Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0767

 

DATE :

24 novembre 2010

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Sylvain Généreux

Président

M. Claude Trudel, A.V.A.

Membre

M. Louis L’Espérance, A.V.C.

Membre

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VENISE LEVESQUE, ès qualités de syndic adjoint par intérim de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

PIERRE PLAMONDON, conseiller en sécurité financière (certificat 127 199)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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La plainte

[1]           Une plainte portant la date du 28 avril 2009 a été portée contre l’intimé.

[2]           Cette plainte se lit comme suit :

1.    À Albanel, le ou vers le 16 juillet 2003, l’intimé PIERRE PLAMONDON, alors qu’il faisait souscrire son client, Martin Menier, à une proposition d’assurance vie portant le numéro 240897 auprès de la compagnie d’assurance-vie L’Empire, a témoigné hors de la présence de Martin Menier et a faussement attesté de l’identité de ce dernier, contrevenant ainsi aux articles 11, 16, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la Sécurité financière (L.R.Q.c. D-9.2, r.1.01);

2.    À Albanel, le ou vers le 16 juillet 2003, l’intimé PIERRE PLAMONDON, alors qu’il faisait souscrire son client, Martin Menier, à une proposition d’assurance vie portant le numéro 240897 auprès de la compagnie d’assurance-vie L’Empire, a fait défaut de divulguer l’existence de la police Clarica portant le numéro de contrat 7248,128-8, suivant laquelle Martin Menier était déjà assuré en vertu d’un avenant sur la police de son père, Roch Menier, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la Sécurité financière (L.R.Q.c. D-9.2, r.1.01);

3.    À Albanel, le ou vers le 28 octobre 2003, l’intimé PIERRE PLAMONDON, alors qu’il faisait souscrire son client, Martin Menier à une proposition d’assurance vie portant le numéro 0021115115 auprès de la compagnie d’assurance-vie L’Empire, a témoigné hors de la présence de Martin Menier et a faussement attesté de l’identité de ce dernier, contrevenant ainsi aux articles 11, 16, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la Sécurité financière (L.R.Q.c. D-9.2, r.1.01);

4.    À Albanel, le ou vers le 28 octobre 2003, l’intimé PIERRE PLAMONDON, alors qu’il faisait souscrire à son client, Martin Menier, à une proposition d’assurance-vie portant le numéro 0021115115 auprès de la compagnie d’assurance-vie L’Empire, a omis d’indiquer dans ladite proposition l’existence de la police d’assurance-vie déjà en vigueur auprès de Clarica et portant le numéro C216,871-1 et fait défaut d’indiquer l’intention de remplacer la police d’assurance-vie déjà en vigueur auprès de Clarica et portant le numéro C216,871-1 et, par conséquent, il a omis de communiquer à l’assureur les renseignements qu'il est d'usage de lui fournir, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la Sécurité financière (L.R.Q.c. D-9.2, r.1.01);

5.    À Albanel, le ou vers le 28 octobre 2003, l’intimé PIERRE PLAMONDON, alors qu’il faisait souscrire son client, Martin Menier, à une proposition d’assurance vie portant le numéro 0021115115 auprès de la compagnie d’assurance-vie L’Empire, a fait défaut de compléter le formulaire de préavis de remplacement, contrevenant ainsi aux articles 22 (2), 22 (3), 22 (4) et 22 (5) du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (L.R.Q. c. D-9.2, r.1.3);

L’audience et les demandes visant à amender la plainte et le retrait de certains chefs d’infraction

[3]           L’audience a eu lieu à Montréal le 22 octobre 2010.

[4]           Me Paul Dery-Goldberg, procureur de la partie plaignante, a requis du comité de discipline (le comité) la permission d’amender les paragraphes 1 et 3 de la plainte pour en retirer la mention faite de l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière.

[5]           L’intimé, représenté par Me Carolyne Mathieu, ne s’est pas objecté à cette demande.

[6]           Le comité a permis ces amendements aux paragraphes 1 et 3 de la plainte.

[7]           Me Dery-Goldberg a ensuite demandé au comité la permission de retirer les chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 2, 4 et 5 de la plainte amendée en invoquant le fait que deux des personnes qui auraient été appelées à témoigner étaient décédées, qu’une « entente » était intervenue entre les parties aux termes de laquelle l’intimé plaiderait coupable aux chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 1 et 3 et que les parties formuleraient des «recommandations conjointes» quant aux sanctions.

[8]           La procureure de l’intimé a indiqué au comité qu’elle ne s’objectait pas à la demande de retrait mais elle a soumis qu’elle aurait été en mesure de présenter une preuve valable en défense quant aux chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 2, 4 et 5 de la plainte amendée.

[9]           Compte tenu des représentations faites, le comité a autorisé le retrait des chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 2, 4 et 5 de la plainte amendée.

Le plaidoyer de culpabilité

[10]        L’intimé a ensuite enregistré un plaidoyer de culpabilité en regard des chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 1 et 3 de la plainte amendée.

[11]        Après avoir vérifié si l’intimé comprenait bien le sens et la portée d’un tel plaidoyer, le comité a déclaré l’intimé coupable des infractions énoncées aux paragraphes 1 et 3 de la plainte amendée.

La preuve sur sanction

[12]        La partie plaignante a produit, avec le consentement de l’intimé, certains documents dont les propositions d’assurance vie mentionnées aux paragraphes 1 et 3 de la plainte amendée.

