée de la décision de ce tribunal du 20 février 2006 dans Martha Porter v. Yellowknife Housing Authority S-0001-CV2006000029, auquelle le régisseur a fait référence dans sa décision. L’Intimée y a aussi fait allusion dans le cadre de cet appel.
[69]	La décision dans Porter n’est pas une décision publiée, mais le dossier du tribunal contient une transcription de la brève audition à l’issue de laquelle le tribunal a rejeté l’appel de la décision du régisseur.  Dans cette affaire, la YHA avait porté plainte au régisseur, demandant la résiliation du bail de Mme Porter, au motif qu’elle avait contrevenu à la clause de son bail lui interdisant d’avoir des animaux de compagnie.  Mme Porter ne s’était pas présentée à l’audition devant le régisseur et l’audition avait procédé en son absence.  Lors de cette audition la YHA a établi que Mme Porter avait effectivement contrevenu à son bail.
[70]	Mme Porter a ensuite logé un appel.  Elle contestait notamment la décision du régisseur d’avoir procédé en son absence.  Le 17 février 2006, Mme Porter s'est présentée devant le tribunal et a plaidé qu'elle n'avait pas été avisée de la date d'audition devant le régisseur.   Elle a aussi plaidé qu'elle n'avait plus l'animal de compagnie dans son logement et que l'ordonnance d'expulsion n'était pas nécessaire.   Aucune représentation n’a été faite au tribunal concernant la validité de la clause du bail lui interdisant d'avoir un animal de compagnie dans son logement.   Après avoir entendu les représentations de Mme Porter, le tribunal a simplement conclu que le régisseur avait eu raison de procéder à l'audition en son absence.  Le tribunal a aussi confirmé que la décision du régisseur était raisonnable.
[71]	Compte tenu du contexte de la décision, le rejet par ce tribunal de l’appel de Mme Porter ne saurait être interprété comme étant une approbation par le tribunal de la politique de la YHA.   Lorsque la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, le rejet d'un appel ne signifie pas que le tribunal est en complet accord avec la décision du tribunal administratif.  Les tribunaux administratifs doivent être conscients de cette nuance.
[72]	Ma deuxième observation concerne le fait que la politique de la YHA est non-écrite.
[73]	L’affidavit de Mr. Bies, qui fait état de la politique et de son fonctionnement, contient très peu de détails.  L’information limitée concernant la politique soulève, pour moi, nombre de questions qui auraient avantage à être clarifiées.  Par exemple, comment et quand les locataires éventuels sont-ils avisés de la possibilité de se prévaloir de l'exception à la politique?  Quelle information leur donne-t-on à ce sujet?  Quelles incapacités sont considérées comme justifiant de faire exception à la politique?  Qu’est-ce qui est exigé des locataires, en fait de pièces justificatives, pour établir qu’ils devraient bénéficier de l’exception?  Qui, ultimement, décide si un locataire se verra ou non accorder une exception?  Comment la YHA définit-elle la notion d’ « invalidité » dans ce contexte?
[74]	Comme j'en ai fait état aux Paragraphes 45 et 64, la politique de la YHA impose aux locataires une interdiction qui, pour certains d'entre eux, représente une contrainte sérieuse.  Il me semble que dans les circonstances, il serait important que tous aient de l'information claire concernant les modalités de la politique, notamment les paramètres selon lesquels les locataires peuvent se voir accorder une exception.  Une politique écrite assurerait clarté et de transparence, et assurerait une mise en œuvre juste et cohérente.
d) 	La décision du régisseur de résilier le bail et d’ordonner l’expulsion de la Requérante
[75]	Tel que mentionné au Paragraphe 4, la Requérante avait déjà comparu devant le régisseur, en 2011, parce qu’elle n’avait pas respecté la clause de son bail lui interdisant d’avoir des animaux de compagnie.  Le régisseur avait alors refusé la demande de la YHA de l’expulser de son logement, mais avait ordonné à la Requérante de se conformer aux conditions de son bail à l’avenir.
[76]	Lors de la seconde audition, la Requérante n’a pas nié qu’elle avait encore des animaux dans son logement.  Elle a demandé au régisseur de conclure que la clause en question était sans effet.  Elle a aussi expliqué qu’indépendamment du résultat de l’audition, elle comptait quitter son logement.
[77]	Le régisseur ayant conclu que la clause du bail était valide et que la Requérante y avait contrevenu une seconde fois, il n’était pas déraisonnable pour lui de résilier le bail et d’ordonner son expulsion.  Encore une fois, ces décisions étaient clairement parmi les issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.
C) 	CONCLUSION
[78]	Pour ces motifs, et compte tenu des normes de contrôle applicables aux questions soulevées par cet appel, je conclus qu’il n’y a pas lieu de renverser la décision du régisseur.  L’appel est rejeté.
[79]	La Requérante a demandé qu’en cas de rejet de son appel, une période de temps suffisante lui soit accordée pour se trouver un autre logement.  C’est une demande raisonnable, surtout compte tenu du fait qu’elle a des enfants.  Cependant  le tribunal doit aussi tenir compte du fait que la décision du régisseur date du 27 novembre 2013.  L’appel de la Requérante étant rejeté, la YHA a le droit à ce que la décision du régisseur prenne effet.  Elle a le droit de récupérer le logement pour le rendre disponible à une autre famille qui en a besoin.  Par ailleurs, la Requérante affirmait déjà, lors de l’audition devant le régisseur, qu’elle avait l’intention de déménager peu importe l’issue des procédures.  Elle a réitéré cela lors de l’audition de l’appel. Tout indique qu’elle a depuis un certain temps commencé les démarches pour se trouver un autre logement.
[80]	Dans les circonstances, j’accorde à la Requérante jusqu'au 3 août 2014 pour quitter le logement.  Une ordonnance d’expulsion sera en vigueur à compter du 4 août 2014.
[81]	Les parties auront jusqu'au 20 juin 2014 à 16:00PM pour aviser le Greffe si elles veulent faire des représentations au tribunal concernant les frais de l'appel, et si elles désirent le faire dans le cadre d'une audition, ou par voie de représentations




écrites.   Je fixerai, s’il y a lieu, une date d’audition ou, le cas échéant, des lignes directrices pour le dépôt de représentations écrites.




									
									   L.A. Charbonneau
									          J.C.S.
Fait à Yellowknife, TN-O, ce
11e jour de juin 2014.

La Requérante s'est représentée elle-même	
Teresa Haykowsky and Michelle Thériault, procureurs de l'Intimée



S-0001-CV 2013000193




COUR SUPRÊME DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST


ENTRE:

ANNE MARIE GIROUX
Requérante

- et -


YELLOWKNIFE HOUSING AUTHORITY
Intimé



MOTIFS DE JUGEMENT DE
L’HONORABLE JUGE L.A. CHARBONNEAU

   
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