[13]        L’intimé a ensuite témoigné.  Il a signé, à titre de témoin, ces deux  propositions d’assurance alors qu’il n’était pas en présence de l’assuré, monsieur Martin Menier, lequel occupait alors un emploi temporaire à Vancouver.  Les échanges d’informations entre l’assuré et lui ont été faits à distance par téléphone et par la poste.

[14]        L’intimé a également témoigné de ce qui suit :

-      il n’a pas agi de mauvaise foi et reconnait qu’il n’aurait pas dû procéder comme il l’a fait;

-      il a 45 ans;

-      il est dans le domaine depuis 2000;

-      il n’a pas d’antécédent disciplinaire;

-      les primes et les commissions n’étaient pas très élevées.

Les représentations des parties

[15]        En se fondant sur les décisions rendues par d’autres formations du comité dans les affaires Gervais, Jean, Tremblay, Belvin, Smith et Amar[1], le procureur de la partie plaignante a recommandé au comité d’imposer à l’intimé 4 000 $ d’amende en regard des chefs d’infraction énoncés au paragraphe 1 de la plainte amendée et une amende de 4 000 $ en regard de ceux énoncés au paragraphe 3; il a également recommandé que l’intimé soit condamné au paiement des déboursés.

[16]        La procureure de l’intimé a référé le comité à la décision rendue par le comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages dans l’affaire Cianciulli[2] et indiqué qu’elle croyait justifiées les recommandations formulées par le procureur de la partie plaignante.

L’analyse et les motifs

[17]        Dans l’affaire Roy[3], le Tribunal des professions rappelle qu’une grande attention doit être apportée à des représentations communes, que le syndic a une connaissance approfondie du dossier et que c’est à lui qu’il incombe, en première ligne, d’assurer la protection du public.

[18]        La jurisprudence enseigne également qu’un tribunal ne doit s’écarter des recommandations présentées conjointement par les parties aux termes de sérieuses négociations que s’il conclut qu’elles sont inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice[4].

[19]        Cela dit, examinons les faits et la jurisprudence afin de déterminer si le comité doit s’écarter des recommandations formulées.

[20]        Quant à la gravité objective des infractions dont l’intimé s’est reconnu coupable, une autre formation du comité écrivait ce qui suit à l’égard d’un représentant à qui il était reproché d’avoir faussement témoigné de la signature d’un assuré [5] : «Même simplement en apposant sa signature comme témoin, vu sa qualité d’agent, cette signature apporte une dimension accrue au document considérant qu’il s’agit notamment d’un document d’assurance et que l’intimé l’a fait parvenir à la compagnie d’assurance en question. […] La conduite de l’intimé n’est pas celle d’un professionnel sérieux et conscient de ses responsabilités professionnelles ».

[21]        Aux yeux des membres du comité, il est effectivement grave pour un représentant de signer une proposition d’assurance à titre de témoin alors qu’il n’est pas présent au moment où l’assuré signe.

[22]        D’autre part, l’intimé n’a pas d’antécédent disciplinaire.

[23]        Il a de plus reconnu ses fautes en plaidant coupable aux chefs d’infraction portés contre lui et il est apparu repentant aux membres du comité.

[24]        Il ne semble pas avoir agi de mauvaise foi ni n’avoir été animé par l’appât du gain.

[25]        Le comité croit que les risques de récidive sont faibles.

[26]        Au regard de la jurisprudence et des faits mis en preuve, le comité est d’avis que les sanctions proposées conjointement par les parties satisfont aux impératifs de dissuasion et d’exemplarité et que la protection du public sera ainsi assurée.  Le comité donnera donc suite aux recommandations des parties.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ :

AUTORISE le retrait des chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 2, 4 et 5 de la plainte amendée;

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé à l’égard des chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 1 et 3 de la plainte amendée;

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs d’infraction énoncés aux paragraphes 1 et 3 de la plainte amendée.

ET STATUANT SUR LA SANCTION

En regard des chefs d’infractions énoncés au paragraphe 1 de la plainte amendée :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 4 000 $;

En regard des chefs d’infraction énoncés au paragraphe 3 de la plainte amendée :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 4 000 $;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés prévus aux dispositions de l’article 151 du Code des professions.

 

 

(s) Sylvain Généreux

Me Sylvain Généreux

Président du comité de discipline

 

 

(s) Claude Trudel

M. Claude Trudel, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Louis L’Espérance

M. Louis L’Espérance, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Paul Déry-Goldberg

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

 

Me Carolyne Mathieu

Procureure de la partie intimée

 

Date d’audience :

22 octobre 2010

 

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ



[1] Chambre de la sécurité financière c. Jean-François Gervais, CD00-0766, 16 mars 2010; Chambre de la sécurité financière c. Gaétan Jean, CD00-0722, 15 octobre 2009; Chambre de la sécurité financière c. Benoît Tremblay, CD00-0618, 8 mai 2007; Chambre de la sécurité financière c. Daniel Belvin, CD00-0413, 27 septembre 2002; Chambre de la sécurité financière c. Michel Smith, CD00-0257, 15 mars 2000; Chambre de la sécurité financière c. Benoît Amar, CD00-0653, 17 septembre 2008.

[2] Chauvin c. Cianciulli [2010] CanLII 20034.

[3] Roy c. Médecins [1998] QCTP 1735.

[4] R c. Douglas [2002] CanLII 32492 (par. 43) (Cour d’appel du Québec); Malouin c. Notaires [2002] QCTP 015.

[5] Rioux c. Belvin [2002] Can LII 49163.

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